Un rapport de l'ONU dénonce les horreurs de la vie quotidienne en Iran

Des piétons traversent une rue de Téhéran, en Iran. (Photo AP/Archive)
Des piétons traversent une rue de Téhéran, en Iran. (Photo AP/Archive)
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Publié le Mardi 09 mars 2021

Un rapport de l'ONU dénonce les horreurs de la vie quotidienne en Iran

  • Les femmes et les filles en Iran continuent d'être traitées « en citoyennes de deuxième classe », selon un nouveau rapport de l'ONU
  • Le document révèle que plus de 16 000 filles âgées de 10 à 14 ans se sont mariées en Iran sur une période de six mois l'année dernière

NEW YORK : Les femmes et les filles en Iran continuent d'être considérées comme des «citoyennes de seconde classe», selon un nouveau rapport de l'ONU. Publié le 8 mars, à l’occasion de la Journée internationale de la femme, il raconte en détail l’ampleur des violations des droits de l’homme perpétrées par le régime de Téhéran à l’encontre des membres de nombreux groupes dans le pays.

L’étude, réalisée par l'expert indépendant Javaid Rehman, le rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des droits de l'homme en République islamique d’Iran, révèle que les femmes, les filles, les défenseurs des droits de l’homme, les minorités ethniques, les écrivains, les journalistes et les personnes qui détiennent une double nationalité font partie des individus visés par le régime. Mauvais traitements, tortures, détentions arbitraires, harcèlement, aveux forcés et même peine de mort: voilà le sort qui leur est réservé.

Rehman, qui doit présenter son rapport le 9 mars devant le Conseil des droits de l’homme de l’ONU, déclare que les femmes subissent une discrimination profondément enracinée dans les lois et dans le quotidien. L’expert soulève de graves préoccupations au sujet de la violence domestique et, malgré l'introduction d'une nouvelle loi contre les attaques à l'acide qui ciblent les femmes, il somme le gouvernement iranien de faire plus pour les protéger.

«La violence contre les femmes, les valeurs patriarcales et les comportements misogynes déteignent sur de nombreuses facettes de la vie iranienne, avec des dispositions juridiques discriminatoires qui exacerbent la vulnérabilité des femmes dans les contextes de violence domestique», affirme Rehman.

Mariage des enfants

Son rapport met également l’accent sur la question du mariage des enfants. Le document révèle que plus de 16 000 filles âgées de 10 à 14 ans se sont mariées en Iran sur une période de six mois l'année dernière.

«L'un des problèmes les plus préoccupants en Iran aujourd'hui, en ce qui concerne les droits des femmes et des filles, est la question du mariage des enfants. L'âge légal actuel du mariage est tout simplement inacceptable», explique Rehman.

Selon Human Rights Watch, en Iran, des filles qui ont à peine 13 ans peuvent se marier, avec l’autorisation de leur père. Elles peuvent être encore plus jeunes si elles reçoivent l’autorisation d’un juge.

«Il est clair que le mariage des enfants nuit au développement et au bien-être des filles, particulièrement en termes d'éducation, d'emploi et de vie sans violence», ajoute Rehman.

Les demandes de séjour en Iran du rapporteur ont été refusées. Ce dernier a donc établi son rapport à l’aide de données qu’il a recueillies auprès de sources gouvernementales et non gouvernementales ainsi que dans la presse. Il a également interrogé des personnes victimes de mauvais traitements, leurs familles et leurs avocats.

Attaques contre les femmes

Le document sonne l’alerte au sujet du harcèlement, de l’arrestation et de l’emprisonnement continus des défenseurs des droits des femmes, qu’il s’agisse d’hommes ou de femmes, notamment ceux  d’entre eux qui militent contre les lois sur le port obligatoire du voile.

Certains responsables ont encouragé les attaques contre les femmes qui ne respectent pas ces lois et ont menacé leur sécurité, indique le rapport. L'application des lois sur le voile par la police, la milice Basij et l’intraitable «police des mœurs» entraîne souvent des violences contre les femmes comme des attaques à l'acide et des meurtres.

Le rapport de Rehman précise aussi à quel point la discrimination sexuelle flagrante entache tous les aspects de la loi et de la vie quotidienne en Iran: le mariage, le divorce, l’emploi et la culture. En conséquence, les femmes sont traitées comme des citoyennes de deuxième classe.

Le document somme le gouvernement iranien d’abroger les lois discriminatoires et de ratifier la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. L'Iran est l'un des rares États à ne pas l'avoir signé.

Plus de 7 000 prisonniers détenus dans des infrastructures secrètes

En ce qui concerne le refus du régime iranien d’enquêter sur la répression brutale des forces de l’ordre contre les manifestants lors des manifestations du 19 novembre ou de tenir ses auteurs pour responsables, Rehman présente des preuves qui montrent que des armes à feu ont été utilisées «d'une manière qui constitue une grave violation des droits de l'homme», entraînant la mort de plus de trois cents personnes, dont des femmes et des enfants.

Le rapport indique que, dans les jours qui ont suivi les manifestations, le Corps des gardiens de la révolution islamique a effectué des raids dans des maisons, des hôpitaux, des écoles et des lieux de travail pour arrêter des manifestants, parmi lesquels des enfants, afin d’écraser ce que les responsables iraniens ont qualifié de «complot très dangereux».

Plus de 7 000 prisonniers ont été détenus dans des infrastructures secrètes sans pouvoir recourir à un avocat; nombre d'entre eux ont été placés en isolement, où ils ont été torturés, affamés et contraints de faire de faux aveux.

Des gens qui recherchaient des informations sur le sort de leurs proches ont également été harcelés et emprisonnés. Cibler des proches dans le but de forcer les militants des droits humains à arrêter leur campagne est une pratique souvent observée.

Exécutions secrètes

Au mois de juillet 2020, par exemple, Alireza Alinejad, le frère du militant des droits de l'homme Masih Alinejad, est reconnu coupable de «complot contre la sécurité nationale, en guise de vengeance contre la peine de sa sœur», souligne le rapport. Il est condamné à huit ans de prison.

Rehman appelle à la fin de la culture de l'impunité en Iran. Une culture renforcée par les représailles du gouvernement contre ceux qui soulèvent des allégations de violations des droits de l'homme durant les manifestations.

Le rapporteur spécial se déclare par ailleurs préoccupé par le taux élevé de condamnations à mort en Iran. Il s’inquiète particulièrement de l'exécution de délinquants mineurs, et de cas récents de manifestants condamnés à mort.

Des rapports font état d'exécutions secrètes liées aux manifestations, «après des procès inéquitables et le recours systématique à la torture en vue d’obtenir des aveux forcés». Le 12 septembre de l'année dernière, par exemple, le lutteur Navid Afkari, qui avait participé aux manifestations du mois d’août 2018 à Chiraz, a été exécuté «sans préavis, en violation de la loi iranienne».

Interruptions répétées des télécommunications par les autorités

Le rapport soulève aussi des inquiétudes quant au sort des militants des droits humains détenus, des journalistes, des militants des droits du travail, des détenteurs de deux nationalités, des étrangers, ainsi que des avocats. Il souligne que le régime iranien continue de cibler les personnes qui défendent les libertés de base, notamment Yasaman Aryani, Monireh Arabshahi et Mojgan Keshavarz, emprisonnées pour avoir participé à des manifestations contre le voile obligatoire en 2019, à l'occasion de la Journée internationale de la femme.

Payam Derafshan, qui s'est opposé à un interdit gouvernemental sur l'application de messagerie Telegram, reste derrière les barreaux en attendant que la Cour suprême révise la peine de deux ans et demi de prison qu’il s’est vu infliger.

Par ailleurs, Rehman constate avec inquiétude «les interruptions répétées des télécommunications par les autorités». Telegram, Twitter, Facebook et YouTube sont «définitivement bloqués et inaccessibles, sans possibilité de recourir à des moyens de contournement». Cette action vise à empêcher les manifestants de faire connaître au monde entier les abus du régime iranien.

«Les coupures d'Internet et le blocage des sites Web et des applications constituent une violation du droit à la liberté d'expression», affirme Rehman.

Discrimination à l'encontre des minorités ethniques et religieuses

Selon lui, la discrimination continue à l'encontre des minorités ethniques et religieuses ainsi que la discrimination à caractère sexuel continuent de susciter l'inquiétude. Le rapport contient des détails sur les prisonniers politiques issus de minorités ethniques qui ont été exécutés ou qui ont disparu.

Ainsi, le Kurde Hedayat Abdollahpour a été exécuté pour avoir prétendument pris les armes contre l'État, bien que les preuves de sa condamnation et les aveux obtenus sous la torture fassent défaut.

De plus, l'Iran prend pour cibles les minorités ethniques et religieuses au seul prétexte qu’elles «pratiquent leur culture, leur langue ou leur foi».

Le 15 août dernier, Liza Tebyanian a été arrêtée et incarcérée pour avoir «enseigné le bahaïsme». Bon nombre de derviches de Gonabad sont eux aussi en prison.

Le rapport de Javaid Rehman signale également des cas d'expulsions forcées dans des régions qui abritent des minorités ethniques. Parmi ces exemples, on peut citer le raid lancé sur un village d'Ahwaz, dans la province du Khouzistan: trois cents maisons ont alors été démolies et les forces de sécurité ont tiré des gaz lacrymogènes sur les habitants qui refusaient la confiscation de leurs terres et la démolition de leurs maisons. Cent trente personnes ont été arrêtées alors qu'elles détenaient les preuves de propriété de ces terres.

Ciblage continu des journalistes

Depuis que Rehman a terminé son rapport, d'autres «incidents inquiétants» visant des minorités ont fait surface. Parmi ces derniers, on peut notamment citer l'exécution de plus de vingt prisonniers baloutches, la mort «suspecte» d'un derviche, l'usage excessif de la force contre des manifestants au Sistan et dans la province de Baloutchistan, la détention de cent militants kurdes, ainsi que des raids sur des maisons et des confiscations de terres appartenant à des bahaïs.

Les personnes soupçonnées d’être lesbiennes, homosexuelles, bisexuelles ou transsexuelles sont également victimes de violations des droits de l'homme et de discriminations massives. Les relations sexuelles consensuelles entre des personnes de même sexe peuvent être punies de mort, tandis que des personnes reconnues coupables d’«attouchements» et de «baisers» courent le risque de se faire fouetter. Le rapport indique que «les hauts fonctionnaires emploient des qualificatifs haineux pour désigner les membres de la communauté LGBT, notamment les termes «inférieurs aux humains» et «malades».

M. Rehman s'est dit préoccupé par le ciblage continu des journalistes et des écrivains qui couvrent des sujets tels que la corruption et la pandémie de la Covid-19. Les experts de la santé, qui remettent en question la façon dont le régime gère la crise sanitaire, risquent eux aussi d'être poursuivis ou de se retrouver sans emploi.

Si le rapport soutient que les sanctions internationales ont probablement empêché le gouvernement iranien de faire face à la pandémie, il critique néanmoins la «réponse incertaine et inadéquate du gouvernement au coronavirus, [qui a] entraîné la mort d'un grand nombre de personnes, y compris des membres du personnel médical qui ont été livrés à eux-mêmes sans bénéficier d’équipements de protection appropriés».

Rahman souligne que les détenus ont été abandonnés dans des prisons «surpeuplées et peu hygiéniques». Selon l'Organisation mondiale de la santé, au mois de juin 2020, les prisons publiques en Iran comptaient 211 000 détenus, soit 2,5 fois leur capacité officielle.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Israël frappe à nouveau le sud du Liban, un an après le cessez-le-feu

L'armée israélienne a déclaré avoir mené jeudi une série de frappes contre le Hezbollah dans le sud du Liban, la dernière en date malgré le cessez-le-feu conclu il y a un an avec le groupe militant. (X/@fadwa_aliahmad)
L'armée israélienne a déclaré avoir mené jeudi une série de frappes contre le Hezbollah dans le sud du Liban, la dernière en date malgré le cessez-le-feu conclu il y a un an avec le groupe militant. (X/@fadwa_aliahmad)
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  • L’armée israélienne a mené de nouvelles frappes dans le sud du Liban, ciblant des infrastructures et des sites d’armes du Hezbollah, malgré un cessez-le-feu en vigueur depuis un an
  • Le gouvernement libanais est accusé par Israël et les États-Unis de tarder à démanteler la présence militaire du Hezbollah dans la zone frontalière, tandis que Beyrouth dément toute faute et rejette les accusations israéliennes

JERUSALEM: L'armée israélienne a annoncé jeudi avoir mené de nouvelles frappes contre le Hezbollah dans le sud du Liban, au moment où elle intensifie ses attaques sur le territoire libanais malgré un cessez-le-feu avec le mouvement pro-iranien qu'elle accuse de chercher à se réarmer.

"Il y a peu, l'armée israélienne a frappé et démantelé des infrastructures terroristes du Hezbollah dans plusieurs zones dans le sud du Liban", écrit l'armée dans un communiqué.

"Dans le cadre de ces frappes, l'armée a visé plusieurs sites de lancement où des armes du Hezbollah étaient stockées", ajoute le communiqué, qui précise que les frappes ont également touché des "postes militaires utilisés par des membres du Hezbollah pour mener des attaques terroristes".

L'agence de presse d'Etat libanaise ANI a annoncé une série de "raids aériens israéliens sur Al-Mahmoudiya et Al-Jarmak dans la région de Jezzine."

En vertu de l'accord de cessez-le-feu, signé il y a un an jour pour jour, l'armée libanaise doit démanteler la présence militaire du Hezbollah sur une bande d'une trentaine de kilomètres entre la frontière avec Israël et le fleuve Litani, plus au nord.

L'armée a soumis un plan au gouvernement, dans lequel elle s'engage à accomplir cette tâche titanesque, avant de procéder par étapes sur le reste du territoire libanais. Mais les Etats-Unis et Israël accusent les autorités libanaises de tarder, face à la ferme opposition du Hezbollah.

Mercredi, le ministre israélien de la Défense Israël Katz avait averti qu'il n'y aura "pas de calme" au Liban sans sécurité pour son pays.

"Nous ne permettrons aucune menace contre les habitants du nord, et une pression maximale continuera à être exercée et même s'intensifiera", a déclaré M. Katz lors d'une intervention devant le parlement israélien, avançant pour preuve "l'élimination" dimanche à Beyrouth du chef militaire du Hezbollah.

La Présidence libanaise a publié mercredi une déclaration du président Joseph Aoun qui "a rejeté les allégations israéliennes qui portent atteinte au rôle de l'armée et remettent en question son travail sur le terrain, notant que ces allégations ne reposent sur aucune preuve tangible."


Un an après le cessez-le-feu au Liban, la paix reste fragile alors que les violations israéliennes se multiplient

Cette frappe est la cinquième opération israélienne visant la banlieue sud depuis le 27 novembre 2024, et la deuxième à avoir lieu sans avertissement préalable. (Photo d'archive: AFP)
Cette frappe est la cinquième opération israélienne visant la banlieue sud depuis le 27 novembre 2024, et la deuxième à avoir lieu sans avertissement préalable. (Photo d'archive: AFP)
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  • Le cessez-le-feu demeure extrêmement fragile : plus de 5 000 violations israéliennes, une frappe majeure à Beyrouth et un risque réel d’escalade malgré les appels internationaux à la retenue
  • Le Sud-Liban vit une crise humanitaire profonde, avec des villages détruits, jusqu’à 70 000 déplacés et une population abandonnée entre l’État libanais et le Hezbollah

BEYROUTH : Alors que le cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah s'apprête à entrer dans sa deuxième année vendredi, les signaux d'alarme retentissent plus fort que jamais quant au risque d’une reprise du conflit au Liban.

L’assassinat dimanche dernier de Haytham Ali Tabatabai, chef militaire du Hezbollah et deuxième figure la plus puissante du mouvement après le secrétaire général Naim Qassem, lors d’une attaque audacieuse dans la banlieue sud de Beyrouth, a brisé les espoirs d’une stabilité durable.

La réponse du Hezbollah — qu’elle prenne la forme d’une action militaire ou d’un simple blâme diplomatique, comme certains cadres l’ont laissé entendre — pourrait déterminer si le cessez-le-feu survivra.

Cette frappe représente la cinquième opération israélienne visant la banlieue sud depuis le 27 novembre 2024, et la deuxième menée sans avertissement préalable.

Les registres officiels font état de 5 350 violations israéliennes du cessez-le-feu en douze mois. Ces violations ont coûté la vie à plus de 340 personnes — principalement des combattants et commandants du Hezbollah, mais aussi des civils, dont des enfants et des femmes — et ont blessé plus de 650 autres.

Dans une escalade notable, les forces israéliennes ont frappé pour la première fois Aïn Al-Héloué, un camp de réfugiés palestiniens.

Les violations répertoriées comprennent 2 198 incursions terrestres, 2 983 opérations aériennes et 169 violations maritimes.

Les forces de maintien de la paix de l’ONU dressent un tableau encore plus sombre, rapportant plus de 7 500 violations aériennes et environ 2 500 violations terrestres au nord de la Ligne bleue depuis l’accord de l’an dernier, ainsi que la découverte et la saisie de plus de 360 caches d’armes abandonnées, remises à l’armée libanaise.

La stratégie d’Israël s’apparente à une campagne d’usure progressive contre le Hezbollah, visant à réduire systématiquement ses capacités tandis que l’armée libanaise s’emploie à désarmer le groupe au sud du fleuve Litani.

L’armée affirme avoir rempli plus de 80 % de ce mandat, avec une échéance fixée à la fin de l’année avant que les opérations ne s’étendent vers le nord — une zone dans laquelle le Hezbollah refuse catégoriquement de rendre ses armes, estimant que la décision revient aux dirigeants politiques libanais.

Le conflit lui-même a porté de lourds coups au Hezbollah, décimant ses rangs et infligeant des pertes catastrophiques à ses stocks d’armement. Mais le plus inquiétant est peut-être l’empiètement physique d’Israël sur le territoire libanais.

Les observateurs de l’ONU ont documenté la construction par l’armée israélienne de murs en T en béton près de la Ligne bleue. Des relevés confirment que ces barrières s’enfoncent dans le territoire libanais au sud-ouest de Yaroun, isolant plus de 4 000 m² de terres libanaises. Des constructions similaires sont apparues au sud-est de la même ville ces dernières semaines.

Plus largement, les forces israéliennes contrôlent cinq positions réparties sur 135 km de territoire libanais — des Fermes de Chebaa à Ras Al-Naqoura — situées 500 à 1 000 mètres au-delà de la Ligne bleue.

L’ONU a exigé des enquêtes rapides et impartiales sur les opérations militaires israéliennes, en particulier la frappe contre le camp de réfugiés palestiniens, évoquant des violations potentielles du droit international humanitaire et appelant à la reddition de comptes.

Vingt ressortissants libanais croupissent dans les prisons israéliennes, principalement à Ofer, parmi lesquels dix membres du Hezbollah capturés lors de combats près d’Aïta Al-Chaab, un officier de marine enlevé lors d’un raid commando, et neuf civils. Leurs familles n’ont reçu aucune information officielle du Comité international de la Croix-Rouge sur leurs conditions ou leur état de santé.

Une source officielle libanaise a estimé que « la libération des détenus fait partie des termes de l’accord de cessez-le-feu, tout comme le retrait des territoires occupés, et le Liban ne détient aucun prisonnier israélien en échange. »

La politique de la terre brûlée menée par Israël dans les villages frontaliers s’est poursuivie, les attaques visant toute tentative de reconstruction. La Banque mondiale estime le coût des travaux à environ 11 milliards de dollars.

« Entre 10 et 15 villages ont été complètement rayés de la carte », affirme Tarek Mazraani, ingénieur à Houla et coordinateur du « Rassemblement des villages frontaliers du Sud ».

Mazraani estime que 65 000 à 70 000 personnes restent déplacées de leurs maisons et de leurs villages détruits.

« Ceux qui sont revenus sont ceux qui ne peuvent littéralement aller nulle part ailleurs, principalement des personnes âgées vivant au milieu des décombres, exposées quotidiennement à l’horreur des bombardements et aux couvre-feux, sans aucun hôpital pour les soigner », a-t-il déclaré à Arab News.

Toute personne souhaitant enterrer un proche doit obtenir l’autorisation de la FINUL, qui informe ensuite Israël pour permettre l’inhumation.

« Malgré cela, l’armée israélienne bombarde à chaque fois les abords du cortège funéraire », ajoute Mazraani.

Il précise que les déplacés ont loué des logements à Nabatiyé, Tyr, Saïda, Iqlim Al-Kharroub, dans la banlieue sud de Beyrouth et au Mont-Liban. La plupart sont agriculteurs, mais on compte aussi des enseignants, des ingénieurs, des travailleurs indépendants et des membres des forces de sécurité.

« Depuis la fin de la guerre, ces gens sont laissés sans aucun soutien officiel ou partisan. L’un des habitants les plus riches de la région, qui a tout perdu, travaille désormais comme livreur », dit-il.

Les personnes déplacées sont prises entre l'État parallèle du Hezbollah et l'État libanais : « Tout le monde exploite leur tragédie, même au sein de notre propre communauté du sud. Les loyers sont extrêmement élevés et nous ne nous sentons jamais chez nous. »

L’un d’eux, qui souhaite rester anonyme, explique : « Ceux qui ne sont affiliés à aucun parti sont loin de la politique. Notre seule préoccupation est d’assurer notre subsistance et une couverture financière en cas d’hospitalisation. Nous nous sentons orphelins et abandonnés, surtout quand une institution du Hezbollah nous dit qu’elle n’a plus d’argent. »

Il ajoute : « Les habitants des zones détruites paient le prix fort. Certains en veulent au Hezbollah pour la guerre et les milliers de morts qu’elle a entraînés, tandis que d’autres craignent que l’autre camp se réjouisse de notre malheur sans jamais nous rassurer. »

Les attentes libanaises face aux menaces israéliennes de relancer la guerre — sapant l’accord de cessez-le-feu négocié par la France et les États-Unis et dont les termes ressemblent fortement aux points principaux de la résolution 1701 — restent contradictoires.

Certains observateurs politiques jugent ces menaces « exagérées », tandis que d’autres estiment qu’« une frappe est inévitable mais n’aboutira pas à une guerre totale ; elle vise à pousser le Liban à négocier ».

Plus tôt ce mois-ci, le président libanais Joseph Aoun a déclaré : « Le Liban n’a pas d’autre choix que de négocier, et le langage de la négociation est plus important que celui de la guerre. »

Le Premier ministre Nawaf Salam l’a confirmé, exprimant son espoir d’un « soutien américain à une solution diplomatique ».

Pour l’heure, cependant, des négociations directes entre le Liban et Israël restent totalement exclues.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Israël: le ministre de la Défense avertit qu'il n'y aura "pas de calme" au Liban sans sécurité pour son pays

Un an après le cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah, l'armée israélienne maintient toujours cinq positions dans le sud du Liban, avec des fortifications et des voies d'accès élargies, selon des images satellites analysées par l'AFP. (AFP)
Un an après le cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah, l'armée israélienne maintient toujours cinq positions dans le sud du Liban, avec des fortifications et des voies d'accès élargies, selon des images satellites analysées par l'AFP. (AFP)
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  • Israël avertit qu’aucun calme ne reviendra au Liban tant que sa propre sécurité ne sera pas garantie, intensifiant ses frappes malgré la trêve et affirmant vouloir désarmer le Hezbollah
  • L’Égypte tente de désamorcer les tensions, tandis que l’application du cessez-le-feu reste bloquée : l’armée libanaise dit vouloir démanteler les positions du Hezbollah, mais Israël et les États-Unis accusent Beyrouth de traîner

JERUSALEM: Le ministre de la Défense israélien a averti mercredi qu'il n'y aura "pas de calme" au Liban sans sécurité pour son pays, alors qu'Israël a intensifié ses opérations militaires au Liban ces dernières semaines, en dépit d'un accord de cessez-le-feu.

"Nous ne permettrons aucune menace contre les habitants du nord, et une pression maximale continuera à être exercée et même s'intensifiera", a déclaré Israël Katz lors d'une intervention devant le parlement israélien, avançant pour preuve "l'élimination" dimanche à Beyrouth du chef militaire du Hezbollah.

"Il n'y aura pas de calme à Beyrouth ni d'ordre et de stabilité au Liban tant que la sécurité de l'Etat d'Israël ne sera pas garantie", a ajouté M. Katz en affirmant que son pays allait désarmer le Hezbollah.

Le ministre égyptien des Affaires étrangères a déclaré mercredi que son pays oeuvrait à la désescalade des tensions entre Israël et le mouvement armé libanais soutenu par l'Iran.

"Nous craignons toute escalade et nous sommes inquiets pour la sécurité et la stabilité du Liban", a déclaré ce ministre, Badr Abdel Ati, après sa rencontre avec le président libanais Joseph Aoun à Beyrouth mercredi.

"Nous engageons des efforts considérables pour épargner au Liban tout risque, ou toute atteinte, concernant sa sécurité", a-t-il ajouté.

Israël a frappé le Liban à plusieurs reprises malgré la trêve, affirmant régulièrement cibler les membres et les infrastructures du Hezbollah pour empêcher le groupe de se réarmer, ce qu'il nie être en train de faire.

En vertu de l'accord de cessez-le-feu, l'armée libanaise doit démanteler la présence militaire du Hezbollah sur une bande d'une trentaine de kilomètres entre la frontière avec Israël et le fleuve Litani, plus au nord.

L'armée a soumis un plan au gouvernement, dans lequel elle s'engage à accomplir cette tâche titanesque, avant de procéder par étapes sur le reste du territoire libanais. Mais les Etats-Unis et Israël accusent les autorités libanaises de tarder, face à la ferme opposition du Hezbollah.

Ce dernier invoque notamment le maintien par Israël de cinq postes dans le sud du Liban, dont l'accord de cessez-le-feu stipule pourtant que l'armée israélienne doit se retirer.