Ankara maintient un militant de l'opposition à l'isolement

Kavala,  détenu pour la première fois en octobre 2017 et placé en détention provisoire le 1er  novembre 2017,  est depuis cette date, derrière les barreaux. (Photo, AFP / Archives
Kavala, détenu pour la première fois en octobre 2017 et placé en détention provisoire le 1er novembre 2017, est depuis cette date, derrière les barreaux. (Photo, AFP / Archives
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Publié le Samedi 06 février 2021

Ankara maintient un militant de l'opposition à l'isolement

  • Barkey et Kavala sont jugés pour des accusations d'espionnage et pour avoir participé à la tentative du coup d'État
  • Les militants espèrent que la nouvelle administration américaine mettra tout son poids dans la campagne

ISTANBUL: Un tribunal d'Istanbul a décidé de maintenir le célèbre activiste et homme d'affaires turc Osman Kavala derrière les barreaux, à l'isolement, vendredi, lors de son deuxième procès très médiatisé ainsi que celui de l'universitaire turco-américain Henri Barkey. Le tribunal a également relié l’affaire actuelle avec le procès historique des manifestations antigouvernementales de Gezi Park.

Au milieu des théories du complot anti-américain sur l'implication des États-Unis dans la tentative du coup d'État ratée en 2016, Barkey et Kavala sont jugés pour des accusations d'espionnage et pour avoir participé à la tentative du coup d'État. S'ils sont reconnus coupables, ils risquent des peines à perpétuité.

S'exprimant pour sa défense vendredi, Kavala a affirmé que la connaissance de la fausseté des allégations portées contre lui étant davantage médiatisée, chaque refus de sa libération sous caution devient une violation de plus en plus flagrante de ses droits.

Le co-accusé de Kavala, Barkey, un citoyen américain, est jugé par contumace.

Kavala, détenu pour la première fois en octobre 2017 et placé en détention provisoire le 1er  novembre 2017, est depuis cette date, derrière les barreaux. Malgré son acquittement de toutes les charges retenues contre lui lors des manifestations antigouvernementales du parc Gezi en février 2020, il a ensuite été accusé de renverser l'ordre constitutionnel et d'espionnage. Kavala est derrière les barreaux depuis 1193 jours sans condamnation.

L’affaire Kavala est considérée comme un moyen pour les leaders turcs de menacer d’autres militants qui défendent les valeurs occidentales telles que le pluralisme, la démocratie et les droits de l’homme dans le pays.

Neuf ambassadeurs des droits européens de l’Autriche, du Danemark, de la Finlande, de la France, d'Allemagne, de la Hongrie, des Pays-Bas, d'Espagne et de la Suède ont publié jeudi une déclaration commune exigeant la libération immédiate de Kavala, affirmant qu’ils sont «très préoccupés» par l'état de droit et les droits de l'homme ainsi que le bilan judiciaire en Turquie.

Les ambassadeurs ont également exhorté Ankara à mettre en œuvre les arrêts contraignants de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH).

«L’emprisonnement continu  d'Osman Kavala en Turquie est politiquement motivé et va à l'encontre des jugements de la Cour européenne des droits de l'homme», a tweeté Barbel Kofler, commissaire allemande aux droits de l'homme.

En 2019, la CEDH a jugé que la détention prolongée de Kavala avait un «but inavoué, à savoir le réduire au silence en tant que militant et défenseur des droits de l'homme, de dissuader d'autres personnes de se livrer à de telles activités dans le but de paralyser la société civile dans le pays». Ankara a ainsi violé la Convention européenne des droits de l'homme que la Turquie est tenue de respecter en tant qu'État membre.

La Turquie insiste pour défier les décisions de la Cour non seulement dans l'affaire Kavala mais aussi dans l’affaire du politicien kurde Selahattin Demirtas, qui est également emprisonné depuis des années.

S'exprimant à l'Assemblée parlementaire le 25 janvier, la secrétaire générale du Conseil de l'Europe, Marija Pejcinovic Buric, a averti Ankara que le respect de la décision de la CEDH dans l'affaire Kavala n'est pas du tout «une demande aimable», mais plutôt «une obligation légale contraignante».

Malgré que le cas de Kavala et Barkey n'a pas été priorisé dans l'agenda bilatéral d'Ankara et de l'administration Biden, les poursuites pénales contre un citoyen américain pourraient inciter les États-Unis à exiger d’Ankara d’améliorer l'état de droit avec l’aide de ses partenaires stratégiques, ont indiqué les experts.

Merve Tahiroglu, coordinatrice du programme pour la Turquie au Projet sur la démocratie au Moyen-Orient (POMED), a déclaré que Biden avait pris une position remarquable de l'étreinte effrontée de Trump envers les hommes forts mondiaux en optant pour une politique étrangère qui met l'accent sur la démocratie et les droits de l'homme.

«Déjà en quelques semaines au pouvoir, son administration s’est davantage exprimée sur la répression d’Erdogan en Turquie que ses prédécesseurs. Je pense qu'ils surveillent également cette affaire de très près », a-t-elle déclaré à Arab News.

Selon Tahiroglu, les poursuites injustes de Kavala reflètent singulièrement la disparition complète de l’état de droit, la répression de la société civile turque et la militarisation des théories du complot anti-occidentales contre les critiques du gouvernement.

Lors d'un discours prononcé le 5 février, le président turc Recep Tayyip Erdogan a pris pour cible l'épouse de Kavala, Ayse Bugra. Bugra est une universitaire bien connue qui enseigne à la prestigieuse université Bogazici d'Istanbul, et devenue le théâtre de protestations d'universitaires et d'étudiants pendant plus d'un mois après la nomination d'une personnalité politique fidèle à Erdogan, en tant que nouveau recteur.

«L'épouse d'Osman Kavala, qui n’est que la représentante de Soros dans ce pays, est une personne qui fait partie de ces provocateurs à l'Université de Bogazici", a signalé Erdogan, à la suite de déclarations similaires, faites dans le passé et accusant Kavala d'être l'agent du financier américain George Soros.

Kavala s'est tourné vers la Cour constitutionnelle l'année dernière, affirmant que sa détention illégale violait son droit à la liberté et à la sécurité. Le tribunal a statué le 29 décembre que sa détention n'était en aucune façon une violation.

«L'année dernière, les juges qui ont ordonné l'acquittement des accusés du procès Gezi, dont Kavala, ont été rapidement mis sous enquête. Les derniers commentaires du président Erdogan constituent une autre preuve qu’il s’agit d’une poursuite à motivation politique », a révélé Milena Buyum, représentante d’Amnesty International pour la Turquie.

Le prochain procès de Kavala aura lieu le 21 mai. Le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe reprendra l’examen de son cas en mars 2021.

Selon Buyum, la décision du tribunal ce vendredi a confirmé une fois de plus que les appels continus de la CEDH et ses critiques à l’égard des motivations politiques derrière l'arrestation étaient bel et bien réels.

«Cela n'est pas du tout un procès; c'est une punition directe. Il n'y a même pas une seule preuve que Kavala a tenté de renverser l'ordre constitutionnel », a-t-elle souligné.

La CEDH a conclu que l’article 18 de la Convention européenne des droits de l’homme avait été violé par l’arrestation de Kavala. L'article 18 détermine la limitation de l'utilisation des restrictions aux droits humains.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Le chef d'état-major libyen est mort dans un "accident" d'avion en Turquie (officiel)

Photo prise et diffusée par le ministère turc de la Défense le 23 décembre 2025, montrant le chef d'état-major libyen, le général Muhammad Ali Ahmad Al-Haddad. (AFP/ministère turc de la Défense)
Photo prise et diffusée par le ministère turc de la Défense le 23 décembre 2025, montrant le chef d'état-major libyen, le général Muhammad Ali Ahmad Al-Haddad. (AFP/ministère turc de la Défense)
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  • Le chef d’état-major libyen Mohamed al-Haddad et plusieurs hauts responsables militaires sont morts dans un accident d’avion après leur départ d’Ankara
  • Les autorités turques évoquent une urgence liée à un dysfonctionnement électrique ; la Libye observe trois jours de deuil national et a dépêché une délégation pour enquêter

TRIPOLI: Le chef d'état-major libyen et plusieurs autres responsables militaires sont morts dans un "accident" d'avion après avoir quitté la capitale turque Ankara, où ils étaient en visite, a annoncé mardi soir le Premier ministre libyen, Abdelhamid Dbeibah.

"C'est avec une profonde tristesse et une grande affliction que nous avons appris la nouvelle du décès du chef d'état-major général de l'armée libyenne, le général de corps d'armée Mohamed Al-Haddad (...), à la suite d'une tragédie et d'un accident douloureux lors de (son) retour d'une mission officielle dans la ville turque d'Ankara", a déclaré M. Dbeibah sur sa page officielle sur Facebook.

Les autorités turques ont annoncé que l'épave de l'avion qui le transportait avait été retrouvée. Elles avaient auparavant indiqué que le contact avait été perdu avec l'appareil moins de 40 minutes après son décollage d'Ankara.

Le général Mohamad al-Haddad, originaire de Misrata (ouest), avait été nommé à ce poste en août 2020 par l'ancien chef du gouvernement Fayez al-Sarraj.

Plusieurs autres responsables militaires se trouvaient à bord selon le Premier ministre libyen: le chef d'état-major de l'armée de terre, le général Al-Fitouri Ghraybel, le directeur de l'Autorité de l'industrie militaire, Mahmoud Al-Qatioui, et le conseiller du chef d'état-major, Mohamed Al-Assaoui Diab.

Un photographe, Mohamed Omar Ahmed Mahjoub, les accompagnait.

M. Dbeibah a déploré une "grande perte pour la patrie"". "Nous avons perdu des hommes qui ont servi leur pays avec loyauté et dévouement", a-t-il noté.

Le gouvernement d'union nationale (GNU) de M. Dbeibah, basé à Tripoli et reconnu par la communauté internationale, a décrété un deuil national de trois jours.

Il a aussi demandé au ministère de la Défense d'envoyer une délégation officielle à Ankara pour faire la lumière sur les circonstances de l'incident, selon un communiqué du gouvernement.

L'appareil "a signalé une urgence due à un dysfonctionnement électrique au contrôle aérien et a demandé un atterrissage d'urgence", a précisé la présidence turque.

Le maréchal Khalifa Haftar, l'homme fort de l'Est libyen, a de son côté présenté ses condoléances et dit sa "profonde tristesse".


Le ministre israélien de la Défense promet de ne "jamais quitter" Gaza

Des enfants jouent dans le camp de Nuseirat pour Palestiniens déplacés, dans le centre de la bande de Gaza, le 22 décembre 2025. (Photo : Eyad Baba / AFP)
Des enfants jouent dans le camp de Nuseirat pour Palestiniens déplacés, dans le centre de la bande de Gaza, le 22 décembre 2025. (Photo : Eyad Baba / AFP)
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  • Le ministre israélien de la Défense, Israël Katz, a déclaré qu’Israël « ne quitterait jamais Gaza » et évoqué la création d’avant-postes, avant que son ministère ne précise qu’il n’y a aucune intention de recolonisation
  • Ces propos interviennent alors qu’une trêve fragile est en vigueur et que les médiateurs appellent à la mise en œuvre du plan Trump, qui prévoit un retrait complet israélien de Gaza

JERUSALEM: Le ministre de la Défense israélien Israël Katz a affirmé mardi qu'Israël "ne quitterait jamais Gaza", évoquant la possible création d'avant-postes dans le territoire palestinien ravagé par la guerre, avant que ses services ne modèrent ses propos.

"Nous sommes au cœur de Gaza et nous ne quitterons jamais Gaza", a déclaré M. Katz en déplacement dans la colonie de Beit-El en Cisjordanie occupée, lors d'un discours filmé par des médias israéliens.

"Nous sommes là-bas pour empêcher ce qui s'est passé" de se reproduire, a-t-il ajouté, en référence à l'attaque meurtrière du Hamas palestinien en Israël le 7 octobre 2023.

M. Katz a évoqué l'installation d'avant-postes dans le nord de Gaza, pour remplacer des colonies évacuées par Israël lors de son retrait unilatéral de 2005, citant le modèle de "Nahal", associant présence militaire et implantation agricole.

"Au moment opportun (...) nous établirons dans le nord de Gaza, des avant-postes Nahal à la place des communautés (des anciennes colonies) qui ont été déracinées", a-t-il dit.

Ses services ont rapidement tempéré ses propos, assurant qu'ils "s'inscrivaient exclusivement dans un contexte sécuritaire."

"Le gouvernement n'a aucune intention d'établir des colonies dans la bande de Gaza", selon un communiqué.

Les déclarations du ministre interviennent dans le contexte d'une fragile trêve entrée en vigueur le 10 octobre entre Israël et le Hamas, sous l'égide de Washington et de médiateurs régionaux.

Les pays médiateurs --Qatar et Égypte-- appellent à la mise en œuvre de la deuxième phase du plan de paix du président américain Donald Trump. Cette étape prévoit notamment un retrait complet des forces israéliennes de la bande de Gaza, et le plan stipule qu'"Israël ne va ni occuper ni annexer Gaza."

Les propos de M. Katz ont suscité de vives critiques dans l'opposition.

"Le gouvernement vote d'une main en faveur du plan Trump, et de l'autre il vend des fables sur des centres de peuplement isolés à Gaza", a assené sur X Gadi Eizenkot, ancien ministre et ancien chef d'état-major.

Jeudi dernier, quelques dizaines d'Israéliens ont pénétré illégalement dans la bande de Gaza, en violation des consignes de l'armée, et y ont planté symboliquement un drapeau israélien, pour appeler à la réoccupation et à la recolonisation du territoire palestinien, réclamée notamment par les ministres d'extrême droite du gouvernement Netanyahu.


Liban: l'Italie souhaite maintenir sa présence militaire après le départ de la force de l'ONU

L'Italie est le deuxième pays contributeur à la force de maintien de la paix de la FINUL dans le sud du Liban. (AFP/Archives)
L'Italie est le deuxième pays contributeur à la force de maintien de la paix de la FINUL dans le sud du Liban. (AFP/Archives)
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  • L’Italie confirme qu’elle maintiendra une présence militaire au Liban même après le retrait progressif de la Finul à partir du 31 décembre 2026
  • Rome met en avant le rôle clé des forces armées libanaises pour la stabilité du Liban et de la région, et appelle à des résultats concrets pour éviter toute exploitation de l’instabilité

ROME: L'Italie souhaite maintenir sa présence militaire au Liban, après le départ des Casques bleus de l'ONU qui commence le 31 décembre 2026, a indiqué lundi le ministère italien de la Défense.

"Même après" le départ de la force de maintien de la paix dans le sud du Liban (Finul) de l'ONU, l'Italie continuera à jouer son rôle soutenant avec conviction la présence internationale" dans ce pays, selon les propos du ministre de la Défense Guido Crosetto sur X.

Interrogé par l'AFP pour savoir si cela signifiait une "présence militaire" italienne, un porte-parole du ministère a confirmé que oui.

M. Crosetto a également souligné "le rôle fondamental" des forces armées libanaises "pour garantir la stabilité non seulement au Liban mais dans toute la région".

Le ministre a en outre assuré que Rome œuvrait à ce que les discussions en cours dans la région se traduisent par "des résultats concrets et que personne ne puisse tirer des avantages d'une situation d'instabilité dans le sud du Liban".

L'Italie est, avec 1.099 militaires, le deuxième contributeur de la Finul, derrière l'Indonésie (1.232) et cinq généraux italiens ont été parmi les chefs des Casques bleus au cours des 20 dernières années.