Le verdict dans le procès de Hariri étaye la responsabilité du Hezbollah

L’assassinat de Rafic Hariri le 14 février 2005 a été un événement sismique dans l’histoire de la région
L’assassinat de Rafic Hariri le 14 février 2005 a été un événement sismique dans l’histoire de la région
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Publié le Mercredi 19 août 2020

Le verdict dans le procès de Hariri étaye la responsabilité du Hezbollah

  • L’assassinat de Rafic Hariri le 14 février 2005 a été un événement sismique dans l’histoire de la région
  • De nombreux partisans sont probablement déçus par l’incapacité du tribunal à fournir des réponses aux questions clés

DUBAÏ : Le verdict survient à un moment difficile, même selon les normes libanaises, à peine deux semaines après une explosion qui a détruit ou endommagé près de la moitié de la capitale, Beyrouth. L'indignation publique a forcé le gouvernement à démissionner, laissant le pays sans pilote face à une crise économique et financière de plus en plus importante aggravée par la pandémie de coronavirus.

Néanmoins, plus de quinze ans après l’assassinat de l'ancien Premier ministre Rafic Hariri, le jour de la Saint-Valentin en 2005, la justice a finalement prévalu avec un tribunal soutenu par l'ONU. Le tribunal a déclaré coupable un membre du Hezbollah libanais aligné sur l'Iran en tant que coauteur des cinq chefs d'accusation retenus pour l'attentat meurtrier.

Les quatre suspects – les membres du Hezbollah Salim Jamil Ayyash, âgé de 56 ans ; Assad Hassan Sabra, âgé de 43 ans ; Hussein Hassan Oneissi, âgé de 46 ans ; et Hassan Habib Merhi, âgé de 54 ans – avaient été jugés le 16 janvier 2014 devant la chambre de première instance du Tribunal spécial pour le Liban (TSL). Jugé par contumace, Ayyash a été condamné mardi par le TSL tandis que les trois autres ont été acquittés. La peine sera prononcée ultérieurement.

L'attaque a eu lieu en 2005, cinq mois après que le Conseil de sécurité de l'ONU a adopté la résolution 1559 en 2004, appelant au retrait des forces syriennes du Liban et au désarmement du Hezbollah.

L’assassinat de Rafic Hariri, qui avait des liens étroits avec l’Occident et les États arabes du Golfe, a été un événement sismique dans l’histoire de la région, et les soupçons se sont immédiatement portés sur la Syrie, qui, à l’époque, dominait le Liban, et le Hezbollah.

Seul le temps nous dira si la décision et le dossier d’instruction de 2 600 pages ont clôturé le chapitre sur l'une des périodes les plus douloureuses de l'histoire récente du Liban. De nombreux admirateurs de Rafic Hariri seront déçus par l’incapacité du TSL à fournir des réponses aux questions clés, notamment sur les motifs de l’assassinat et l’identité de la personne qui se trouvait dans le camion rempli d’explosifs qui a foncé sur le cortège du Premier ministre.

 

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Un cinquième homme, Mustafa Amin Badr al-Din, a été rayé de l'acte d'accusation après avoir été tué en Syrie en 2016. Les procureurs avaient décrit Badr al-Din, alors commandant de la branche militaire du Hezbollah, comme « le cerveau de l'opération ».

« Malheureusement, le TSL déçoit le peuple libanais depuis quinze ans. De nombreuses personnes ont été assassinées et le tribunal a eu de nombreuses occasions d'intervenir et d'empêcher de nouveaux meurtres, mais il n'a pas fait ce qu'il était tenu de faire », a déclaré à Arab News depuis Beyrouth, Chibli Mallat, avocat international et professeur de droit.

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Chibli Mallat, avocat international et professeur de droit. 

« En tant que criminaliste et ami de tant de familles de victimes, j’appelle à la remise immédiate par le Hezbollah de M. Ayyash, a-t-il déclaré. Si cela ne se produit pas, j’exhorte l’appareil judiciaire libanais à rechercher et à arrêter M. Ayyash et à le livrer au tribunal. »

« Enfin, en raison de l’incapacité du tribunal à remplir la mission qui lui a été confiée, j’invite les familles des victimes à faire appel notamment sur la grave erreur de droit dans le jugement prononcé au tribunal. »

Le juge président David Re a déclaré que, alors que les dirigeants du Hezbollah ou du gouvernement syrien auraient pu avoir des raisons d'éliminer Hariri et ses alliés politiques, le TSL n’avait trouvé aucune preuve de leur implication dans l'attaque de 2005. Mallat soutient qu'il n'y a de telle séparation en droit pénal « nulle part dans le monde ».

« Monsieur Re et le tribunal utilisent un mauvais argument pour expliquer pourquoi la direction du Hezbollah et le gouvernement syrien n'ont peut-être pas joué un rôle dans l'assassinat », a-t-il déclaré à Arab News.

« Ainsi, le verdict actuel sert maintenant les deux camps », a déclaré à Arab News Heiko Wimmen, directeur de projet pour l'Irak, le Liban et la Syrie à l'International Crisis Group, dans une réaction écrite.

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Heiko Wimmen, directeur de projet pour l'Irak, le Liban et la Syrie à l'International Crisis Group. 

Ceux qui sont contre le Hezbollah « peuvent souligner le fait que la personne qui a été condamnée est toujours un membre du Hezbollah qui n'aurait pas pu agir seul, même si les preuves n'étaient pas suffisantes pour condamner les autres », a-t-il dit.

D'un autre côté, « les partisans du Hezbollah peuvent dire qu'après plus de dix ans et malgré les efforts incessants des services de renseignement occidentaux et israéliens, ce tribunal a à peine réussi à rassembler suffisamment de preuves “erronées” pour condamner l'un de ses membres, ce qui suggère qu'en réalité l'ensemble de l'histoire a été créée de toute pièce. »

Considérant l'avenir, Wimmen a déclaré : « Je ne m'attendrais pas à ce que le Hezbollah considère l'acquittement des trois autres accusés comme la preuve d'un procès équitable, ou le verdict pour évoluer et accepter l’ouverture d’une enquête internationale sur les explosions du 4 août à Beyrouth. »

« Nous n’aurons de repos tant que la punition ne sera pas appliquée », a déclaré Saad Hariri, fils de Rafic Hariri.

Saad, qui après l’assassinat de son père a également exercé les fonctions de Premier ministre libanais, a déclaré qu’il acceptait le jugement du TSL, ajoutant qu’il était évident que le Hezbollah était responsable.

« Le Hezbollah est celui qui devrait faire des sacrifices aujourd'hui, a-t-il déclaré après avoir assisté à la session du TSL. « Il est clair que le réseau responsable provient de ses rangs. »

Saad s'attendait à ce que plus d'informations émergent du procès. « Je pense que les attentes de tous étaient bien plus élevées, mais je crois que, globalement, les conclusions du tribunal sont satisfaisantes », a-t-il déclaré.

Un autre fils, Bahaa, a déclaré que la décision confirmait que l'assassinat était un « acte politique commis par ceux dont les activités étaient menacées par [son] père, après qu'il a décidé que la Syrie devait quitter notre pays ».

Il a ajouté : « Le tribunal a été clair sur les antécédents politiques de ceux qui sont impliqués et de ceux qui avaient les motivations, des capacités opérationnelles locales et une expérience de ce type d'action. »

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com  


Offensive à Gaza, la CIJ ordonne à Israël d'assurer une aide «  d'urgence »

Dans la bande de Gaza, le ministère de la Santé du Hamas a fait état de "dizaines de morts" lors de combats et de raids aériens notamment à Rafah (sud), ville considérée par Israël comme le dernier grand bastion du Hamas et où s'entassent 1,5 million de Palestiniens. (AFP).
Dans la bande de Gaza, le ministère de la Santé du Hamas a fait état de "dizaines de morts" lors de combats et de raids aériens notamment à Rafah (sud), ville considérée par Israël comme le dernier grand bastion du Hamas et où s'entassent 1,5 million de Palestiniens. (AFP).
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  • Dans la bande de Gaza, le ministère de la Santé du Hamas a fait état de "dizaines de morts" lors de combats et de raids aériens notamment à Rafah
  • "Il n'y a pas un autre endroit dans le monde où un aussi grand nombre de personnes font face à une famine imminente", a résumé sur X le Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations unies

TERRITOIRES PALESTINIENS: L'offensive militaire israélienne contre le mouvement islamiste palestinien Hamas se poursuit vendredi dans la bande de Gaza alors que la Cour internationale de justice (CIJ) a ordonné à Israël d'assurer "une aide humanitaire de toute urgence" à la population civile sur place, menacée de famine.

Les affrontements des derniers mois ont aussi exacerbé les tensions régionales entre Israël et "l'axe de la résistance", rassemblement de mouvements armés soutenus par son ennemi iranien et comprenant notamment le Hamas palestinien, le Hezbollah libanais et les Houthis yéménites.

Au moins 36 militaires syriens ont été tués dans une frappe israélienne qui a visé vendredi à l'aube la région d'Alep, dans le nord de la Syrie, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH).

D'après cette ONG basée au Royaume-Uni et qui dispose d'un vaste réseau de sources en Syrie, la frappe a notamment visé "des dépôts de missiles relevant du Hezbollah libanais", qui combat aux côtés du régime syrien. Contactée par l'AFP depuis Jérusalem, l'armée israélienne a répondu "ne pas commenter" ces informations.

Dans la bande de Gaza, le ministère de la Santé du Hamas a fait état de "dizaines de morts" lors de combats et de raids aériens notamment à Rafah (sud), ville considérée par Israël comme le dernier grand bastion du Hamas et où s'entassent 1,5 million de Palestiniens, en grande majorité déplacés par les hostilités.

« Famine imminente »

Outre le bilan humain et ces destructions, la guerre a provoqué une catastrophe humanitaire dans le territoire palestinien assiégé, où la majorité des 2,4 millions d'habitants sont désormais menacés de famine selon l'ONU qui déplore une aide insuffisante pour répondre aux besoins de la population.

"Il n'y a pas un autre endroit dans le monde où un aussi grand nombre de personnes font face à une famine imminente", a résumé sur X le Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations unies.

Israël doit "veiller sans délai" à ce que soit assurée "sans restriction et à grande échelle, la fourniture par toutes les parties intéressées des services de base et de l'aide humanitaire requis de toute urgence", a déclaré jeudi la Cour internationale de justice (CIJ) basée à La Haye.

Saisie par l'Afrique du Sud, la juridiction avait ordonné en janvier à Israël de faire tout son possible pour empêcher un "génocide" dans le territoire palestinien, Israël jugeant "scandaleuses" de telles accusations.

Dans la nuit, le Hamas s'est félicité de la décision de la CIJ et a demandé sa "mise en œuvre immédiate" afin qu'elle ne devienne pas "lettre morte".

« Entrer à Rafah »

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyhau avait plus tôt réaffirmé jeudi sa détermination à lancer une offensive terrestre à Rafah en dépit des pressions internationales, y compris des Etats-Unis, contre une opération d'envergure sur place.

"Nous tenons le nord de la bande de Gaza ainsi que Khan Younès (sud). Nous avons coupé en deux la bande de Gaza et on se prépare à entrer à Rafah", a-t-il dit à des familles de soldats otages dans le territoire palestinien.

Les Etats-Unis, principal allié d'Israël qui redoute le bilan humain d'une telle opération, avaient demandé récemment l'envoi d'une délégation israélienne à Washington pour discuter de ce projet.

Mais Israël, furieux de l'abstention des Etats-Unis qui a permis l'adoption récente d'une résolution à l'ONU réclamant un "cessez-le-feu immédiat" à Gaza, a annulé la visite. Israël a finalement fait savoir à Washington qu'il aimerait trouver "une nouvelle date pour organiser la réunion" sur Rafah, a indiqué la Maison Blanche.

En parallèle de ces éventuelles discussions à Washington, le Qatar - un médiateur avec l'Egypte et les Etats-Unis - accueille cette semaine des négociations indirectes entre Israël et le Hamas sur un projet de trêve de plusieurs semaines doublée d'un échange d'otages israéliens et de prisonniers palestiniens.

« Yeux bandés »

L'attaque du Hamas le 7 octobre en Israël a entraîné la mort d'au moins 1.160 personnes, essentiellement des civils, selon un décompte de l'AFP établi à partir de données officielles israéliennes. D'après Israël, environ 250 personnes ont été enlevées et 130 d'entre elles sont toujours otages à Gaza, dont 34 sont mortes.

En représailles, Israël a juré d'anéantir le Hamas -- qu'il considère comme une organisation terroriste de même que les Etats-Unis et l'Union européenne -- et lancé une offensive qui a fait à 32.552 morts, majoritairement des femmes et des enfants, selon le ministère de la Santé du Hamas.

L'armée israélienne, qui accuse les combattants du Hamas de se cacher dans les hôpitaux, poursuit ses opérations dans le complexe hospitalier al-Chifa, dans la ville de Gaza (nord), disant avoir "éliminé environ 200 terroristes" dans le secteur depuis le 18 mars.

Les troupes israéliennes "ont évacué les civils, les patients et les équipes médicales vers des installations médicales alternatives", assure l'armée.

"Les forces israéliennes ont obligé des hommes à se déshabiller et ne garder que leurs sous-vêtements (...) J'en ai vu d'autres les yeux bandés qui devaient suivre un char au milieu d'explosions", a indiqué à l'AFP Karam Ayman Hathat, un Palestinien de 57 ans qui habite dans un immeuble près de l'hôpital.


Syrie: au moins 36 soldats syriens tués dans une frappe israélienne près d'Alep

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  • La frappe a notamment visé "des dépôts de missiles relevant du Hezbollah libanais"
  • Il s'agit du bilan le plus lourd pour l'armée syrienne dans des frappes israéliennes depuis le début de la guerre à Gaza il y a près de six mois

BEYROUTH: Au moins 36 militaires syriens ont été tués dans une frappe israélienne qui a visé vendredi à l'aube la région d'Alep, dans le nord de la Syrie, a indiqué l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH).

Selon cette ONG basée au Royaume-Uni et qui dispose d'un vaste réseau de sources en Syrie, la frappe a notamment visé "des dépôts de missiles relevant du Hezbollah libanais", qui combat aux côtés du régime syrien.

"Au moins 36 militaires ont été tués et des dizaines de blessés dans les raids israéliens" qui ont visé une zone proche de l'aéroport d'Alep, a précisé l'ONG.

Il s'agit du bilan le plus lourd pour l'armée syrienne dans des frappes israéliennes depuis le début de la guerre à Gaza il y a près de six mois, selon l'OSDH.

De son côté, une source militaire citée par l'agence officielle syrienne Sana a fait état de "plusieurs tués et blessés parmi des civils et des soldats" dans les frappes.

"L'ennemi israélien a lancé une attaque aérienne contre différents sites à Athriya, au sud-est d'Alep", a affirmé cette source.

Les frappes ont également visé des usines qui relèvent du ministère syrien de la Défense à Safira près d'Alep mais sont actuellement sous le contrôle de groupes pro-iraniens, selon l'OSDH.

Contactée par l'AFP depuis Jérusalem, l'armée israélienne a répondu "ne pas commenter" ces informations de presse.

L'armée israélienne a mené des centaines de frappes aériennes en Syrie depuis le début de la guerre dans ce pays voisin, ciblant en particulier les groupes pro-iraniens.

Elle a intensifié ses frappes depuis le début de la guerre à Gaza en octobre 2023 entre Israël et le Hamas palestinien.

Parallèlement, Israël et le Hezbollah se livrent à des échanges de tirs quotidiens le long de la frontière israélo-libanaise depuis le début de la guerre à Gaza.

Deux morts près de Damas 

La guerre en Syrie a fait plus d'un demi-million de morts, déplacé des millions de personnes et morcelé le pays.

Le conflit a débuté en 2011 par un soulèvement contre le président Bachar el-Assad. Il s'est rapidement transformé en guerre civile après que le régime, soutenu par l'Iran, a lancé une répression féroce contre les dissidents.

Le Hezbollah libanais a envoyé des combattants en Syrie pour soutenir son allié et protéger ses lignes d’approvisionnement avec l'Iran, et a continué à opérer dans le pays depuis lors.

L'Iran nie avoir envoyé des troupes combattre aux côtés du régime de Bachar al-Assad, affirmant que sa présence s'y limite à celle de conseillers militaires.

Une frappe aérienne avait déjà visé jeudi un immeuble résidentiel dans la banlieue de Damas, faisant deux tués civils, selon l'agence de presse officielle syrienne Sana, qui a imputé l'attaque à Israël.

La zone ciblée, Sayyida Zeinab, est considérée comme un bastion des groupes pro-iraniens en Syrie.

Le 19 mars, des raids israéliens avaient déjà visé des dépôts d'armes du Hezbollah dans les environs de Damas.

L'armée israélienne avait annoncé en mars avoir atteint "environ 4.500 cibles du Hezbollah" au Liban et en Syrie, dont "plus de 1.200" par des frappes aériennes, depuis le début de la guerre dans la bande de Gaza.


MSF nie les allégations de l’armée israélienne selon lesquelles il existait une «activité terroriste» sur le site d’une attaque meurtrière à Gaza

Sky News a révélé les résultats de son enquête sur cet incident, ce qui a incité l’armée israélienne à mener sa propre «enquête». (MSF)
Sky News a révélé les résultats de son enquête sur cet incident, ce qui a incité l’armée israélienne à mener sa propre «enquête». (MSF)
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  • Deux membres de la famille d’un employé tués et sept autres blessés par l’armée israélienne en février
  • Un obus de char aurait été «tiré directement dans le bâtiment», selon une enquête menée par un organe de presse

DUBAÏ: L’armée israélienne a été accusée d’avoir attaqué intentionnellement et sans provocation un centre d’hébergement de Médecins sans frontières (MSF) qui abritait 64 personnes dans la région d’Al-Mawasi, à Gaza, le 20 février, tuant deux membres de la famille d’un employé et blessant sept autres personnes.

L’attaque a eu lieu malgré le fait que l’armée israélienne a été informée de l’emplacement précis du centre, selon MSF. L’armée a affirmé qu’il existait une «activité terroriste» sur le site, ce que MSF a nié.

Mercredi, Sky News a révélé les résultats de son enquête sur cet incident, ce qui a incité l’armée israélienne à mener sa propre «enquête».

L’organe de presse a déclaré s’être rendu sur place et avoir utilisé des images prises sur le terrain, des techniques «open source» ainsi que des entretiens avec des témoins et des experts en armement pour comprendre comment l’incident s’est déroulé.

Des témoins ont affirmé à Sky News qu’ils avaient entendu des bruits forts qui semblaient provenir de chenilles de chars, tandis que d’autres ont également entendu des coups de feu.

Les preuves recueillies laissent penser que l’attaque a été déclenchée par un obus de char qui a pénétré par une fenêtre. «Il est difficile de tirer des conclusions définitives à partir d’images, mais je pense que les dégâts sont dus à un obus de char tiré directement dans le bâtiment», a expliqué Chris Cobb-Smith, ancien officier d’artillerie de l’armée britannique et directeur de Chiron Resources.

Ce dernier a réfuté toute idée selon laquelle il s’agirait d’une attaque du Hamas. Il a affirmé qu’il n’était «pas au courant de l’existence d’armes à tir direct de ce calibre utilisées par le Hamas» et qu’il était «peu probable qu’un obus de cette taille ait pu être déployé et tiré compte tenu de l’activité de l’armée israélienne dans la région».

Des témoins et des membres de MSF ont déclaré avoir entendu des coups de feu avant que le bâtiment ne soit touché.

Meinie Nicolai, directrice générale de l’organisation humanitaire, s’est rendue sur place peu après l’attaque. Elle a indiqué que des balles avaient été tirées sur la façade du centre.

L’enquête a par ailleurs révélé que le jour de l’attaque, l’armée israélienne a écrit sur sa chaîne Telegram que ses forces opéraient dans le nord, le centre et le sud de la bande de Gaza et qu’elles menaient «des opérations intensives dans l’ouest de Khan Younès». Cependant, elle n’a pas mentionné les environs immédiats du centre d’hébergement.

En outre, le porte-parole en langue arabe de l’armée israélienne, Avichay Adraee, a publié le même jour une carte d’évacuation de deux quartiers plus au nord, dans la ville de Gaza et ses environs. Cette carte ne couvrait pas la zone où se trouve le centre.

Selon l’enquête, les services d’urgence sont arrivés sur les lieux au moins deux heures et demie après l’attaque pour des raisons de sécurité.

Les blessés ont été transportés à l’hôpital de campagne de l’International Medical Corps à Rafah, a précisé MSF.

«Nous sommes indignés et profondément attristés par ces meurtres», avait commenté Mme Nicolai au mois de février. «Ces meurtres  témoignent de la triste réalité: aucun endroit à Gaza n’est sûr, les promesses de mise en place de zones sûres n’ont pas été tenues et les mécanismes de “déconfliction” ne sont pas fiables», avait-elle ajouté.

L’armée israélienne, qui mène sa propre enquête, a précisé qu’elle avait «tiré sur un bâtiment identifié comme étant le théâtre d’activités terroristes», mais elle n’a fourni aucune preuve.

Dans un communiqué publié mercredi, MSF «réfute toute allégation d’activité terroriste dans les structures gérées par la MSF».

«Le centre était utilisé par le personnel humanitaire et les membres de leurs familles. Il était identifié par un drapeau MSF et les autorités israéliennes étaient informées de son emplacement.»

«Après l’incident, des informations ont été reçues. Elles font état de la mort de deux civils innocents dans la zone. L’armée regrette tout préjudice causé aux civils et fait tout ce qui est en son pouvoir pour opérer de manière précise et exacte», a ajouté l’armée israélienne dans un communiqué.

En vertu du droit international humanitaire, les installations et les unités médicales doivent être respectées et protégées en toutes circonstances.

Oona Hathaway, professeure de droit international à la faculté de droit de Yale, a expliqué à Sky News que les installations médicales sont «présumées être des biens civils et ne doivent pas être prises pour cibles lors d’un conflit armé».

Elle a souligné que si l’armée israélienne prend intentionnellement pour cible un bien civil, cela constitue «potentiellement un crime de guerre».

La semaine dernière, l’armée a mené une opération à l’intérieur et autour de l’hôpital Al-Shifa, affirmant que de hauts responsables du Hamas étaient basés dans cet immense complexe. Des jours de combats intenses ont suivi. L’armée a signalé qu’environ 170 combattants palestiniens avaient été tués et que des centaines d’autres avaient été arrêtés ou interrogés.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com