Le «supercycle» du pétrole est hors jeu, selon des experts en énergie

La théorie d'un «supercycle» dans le secteur du pétrole gagne en popularité ces derniers mois, à mesure que le prix du brut se redresse, après avoir atteint des niveaux historiquement bas dus à l'effondrement amorcé par la pandémie l'année dernière. (AP)
La théorie d'un «supercycle» dans le secteur du pétrole gagne en popularité ces derniers mois, à mesure que le prix du brut se redresse, après avoir atteint des niveaux historiquement bas dus à l'effondrement amorcé par la pandémie l'année dernière. (AP)
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Publié le Mardi 13 avril 2021

Le «supercycle» du pétrole est hors jeu, selon des experts en énergie

  • Selon les analystes d’Oxford, le pétrole se négociera dans une fourchette de 59 à 69 dollars le baril jusqu'à la fin de 2022
  • L'analyse d'Oxford vient soutenir la prudence persistante du ministre saoudien de l'Énergie, le prince Abdelaziz ben Salmane

DUBAÏ: Il est peu probable que le pétrole parvienne à atteindre, de manière durable, le prix de 100 dollars (1 dollar = 0,84 euro) le baril dans un avenir proche. Tel est le constat des experts de l'Oxford Institute for Energy Studies (OIES), un prestigieux groupe de réflexion dont le siège est au Royaume-Uni.

Dans un rapport de l’OIES élaboré par Bassam Fattouh et Andreas Economou, les chances de voir un «supercycle» pétrolier imminent – suggéré par certains analystes des matières premières – sont désormais limitées, en raison de l'absence des facteurs essentiels susceptibles de déclencher une flambée du prix du brut.

«Certains éléments déclencheurs indispensables au supercycle pétrolier font toujours défaut, tels que l'offre ferme face à une demande galopante, le manque de capacités de réserve et les contraintes de raffinage. Tous ces facteurs permettraient de porter les prix du baril à 100 dollars et de les maintenir à ce niveau élevé», affirment-ils.

Théorie d'un «supercycle»

Selon ces mêmes analystes, le pétrole se négociera plutôt dans une fourchette de 59 à 69 dollars le baril jusqu'à la fin de 2022. «L'humeur du marché pourrait porter les prix au-delà de ces limites, mais cette hausse ne sera probablement pas durable. Pour que les prix atteignent une valeur proche de 100 dollars le baril, il faut envisager de nouveaux bouleversements», ajoutent-ils.

La théorie d'un «supercycle» dans le secteur du pétrole et d'autres matières premières gagne en popularité ces derniers mois, à mesure que le prix du brut se redresse, après avoir atteint des niveaux historiquement bas dus à l'effondrement amorcé par la pandémie l'année dernière; certaines compagnies pétrolières ont donc réduit les investissements dans de nouveaux gisements.

Les analystes de JP Morgan et Goldman Sachs – deux des plus grandes banques du monde – suggèrent que le marché mondial est sur le point de connaître une hausse qui porterait le prix du pétrole à plus de 100 dollars le baril.

Reprise impressionnante

Toutefois, dans leur dernier rapport intitulé «Oil Monthly», les experts d'Oxford ont constaté que cette éventualité est peu probable. «Si la dynamique et les prix du marché pétrolier ont nettement progressé, le degré d'incertitude concernant les perspectives reste élevé. Après une année difficile, le choix des stratégies de l'Organisation des pays exportateur de pétrole et certains pays producteurs comme la Russie (Opep+) continuera à dicter les résultats du marché, mais la récente remontée des prix du pétrole ne signifie pas encore que le prochain supercycle pétrolier a commencé», affirment-ils.

Selon ces experts, avril 2020 a été «le mois le plus sombre de l'histoire des marchés pétroliers», avec un prix moyen de 23 dollars le baril. Cependant, les prix ont par la suite rebondi pour dépasser les 60 dollars grâce à la reprise de la demande, à la réduction des stocks et à la restriction de l'offre par l'Opep+, soit l'alliance des producteurs de pétrole dirigée par l'Arabie saoudite et la Russie.

«Cette reprise impressionnante s’est produite en dépit de la grande incertitude qui pèse sur la demande de pétrole et bien que celle-ci n'ait pas encore pleinement retrouvé son niveau d'avant la pandémie. Si l'on s'attend à un rebond important de la demande de pétrole au cours de la deuxième moitié de 2021, à mesure que les pays lèvent leurs restrictions et que la reprise économique mondiale s'accélère, le moment et le rythme de ce rebond restent particulièrement incertains», ajoutent les auteurs du rapport.

Prudence

L'analyse d'Oxford vient soutenir la prudence persistante du ministre saoudien de l'Énergie, le prince Abdelaziz ben Salmane, qui a fait savoir dernièrement qu'il ne se fierait pas «aux preuves d’une reprise de la demande tant que je ne les vois pas».

La stratégie de l'Opep+ est considérée comme l'un des principaux facteurs responsables du redressement des prix du brut, selon les experts d'Oxford, qui évoquent une «Opep+ plus souple et plus efficace lorsqu'il s'agit de gérer le choc néfaste de la Covid-19 et d'influencer les attentes et l’humeur du marché».

Ils ajoutent que «même s'il est désormais plus difficile de prévoir la prochaine action de l'Opep+, cette imprévisibilité fait partie d'une politique réfléchie et octroie une plus grande importance à l'impact des décisions de l'Opep+ sur le marché. Sur un plan plus fondamental, cette imprévisibilité dénote un rôle plus affirmé de l'Opep+ dans la détermination du rythme auquel le marché parviendra à nouveau à un équilibre».

Nucléaire iranien

Certains analystes prévoient que, en raison de la hausse des prix du pétrole, l'offre de schiste américain fera un retour en force, après avoir souffert des mesures de confinement imposées par la pandémie en Amérique. Néanmoins, l'analyse d'Oxford ne prévoit pas une telle évolution dans un avenir proche. «Un nouveau consensus veut que la croissance du schiste américain sera plutôt restreinte et qu'elle déclinera en 2021», comme le soulignent les auteurs du rapport.

Par ailleurs, le risque que le pétrole iranien inonde le marché en cas de conclusion d'un accord sur le nucléaire entre Téhéran et Washington est lui aussi surestimé, ajoutent les auteurs. «Même si l'accord sur le nucléaire iranien parvient à être rétabli, la hausse des exportations sera modérée par rapport aux niveaux actuels», précisent-ils.

 

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com.


La note française menacée de passer en catégorie inférieure dès vendredi

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
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  • La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne
  • Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie

PARIS: Fitch sera-t-elle vendredi la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure? Les économistes, qui le pensaient il y a quelques jours, discernent des raisons d'en douter, mais ce ne pourrait être que partie remise.

Fitch ouvre le bal des revues d'automne des agences de notation. Toutes, au vu de l'état des finances publiques françaises et de la crise politique persistante depuis la dissolution, classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette "haute ou bonne"), avec, pour certaines comme Fitch, une "perspective négative".

Ce qui préfigure une dégradation: en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité "moyenne supérieure"), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, accroissant d'autant les remboursements de cette dette.

Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management, une dégradation serait "logique". D'abord parce que la situation politique n'aide pas à mettre en œuvre "un plan crédible d'assainissement budgétaire", comme Fitch l'exigeait en mars.

Mais aussi pour effacer "une incohérence" : 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu'ils ont - à très peu d'exceptions près - des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024.

Coup d'envoi 

Depuis mardi, la nomination rapide à Matignon de Sébastien Lecornu pour succéder à François Bayrou, tombé la veille lors du vote de confiance, ravive l'espoir d'un budget 2026 présenté en temps et heure.

Lucile Bembaron, économiste chez Asterès, juge ainsi "plausible" que Fitch "attende davantage de visibilité politique" pour agir.

D'autant, remarque Hadrien Camatte, économiste France chez Natixis, que les finances publiques n'ont pas enregistré cette année de nouveau dérapage inattendu, et que "la croissance résiste".

L'Insee a même annoncé jeudi qu'en dépit du "manque de confiance" généralisé, celle-ci pourrait dépasser la prévision du gouvernement sortant - 0,7% - pour atteindre 0,8% cette année.

Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l'institut Rexecode, observe aussi que Fitch, la plus petite des trois principales agences internationales de notation, "donne rarement le coup d'envoi" des dégradations.

Mais il estime "très probable" que la principale agence, S&P Global, abaissera le pouce lors de sa propre revue, le 28 novembre.

Selon ses calculs, la France ne sera en effet pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l'an prochain, contre les 4,6% qu'espérait François Bayrou.

Les économistes affirment cependant qu'une dégradation ne troublerait pas les marchés, "qui l'ont déjà intégrée", relève Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade.

Syndrome 

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne.

Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie.

Il craint des taux qui resteraient "durablement très élevés", provoquant "un étranglement progressif", avec des intérêts à rembourser captant "une part significative de la dépense publique, alors qu'on a des besoins considérables sur d'autres postes".

L'économiste décrit une France en proie au "syndrome du mauvais élève".

"Lorsqu'on avait 20/20", explique-t-il - la France était jusqu'à 2012 notée AAA, note maximale qu'a toujours l'Allemagne - "on faisait tout pour s'y maintenir. Maintenant on dit que 17/20 (AA-) ça reste une très bonne note. Bientôt ce sera +tant qu'on est au-dessus de la moyenne, c'est pas si mal+. Quand on est la France, en zone euro, on devrait quand même être un peu plus ambitieux que cela!", dit-il à l'AFP.

Pour autant, même abaissée à A+, "la dette française resterait de très bonne qualité", relativise M. Camatte, préférant souligner "la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui reste très saine".


La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, alerte le Secours populaire

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
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  • "La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire
  • "La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg

PARIS: La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, touchant tous les aspects de la vie des plus fragiles, alerte jeudi le Secours Populaire, qui publie un baromètre témoignant de cette situation jugée préoccupante.

"La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire.

L'association publie un baromètre qui indique qu'un tiers des Français (31%) rencontrent des difficultés financières pour se procurer une alimentation saine permettant de faire trois repas par jour. De même 39% ont du mal à payer leurs dépenses d'électricité et 49% à partir en vacances au moins une fois par an, selon ce sondage réalisé par l'Institut Ipsos, auprès d'un échantillon de 1.000 personnes, représentatif de la population nationale âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas.

"La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg.

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier.

Malgré un "léger mieux" constaté sur certains indicateurs lié au "ralentissement de l'inflation", ce baromètre révèle "une situation sociale toujours très préoccupante", selon le Secours populaire.

En début de semaine, la déléguée interministérielle à la prévention et la lutte contre la pauvreté, Anne Rubinstein, a évoqué des "difficultés" rencontrées par l'Etat pour résorber un taux de pauvreté qui a atteint un niveau record en 2023 en France métropolitaine.

Face à cette situation, la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) a appelé mardi à une "mobilisation collective" pour "débloquer la lutte contre la précarité".

Au niveau européen, 28% de la population déclare se trouver en situation précaire, également selon ce baromètre du Secours Populaire, qui s'appuie aussi sur des échantillons de 1.000 personnes représentatifs de neuf autres pays (Allemagne, Grèce, Italie, Pologne, Royaume-Uni, Moldavie, Portugal, Roumanie, Serbie).

La part des personnes se considérant comme précaires demeure à un niveau "très alarmant" en Grèce (46%) et en Moldavie (45%), pointe le baromètre.

En 2024, le Secours populaire a soutenu 3,7 millions de personnes en France. L'association fournit notamment de l'aide alimentaire et organise des activités pour différents publics pour rompre l'isolement.


Face à l'explosion des dépenses militaires, l'ONU appelle à «repenser les priorités»

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé mardi le monde à "repenser les priorités" en redirigeant une partie des dépenses militaires record vers le développement de l'humanité et la lutte contre la pauvreté. (AFP)
Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé mardi le monde à "repenser les priorités" en redirigeant une partie des dépenses militaires record vers le développement de l'humanité et la lutte contre la pauvreté. (AFP)
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  • "Aujourd'hui, nous publions un rapport qui révèle une réalité saisissante: le monde dépense bien plus à faire la guerre qu'à construire la paix", a-t-il déclaré Antonio Guterres
  • Selon l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri), les dépenses militaires mondiales ont atteint en 2024 près de 2.700 milliards de dollars, en hausse de plus de 9% sur un an

NATIONS-UNIES: Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé mardi le monde à "repenser les priorités" en redirigeant une partie des dépenses militaires record vers le développement de l'humanité et la lutte contre la pauvreté.

"Aujourd'hui, nous publions un rapport qui révèle une réalité saisissante: le monde dépense bien plus à faire la guerre qu'à construire la paix", a-t-il déclaré Antonio Guterres.

Selon l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri), les dépenses militaires mondiales ont atteint en 2024 près de 2.700 milliards de dollars, en hausse de plus de 9% sur un an.

C'est "l'équivalent de 334 dollars par habitant de la planète", "près de 13 fois le montant de l'aide publique au développement des pays les plus riches et 750 fois le budget ordinaire de l'ONU", a noté Antonio Guterres.

Et en parallèle, la majorité des Objectifs de développement durables (ODD) visant à améliorer le sort de l'humanité d'ici 2030 (éradication de l'extrême pauvreté, égalité hommes-femmes, éducation...) ne sont pas sur la bonne voie.

Pourtant, mettre un terme à la faim dans le monde d'ici 2030 nécessiterait seulement 93 milliards de dollars par an, soit 4% des dépenses militaires de 2024, et faire en sorte que chaque enfant soit totalement vacciné coûterait entre 100 et 285 milliards par an, note le rapport demandé par les Etats membres.

Au total, l'ONU estime aujourd'hui à 4.000 milliards de dollars les investissements supplémentaires nécessaires chaque année pour atteindre l'ensemble des ODD, un montant qui pourrait grimper à 6.400 milliards dans les prochaines années.

Alors le secrétaire général de l'ONU a lancé un "appel à l'action, un appel à repenser les priorités, un appel à rééquilibrer les investissements mondiaux vers la sécurité dont le monde a vraiment besoin".

"Des dépenses militaires excessives ne garantissent pas la paix, souvent elles la sapent, encourageant la course aux armements, renforçant la méfiance et détournant des ressources de ce qui représentent les bases de la stabilité", a-t-il ajouté. "Un monde plus sûr commence par investir au moins autant pour lutter contre la pauvreté que nous le faisons pour faire la guerre".

"Rediriger même une fraction des dépenses militaires actuelles pourraient combler des écarts vitaux, envoyer des enfants à l'école, renforcer les soins de santé de base, développer les énergies propres et des infrastructures résistantes, et protéger les plus vulnérables", a-t-il plaidé.