Les Libanais commémorent la guerre civile, craignent que l'histoire ne se répète

Avec des cantines communautaires, des cliniques de fortune et des centres de dons, les manifestants libanais aident leurs compatriotes à survivre à la pire crise économique depuis la guerre civile en offrant des services que beaucoup ne peuvent plus se permettre. (Photo, AFP)
Avec des cantines communautaires, des cliniques de fortune et des centres de dons, les manifestants libanais aident leurs compatriotes à survivre à la pire crise économique depuis la guerre civile en offrant des services que beaucoup ne peuvent plus se permettre. (Photo, AFP)
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Publié le Mardi 13 avril 2021

Les Libanais commémorent la guerre civile, craignent que l'histoire ne se répète

  • Si le contexte régional et international est différent, le Liban fait face aujourd’hui aux mêmes défis qui ont conduit à la guerre civile
  • Aujourd’hui, le Hezbollah détient le plus grand arsenal d’armes du pays, dix fois celui de l’armée libanaise

BEYROUTH: Alors que le Liban marque le 13 avril le 46e anniversaire de la guerre civile sanglante qui alourdit son histoire, des personnalités publiques préviennent que l’aggravation de la crise dans le pays pourrait mener vers un nouveau conflit.

Si le contexte régional et international est différent, le Liban fait face aujourd’hui aux mêmes défis qui ont conduit à l'éruption de la guerre en 1975.

La crise économique et sociale sans précédent du pays, jumelé à une impasse politique, présente une situation qui, selon certains, n’est pas sans rappeler celle du Liban de l’avant-guerre.

Les combats ont cessé en 1990 après la signature de l'Accord de Taëf, un accord qui a établi le consensus politique en vigueur jusqu’à aujourd'hui.

La guerre brutale, longue de quinze ans, a tué plus de 150 000 personnes et laissé 300 000 autres avec des séquelles physiques permanentes. 17 000 personnes sont portées disparues à la fin du conflit, et plus d'un million de Libanais - un tiers de la population - est déplacés.

En mars 1991, une loi d'amnistie générale relative aux crimes de guerre est promulguée. Elle exclut par contre les enlèvements, un problème persistant.

Les milices sont alors dissoutes, exception faite du Hezbollah qui garde ses armes sous le slogan de la résistance à l'ennemi israélien. Aujourd’hui, le Hezbollah détient le plus grand arsenal d’armes du pays, dix fois celui de l’armée libanaise.

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Un survivant de la guerre civile, Jean Saliba, est pris en photo devant des bâtiments endommagés par l'explosion du port de Beyrouth le 4 août dans le quartier de Karantina de la capitale libanaise. (Photo, AFP)

Nizar Saghieh, avocat et porte-parole du Comité des familles des kidnappés et disparus, déclare à Arab News que la «guerre s’articulait autour de la logique qu’un parti fort gouverne par la force des armes. Nous sommes toujours gouvernés conformément à cette logique.

Saghieh ajoute que «personne n’est tenu pour responsable et la loi n’est pas respectée. Il est vrai que les actions militaires se sont arrêtées avec la fin de la guerre civile, mais en réalité, le système d'après-guerre a rétabli toutes les valeurs belligérantes pour contrôler le pays, et a réduit la vie politique aux chefs de guerre. Nous vivons à présent au milieu d'un système dans lequel personne n'est tenu de rendre des comptes. Nous vivons une réelle catastrophe depuis l'explosion du 4 août, en plus d’un effondrement économique. Nous sommes donc rendus au stade de la destruction systématique de l'État. Les forts ne pensent pas qu’il devrait y avoir une loi qui embrasse l’égalité».

Le sort de ceux qui ont disparu pendant la guerre est toujours d'actualité, affirme Saghieh. «Ceux qui sont au pouvoir essaient de faire oublier le passé aux gens, et ils veulent nous imposer le même mensonge».

«Par conséquent, les fosses communes n'ont pas été révélées afin de ne pas trahir le système», se désole l’avocat. «Avant de fermer le dossier des disparus nous devons connaître leur sort afin de savoir si leur assassinat a été commis avant ou après l’annonce de l'amnistie générale», ajoute-t-il.

Le secrétaire du Parti socialiste progressiste, Zafer Nasser, estime qu'un consensus politique doit être établi si le Liban veut éviter de répéter l'histoire.

«Notre réalité peut nous conduire vers une situation plus dangereuse que la guerre, vers un état de chaos qui rendrait impossible de contrôler la direction que prend le pays», déclare-t-il, ajoutant que son parti «appelle avec insistance à trouver un règlement pour éviter d'entrer dans le chaos».

«En ce qui concerne la conversation autour de l'ingérence étrangère au Liban et la possibilité qu'elle mène à la guerre, ce que l'on peut dire, c'est que le Liban est tellement fragile que les influences régionales peuvent le tirailler à droite ou à gauche», dit-il.

Nasser confie à Arab News que l’arsenal du Hezbollah «fait l’objet de discussions et la situation, à notre avis, se réglera par une stratégie de défense et un dialogue interne entre les Libanais, car toute autre formule créerait un problème. Je ne pense pas que le désarmement du Hezbollah se produise bientôt, étant donné l'équation régionale qui régit cette question».

Antoine Zahra, un ancien membre des Forces libanaises qui a pris part à la guerre civile, exclut «tout scénario d'une nouvelle guerre civile au Liban».

 «Les conditions que traverse le Liban aujourd'hui ne sont pas semblables à celles de la guerre précédente, mais nous sommes dans une situation qui peut nous conduire au chaos, qui est bien pire qu'une guerre militaire, c'est le chaos. Les armes du Hezbollah ne peuvent pas être utilisées à l’intérieur du Liban, mais ces armes restent le résultat des liens régionaux du Hezbollah, car elles font partie d’un projet de contrôle de la région», explique-t-il.

Zahra estime que même «si l'Iran se dirige vers des négociations, il garde toujours le Liban comme monnaie d'échange. Et le Hezbollah a besoin de l'ennemi israélien et n'abandonnera pas l'argument de la lutte contre l'ennemi.

«À mon avis, la solution est de mettre fin au projet iranien dans la région, et tant que ce ne sera pas fait, nous ne serons pas en mesure de concevoir des solutions chez nous».

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur arabnews.com


Le pape appelle les Libanais à «rester» dans leur pays

Le pape américain a salué la "résilience" d'un "peuple qui ne succombe pas, mais qui sait toujours renaître avec courage face aux épreuves". (AFP)
Le pape américain a salué la "résilience" d'un "peuple qui ne succombe pas, mais qui sait toujours renaître avec courage face aux épreuves". (AFP)
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  • Arrivé de Turquie dans le cadre de son premier déplacement international, Léon XIV est venu porteur d'un message de paix au Liban, qui craint le retour d'un conflit ouvert avec Israël
  • Dans un discours au palais présidentiel peu après son arrivée, il a insisté sur la situation intérieure et la nécessité d’œuvrer pour la "paix" - un mot répété 27 fois - sans évoquer les tensions régionales ni les récents bombardements israéliens

BEYROUTH: Le pape Léon XIV a exhorté dimanche les Libanais à "rester" dans leur pays, où l'effondrement économique a aggravé l'émigration massive, et appelé à la "réconciliation" pour surmonter les profonds clivages politiques et communautaires au Liban.

Arrivé de Turquie dans le cadre de son premier déplacement international, Léon XIV est venu porteur d'un message de paix au Liban, qui craint le retour d'un conflit ouvert avec Israël.

Dans un discours au palais présidentiel peu après son arrivée, il a insisté sur la situation intérieure et la nécessité d’œuvrer pour la "paix" - un mot répété 27 fois - sans évoquer les tensions régionales ni les récents bombardements israéliens.

Léon XIV a également souligné le besoin "d’autorités et d’institutions qui reconnaissent que le bien commun est supérieur à celui d’une partie", et appelé la classe dirigeante à "se mettre au service du peuple avec engagement et dévouement".

La crise économique inédite qui a éclaté à l'automne 2019 et ruiné les Libanais a été imputée en grande partie à la négligence de la classe politique, régulièrement accusée de clientélisme communautaire et de corruption.

Evoquant "une hémorragie de jeunes et de familles" quittant le pays, il a reconnu qu'"il arrive parfois qu'il soit plus facile de fuir ou, tout simplement, plus pratique d'aller ailleurs". "Il faut vraiment du courage et de la clairvoyance pour rester ou revenir dans son pays", a-t-il déclaré.

L'effondrement économique depuis 2019 a accentué l'émigration massive depuis le pays, notamment des jeunes parmi lesquels un grand nombre de chrétiens.

En l'absence de chiffres officiels, un centre de recherche indépendant, al-Doualiya, estime que 800.000 Libanais ont émigré entre 2012 et 2024. La population actuelle est estimée à 5,8 millions d'habitants, dont plus d'un million de réfugiés syriens.

"Résilience" 

Dans son discours devant les responsables, la société civile et le corps diplomatique, accueilli par des applaudissements, le pape américain a appelé le Liban à "emprunter la voie difficile de la réconciliation" pour refermer les "blessures personnelles et collectives".

"Si elles ne sont pas soignées, si l'on ne travaille pas à une guérison de la mémoire, à un rapprochement entre ceux qui ont subi des torts et des injustices, il sera difficile d'avancer vers la paix", a-t-il mis en garde.

Le pays a connu une longue guerre civile (1975-1990) au sortir de laquelle aucun travail de mémoire ni de véritable réconciliation n'a été fait.

La dernière guerre avec Israël a approfondi les clivages, le Hezbollah chiite ayant ouvert le front contre Israël en octobre 2023 pour soutenir le Hamas palestinien, soulevant l'opposition d'une grande partie des autres communautés, dont les chrétiens.

Le pape américain a salué la "résilience" d'un "peuple qui ne succombe pas, mais qui sait toujours renaître avec courage face aux épreuves".

"Vous avez beaucoup souffert des conséquences d’une économie qui tue, de l'instabilité mondiale qui a également, au Levant, des répercussions dévastatrices de la radicalisation des identités et des conflits, mais vous avez toujours voulu et su recommencer", a lancé le chef de l'Eglise catholique.

Pour sa part, le président libanais Joseph Aoun, seul chef d'Etat chrétien du monde arabe, a assuré dans son discours que "la sauvegarde du Liban, unique modèle de coexistence" entre chrétiens et musulmans, "est un devoir pour l’humanité".

"Car si ce modèle venait à disparaître, nul autre lieu ne pourrait le remplacer", a-t-il ajouté.

"Dites au monde entier que nous ne mourrons pas, nous ne partirons pas, nous ne désespérerons pas et nous ne nous rendrons pas (...) Nous demeurons l’unique espace de rencontre, dans notre région - et si j’ose dire dans le monde entier", a encore dit le président libanais.

 


L’Arabie saoudite fournit plus de 142 milliards de dollars d’aide à 173 pays

Al-Rabeeah a déclaré que le Royaume avait mené à bien 8 406 projets humanitaires, d'aide, de développement et caritatifs d'une valeur totale de plus de 142 milliards de dollars dans 173 pays. (Fourni)
Al-Rabeeah a déclaré que le Royaume avait mené à bien 8 406 projets humanitaires, d'aide, de développement et caritatifs d'une valeur totale de plus de 142 milliards de dollars dans 173 pays. (Fourni)
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  • Al-Rabeeah a ajouté que, sous la direction du roi Salmane et du prince héritier Mohammed ben Salmane, les efforts humanitaires du Royaume s’étaient considérablement intensifiés

LONDRES : Le Dr Abdullah Al-Rabeeah, directeur général de KSrelief, a souligné le rôle de premier plan joué par l'Arabie saoudite dans l'action humanitaire mondiale.

Lors d’une conférence sur l’humanité en médecine au Zayed Centre for Research into Rare Disease in Children, au Great Ormond Street Hospital de Londres, Al-Rabeeah a indiqué que le Royaume avait réalisé 8 406 projets humanitaires, de secours, de développement et caritatifs, pour une valeur de plus de 142 milliards de dollars dans 173 pays.

Cela le classe au premier rang du monde arabe et en fait l’un des principaux donateurs au niveau international.

Al-Rabeeah a ajouté que, sous la direction du roi Salmane et du prince héritier Mohammed ben Salmane, les efforts humanitaires du Royaume s’étaient fortement développés.

Depuis sa création en 2015, KSrelief a à lui seul mis en œuvre 3 881 projets d’une valeur de plus de 8,25 milliards de dollars dans 109 pays, couvrant des secteurs clés tels que la santé, la sécurité alimentaire, l’éducation et l’eau.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Les forces israéliennes tuent 13 personnes lors d'une opération dans le sud de la Syrie

Un homme assis sur des décombres dans un site endommagé à la suite d'un raid israélien vendredi à Beit Jinn, en Syrie. (Reuters)
Un homme assis sur des décombres dans un site endommagé à la suite d'un raid israélien vendredi à Beit Jinn, en Syrie. (Reuters)
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  • Des troupes israéliennes ont arrêté des membres présumés de ce que l’armée a appelé l’organisation Jemaah islamique lors d’une opération nocturne dans le village syrien de Beit Jinn
  • Au moins 10 personnes auraient été tuées lors du raid, selon la télévision d’État syrienne.

DUBAÏ : Au moins 13 personnes ont été tuées et 24 blessées par les forces israéliennes lors d’un raid nocturne sur le village de Beit Jinn, dans le sud de la Syrie, selon l’agence syrienne SANA.

Le ministère syrien des Affaires étrangères a condamné l’opération comme un « crime de guerre » et accusé Israël de vouloir « enflammer la région ».

« Nous dormions quand nous avons été réveillés à trois heures du matin par des tirs », a raconté le blessé Iyad Taher à l’AFP depuis l’hôpital Al-Mouwassat à Damas.

« Nous sommes sortis pour voir ce qui se passait et nous avons vu l’armée israélienne dans le village, des soldats et des chars. Puis ils se sont retirés, l’aviation est arrivée et les obus ont commencé à tomber. J’ai été touché au cou par des éclats. »

Un responsable local a indiqué à l’AFP que les forces israéliennes avaient fait irruption dans le village pour capturer trois hommes, déclenchant des affrontements.

« Après les affrontements, les forces d’occupation israéliennes ont bombardé la zone à l’artillerie et aux drones », a déclaré le responsable du village, Abdul Rahman Al-Hamrawi.

À l’hôpital, Ahmad Kamal a raconté à l’AFP que lui et d’autres « avaient ouvert le feu sur la patrouille israélienne pour se défendre et les empêcher de nous emmener. Mon frère a été tué et j’ai été blessé. »

Les troupes israéliennes affirment avoir arrêté des membres présumés de la Jamaa Islamiya, groupe basé au Liban et allié au Hamas palestinien, lors de l’opération nocturne.

Selon l’armée israélienne, les soldats ont essuyé des tirs et ont riposté avec un soutien aérien, faisant six blessés dans leurs rangs.

L’armée affirme que toutes les cibles recherchées ont été arrêtées et que plusieurs combattants ont été tués, ajoutant que des troupes restent déployées dans la zone.

Israël a mené de nombreuses frappes en Syrie en 2025, visant des secteurs autour de Damas et dans le sud du pays, affirmant vouloir contrer des menaces et protéger la communauté druze proche de la frontière.

Israël dit agir contre des groupes qu’il considère comme hostiles, tandis que les autorités syriennes affirment que les frappes ont tué des soldats.

Depuis la chute du président syrien Bachar Al-Assad en décembre 2024 et l’arrivée d’un nouveau leadership à Damas, Israël a mené des centaines de frappes en Syrie.

Israël a également envoyé des troupes dans la zone tampon patrouillée par l’ONU, qui sépare les forces israéliennes et syriennes sur le plateau du Golan depuis 1974.

Israël occupe le Golan syrien depuis 1967 et l’a annexé en 1981, une décision non reconnue par la communauté internationale.

Dans une résolution adoptée le 6 novembre, le Conseil de sécurité de l’ONU a réaffirmé son ferme soutien à la « souveraineté, l’indépendance, l’intégrité territoriale et l’unité nationale » de la Syrie.

Au cours de l’été, des contacts de haut niveau ont eu lieu entre responsables israéliens et syriens, avec l’aide de Paris et Washington.

L'envoyée spéciale adjointe de l’ONU pour la Syrie, Najat Rochdi, a condamné l’attaque israélienne, la qualifiant de « violation grave et inacceptable de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la Syrie ».

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com