La CPI ouvre une enquête sur des crimes présumés dans les Territoires palestiniens

Un gigantesque nuage de fumée à la suite de ce que les témoins ont affirmé être des frappes aériennes israéliennes dans l'est de Gaza. (Reuters)
Un gigantesque nuage de fumée à la suite de ce que les témoins ont affirmé être des frappes aériennes israéliennes dans l'est de Gaza. (Reuters)
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Publié le Jeudi 04 mars 2021

La CPI ouvre une enquête sur des crimes présumés dans les Territoires palestiniens

  • Le département d'Etat a affirmé que le gouvernement de Joe Biden «s'oppose fermement» à cette enquête
  • La CPI «a pris une décision qui est l'essence même de l’antisémitisme et de l'hypocrisie» a déclaré le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou

LAHAYE: La Procureure générale de la Cour pénale internationale (CPI) Fatou Bensouda a annoncé mercredi avoir ouvert une enquête sur des crimes présumés dans les Territoires palestiniens, une initiative rejetée par Israël mais saluée par les Palestiniens.

A Washington, le département d'Etat a affirmé que le gouvernement de Joe Biden «s'oppose fermement» à cette enquête mais précisé qu'il était en train de «réexaminer» les sanctions prises sous la présidence de Donald Trump contre Fatou Bensouda et d'autres responsables de la juridiction internationale.

Avant l'annonce de mercredi, Fatou Bensouda avait déclaré qu'il y avait un «fondement raisonnable» à croire que des crimes avaient été commis par des membres des forces israéliennes, des autorités israéliennes, du Hamas palestinien et d'autres groupes armés palestiniens durant la guerre de Gaza de 2014.

En juillet-août 2014, Israël a lancé une offensive de grande envergure pour faire cesser les tirs de roquettes du Hamas en direction de son territoire depuis la bande de Gaza, une enclave sous blocus israélien depuis des années. La guerre a fait quelque 2 250 morts côté palestinien, en majorité des civils, et 74 morts, essentiellement des soldats, côté israélien.

«Aujourd'hui, je confirme l'ouverture par le Bureau du Procureur de la Cour pénale internationale d'une enquête sur la situation en Palestine», a déclaré Fatou Bensouda dans un communiqué.

Contrairement à la Palestine, Israël n'est pas membre de la CPI, basée à La Haye, et s'est opposé avec véhémence à toute enquête.

La CPI «a pris une décision qui est l'essence même de l’antisémitisme et de l'hypocrisie» a déclaré le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou.

«Nous défendrons chaque soldat, chaque officier, chaque civil et je vous promets que nous allons nous battre pour la vérité jusqu'à ce que cette décision scandaleuse soit annulée», a-t-il ajouté.

 «Impartialité et objectivité» 

Le ministre israélien de la Défense Benny Gantz, qui était chef-d'état major durant la guerre de Gaza en 2014, a écrit sur Twitter: «la décision de la cour est une récompense pour le terrorisme. Les Palestiniens doivent comprendre que le conflit entre nous ne se réglera que par des négociations, aucun tribunal ni même la cour de La Haye ne fera avancer les choses». 

L'Autorité palestinienne a, elle, salué la décision de la CPI. «Les crimes commis par les dirigeants de l'occupation israélienne contre le peuple palestinien -qui sont en cours, systématiques et généralisés- rendent cette enquête nécessaire et urgente», selon un communiqué du ministère des Affaires étrangères.

Fatou Bensouda a assuré que l'enquête serait menée «en toute indépendance, impartialité et objectivité, sans crainte ni parti pris».

«En définitive, ce sont les victimes tant palestiniennes qu'israéliennes du long cycle de violence et d'insécurité, qui a causé de profondes souffrances et un terrible sentiment», a-t-elle ajouté.

En décembre 2019, Fatou Bensouda avait souhaité une enquête complète après une enquête préliminaire de cinq ans, tout en demandant à la CPI de déterminer si sa portée s'étendait aux territoires palestiniens.  

Sanctions 

Les juges de la CPI avaient ouvert la voie à une enquête sur des crimes de guerre en statuant le mois dernier que la Cour était compétente pour les faits survenus dans les Territoires palestiniens.

Israël a occupé la Cisjordanie et la bande de Gaza lors de la guerre des Six jours de 1967, puis a annexé principalement Jérusalem-Est.

Aujourd'hui, ces territoires abritent au moins cinq millions de Palestiniens, définis par les Nations unies comme vivant sous occupation israélienne.

L'armée israélienne continue d'occuper la Cisjordanie. Elle s'est retirée unilatéralement en 2005 de la bande de Gaza mais impose à l'enclave palestinienne un blocus depuis plus de 10 ans. Ce territoire est dirigé par le Hamas.

L'enquête constituera le premier test majeur pour le nouveau Procureur de la CPI, Karim Khan, l'avocat britannique nommé en février pour remplacer Fatouma Bensouda après la fin de son mandat en juin.

Fatouma Bensouda fait l'objet de sanctions américaines pour avoir décider d'enquêter sur les allégations de crimes de guerre américains en Afghanistan.


Liban: le chef de l'Etat demande à l'armée de «s'opposer à toute incursion israélienne»

Le président libanais Joseph Aoun a demandé jeudi à l'armée de "s'opposer à toute incursion israélienne", après la mort d'un employé municipal d'un village du sud du Liban où une unité israélienne a pénétré pendant la nuit. (AFP)
Le président libanais Joseph Aoun a demandé jeudi à l'armée de "s'opposer à toute incursion israélienne", après la mort d'un employé municipal d'un village du sud du Liban où une unité israélienne a pénétré pendant la nuit. (AFP)
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  • Dans un communiqué, le chef de l'Etat a condamné cette opération et "demandé à l'armée de faire face à toute incursion israélienne (...) pour défendre le territoire libanais et la sécurité des citoyens"
  • Selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), "dans une agression grave et sans précédent", une unité israélienne "appuyée par des véhicules a effectué une incursion dans le village de Blida, à plus d'un kilomètre de la frontière"

BERYROUTH: Le président libanais Joseph Aoun a demandé jeudi à l'armée de "s'opposer à toute incursion israélienne", après la mort d'un employé municipal d'un village du sud du Liban où une unité israélienne a pénétré pendant la nuit.

Dans un communiqué, le chef de l'Etat a condamné cette opération et "demandé à l'armée de faire face à toute incursion israélienne (...) pour défendre le territoire libanais et la sécurité des citoyens".

Selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), "dans une agression grave et sans précédent", une unité israélienne "appuyée par des véhicules a effectué une incursion dans le village de Blida, à plus d'un kilomètre de la frontière".

Cette unité "a investi le bâtiment de la municipalité du village, où dormait Ibrahim Salamé, un employé municipal, qui a été tué par les soldats de l'ennemi", a ajouté l'Ani.

Le ministère de la Santé a confirmé la mort de l'employé municipal.

Des villageois cités par l'Ani ont indiqué que l'incursion avait duré plusieurs heures et que les forces israéliennes s'étaient retirées à l'aube.

Sur X, le Premier ministre libanais Nawaf Salam a dénoncé "une agression flagrante contre les institutions de l'Etat libanais et sa souveraineté".


Liban: incursion israélienne dans un village frontalier, un employé municipal tué

Un employé municipal a été tué jeudi, selon le ministère libanais de la Santé, lors d'une incursion israélienne nocturne dans un village du sud du Liban, confirmée par Israël qui a affirmé agir contre le Hezbollah pro-iranien. (AFP)
Un employé municipal a été tué jeudi, selon le ministère libanais de la Santé, lors d'une incursion israélienne nocturne dans un village du sud du Liban, confirmée par Israël qui a affirmé agir contre le Hezbollah pro-iranien. (AFP)
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  • En vertu d'un cessez-le-feu qui a mis fin en novembre 2024 à la guerre entre le Hezbollah et Israël, ce pays a retiré ses troupes du sud du Liban mais continue d'occuper cinq points sur le territoire libanais, frontalier du nord d'Israël
  • Selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), "dans une agression grave et sans précédent", une unité israélienne "appuyée par des véhicules a effectué une incursion dans le village de Blida, à plus d'un kilomètre de la frontière"

BEYROUTH: Un employé municipal a été tué jeudi, selon le ministère libanais de la Santé, lors d'une incursion israélienne nocturne dans un village du sud du Liban, confirmée par Israël qui a affirmé agir contre le Hezbollah pro-iranien.

En vertu d'un cessez-le-feu qui a mis fin en novembre 2024 à la guerre entre le Hezbollah et Israël, ce pays a retiré ses troupes du sud du Liban mais continue d'occuper cinq points sur le territoire libanais, frontalier du nord d'Israël.

Selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), "dans une agression grave et sans précédent", une unité israélienne "appuyée par des véhicules a effectué une incursion dans le village de Blida, à plus d'un kilomètre de la frontière".

Cette unité "a investi le bâtiment de la municipalité du village, où dormait Ibrahim Salamé, un employé municipal, qui a été tué par les soldats de l'ennemi", a ajouté l'Ani.

Le ministère de la Santé a confirmé la mort de l'employé municipal.

Des villageois cités par l'Ani ont indiqué que l'incursion avait duré plusieurs heures et que les forces israéliennes s'étaient retirées à l'aube.

Sur X, le Premier ministre libanais Nawaf Salam a dénoncé "une agression flagrante contre les institutions de l'Etat libanais et sa souveraineté".

L'armée israélienne a confirmé avoir mené cette incursion, affirmant qu'elle intervenait dans le cadre de ses "activités visant à détruire une infrastructure terroriste" du Hezbollah.

Elle a ajouté que l'unité avait "repéré un suspect à l'intérieur du bâtiment" de la municipalité et ouvert le feu après avoir identifié "une menace directe" sur les soldats.

L'incident "fait l'objet d'une enquête", selon l'armée.

Dans un autre village frontalier, Adaissé, une unité israélienne a dynamité un bâtiment servant à abriter des cérémonies religieuses, selon l'Ani.

Ces derniers jours, l'aviation israélienne a intensifié ses frappes au Liban, affirmant viser des membres ou des infrastructures du Hezbollah.

Mardi, le porte-parole du Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'Homme, Jeremy Laurence, a indiqué que 111 civils avaient été tués au Liban par les forces israéliennes depuis la fin de la guerre.

Le Hezbollah est sorti très affaibli du conflit et les Etats-Unis exercent une intense pression sur le gouvernement libanais pour qu'il livre ses armes à l'armée nationale, ce qu'il refuse jusqu'à présent.

Le mécanisme de surveillance du cessez-le-feu, qui regroupe outre le Liban et Israël, les Etats-Unis, la France et l'ONU, s'est réuni mercredi dans la localité frontalière de Naqoura, qui abrite le quartier général des forces de l'ONU.

L'émissaire américaine Morgan Ortagus a déclaré au cours de la réunion que "l'armée libanaise doit à présent exécuter entièrement son plan" visant à "placer toutes les armes sous le contrôle de l'Etat d'ici la fin de l'année".


Soudan: l'ONU appelle à mettre un terme au siège d'El-Facher après une tuerie dans une maternité

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  • Le chef des paramilitaires soudanais Mohamed Daglo a reconnu mercredi soir une "catastrophe" dans la ville, assurant: "La guerre nous a été imposée"
  • Antonio Guterres s'est dit "gravement préoccupé par l'escalade militaire récente" à El-Facher, appelant à "mettre un terme immédiatement au siège et aux hostilités"

PORT-SOUDAN: Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé jeudi à mettre un terme à l'"escalade militaire" au Soudan, après le meurtre de plus de 460 personnes dans une maternité à El-Facher, ville clé prise par les forces paramilitaires.

Les informations se multiplient sur des exactions massives depuis que les Forces de soutien rapide (FSR, paramilitaires) ont pris dimanche, après 18 mois de siège, cette dernière grande ville qui échappait à leur contrôle dans la vaste région du Darfour, où "les massacres continuent" selon des images satellite analysées par le Humanitarian Research Lab (HRL) de l'université Yale.

Le chef des paramilitaires soudanais Mohamed Daglo a reconnu mercredi soir une "catastrophe" dans la ville, assurant: "La guerre nous a été imposée".

Antonio Guterres s'est dit "gravement préoccupé par l'escalade militaire récente" à El-Facher, appelant à "mettre un terme immédiatement au siège et aux hostilités".

L'Organisation mondiale de la santé (OMS) s'est dite "consternée par les informations faisant état du meurtre tragique de plus de 460 patients et accompagnateurs à la maternité saoudienne d'El-Facher". Selon l'institution, cette maternité était le seul hôpital encore partiellement opérationnel dans la ville.

Après la prise d'El-Facher à leurs rivaux, l'armée du général Abdel Fattah al-Burhane, les FSR contrôlent désormais l'ensemble du Darfour, vaste région de l'ouest du Soudan couvrant le tiers du pays.

Les communications satellite restent coupées -sauf pour les FSR qui contrôlent le réseau Starlink-, les accès d'El-Facher restent bloqués malgré les appels à ouvrir des corridors humanitaires. Dans ce contexte, il est extrêmement compliqué de joindre des sources locales indépendantes.

Maîtres du Darfour 

"Plus de 2.000 civils ont été tués au cours de l'invasion de la milice (des FSR) à El-Facher, ciblant les mosquées et les volontaires du Croissant-Rouge", a pour sa part affirmé Mona Nour Al-Daem, chargée de l'aide humanitaire au gouvernement pro-armée.

A El-Facher, le comité de résistance local, qui documente les exactions depuis le début du conflit, a rapporté mercredi soir avoir entendu des tirs dans l'ouest de la ville, "où quelques soldats restants combattent avec (...) ténacité".

Depuis dimanche, plus de 36.000 personnes ont fui les violences, majoritairement vers la périphérie d'El-Facher et vers Tawila, cité située à 70 km plus à l'ouest et qui était déjà la plus importante zone d'accueil du Soudan, selon l'ONU, avec plus de 650.000 déplacés.

De rares images de l'AFP en provenance de Tawila montrent des déplacés portant leurs affaires sur leur dos ou sur leur tête. Certains montent des tentes, d'autres, parfois blessés, sont assis dans des conditions précaires.

Le Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme a alerté sur le "risque croissant d'atrocités motivées par des considérations ethniques" en rappelant le passé du Darfour, ensanglanté au début des années 2000 par les massacres et les viols des milices arabes Janjawid, dont sont issues les FSR, contre les tribus locales Massalit, Four ou Zaghawa.

"Unité" 

Les FSR, qui ont installé au Darfour une administration parallèle, contrôlent désormais l'ouest du Soudan et certaines parties du sud, avec leurs alliés. L'armée contrôle le nord, l'est et le centre du troisième plus vaste pays d'Afrique, ravagé par plus de deux ans de guerre.

Des experts craignent une nouvelle partition du Soudan, après l'indépendance du Soudan du Sud en 2011. Mais le chef des FSR a affirmé mercredi que la prise complète du Darfour par ses forces favoriserait "l'unité" du pays.

"La libération d'El-Facher est une opportunité pour l'unité du Soudan et nous disons : l'unité du Soudan par la paix ou par la guerre", a déclaré M. Daglo mercredi.

Les pourparlers menés depuis plusieurs mois par le groupe dit du "Quad", qui réunit les Etats-Unis, l'Egypte, les Emirats arabes Unis et l'Arabie saoudite, sont restés dans l'impasse, selon un responsable proche des négociations.

Leurs propositions de trêve se heurtent, selon lui, "à l'obstructionnisme continu" du pouvoir de M. Burhane, qui a refusé en septembre une proposition prévoyant à la fois son exclusion et celle des FSR de la transition politique post-conflit.