Climat: accord in extremis de l'UE avant le sommet Biden

« L'accord renforce notre position dans le monde comme un leader du combat contre la crise climatique », s'est félicité Frans Timmermans, vice-président de la Commission (Photo, AFP).
« L'accord renforce notre position dans le monde comme un leader du combat contre la crise climatique », s'est félicité Frans Timmermans, vice-président de la Commission (Photo, AFP).
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Publié le Mercredi 21 avril 2021

Climat: accord in extremis de l'UE avant le sommet Biden

  • L’UE s’est accordée sur une réduction nette d' «au moins 55%» de ses émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030
  • Cet objectif faisait l'objet d'âpres négociations entre les dirigeants des Vingt-Sept

BRUXELLES: L'UE pourra faire bonne figure au sommet sur le climat organisé par Joe Biden après un accord in extremis entre eurodéputés et Etats membres sur une réduction nette d' « au moins 55% » de ses émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030 --jugée insuffisante par les ONG environnementales.

Ce compromis, arraché dans la nuit mercredi, ouvre la voie à une baisse de 57% des émissions du Vieux Continent par rapport à 1990, en tenant compte d'un engagement de la Commission européenne à développer des « puits de carbone » naturels absorbant le CO2, comme les forêts et prairies.

« C'est un moment historique (...) L'accord renforce notre position dans le monde comme un leader du combat contre la crise climatique », s'est félicité Frans Timmermans, vice-président de la Commission.

Cet objectif faisait l'objet d'âpres négociations entre les dirigeants des Vingt-Sept, qui s'étaient entendus en novembre sur une réduction nette de 55%, et le Parlement européen, qui réclamait une baisse d' « au moins 60% ».

Un accord a été trouvé au petit matin après 14 heures de discussions. Lisbonne, qui occupe la présidence tournant de l'UE, a salué « un signal fort envoyé au monde entier », alors que Washington doit dévoiler jeudi son objectif climatique révisé pour 2030.

« L'objectif d'une neutralité carbone pour 2050 deviendra juridiquement contraignant », souligne l'eurodéputé allemand Peter Liese (PPE, droite pro-UE), et l'UE s'engage au-delà de 2050 à viser des « émissions négatives », c'est-à-dire à absorber davantage de CO2 qu'elle n'en émet.

« Compromis ambitieux »

« Le Parlement était évidemment prêt à aller encore plus loin, mais le compromis trouvé est ambitieux : nous allons faire deux fois et demi plus en 9 ans qu'au cours des 10 dernières années », a estimé l'eurodéputé Pascal Canfin (Renew, libéraux), président de la commission Environnement.

L'objectif de l'accord est une baisse « nette » des émissions, c'est-à-dire prenant en compte le CO2 capturé par les puits de carbone naturels.

43 banques s'engagent à la neutralité carbone d'ici à 2050

43 banques internationales se sont engagées sous la houlette de l'ONU pour atteindre la neutralité carbone « d'ici à 2050 ou plus tôt », a annoncé mercredi l'initiative financière de l'ONU pour l'environnement (UNEP FI).

Parmi les banques qui ont adhéré à cette initiative figurent les françaises BNP Paribas, Société Générale et la Banque Postale, ainsi que les britanniques Barclays et HSBC, la suisse Crédit Suisse ou encore l'espagnole Santander.

Tous les établissements signataires se sont engagés, entre autres, à aligner leurs portefeuilles d'investissements et de crédits avec un objectif de neutralité carbone « d'ici à 2050 ou plus tôt », et à se donner des objectifs intermédiaires à 2030 au plus tard.

« Tous les objectifs seront régulièrement révisés afin de garantir leur cohérence avec les données scientifiques les plus récentes », a signalé l'UNEP FI.

Selon l'instance de l'ONU, les assureurs et réassureurs sont actuellement en train de plancher sur une initiative identique. 

Au risque de réduire ainsi mécaniquement la baisse réelle exigée des secteurs polluants, critiquent ONG environnementales et eurodéputés verts.

Une inquiétude relativisée par Pascal Canfin : « On a plafonné la part des ‘puits de carbone’ qui peut être comptabilisée dans la cible 2030 : ça nous permet de sanctuariser une réduction brute de 53%, et d'aller jusqu'à une réduction nette de 57% en intégrant l'engagement de la Commission » à développer forêts et prairies.

Sans toujours convaincre : « Ce n'est pas à la hauteur des ambitions. En termes réels, ce n'est qu'une réduction de 52,8%. (...) C'est insuffisant au regard de l'accord de Paris », s'insurge l'eurodéputé vert allemand Michael Bloss.

L'ONG WWF a dénoncé « une loi climat désolante qui ne fera pas grand chose contre la crise climatique » et « très en-deçà de la réduction de 65% jugée nécessaire par les scientifiques » pour concrétiser l'accord de Paris.

« Poudre aux yeux »

« L'UE est clairement plus soucieuse d'avoir quelque chose pour parader au sommet Biden que du fond  (...) ce n'est que de la poudre aux yeux » et on « lègue aux jeunes générations des conséquences désastreuses », renchérit Silvia Pastorelli de Greenpeace.

Pour autant, ce cadre climatique s'imposera désormais à toutes les lois, à commencer par un ensemble de textes attendu en juin, se défend Pascal Canfin.

D'ici à fin 2022, quelque cinquante lois européennes seront modifiées (automobile, biodiversité, ciment, plastique, pesticides...) pour mettre en musique le « Pacte vert » européen, a-t-il expliqué. 

Face aux lobbies de ces secteurs, un contrôle de la Commission « vérifiera à chaque étape des textes qu'ils restent bien alignés » avec l'objectif de -55%, « c'est une pression colossale », estime-t-il. 

Il sera exercé par 15 experts indépendants, qui aideront aussi la Commission à élaborer un « bilan prévisionnel » détaillant les émissions attendues sur 2030-2050, précise l'eurodéputée suédoise Jytte Guteland (sociaux-démocrates), rapporteure du texte.

Des eurodéputés déplorent cependant que l'objectif de neutralité carbone s'appliquera collectivement à l'ensemble de l'UE, mais pas à chaque Etat individuellement, contrairement à ce que souhaitait le Parlement. 

Une ligne rouge pour une partie des Vingt-Sept, dont la Pologne, encore très dépendante du charbon.


Tanzanie : la présidente investie malgré les violences électorales

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
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  • Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021
  • Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin

NAIROBIE: Samia Suluhu Hassan a été investie lundi présidente de la Tanzanie, où l'internet reste coupé depuis les manifestations réprimées dans le sang contre son élection, l'opposition évoquant au moins 800 morts.

Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021. Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin.

"Moi, Samia Suluhu Hassan, jure que je remplirai mes fonctions de présidente de la République (...) avec diligence et un cœur sincère", a-t-elle affirmé. La cheffe de l'Etat, qui portait un voile rouge et un long vêtement noir, a également prôné dans un discours "l'unité et la solidarité".

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan.

La cérémonie, qui n'était pas ouverte au public, contrairement aux précédentes, s'est tenue dans un espace ressemblant à un terrain de parade militaire de la capitale Dodoma, où quelques podiums dressés ne réussissaient pas à masquer un grand vide.

Des chanteurs et chanteuses se sont succédé, avant l'arrivée de la présidente, pour chanter les louanges de "Mama Samia", son surnom parmi ses soutiens, devant un parterre de dignitaires et de militaires. Parmi les invités étaient notamment présents les présidents de la Zambie, de la Somalie et du Burundi.

Mme Hassan a, selon la commission électorale, obtenu 97,66% des suffrages. L'élection a été qualifiée de "parodie de démocratie" par l'opposition, les deux principaux opposants ayant été soit emprisonné, soit disqualifié.

L'opposition a également dénoncé d'importantes tricheries le jour de l'élection, mais aussi sur le taux de participation de 87% selon la commission électorale.

Le scrutin a surtout été marqué par un fort niveau de violence, des manifestations anti-régime ayant été réprimées dans le sang et la Tanzanie mise sous cloche: l'internet reste coupé depuis mercredi, ce qui ralentit considérablement la sortie d'informations.

Cadavres 

De premières photos et vidéos de cadavres, parfois empilés les uns sur les autres, mais aussi d'hommes en uniforme usant de leur arme à feu, commencent à apparaître sur les réseaux sociaux.

Le service de fact-checking de l'AFP a pu vérifier que certaines d'entre elles n'avaient jamais été postées auparavant. Plusieurs éléments montrent qu'elles ont été prises en Tanzanie.

Un porte-parole du principal parti d'opposition, Chadema, a estimé vendredi qu'au moins 700 manifestants hostiles au régime ont été tués en Tanzanie en trois jours. Un chiffre estimé crédible par une source sécurité, qui a alors mentionné "des centaines de morts".

Le samedi, ce porte-parole, John Kitoka, a ensuite fait état d'au moins 800 tués.

Des informations crédibles corroborent l'idée que des centaines, et peut-être même des milliers de personnes ont été tuées lors des violences électorales, a de son côté estimé une source diplomatique interrogée par l'AFP.

D'après des "rapports préoccupants", la police utilise également le blocage d'internet pour "traquer les membres de l'opposition et les manifestants qui pourraient avoir des vidéos" de ses atrocités, a poursuivi cette source.

La Mission d'observation électorale de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), dont la Tanzanie fait partie, a pointé lundi dans un rapport préliminaire "un faible nombre d'électeurs dans tous les bureaux de vote" où ses observateurs se trouvaient, avec parfois "plus de policiers que de votants", des irrégularités et des incidents violents "au cours desquels des membres de la police ont fait usage d'armes à feu".

Les écoles restent fermées lundi et les transports publics à l'arrêt. La capitale économique Dar es Salaam et les principales villes du pays ont retrouvé un peu de calme depuis le week-end.

Dimanche, le pape Léon XIV a indiqué prier "pour la Tanzanie" et évoqué les "nombreuses victimes" des affrontements ayant éclaté après les élections.

L'élection présidentielle était couplée avec les législatives.

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a réclamé vendredi une "enquête minutieuse et impartiale sur les accusations d'utilisation excessive de la force".


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.