L'Iran n'est pas un pays pour les minorités: l'agonie des Arabes, des Kurdes, des Baloutches et des Azéris d'Iran

Depuis la révolution islamique de 1979, les minorités kurdes, arabes et baloutches ont été réprimées de manière particulièrement sévère par les forces de sécurité du régime. (AFP)
Depuis la révolution islamique de 1979, les minorités kurdes, arabes et baloutches ont été réprimées de manière particulièrement sévère par les forces de sécurité du régime. (AFP)
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Publié le Mardi 09 mars 2021

L'Iran n'est pas un pays pour les minorités: l'agonie des Arabes, des Kurdes, des Baloutches et des Azéris d'Iran

  • Depuis la révolution islamique de 1979, les sunnites des provinces périphériques ont subi de nombreuses répressions sévères
  • Les derniers bouleversements au Sistan et au Baloutchistan ont mis en évidence la marginalisation considérable des groupes ethniques non persans

WASHINGTON D.C.: La persécution des opposants politiques en Iran a été largement documentée. Toutefois, la notion courante de «peuple iranien» privilégie les doléances des musulmans chiites et de ceux qui parlent le persan au détriment des griefs des minorités ethniques. Ainsi, les événements qui se produisent à Téhéran et dans d'autres villes sont toujours privilégiés aux dépens des incidents que subissent les provinces lointaines.

Au total, les groupes ethniques non persans d’Iran constituent près de 50% de la population, tous étant largement marginalisés.

Au cours des dernières années, le régime de Téhéran, ainsi que ses complices en Occident, ont invariablement avancé l'argument qui place les États-Unis en position d'oppresseur et le «peuple iranien» en position de victime. Toutefois, ce récit est souvent interrompu par les manifestations des minorités ethniques opprimées de l'Iran, qui échappent souvent à tout contrôle, à l’instar des violents affrontements qui ont récemment secoué le sud-est du pays, une zone en proie à la pauvreté.

En effet, selon une déclaration commune de divers groupes de droits de l'homme, les autorités ont désactivé le réseau de données mobiles dans la province du Sistan et du Baloutchistan. Ces groupes jugent que ces mesures constituent un «outil pour camoufler» la répression sévère que le gouvernement mène contre les manifestations qui secouent cette partie du pays.

Indignés par les coups de feu tirés sur des trafiquants de carburant qui tentaient d’entrer en Iran à venant du Pakistan, les habitants avaient attaqué le bureau du gouverneur du district et pris d'assaut deux postes de police dans la ville de Saravan.

Plusieurs groupes de militants se révoltent au Sistan et au Baloutchistan. Certains revendiquent une plus grande autonomie pour la région. Les relations entre les résidents baloutches, à majorité sunnites, et la théocratie chiite iranienne restent tendues depuis bien longtemps.

En effet, depuis la révolution islamique de 1979, les Kurdes, les Arabes et les Baloutches ont été réprimés de manière particulièrement sévère par les forces de sécurité du régime. Par conséquent, quarante ans plus tard, des provinces telles que le Khouzistan, le Kurdistan, le Sistan et le Baloutchistan demeurent les régions les moins stables et les moins développées d'Iran.

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Des provinces telles que le Khouzistan, le Kurdistan, le Sistan et le Baloutchistan demeurent les régions les plus instables et les moins développées d'Iran. (AFP)

Le plus souvent, les autorités prétendent combattre le «terrorisme» et l'«extrémisme» pour justifier les exécutions, les détentions arbitraires et les tirs à balles réelles qu’elles engagent contre les minorités qui protestent. Les activités contestataires les plus bénignes, comme la publication de critiques du régime sur les réseaux sociaux, peuvent, elles aussi, entraîner la peine de mort.

«On sait que, en Iran, la discrimination est institutionnalisée par la Constitution du pays», explique Abdel Sattar Doshouki, directeur du Centre d'études sur le Baloutchistan, situé à Londres, dans un rapport soumis au forum du Conseil des droits de l'homme des Nations unies sur les questions relatives aux minorités.

«La politique que mène le régime iranien au Sistan et au Baloutchistan, ainsi que dans d'autres provinces, repose sur la discrimination raciale et linguistique, l'assimilation, les préjugés et les inégalités en matière de religion, l'oppression brutale, la privation et l'exclusion des personnes qui sont majoritaires dans les provinces et les régions», ajoute-t-il.

En outre, les militants baloutches ont lancé plusieurs appels à la communauté internationale ainsi qu’aux puissances régionales pour qu'elles exercent des pressions sur le gouvernement iranien afin qu’il cesse sa politique généralisée consistant à harceler et à emprisonner ses dirigeants locaux.

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L'attaque de 2018 qui visait un défilé militaire à Ahvaz a fait ressurgir la rancœur croissante des groupes minoritaires face aux tactiques de répression employées par Téhéran. (AFP)

 

Les Arabes d'Ahvaz, qui constituent la plus grande communauté arabe d'Iran, sont confrontés à la même répression. Originaires du Khouzistan, ils vivent dans un contexte de grande pauvreté, même si cette région possède près de 80% des ressources pétrolières de l'Iran.

La province n'a jamais été gouvernée par un Arabe et la majorité de ses hauts fonctionnaires sont des Perses étroitement liés au Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI). Le persan est la langue officielle, alors que la langue arabe n'est pas enseignée dans les écoles.

Mardi, l'organisation des droits de l'homme d'Ahvaz a annoncé que quatre autres prisonniers politiques avaient été exécutés dans la fameuse prison de Sepidar. Parmi les rares personnes qui ont survécu figure Saleh Hamid, un activiste politique et intellectuel arabe d'Ahvaz qui a été arrêté par les autorités iraniennes au début des années 2000 pour avoir prétendument diffusé une propagande contre le régime.

Activités de subversion

Selon le témoignage qu'il a donné au Centre de documentation des droits de l'homme en Iran (IHRDC), dont le siège est aux États-Unis, Hamid s'est rendu en Syrie pour s'inscrire à l'université de Damas, où il a rejoint l'Association des étudiants arabes d’Ahvaz.

Selon M. Hamid, ce groupe d'étudiants promouvait principalement la culture arabe d'Ahvaz. Cependant, l’intellectuel pense que ce sont les services de renseignement syriens qui ont considéré qu'il menait des activités de subversion, puisqu'il a été détenu à l'aéroport de Téhéran-Imam Khomeini alors qu'il revenait de vacances.

Hamid a été libéré au bout de quatre jours avant d'être à nouveau arrêté par des officiers civils à Ahvaz, au domicile de son père. Au bout de deux mois passés dans le centre de détention du Corps des gardiens de la révolution islamique à Chaharshir, Hamid a été libéré sous caution. Par la suite, il a fui le pays avant son procès.

Pour lui, la politique de persécution de Téhéran cherche à effacer toute identité ethnique qu'il est impossible de rattacher à l'idéologie hégémonique de la République islamique. Il estime que la communauté internationale, en particulier les puissances européennes, soucieuses de préserver l'accord sur le nucléaire iranien de 2015, est tenue de faire de la protection des minorités la condition préalable à tout accord commercial avec le régime.

Une mise à l’écart politique des Azéris d'Iran

«Les droits de l'homme en Iran paient la facture des négociations relatives au dossier nucléaire et au commerce entre l'Union européenne et l'Iran», confie M. Hamid à Arab News. «Au cours des négociations, ils oublient les droits de l'homme, la suppression et la répression. Nous demandons que la question des droits de l'homme figure parmi les principaux thèmes de négociation avec le régime. La discrimination touche tous les aspects. Demandez à un citoyen arabe en Iran s'il a pu bénéficier du pétrole, il vous répondra: “Je n'ai eu que de la fumée.”»

Les Azéris d'Iran, qui constituent au moins 16% de la population du pays, sont une autre minorité confrontée à de nombreux problèmes. Bien que les Azéris soient chiites, le Corps des gardiens de la révolution islamique se méfie d’un bon nombre d'entre eux en raison de leurs affinités culturelles et linguistiques avec la Turquie, sans compter le sentiment de parenté ethnique qu'ils éprouvent envers le peuple de l'Azerbaïdjan voisin.

Cette mise à l’écart politique des Azéris d'Iran s’est récemment traduite par des manifestations qui ont secoué la ville de Tabriz, dans le nord du pays, lors de la guerre entre l'Azerbaïdjan et l'Arménie, qui a pris fin au mois de novembre. Ils en voulaient à Téhéran pour avoir, prétendument, acheminé des armes vers l'Arménie afin de les utiliser contre l'Azerbaïdjan.

Les Azéris d'Iran, qui désignent leur région natale par le terme Guney Azerbaïdjan ou «Azerbaïdjan du Sud», ne sont pas non plus autorisés à utiliser leur langue maternelle dans les établissements scolaires qu’ils fréquentent. Ils sont nombreux à considérer que, pour que leur situation s’améliore, une «réunification» de leur territoire historique avec l'Azerbaïdjan constituerait la seule solution.

Yashar Piri, un militant iranien azéri, a récemment été arrêté et sauvagement frappé par le Corps des gardiens de la révolution islamique pour avoir réalisé des graffitis revendiquant davantage de droits à la langue. Par son geste, Piri a fait preuve d'un courage remarquable dans la mesure où la détention, la torture ou encore l'exécution arbitraire sont le destin qu’on réserve aux militants des droits des minorités.

«Ce régime repose entre autres sur la persécution des minorités religieuses», affirme Masih Alinejad, journaliste et activiste iranienne, à Arab News.

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Les arabes d'Ahvaz ont exercé des pressions sur les gouvernements étrangers pour les inciter à agir. (AP)

 

«Voilà quarante-deux ans que le régime recourt à l'arrestation, à la persécution, à l'exécution et à la confiscation des biens de ces minorités. Ces dernières n'ont donc pas réussi à exploiter pleinement leur potentiel et ont disposé de peu d’opportunités d’emploi», explique la journaliste.

«Le sort des minorités sunnites musulmanes, comme les Kurdes et les Baloutches, n'a pas été meilleur. Les régions habitées par ces minorités comptent parmi les plus pauvres et les plus négligées par le régime. Ces minorités apparaissent de manière flagrante dans les statistiques relatives aux exécutions effectuées dans la République islamique d'Iran. Dans ces régions, la pauvreté est si grande que de nombreuses personnes sont contraintes de se livrer à la contrebande de marchandises à travers les frontières afin de gagner leur vie et de subvenir aux besoins de leur famille», déplore Masih Alinejad.

C’est bel et bien le cas des Kurdes du nord-ouest de l'Iran qui constituent environ 10% de la population totale. Principalement établis dans les provinces de l'Azerbaïdjan occidental, du Kermanchah, du Kurdistan et d'Ilam, de nombreux jeunes Kurdes gagnent leur vie en transportant des marchandises sur leur dos à travers les dangereux passages montagneux du Zagros vers la région kurde du nord de l'Irak.

Résistance des minorités iraniennes

Appelés «kolbars», ceux d'entre eux qui parviennent à survivre au froid glacial et aux chutes d'eau doivent également traverser de vastes champs de mines et affronter les gardes-frontières du Corps des gardiens de la révolution islamique, qui sont prêts à tirer à tout moment.

À l'instar d'autres minorités d’Iran, les Kurdes ne sont pas autorisés à enseigner leur langue maternelle dans le cadre du programme national. En outre, la peine de mort attend ceux qui sont soupçonnés d'appartenir à l'un des nombreux groupes d'opposition kurdes présents le long de la frontière.

En effet, les activistes estiment que la terreur des exécutions et la menace de déplacement démographique auxquelles les minorités d'Iran sont confrontées devraient être reconnues pour ce qu'elles sont: des crimes contre l'humanité.

Ils constatent par ailleurs avec désarroi que l'exclusion économique, sociale et politique des minorités ethniques et religieuses d'Iran ne figure jamais dans le discours diplomatique qui entoure la question nucléaire et l'ingérence régionale du Corps des gardiens de la révolution islamique.

Au bout du compte, les activistes affirment que la résistance des minorités iraniennes, qui sont déterminées à conserver leur identité et leurs traditions, freine l'absolutisme de la théocratie chiite.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com.

 


Au Liban, le monastère du Saint des miracles attend le pape

"Saint Charbel m'a sauvé la vie". Comme de nombreux pèlerins, Charbel Matar se recueille sur la tombe du saint patron des Libanais, auquel sont attribués de nombreux miracles, avant la venue du pape Léon XIV. (AFP)
"Saint Charbel m'a sauvé la vie". Comme de nombreux pèlerins, Charbel Matar se recueille sur la tombe du saint patron des Libanais, auquel sont attribués de nombreux miracles, avant la venue du pape Léon XIV. (AFP)
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  • La visite du monastère qui abrite la tombe de Saint Charbel, au nord de Beyrouth, sera un moment fort de la visite du pape américain, attendu au Liban le 30 novembre
  • Saint Charbel Makhlouf (1828-1898), un moine-ermite maronite, canonisé en 1977, est populaire parmi les Libanais de toutes les communautés qui croient en ses miracles

ANNAYA: "Saint Charbel m'a sauvé la vie". Comme de nombreux pèlerins, Charbel Matar se recueille sur la tombe du saint patron des Libanais, auquel sont attribués de nombreux miracles, avant la venue du pape Léon XIV.

La visite du monastère qui abrite la tombe de Saint Charbel, au nord de Beyrouth, sera un moment fort de la visite du pape américain, attendu au Liban le 30 novembre.

"Ma famille et moi avons une grande foi en Saint Charbel et nous lui rendons toujours visite", déclare Charbel Matar, 69 ans, entouré de son épouse et ses amis.

"J'ai failli mourir quand j'avais cinq ans. Il a accompli un miracle, il m'a sauvé de la mort et m'a maintenu en vie pendant 64 années de plus", ajoute l'homme dont les parents ont changé le prénom de Roger à Charbel en l'honneur du saint.

Saint Charbel Makhlouf (1828-1898), un moine-ermite maronite, canonisé en 1977, est populaire parmi les Libanais de toutes les communautés qui croient en ses miracles.

Les portraits du saint, avec sa longue barbe blanche, ornent maisons, voitures, mêmes bureaux, et les visiteurs affluent au monastère, qui porte le nom de Saint Maron, en toutes saisons.

"J'étais certaine que le pape allait visiter Saint Charbel (..) car Rome ne peut pas nier les miracles qu'il accomplit", dit Randa Saliba, une femme de 60 ans. "Saint Charbel est un message d'amour (..), il garde vivant le message chrétien".

La dernière visite d'un souverain pontife au Liban avait été celle de Benoit XVI en 2012.

Toutes les confessions 

En prévision de l'arrivée du pape, des ouvriers appliquent une couche d'asphalte sur la route menant au paisible monastère, dans les montagnes boisées d'Annaya qui surplombent la mer.

Des visiteurs, dont des femmes musulmanes voilées, se promènent sur le site, où la cellule monacale de Saint Charbel a été gardée intacte. Certains allument des bougies et récitent des prières.

Fils de bergers, le moine originaire du nord du Liban était entré dans les ordres à l'âge de 23 ans, avant de mener une vie d'ermite.

L'abbé Tannous Nehmé, vice-recteur de Saint Maron, affirme que le monastère attire environ trois millions de visiteurs chaque année.

"Ce ne sont pas seulement des chrétiens - beaucoup de musulmans, ou des personnes non croyantes, viennent. Des gens arrivent de partout: d'Afrique, d'Europe, de Russie", affirme-il.

Au milieu des effluves d'encens, seul le bruit des travaux de restauration de la tombe de Saint Charbel troublent la quiétude du monastère.

C'est là que, lorsque la tombe a été ouverte en 1950, des représentants du clergé ont constaté que le corps du saint était intact, plus d'un demi-siècle après sa mort.

Le monastère a recensé des dizaines de milliers de personnes qui ont affirmé avoir été guéries par Saint Charbel.

La miraculée la plus célèbre est une Libanaise, Nohad Chami, diagnostiquée avec une maladie en phase terminale en 1993.

Elle affirme avoir eu une vision de Saint Charbel qui l'a guérie. Elle est décédée cette année, à l'âge de 75 ans.

"L'espoir" 

Le Liban, un pays multiconfessionnel, est le seul Etat arabe où le président de la République est un chrétien maronite, en vertu du partage du pouvoir entre les communautés.

"La visite du pape est très importante pour le Liban. Elle apporte du bien et la bénédiction", se réjouit Claude Issa, une mère de trois enfants âgée de 56 ans.

Le Liban est sorti d'une guerre meurtrière il y a près d'un an entre le Hezbollah et Israël, qui continue de mener des frappes dans le pays, disant viser des membres ou infrastructures du mouvement pro-iranien.

Secoué par une crise économique inédite depuis 2019, il a également connu en août 2020 une énorme explosion, qui a fait plus de 220 morts et dévasté une partie de Beyrouth.

Le pape doit tenir le 2 décembre une prière silencieuse sur le site de l'explosion, au port de Beyrouth, et célébrer une messe publique.

"Sa visite donnera un élan aux gens, leur fera sentir qu'il y a toujours de l'espoir au Liban", affirme Claude Issa.

 


L'ONU s'alarme «pour la survie de Gaza»

La "survie de Gaza est en jeu", s'alarme l'ONU mardi dans un rapport, appelant la communauté internationale à élaborer un "plan de redressement d'ensemble" et à intervenir "sans délai" et de manière coordonnée. (AFP)
La "survie de Gaza est en jeu", s'alarme l'ONU mardi dans un rapport, appelant la communauté internationale à élaborer un "plan de redressement d'ensemble" et à intervenir "sans délai" et de manière coordonnée. (AFP)
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  • Les opérations militaires israéliennes à Gaza "ont rongé tous les piliers de la survie", de la nourriture au logement en passant par les soins de santé, "nui à la gouvernance et plongé" le territoire palestinien "dans un abîme créé par l'homme"
  • "Compte tenu des destructions incessantes et méthodiques dont elle a fait l'objet, on peut douter sérieusement de la capacité de Gaza de se reconstruire, en tant qu'espace de vie et société", ajoute le rapport

GENEVE: La "survie de Gaza est en jeu", s'alarme l'ONU mardi dans un rapport, appelant la communauté internationale à élaborer un "plan de redressement d'ensemble" et à intervenir "sans délai" et de manière coordonnée.

Les opérations militaires israéliennes à Gaza "ont rongé tous les piliers de la survie", de la nourriture au logement en passant par les soins de santé, "nui à la gouvernance et plongé" le territoire palestinien "dans un abîme créé par l'homme", dénonce un rapport de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced).

"Compte tenu des destructions incessantes et méthodiques dont elle a fait l'objet, on peut douter sérieusement de la capacité de Gaza de se reconstruire, en tant qu'espace de vie et société", ajoute le rapport.

La guerre à Gaza a été déclenchée par l'attaque sans précédent du mouvement islamiste palestinien Hamas en Israël le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.221 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des données officielles.

Plus de 69.756 Palestiniens ont été tués par la campagne militaire israélienne de représailles, selon le ministère de la Santé de Gaza, contrôlé par le Hamas. Ces données, jugés fiables par l'ONU, ne précisent pas le nombre de combattants tués mais indiquent que plus de la moitié des morts sont des mineurs et des femmes.

Selon le rapport de la Cnuced, les opérations militaires israéliennes ont fait passer Gaza "d'une situation de sous-développement à celle d'une ruine totale".

L'ONU estime qu'environ 70 milliards de dollars seront nécessaires pour reconstruire le territoire palestinien.

"Même dans un scénario optimiste, dans lequel la croissance atteint un taux à deux chiffres et l'aide étrangère afflue, il faudra plusieurs décennies pour que Gaza retrouve le niveau de qualité de vie d'avant octobre 2023", souligne le rapport.

La Cnuced appelle à la mise en oeuvre "d'un plan de redressement d'ensemble" qui associe "une aide internationale coordonnée, le rétablissement des transferts fiscaux" d'Israël vers Gaza "et des mesures visant à alléger les contraintes qui pèsent sur le commerce, les déplacements et l'investissement".

Cette agence onusienne appelle à instaurer, dans ce cadre, un revenu de base universel à Gaza, pour pourvoir à la subsistance de tous les habitants, sous forme d'un programme d'aide en espèces, "reconductible et sans conditions" et qui serait versé mensuellement.

La Cnuced note également qu'en Cisjordanie occupée, "la violence, l'expansion accélérée des colonies et les restrictions à la mobilité de la main-d'oeuvre" sont à l'origine du pire déclin économique depuis que l'agence a commencé à tenir des registres en 1972.


Au Soudan, les paramilitaires annoncent une trêve unilatérale de trois mois

L'émissaire du président américain pour l'Afrique, Massad Boulos, a présenté récemment une proposition de trêve au nom des Etats-Unis, des Emirats arabes unis, de l'Arabie saoudite et de l'Egypte, pays médiateurs, dont les détails n'ont pas été divulgués. (AFP)
L'émissaire du président américain pour l'Afrique, Massad Boulos, a présenté récemment une proposition de trêve au nom des Etats-Unis, des Emirats arabes unis, de l'Arabie saoudite et de l'Egypte, pays médiateurs, dont les détails n'ont pas été divulgués. (AFP)
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  • L'émissaire du président américain pour l'Afrique, Massad Boulos, a présenté récemment une proposition de trêve au nom des Etats-Unis, des Emirats arabes unis, de l'Arabie saoudite et de l'Egypte, pays médiateurs, dont les détails n'ont pas été divulgués
  • "En réponse aux efforts internationaux, notamment à l'initiative du président américain Donald Trump et des médiateurs (...), nous annonçons une trêve humanitaire prévoyant une cessation des hostilités pour trois mois", a déclaré lundi Mohamed Daglo

PORT-SOUDAN: Les paramilitaires soudanais des Forces de soutien rapide (FSR) ont annoncé lundi une trêve humanitaire unilatérale de trois mois, au lendemain du rejet par l'armée rivale d'une proposition internationale de cessez-le-feu dans le pays ravagé par plus de deux ans d'un conflit meurtrier.

Le Soudan est le théâtre depuis avril 2023 d'une guerre pour le pouvoir, opposant l'armée du général Abdel Fattah al-Burhane, dirigeant de facto du pays, aux FSR de son ancien bras droit Mohamed Hamdane Daglo.

Le conflit, marqué par des exactions dans les deux camps et auquel plusieurs médiateurs internationaux tentent de mettre un terme, a fait plusieurs dizaines milliers de morts et forcé le déplacement de millions de personnes, plongeant le pays dans ce que l'ONU qualifie de "pire crise humanitaire" au monde.

L'émissaire du président américain pour l'Afrique, Massad Boulos, a présenté récemment une proposition de trêve au nom des Etats-Unis, des Emirats arabes unis, de l'Arabie saoudite et de l'Egypte, pays médiateurs, dont les détails n'ont pas été divulgués.

"En réponse aux efforts internationaux, notamment à l'initiative du président américain Donald Trump et des médiateurs (...), nous annonçons une trêve humanitaire prévoyant une cessation des hostilités pour trois mois", a déclaré lundi Mohamed Hamdane Daglo, dans une allocution vidéo enregistrée.

Les paramilitaires avaient indiqué début novembre accepter le principe d'une trêve humanitaire proposée par les médiateurs, à laquelle l'armée n'avait pas répondu, et les combats entre les deux camps n'ont pas cessé depuis.

Le chef de l'armée a lui jugé dimanche "inacceptable" la nouvelle proposition de trêve, appelé les citoyens désireux de défendre leur pays à "rejoindre immédiatement les lignes de front" et accusé la médiation de partialité.

Frères musulmans? 

"Encore une fois, le général (Abdel Fattah) al-Burhane refuse les offres de paix. Dans son rejet de la proposition américaine pour le Soudan, dans son refus obstiné d'un cessez-le-feu, il fait sans cesse preuve d'un comportement d'obstruction", a réagi lundi la ministre d'Etat à la coopération internationale des Emirats, Reem al Hashimy.

Le général Burhane a estimé que la dernière proposition envoyée par l'émissaire américain était "la pire", car, selon lui elle "élimine les forces armées, dissout les agences de sécurité et maintient les milices là où elles sont" au lieu de les désarmer.

Il a également rejeté les "récits" selon lesquels les islamistes des Frères musulmans contrôleraient l'armée, accusant M. Boulos de reprendre les éléments de langage des Emirats.

"Où sont ces soi-disant membres des Frères musulmans au sein de l'armée soudanaise? Nous ne les connaissons pas. Nous entendons seulement de telles affirmations dans les médias", a-t-il dit.

Dans son discours diffusé lundi, le chef des FSR a réaffirmé son "engagement en faveur d'un processus politique auquel participent tous les acteurs, à l'exception du mouvement islamiste terroriste des Frères musulmans et du Congrès national (parti désormais interdit du général Omar el-Béchir au pouvoir de 1989 à 2019, NDLR), car ils sont responsables de toute la tragédie que vit notre peuple depuis trois décennies".

Au cours des deux dernières années, les parties belligérantes au Soudan ont violé tous les accords de cessez-le-feu, entraînant l'échec des efforts de négociation.