Dans la ville très pauvre de Grigny, le "tsunami social" du Covid

dans cette photo d'archive prise le 2 septembre 2016, un piéton traverse une passerelle dans le quartier Grigny 2 près de la gare centrale de Grigny, au sud de Paris. PATRICK KOVARIK / AFP
dans cette photo d'archive prise le 2 septembre 2016, un piéton traverse une passerelle dans le quartier Grigny 2 près de la gare centrale de Grigny, au sud de Paris. PATRICK KOVARIK / AFP
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Publié le Jeudi 11 mars 2021

Dans la ville très pauvre de Grigny, le "tsunami social" du Covid

  • La crise a été "un accélérateur de pauvreté", notamment dans cette immense copropriété devenue une "bombe à retardement"
  • "Nous constatons entre mars et décembre 2020 que les impayés de charges, d'eau et de chauffage, ont quasiment doublé"

GRIGNY, FRANCE : A Grigny, Zineb, Danielle et même le septuagénaire Benjamina ne demandent qu'une chose: travailler. Retrouver une activité après le "tremblement de terre" du Covid-19 qui a ébranlé leurs vies déjà fragiles dans la ville la plus pauvre de France métropolitaine.

A 77 ans, Benjamina Rajoharison habite à Grigny 2, quartier emblématique de la petite ville de banlieue parisienne. Avec ses 5.000 logements, c'est l'une des plus grandes copropriétés d'Europe mais aussi l'une des plus dégradées de France.

Ici, des portes d'entrée fracassées, là des amas de déchets. Le studio de Benjamina, au contraire, est soigné.

Il donne comme l'impression d'un îlot, perché au 10e étage d'une tour, avec des peintures de fleurs décorant son intérieur. Mais un îlot devenu lourd à assumer financièrement, avec la crise du Covid-19.

Depuis le premier confinement, Benjamina regrette de n'avoir "pas pu chercher un travail". Aujourd'hui, sa femme et lui vivotent grâce à une aide sociale, le RSA: avec un loyer à 580 euros, il ne leur reste que "300 euros pour joindre les deux bouts" chaque mois. "C'est rien du tout", dit à l'AFP Benjamina, qui espère vite sortir "du statu quo" des restrictions sanitaires pour trouver des "petits travaux manuels" et "améliorer le quotidien" de son foyer.

La crise a été "un accélérateur de pauvreté", notamment dans cette immense copropriété devenue une "bombe à retardement", selon Philippe Rio le maire communiste de la ville d'environ 30.000 habitants, située à 30 km au sud de Paris.

"J'oublie les problèmes"

"Nous constatons entre mars et décembre 2020 que les impayés de charges, d'eau et de chauffage, ont quasiment doublé", a-t-il expliqué en février à l'AFP, alertant: "Si on n'arrive pas à payer l'eau et le chauffage, on ne paie plus l'entretien et on ne paie plus les travaux d'urgence".

A quelques rues de Grigny 2, une quarantaine de personnes patientent devant l'antenne d'une association délivrant une aide alimentaire, les Restos du coeur, où le nombre d'inscrits augmente depuis le "tsunami social" du premier confinement, selon l'expression du maire (+11% sur un an l'été dernier, +14% cet hiver).

Parmi les nouveaux bénéficiaires, Danielle, 21 ans, est venue chercher des couches et du lait pour sa fille.

"Avant le coronavirus, je travaillais un peu, mon compagnon aussi, mais depuis la première vague du corona, le travail on n'y arrive plus", témoigne cette Ivoirienne sans papiers qui faisait des ménages non déclarés mais n'est plus sollicitée par ses anciens employeurs.

Même constat pour Naïma, salariée. Mère de famille franco-marocaine de 37 ans, inscrite depuis quelques années aux Restos, elle a vu ses conditions de vie se dégrader depuis la perte de ses contrats d'intérimaire.

"Avec le Covid, tout s'est arrêté. Ca a eu un impact sur ma vie personnelle, je me suis déprimée", raconte-t-elle.

"Crise durable"

Zineb, Marocaine sans papiers au tempérament de battante, s'alarme: avec la fin de la campagne d'hiver des Restos à la mi-mars, "c'est là que ça va être très difficile", juge la trentenaire.

Car, aux Restos, Zineb fait le plein de provisions mais aussi de chaleur humaine, en pleines restrictions sanitaires. "Quand je pose mon pied aux Restos du coeur, j'oublie les problèmes. Ici, je suis une femme forte, je vis la belle vie !".

La "belle vie" comparée à la chambre d'hôtel, visitée par l'AFP, qu'elle habite avec ses deux enfants: une pièce sombre, peu aérée, d'une douzaine de mètres carrés où s'entassent un frigo, un lit superposé, un bureau, un petit canapé-lit et de la vaisselle dans la douche.

Déjà en 2017, 45% de la population de Grigny vivait sous le seuil de pauvreté. La mairie ne disposait pas de chiffres actualisés fin février. Mais elle alertait déjà sur un bond, depuis mars 2020, des nouveaux inscrits aux aides sociales.

"Un an après le tremblement de terre du premier confinement, nous avons la certitude que la crise sera durable", souligne le maire, l'aide alimentaire étant encore aujourd'hui "une question de survie" alors que l'un des enjeux majeurs est la reprise "du travail et du travail durable".

M. Rio appartient au collectif d'élus qui a lancé un "appel au secours" au gouvernement fin 2020. Depuis, le Premier ministre Jean Castex a promis de consacrer 1% du plan de relance aux "quartiers prioritaires", des zones reconnues comme socialement défavorisées.

De son côté, Grigny travaille sur des mesures pour lutter contre la pauvreté, comme la mise en place progressive de la distribution de petits-déjeuners dans toutes les maternelles de la ville à compter du 22 mars.


Rassemblement à Paris en mémoire d'Aboubakar Cissé et contre l'islamophobie

"Le racisme tue, non à la haine contre les musulmans", a-t-on pu lire sur des pancartes tenues par des manifestants réunis à l'appel de SOS Racisme et de la militante associative Assa Traoré. (AFP)
"Le racisme tue, non à la haine contre les musulmans", a-t-on pu lire sur des pancartes tenues par des manifestants réunis à l'appel de SOS Racisme et de la militante associative Assa Traoré. (AFP)
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  • "Je n'ai pas l'impression que l'on (les musulmans) soit entendu et représenté dans les médias ou au gouvernement. Si cela avait été une victime d'une autre religion, d'un autre nom et d'une autre culture nous, nous aurions été au soutien. Il existe un deu
  • Un juge d'instruction du pôle criminel de Nîmes a été saisi et une information judiciaire ouverte pour meurtre avec préméditation et à raison de la race ou de la religion

PARIS: Au moins un millier de personnes se sont rassemblées à Paris pour rendre hommage à Aboubakar Cissé, un musulman tué la semaine dernière dans une mosquée du Gard, et dénoncer l'"islamophobie", a constaté une journaliste de l'AFP.

"Le racisme tue, non à la haine contre les musulmans", a-t-on pu lire sur des pancartes tenues par des manifestants réunis à l'appel de SOS Racisme et de la militante associative Assa Traoré.

"Je n'ai pas l'impression que l'on (les musulmans) soit entendu et représenté dans les médias ou au gouvernement. Si cela avait été une victime d'une autre religion, d'un autre nom et d'une autre culture nous, nous aurions été au soutien. Il existe un deux poids deux mesures", commente Yasmina, 52 ans, fonctionnaire, qui n'a pas souhaité donner son nom de famille.

"On arrive encore à dire que ce n'était pas un musulman qui était visé mais on ne va pas se mentir il n'y a que les musulmans en France qui fréquentent les mosquées. À un moment il faut poser les mots comme on le fait à juste titre contre l'antisémitisme, et appeler ça de l'islamophobie", a souligné Myriam, 30 ans, assistante dentaire, qui n'a pas souhaité non plus donner son nom.

Aboubakar Cissé, un jeune Malien, a été lardé de plusieurs dizaines de coups de couteau dans la mosquée de la petite commune gardoise de La Grand-Combe, où il était venu tôt comme chaque semaine pour faire le ménage, avant la prière du vendredi.

Son assassin, un Français d'origine bosnienne de 21 ans, s'est rendu à la police italienne.

Dans la vidéo qu'il avait lui-même réalisée juste après son meurtre, le suspect a insulté la religion de sa victime.

Un juge d'instruction du pôle criminel de Nîmes a été saisi et une information judiciaire ouverte pour meurtre avec préméditation et à raison de la race ou de la religion.

Outre une marche blanche à La Grand-Combe, un rassemblement en mémoire de la victime et contre l'islamophobie a déjà été organisé dimanche à Paris et une manifestation s'est déroulée mardi à Lyon.


Un 1er-Mai syndical qui se veut «festif et combatif», mais sans unité large

Pour les salaires, pour l'abrogation de la réforme des retraites, ou encore "contre la trumpisation du monde" : les organisations syndicales appellent à battre le pavé jeudi pour le 1er-Mai, mais la mobilisation se tient sans unité large. (AFP)
Pour les salaires, pour l'abrogation de la réforme des retraites, ou encore "contre la trumpisation du monde" : les organisations syndicales appellent à battre le pavé jeudi pour le 1er-Mai, mais la mobilisation se tient sans unité large. (AFP)
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  • A Paris, la manifestation doit partir à 14H00 de la place d'Italie vers la place de la Nation
  • Si - comme l'an dernier - l'intersyndicale ne sera pas unie pour l'occasion, le numéro un de FO Frédéric Souillot défilera aux côtés de ses homologues, dont la cheffe de file de la CGT Sophie Binet, dans le cortège parisien

PARIS: Pour les salaires, pour l'abrogation de la réforme des retraites, ou encore "contre la trumpisation du monde" : les organisations syndicales appellent à battre le pavé jeudi pour le 1er-Mai, mais la mobilisation se tient sans unité large.

Pour la journée internationale des travailleurs, la CGT a recensé quelque 260 rassemblements en France. La centrale de Montreuil a appelé avec la FSU, Solidaires et des organisations de jeunesse (Union étudiante, Unef, Fage, USL) à défiler "contre l'extrême droite, pour la paix, les libertés et la justice sociale".

Si - comme l'an dernier - l'intersyndicale ne sera pas unie pour l'occasion, le numéro un de FO Frédéric Souillot défilera aux côtés de ses homologues, dont la cheffe de file de la CGT Sophie Binet, dans le cortège parisien.

A Paris, la manifestation doit partir à 14H00 de la place d'Italie vers la place de la Nation.

D'autres cortèges s'élanceront dès le matin, comme Marseille et Lille à 10h30. Ce sera aussi le cas dès 10 heures à Bordeaux, Strasbourg ou Dunkerque, où des responsables de gauche, comme Marine Tondelier (Ecologistes), François Ruffin (ex-LFI) ou Boris Vallaud (PS) sont attendus pour protester contre le plan du sidérurgiste ArcelorMittal prévoyant la suppression d'environ 600 postes.

La numéro un de la CFDT Marylise Léon et son homologue de l'Unsa Laurent Escure se retrouvent, eux, dans la matinée dans le centre de Paris pour un rassemblement et une table ronde sur le travail.

Cent jours après l'arrivée de Donald Trump au pouvoir, la CGT, la FSU et Solidaires veulent aussi faire de cette journée un temps fort "contre la trumpisation du monde et l'internationale réactionnaire qui se développe partout", a expliqué à l'AFP Thomas Vacheron, cadre de la CGT.

Des syndicats internationaux (américain, belge, argentin, notamment) ont été conviés au défilé parisien. "Cette démarche unitaire et internationale est un petit pas" pour lutter contre des politiques qui menacent les travailleurs (hausse des droits de douane ou expulsions massives des travailleurs clandestins), selon Murielle Guilbert (Solidaires).

"Le sang et les larmes"

Cette année encore, de source policière, la présence de militants de l'ultra-gauche est jugée très probable à Paris, Nantes ou Lyon, entre autres.

De même source, dans la capitale où un peu plus de 2.000 membres des forces de l'ordre sont attendus, la décision du gouvernement de dissoudre le groupe antifasciste "La Jeune garde" et le collectif "Urgence Palestine" pourrait tendre le climat.

"On ne tolèrera rien", a averti mercredi le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau.

"Il faut relativiser" cette présence de "black blocs" face aux "centaines de milliers de manifestantes et de manifestants" attendues, a nuancé Sophie Binet mercredi, dénonçant des "stratégies malheureusement classiques (...) pour décrédibiliser la mobilisation sociale".

En 2023, les huit principaux syndicats (CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC, Unsa, Solidaires, FSU) avaient défilé ensemble contre la réforme des retraites, du jamais vu depuis près de 15 ans, avec une très forte mobilisation à la clé (entre 800.000, selon les autorités et 2,3 millions, selon la CGT).

L'an dernier, les chiffres étaient revenus dans des fourchettes plus ordinaires: entre 121.000 personnes, selon les autorités, et 210.000, selon la CGT; et jeudi, la mobilisation devrait attirer sensiblement le même nombre de manifestants (100.000 à 150.000 de source policière).

Ce rendez-vous traditionnel se tient au moment où les syndicats craignent que le gouvernement apporte son soutien à des propositions de loi visant à autoriser certaines professions à faire travailler les salariés le 1er-Mai - seul jour férié et chômé en France -, une journée acquise "dans le sang et dans les larmes des ouvriers", rappelle Sophie Binet.

Le syndicat des "Gilets jaunes" a par ailleurs appelé ses sympathisants à mener une opération secrète sur différents points de rassemblement. "On va montrer aux partenaires du pouvoir ce qu’est un VRAI syndicat", ont-ils écrit dans un appel posté sur le réseau social X.


Macron et von der Leyen inciteront lundi les chercheurs étrangers à choisir l'Europe

Le président français Emmanuel Macron accueille la présidente de la Commission européenne Ursula Von der Leyen à son arrivée au sommet de la « coalition des volontaires » au palais de l'Élysée, à Paris, le 27 mars 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
Le président français Emmanuel Macron accueille la présidente de la Commission européenne Ursula Von der Leyen à son arrivée au sommet de la « coalition des volontaires » au palais de l'Élysée, à Paris, le 27 mars 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
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  • Le président français clôturera cette conférence dans la prestigieuse université de la Sorbonne, « dédiée à la science, à l'attractivité de l'Union européenne, mais aussi plus largement à l'innovation, à la recherche et aux libertés académiques »
  • « Ici, en France, la recherche est une priorité, l’innovation est une culture et la science est un horizon sans limite », avait-il assuré.

PARIS : À Paris, le président Emmanuel Macron et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen participeront lundi à une conférence pour vanter les mérites de l'Europe auprès des chercheurs étrangers, notamment américains, confrontés à « un certain nombre de menaces », a annoncé l'Élysée mercredi.

Le président français clôturera cette conférence dans la prestigieuse université de la Sorbonne, « dédiée à la science, à l'attractivité de l'Union européenne, mais aussi plus largement à l'innovation, à la recherche et aux libertés académiques », ont affirmé ses services à la presse.

Le message de cette rencontre sera « très clair » : « Choose Science, Choose Europe ».

Selon son entourage, il s'agit de dire, « dans un moment où les libertés académiques connaissent un certain nombre de reculs ou de menaces, que l'Europe est un continent attractif et que l'innovation, l'attractivité, la science et la recherche sont des éléments essentiels pour la croissance européenne ».

Le chef de l'État aura à cette occasion un entretien avec la présidente de la Commission européenne, qui participera à la conférence. 

Le 18 avril, Emmanuel Macron avait donné rendez-vous le 5 mai aux chercheurs « du monde entier ». Sur le réseau X, il les avait invités à « choisir la France et l'Europe », dans une tentative d'attirer les chercheurs américains menacés par la politique de Donald Trump.

« Ici, en France, la recherche est une priorité, l’innovation est une culture et la science est un horizon sans limite », avait-il assuré.

Parallèlement, le gouvernement a lancé une plateforme baptisée « Choose France for Science », présentée comme « une première étape pour préparer l'accueil des chercheurs internationaux ».

Depuis le retour de Donald Trump à la Maison Blanche en janvier, chercheurs et universités sont dans le collimateur de son gouvernement et redoutent pour leur avenir, entre libertés académiques et de recherche menacées et financements réduits.

De plus en plus de chercheurs ou d'aspirants chercheurs réfléchissent donc à quitter le pays, considéré jusqu'ici comme le paradis de la recherche dans nombre de domaines.

En France, dès début mars, le ministre chargé de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Philippe Baptiste, a demandé aux universités de réfléchir à des moyens de les accueillir.