Qualifier les Houthis d'«organisation terroriste» est mérité: un avantage pour Biden

Des combattants houthis nouvellement recrutés scandent des slogans lors d’un rassemblement dans la capitale Sanaa pour mobiliser davantage de combattants sur les fronts de bataille pour combattre les forces progouvernementales dans plusieurs villes yéménites. (AFP / Photo d’archives)
Des combattants houthis nouvellement recrutés scandent des slogans lors d’un rassemblement dans la capitale Sanaa pour mobiliser davantage de combattants sur les fronts de bataille pour combattre les forces progouvernementales dans plusieurs villes yéménites. (AFP / Photo d’archives)
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Publié le Samedi 23 janvier 2021

Qualifier les Houthis d'«organisation terroriste» est mérité: un avantage pour Biden

  • Il est surprenant que les Houthis n’aient été désignés comme organisation terroriste plus tôt
  • Les Houthis ont plusieurs fois ciblé la population civile au Yémen et en Arabie saoudite

LONDRES: Joe Biden, le président américain nouvellement intronisé, profite de ses premiers jours au pouvoir pour revoir nombre des politiques et des décrets de son prédécesseur. La manière dont l’administration va gérer l’héritage stratégique de Trump, en particulier en ce qui concerne l’Iran et ses alliés, et notamment la milice yéménite houthie, pourrait bien façonner l’opinion de la région arabe sur sa présidence naissante.

Le 10 janvier, Mike Pompeo, le secrétaire d’État sortant, annonçait que le département d’État allait désigner les Houthis (également connus sous le nom d’Ansar Allah [«les partisans de Dieu»]) comme une «organisation terroriste étrangère». Depuis le 19 janvier, trois dirigeants houthis – Abdel Malik al-Houthi, Abdel Khaliq Badr al-Din al-Houthi et Abdallah Yahya al-Hakim – sont considérés comme des terroristes.

«Les désignations ont pour objectif de tenir les membres d’Ansar Allah pour responsables de leurs actes terroristes, y compris des attaques transfrontalières qui menacent les populations civiles, les infrastructures et la navigation commerciale», explique Pompeo.

«Les désignations visent également à faire progresser les efforts pour parvenir à un Yémen pacifique, souverain et uni, à la fois exempt d’ingérence iranienne et en paix avec ses pays voisins.»

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Une photo prise le 19 juin 2018 montre des débris de drones Ababil de fabrication iranienne exposés à Abou Dhabi, qui, selon les forces armées émiraties, ont été utilisés par les rebelles houthis au Yémen dans des combats contre les forces de la coalition dirigée par les EAU et l'Arabie saoudite. (AFP/File Photo)

L’une des raisons pour lesquelles l’administration Trump a pu accomplir beaucoup de choses au Moyen-Orient est probablement sa disposition à appeler les choses par leur nom. La guerre au Yémen s’est intensifiée en 2015 lorsque les Houthis soutenus par l’Iran ont renversé le gouvernement reconnu par l’Organisation des Nations unies (ONU) du président Abed Rabbo Mansour Hadi. Une coalition d’États arabes, soutenue par les États-Unis, la Grande-Bretagne et la France, a alors lancé une campagne militaire pour restaurer le gouvernement légitime au pouvoir.

Depuis lors, toutes les tentatives pour parvenir à la paix ont échoué: les représentants de la milice n’ont pas assisté aux pourparlers négociés par l’ONU à Genève en septembre 2018, et ses combattants ignorent délibérément les termes des accords de Stockholm et de Riyad.

Le cessez-le-feu d’avril 2020, annoncé par la coalition au début de la pandémie de Covid-19, a rapidement pris fin lorsque les Houthis ont repris les frappes transfrontalières de drones et de missiles vers l’Arabie saoudite.

Pour le gouvernement yéménite, tout accord de paix avec les Houthis serait subordonné à la rupture par la milice de ses liens avec Téhéran – une évolution très improbable à l’heure actuelle.

Le soutien de l’Iran aux Houthis avant même le contrôle de Sanaa en 2015 est un secret de polichinelle. Cela a provoqué une guerre brutale qui fait rage sans relâche et une des pires crises humanitaires au monde.

Le conflit, qui en est maintenant à sa sixième année, a tué 112 000 personnes et en a laissé 24 millions en urgence humanitaire.

Les Houthis ont plusieurs fois ciblé la population civile au Yémen et en Arabie saoudite. Plus récemment, le 30 décembre, 27 personnes ont été tuées par un missile houthi qui visait des ministres du gouvernement yéménite nouvellement établi à l’aéroport international d’Aden.

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Une photo prise le 26 mars 2018 dans le district de Um Al-Hammam à Riyad montre le plafond percé d'une maison touchée par des éclats de missiles Houthi qui ont été interceptés au-dessus de la capitale saoudienne. (AFP/File Photo)

En avril de l’année dernière, cinq femmes ont été tuées dans une attaque présumée des Houthis contre une prison de la ville de Ta’izz – un acte fermement condamné par les associations humanitaires. En novembre 2017, des missiles houthis ont même frappé des installations civiles et l’aéroport international à Riyad.

La milice a également régulièrement visé les infrastructures pétrolières de l’Arabie saoudite. En juillet 2018, une attaque frappait deux transporteurs de pétrole brut saoudiens sur la mer Rouge, et, en mai 2019, une autre attaque contre deux stations de pompage de pétrole près de Riyad endommageait un pipeline clé.

La plus dommageable de toutes les attaques revendiquées par les Houthis reste la frappe de drone et de missile en septembre 2019 sur les installations pétrolières d’Arabie saoudite de Abqaiq et de Khurais, qui a eu des répercussions sur le marché mondial du pétrole brut.

Bien que les Houthis aient revendiqué cet attentat, les enquêteurs pensent que la frappe, qui implique du matériel fourni par l’Iran, pouvait provenir du Nord.

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L’équipe de politique étrangère de Biden se souvient peut-être aussi des trois attaques contre la marine américaine en 2016 quand ce dernier était vice-président de Barack Obama – par une milice dont les actions correspondaient aux mots notoires du slogan «Mort à l’Amérique. Mort à Israël. Malédiction sur les Juifs.»

L’USS Mason a été pris pour cible le 9 octobre 2016 par deux missiles tirés depuis le territoire contrôlé par les Houthis alors qu’il était déployé près du détroit de Bab-el-Mandeb au large des côtes du Yémen. Les tirs n’avaient causé aucun dommage.

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Des membres de familles yéménites déplacées qui ont fui les combats entre les forces gouvernementales et les combattants houthis près de l'aéroport de Hodeidah partagent un repas sur le balcon d'une école utilisée comme logement temporaire à l'intérieur de la ville. (AFP/File Photo)

Trois jours plus tard, le destroyer avait de nouveau été pris pour cible, un missile tombant en panne tandis que l’autre était intercepté. L’USS Nitze, également déployé dans la région, avait riposté le lendemain, détruisant trois sites radar sur le territoire contrôlé par les Houthis.

Le 15 octobre 2016, l’USS Mason a été une troisième fois la cible d’une attaque, cette fois en mer Rouge. Les cinq missiles de croisière antinavires avaient été neutralisés ou interceptés.

Compte tenu de ce comportement, il est surprenant que les Houthis n’aient pas été désignés comme organisation terroriste plus tôt. Les analystes l’expliquent par la probable volonté de l’administration Obama de préserver à tout prix l’accord nucléaire iranien de 2015.

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Les navires militaires étrangers ne sont pas les seules cibles. Ces dernières années, les Houthis ont plusieurs fois visé des ports et des navires, plantant régulièrement des mines marines dans le sud de la mer Rouge et dans le détroit de Bab-el-Mandeb sur la route de la navigation commerciale.

La milice a également rejeté à plusieurs reprises les demandes de l’ONU d’autoriser une équipe d’inspection à entrer dans le FSO Safer, un pétrolier vieux de quarante-cinq ans abandonné au large du port de Hodeidah avec 1,1 million de barils de pétrole brut à son bord, pour effectuer des réparations urgentes. Lors d’une session extraordinaire le 15 juillet 2020, l’ONU a fait part de ses craintes d’une «catastrophe» si le navire se brisait dans la mer Rouge.

Le patron de Pompeo, Donald Trump, avait poursuivi une politique de «pression maximale» contre Téhéran, retiré les États-Unis de l’accord nucléaire conclu sous l’ère Obama et réimposé des sanctions contre l’Iran.

Twitter: @RobertPEdwards

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Nucléaire : Paris, Berlin et Londres exhortent Téhéran à entamer des négociations sans « préconditions »

Les bâtiments du siège de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) se reflètent dans les portes arborant le logo de l'agence lors de la réunion du Conseil des gouverneurs de l'AIEA à Vienne, en Autriche, le 13 juin 2025.  (Photo de Joe Klamar / AFP)
Les bâtiments du siège de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) se reflètent dans les portes arborant le logo de l'agence lors de la réunion du Conseil des gouverneurs de l'AIEA à Vienne, en Autriche, le 13 juin 2025. (Photo de Joe Klamar / AFP)
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  • es ministres des Affaires étrangères français, britannique et allemand ont « incité l'Iran à revenir au plus vite, sans préconditions, à la table des négociations » sur le programme nucléaire iranien.
  • Abbas Araghchi a estimé que « L'agression israélienne contre l'Iran en pleine négociation avec les États-Unis sur le nucléaire porte un coup à la diplomatie », a-t-il déclaré.

PARIS : Selon une source diplomatique française, les ministres des Affaires étrangères français, britannique et allemand ont « incité l'Iran à revenir au plus vite, sans préconditions, à la table des négociations » sur le programme nucléaire iranien.

Lundi soir, Jean-Noël Barrot, David Lammy et Johann Wadephul ont eu un entretien avec la haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Kaja Kallas, et ont en outre « appelé l'Iran à éviter toute fuite en avant contre les intérêts occidentaux, toute extension régionale et toute escalade nucléaire », comme la non-coopération avec l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), la sortie du Traité sur la non-prolifération (TNP) ou le franchissement de seuils d'enrichissement, selon la même source.

Dans la nuit de lundi à mardi, le ministère iranien des Affaires étrangères a fait état d'un appel entre le ministre iranien des Affaires étrangères et chef négociateur pour le nucléaire et ses homologues français, britannique et allemand ainsi que Kaja Kallas. 

Abbas Araghchi a estimé que « L'agression israélienne contre l'Iran en pleine négociation avec les États-Unis sur le nucléaire porte un coup à la diplomatie », a-t-il déclaré.

La France, l'Allemagne et le Royaume-Uni, ainsi que l'UE, sont membres avec la Chine et la Russie d'un accord sur le nucléaire conclu en 2015 et dont les États-Unis s'étaient retirés unilatéralement.

Paris, Berlin et Londres, qui forment le groupe E3, avaient entrepris des discussions avec Téhéran l'an passé pour tenter de trouver un nouvel accord sur le nucléaire.

Parallèlement, les États-Unis avaient entamé des négociations indirectes en début d'année, qui butaient sur la question de l'enrichissement d'uranium iranien.

Un nouveau cycle de négociations était prévu la semaine dernière, mais il a été annulé après les frappes israéliennes.

Les États-Unis et leurs alliés occidentaux, ainsi qu'Israël, que des experts considèrent comme la seule puissance nucléaire au Moyen-Orient, accusent depuis longtemps la République islamique d'Iran de chercher à se doter de l'arme atomique, ce qu'elle a toujours nié.

Par ailleurs, des messages ont été transmis par les ministres français, britannique et allemand à Israël « sur la nécessité de ne pas cibler les autorités, les infrastructures et les populations civiles », selon une source diplomatique française.


Gaza: la Défense civile annonce 20 personnes tuées par des tirs israéliens en allant chercher de l'aide

Une série d'événements meurtriers se sont produits depuis l'ouverture le 27 mai à Gaza de centres d'aide gérés par la Fondation humanitaire de Gaza (GHF), une organisation au financement opaque soutenue par les Etats-Unis et Israël. (AFP)
Une série d'événements meurtriers se sont produits depuis l'ouverture le 27 mai à Gaza de centres d'aide gérés par la Fondation humanitaire de Gaza (GHF), une organisation au financement opaque soutenue par les Etats-Unis et Israël. (AFP)
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  • "Vingt martyrs et plus de 200 blessés du fait de tirs de l'occupation (armée israélienne, NDLR), dont certains dans un état grave, ont été transférés" vers des hôpitaux de la bande de Gaza, a déclaré à l'AFP le porte-parole de la Défense civile
  • Compte tenu des restrictions imposées aux médias dans la bande de Gaza et des difficultés d'accès sur le terrain, l'AFP n'est pas en mesure de vérifier de manière indépendante les bilans annoncés par la Défense civile

GAZA: La Défense civile de Gaza a indiqué que 20 personnes avaient été tuées lundi par des tirs de l'armée israélienne en allant chercher de l'aide humanitaire dans le territoire palestinien ravagé par les bombardements après plus de vingt mois de guerre.

Contactée par l'AFP, l'armée israélienne a dit qu'elle se renseignait.

"Vingt martyrs et plus de 200 blessés du fait de tirs de l'occupation (armée israélienne, NDLR), dont certains dans un état grave, ont été transférés" vers des hôpitaux de la bande de Gaza, a déclaré à l'AFP le porte-parole de la Défense civile, Mahmoud Bassal, ajoutant que ces personnes étaient rassemblées près d'un site de distribution d'aide.

"Elles attendaient de pouvoir accéder au centre d'aide américain à Rafah pour obtenir de la nourriture, lorsque l'occupation a ouvert le feu sur ces personnes affamées près du rond-point d'al-Alam", dans le sud de la bande de Gaza, a détaillé M. Bassal en indiquant que les tirs avaient eu lieu de 05H00 et 07H30 (02H00 et 04H30 GMT).

Il a ajouté que les victimes avaient été transférées vers des hôpitaux du sud du territoire palestinien, lesquels ne fonctionnent plus que partiellement depuis des jours en raison des combats et des pénuries de fournitures médicales.

Compte tenu des restrictions imposées aux médias dans la bande de Gaza et des difficultés d'accès sur le terrain, l'AFP n'est pas en mesure de vérifier de manière indépendante les bilans annoncés par la Défense civile.

Une série d'événements meurtriers se sont produits depuis l'ouverture le 27 mai à Gaza de centres d'aide gérés par la Fondation humanitaire de Gaza (GHF), une organisation au financement opaque soutenue par les Etats-Unis et Israël.

L'ONU refuse de travailler avec cette organisation en raison de préoccupations concernant ses procédés et sa neutralité.

Des photographes de l'AFP ont constaté ces derniers jours que des Gazaouis se réunissaient à l'aube près de sites de distribution d'aide, malgré la crainte de tirs lors des rassemblements.

La bande de Gaza est menacée de famine, selon l'ONU.

 


Ehud Barak : seule une guerre totale ou un nouvel accord peut arrêter le programme nucléaire iranien

Israël et l'Iran ont échangé des coups de feu après le déclenchement par Israël d'une campagne de bombardements aériens sans précédent qui, selon l'Iran, a touché ses installations nucléaires, "martyrisé" des hauts gradés et tué des dizaines de civils. (AFP)
Israël et l'Iran ont échangé des coups de feu après le déclenchement par Israël d'une campagne de bombardements aériens sans précédent qui, selon l'Iran, a touché ses installations nucléaires, "martyrisé" des hauts gradés et tué des dizaines de civils. (AFP)
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  • S'adressant à Christiane Amanpour sur CNN, M. Barak a déclaré que la capacité d'Israël à freiner le programme de Téhéran était limitée
  • M. Barak a déclaré que les frappes militaires étaient "problématiques", mais qu'Israël les considérait comme justifiées

LONDRES : L'ancien Premier ministre israélien Ehud Barak a prévenu que l'action militaire d'Israël ne suffirait pas à retarder de manière significative les ambitions nucléaires de l'Iran, décrivant la république islamique comme une "puissance nucléaire de seuil".

S'adressant à Christiane Amanpour sur CNN, M. Barak a déclaré que la capacité d'Israël à freiner le programme de Téhéran était limitée.
"À mon avis, ce n'est pas un secret qu'Israël ne peut à lui seul retarder le programme nucléaire de l'Iran de manière significative. Probablement plusieurs semaines, probablement un mois, mais même les États-Unis ne peuvent pas les retarder de plus de quelques mois", a-t-il déclaré.

"Cela ne signifie pas qu'ils auront immédiatement (une arme nucléaire), ils doivent probablement encore achever certains travaux d'armement, ou probablement créer un dispositif nucléaire rudimentaire pour le faire exploser quelque part dans le désert afin de montrer au monde entier où ils se trouvent.

M. Barak a déclaré que si les frappes militaires étaient "problématiques", Israël les considérait comme justifiées.

"Au lieu de rester les bras croisés, Israël estime qu'il doit faire quelque chose. Probablement qu'avec les Américains, nous pouvons faire plus".

L'ancien premier ministre a déclaré que pour stopper les progrès de l'Iran, il faudrait soit une avancée diplomatique majeure, soit un changement de régime.

"Je pense que l'Iran étant déjà ce que l'on appelle une puissance nucléaire de seuil, le seul moyen de l'en empêcher est soit de lui imposer un nouvel accord convaincant, soit de déclencher une guerre à grande échelle pour renverser le régime", a-t-il déclaré.

"C'est quelque chose que nous pouvons faire avec les États-Unis.

Mais il a ajouté qu'il ne pensait pas que Washington avait l'appétit pour une telle action.

"Je ne crois pas qu'un président américain, ni Trump ni aucun de ses prédécesseurs, aurait décidé de faire cela".

Israël a déclenché des frappes aériennes à travers l'Iran pour la troisième journée dimanche et a menacé de recourir à une force encore plus grande alors que certains missiles iraniens tirés en représailles ont échappé aux défenses aériennes israéliennes pour frapper des bâtiments au cœur du pays.

Les services d'urgence israéliens ont déclaré qu'au moins 10 personnes avaient été tuées dans les attaques iraniennes, tandis que les autorités iraniennes ont déclaré qu'au moins 128 personnes avaient été tuées par les salves israéliennes.