Michèle Sibony: Israël exerce un fascisme violent sur les Palestiniens

Une fille pose pour une photo devant une peinture murale le 25 mai 2021, dans le quartier de Sheikh Jarrah, annexé par Israël à Jérusalem-Est, site de manifestations régulières contre l'expulsion des Palestiniens de leurs maisons au profit des colons juifs. (Photo / AFP)
Une fille pose pour une photo devant une peinture murale le 25 mai 2021, dans le quartier de Sheikh Jarrah, annexé par Israël à Jérusalem-Est, site de manifestations régulières contre l'expulsion des Palestiniens de leurs maisons au profit des colons juifs. (Photo / AFP)
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Publié le Mardi 21 septembre 2021

Michèle Sibony: Israël exerce un fascisme violent sur les Palestiniens

  • À l’opposé ce qui s’est dit en France sur la récupération de la révolte des jeunes de Jérusalem par le Hamas, Sibony s’insurge contre cette vision réductrice du conflit
  • «Nous sommes le seul peuple au monde auquel on demande de garantir la sécurité de l’occupant, tandis qu’Israël est le seul pays au monde qui prétend se défendre de ses victimes»

PARIS: Michèle Sibony, vice-présidente de l’Union juive française pour la paix (UJFP) observe le conflit israélo-palestinien des deux côtés du miroir.

Née à Rabat dans une famille juive traditionnelle, elle connaît la société israélienne de l’intérieur. Elle a vécu à Haïfa, où elle a poursuivi des études universitaires de lettres et de cinéma.

Ce séjour de plusieurs années a ébranlé ses certitudes, et l’a amenée à remettre en question le sionisme, puis à s’engager activement pour la paix entre Israéliens et Palestiniens, après la deuxième Intifada.

Interrogée par Arab News en français, Michèle Sibony, qui vit à Paris, estime que la dernière flambée de violence, qui a duré onze jours, est semblable aux précédentes flambées qu’a connues la région, mais différente à la fois.

«Ce qui est particulièrement différent», dit-elle, «c’est la mobilisation de ce que l’on appelle la Palestine de 1948, c’est-à-dire les Palestiniens citoyens d’Israël, qui se sont révoltés et ont pris part à la bataille.»

Les raisons de cette révolte sont multiples, notamment depuis la loi «État-Nation du peuple juif», qui est une loi de type constitutionnel, une des lois fondamentales du pays.  

Elle exclut de fait «une minorité palestinienne» représentant 20% de la population, constituée certes de citoyens d’Israël, mais «qui n’ont pas accès à la nation», affirme la vice-présidente de l’UJFP.

Cette loi a aussi déclassé l’arabe, qui n’est plus une langue officielle, et elle stipule que l’implantation juive doit se poursuivre sur l’ensemble du territoire situé entre la mer et le fleuve Jourdain.

Pour Michèle Sibony, cette loi met en évidence «la société de discrimination et d’apartheid qui se crée sur le territoire israélien de 1948».

L’autre motif de cette révolte est la jeunesse palestinienne, «qui n’accepte plus les compromis avec l’État».

Cette jeunesse «ne veut plus faire semblant», c’est-à-dire comme leurs parents, qui soutenaient la Palestine comme ils le pouvaient, sans être dans la révolte active.

Ce constat en dit long sur ce qui va se passer «avec le retour au calme à Gaza, qui ne sera en aucun cas un retour à la paix», prévient-elle.

Les citoyens palestiniens d’Israël vont payer cette fracture; «il y a déjà près de 700 arrestations en Israël», et les avocats qui défendent les personnes interpellées disent qu’il y a «des violences inhabituelles de la part de la police dans les commissariats». 

À Nazareth, nous apprend Michèle Sibony, les commissariats ont regroupé les Palestiniens dans les mêmes cellules pour leur faire subir des châtiments collectifs.

Selon elle, «ce qui était ponctuel en Israël est désormais généralisé, on assiste à une fascisation de la société israélienne, d’une grande violence».

Impossible pour elle de dire de quoi sera fait l’avenir, mais au-delà de ce qui va se passer dans les territoires occupés, à Gaza ou Jérusalem, « ce qui se passe à l’intérieur d’Israël aujourd’hui est difficilement réparable si on ne revient pas sur la question de la citoyenneté et de la nationalité».

C’est «la Palestine entière qui s’est réveillée»

À l’opposé ce qui s’est dit en France sur la récupération de la révolte des jeunes de Jérusalem par le mouvement Hamas, Sibony s’insurge contre cette vision réductrice du conflit.

C’est comme s’il n’y avait pas eu avant toutes «les provocations fascistes» autour de la mosquée Al-Aqsa, et comme si la police n’était pas entrée dans la mosquée en tirant des coups de feu et en s’en prenant à un symbole national palestinien».

Vers quoi allons-nous, en fait? Michèle Sibony estime qu’il va y avoir une période dure en Israël.

C’est comme s’il n’y avait pas eu les expulsions des familles palestiniennes de leurs foyers à Cheikh-Jarrah pour «donner leurs maisons aux colons», et comme si Gaza était comptée à part, «que ce territoire était autre chose que palestinien».

Or, selon Sibony, quand Gaza «prend la parole et entre dans l’affrontement, elle indique qu’elle est là, qu’elle existe et qu’elle fait partie de la Palestine».

L’autre particularité de cette récente flambée est que cette fois on avait plusieurs fronts. C’est «la Palestine entière qui s’est réveillée», avec un front dans les territoires occupés, un autre dans Jérusalem, un sur les territoires de 1948 et encore un à Gaza. 

Tout ceci perturbe d’une certaine manière l’alliance entre le monde occidental et Israël, qui vise à effacer la Palestine des consciences politiques et des médias.

Il s’agit d’après Sibony d’un «révisionnisme politique qui est en cours depuis longtemps sur la question de la Palestine», et pour cela «personne ne parle de colonisation, personne ne parle d’occupation ni d’apartheid, sans compter le siège de Gaza» qui dure depuis plus de treize ans.

La lueur d’espoir de son point de vue pourrait venir d’une population palestinienne «qui garde son cap, qui s’inscrit dans un mouvement national et refuse l’oppression».

Vers quoi allons-nous, en fait? Michèle Sibony estime qu’il va y avoir une période dure en Israël, parce que toute cette affaire est partie aussi de la volonté du Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou de tenter, quoi qu’il arrive et à n’importe quel prix, de constituer un gouvernement afin de garantir son immunité face à la multitude de procès pour corruption dans lesquels il est impliqué.

Michèle Sibony assume être une voix dissonante, et soutient que l’UJFP où elle milite est elle-même une voix dissonante.  

Mais la plus grande difficulté pour Israël en ce moment, c’est de regarder les Palestiniens qui vivent sur le même territoire et de trouver une modalité de coexistence avec eux, car «la coexistence qu’il y a eu jusqu’à présent n’existe plus pour la population palestinienne; les faux-semblants des décennies précédentes, c’est terminé».

Michèle Sibony assume être une voix dissonante, et soutient que l’UJFP où elle milite est elle-même une voix dissonante.  

Elle a été élevée dans une famille juive traditionnelle pas vraiment politisée, mais sioniste dans la mesure où elle considérait, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, que c’était formidable qu’il y ait un État juif à un endroit dans le monde.

Au tout début, elle pouvait «comprendre que les juifs avaient besoin de souveraineté, mais ce qu’elle ne pouvait pas accepter c’est que ça se fasse en écrasant un autre peuple, qui n’avait rien à voir avec la tragédie des juifs en Europe».

Une voix comme la sienne et celle de son organisation est-elle audible par les temps actuels? Sibony rétorque à regret: «On est audible dans notre camp»  ̶  le mouvement de solidarité français avec la Palestine, qu’elle estime être large «parce que les opinions ne sont pas alignées sur les positions des gouvernements».

Le mot de la fin de cette interview a été choisi par Sibony elle-même, qui a tenu à citer une phrase de Hanane Achraoui, ancienne figure de proue de l’OLP: «Nous sommes le seul peuple au monde auquel on demande de garantir la sécurité de l’occupant, tandis qu’Israël est le seul pays au monde qui prétend se défendre de ses victimes».

Elle trouve que c’est un assez bon résumé «de l’inversion des valeurs et de la situation aujourd’hui»


Négociations de paix au Soudan: le chef de l'armée prêt à «collaborer» avec Trump

Le chef de l'armée soudanaise et dirigeant de facto du pays, le général Abdel Fattah al-Burhane, s'est dit prêt à collaborer avec le président américain Donald Trump, au moment où les négociations pour un cessez-le-feu menées par les Etats-Unis sont à l'arrêt. (AFP)
Le chef de l'armée soudanaise et dirigeant de facto du pays, le général Abdel Fattah al-Burhane, s'est dit prêt à collaborer avec le président américain Donald Trump, au moment où les négociations pour un cessez-le-feu menées par les Etats-Unis sont à l'arrêt. (AFP)
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  • Le général al-Burhane "a affirmé la volonté du Soudan de travailler avec le président Trump, son secrétaire d'État (Marco Rubio) et son envoyé pour la paix au Soudan (Massad Boulos)"
  • Ce voyage était destiné à discuter de l'initiative présentée par le dirigeant saoudien au président américain lors d'une récente visite officielle à Washington, selon une source gouvernementale soudanaise

PORT-SOUDAN: Le chef de l'armée soudanaise et dirigeant de facto du pays, le général Abdel Fattah al-Burhane, s'est dit prêt à collaborer avec le président américain Donald Trump, au moment où les négociations pour un cessez-le-feu menées par les Etats-Unis sont à l'arrêt.

Le général al-Burhane "a affirmé la volonté du Soudan de travailler avec le président Trump, son secrétaire d'État (Marco Rubio) et son envoyé pour la paix au Soudan (Massad Boulos)", a déclaré le ministère des Affaires étrangères pro-armée dans un communiqué publié à l'issue d'un déplacement officiel à Ryad, à l'invitation du prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane.

Ce voyage était destiné à discuter de l'initiative présentée par le dirigeant saoudien au président américain lors d'une récente visite officielle à Washington, selon une source gouvernementale soudanaise.

Les négociations de paix menées par les Etats-Unis avec le groupe de médiateurs du Quad (réunissant Egypte, Arabe Saoudite et Emirats) sont à l'arrêt depuis que le général al-Burhane a affirmé que la dernière proposition de trêve transmise par M. Boulos était "inacceptable", sans préciser pourquoi.

Le militaire avait alors fustigé une médiation "partiale" et reproché à l'émissaire américain de reprendre les éléments de langage des Emirats, accusés d'armer les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR).

Abou Dhabi nie régulièrement fournir des armes, des hommes et du carburant aux FSR, malgré des preuves fournies par des rapports internationaux et enquêtes indépendantes.

De leur côté, les FSR ont annoncé qu'ils acceptaient la proposition de trêve mais les attaques sur le terrain n'ont pas pour autant cessé au Kordofan, région au coeur de combats intenses.

Pour l'instant, aucune nouvelle date de négociations n'a été fixée, que ce soit au niveau des médiateurs du Quad ou de l'ONU qui essaie parallèlement d'organiser des discussions entre les deux camps.

Le Soudan est déchiré depuis avril 2023 par une guerre opposant l'armée, qui contrôle le nord et l'est du pays - aux FSR, dominantes dans l'ouest et certaines zones du sud.

Depuis la prise du dernier bastion de l'armée dans la vaste région voisine du Darfour, les combats se sont intensifiés dans le sud du pays, au Kordofan, région fertile, riche en pétrole et en or, charnière pour le ravitaillement et les mouvements de troupes.

Le conflit, entré dans sa troisième année, a fait plusieurs dizaines de milliers de morts, déraciné des millions de personnes et provoqué ce que l'ONU qualifie de "pire crise humanitaire au monde".

 


Le prince héritier saoudien rencontre le chef du conseil de transition soudanais pour discuter de la sécurité et de la stabilité

Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed bin Salman a rencontré lundi à Riyad Abdel Fattah Al-Burhan pour discuter des derniers développements au Soudan et des efforts visant à rétablir la sécurité et la stabilité dans le pays. (SPA)
Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed bin Salman a rencontré lundi à Riyad Abdel Fattah Al-Burhan pour discuter des derniers développements au Soudan et des efforts visant à rétablir la sécurité et la stabilité dans le pays. (SPA)
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  • La réunion a eu lieu au palais Al-Yamamah, où le prince héritier s'est entretenu avec le président du Conseil de souveraineté transitoire du Soudan et sa délégation
  • Au cours des entretiens, les deux parties ont passé en revue la situation au Soudan, ses implications régionales et les efforts visant à assurer la sécurité et la stabilité dans le contexte de la crise persistante que traverse le pays

RIYADH : Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed ben Salmane a rencontré Abdel Fattah Al-Burhan à Riyad lundi pour discuter des derniers développements au Soudan et des efforts visant à restaurer la sécurité et la stabilité dans le pays, a rapporté l'Agence de presse saoudienne.

La réunion a eu lieu au palais Al-Yamamah, où le prince héritier s'est entretenu avec le président du Conseil de souveraineté transitoire du Soudan et sa délégation.

Au cours des entretiens, les deux parties ont passé en revue la situation au Soudan, ses implications régionales et les efforts visant à assurer la sécurité et la stabilité dans le contexte de la crise persistante que traverse le pays, a ajouté SPA.

Le ministre saoudien de la défense, le prince Khalid ben Salmane, le ministre des affaires étrangères, le prince Faisal bin Farhan, le ministre d'État et conseiller à la sécurité nationale, Musaed bin Mohammed Al-Aiban, le ministre des finances, Mohammed Al-Jadaan, et l'ambassadeur saoudien au Soudan, Ali Hassan Jaafar, ont également assisté à la réunion.


Cisjordanie: 25 immeubles d'habitation menacés de destruction dans un camp de réfugiés

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  • "Nous avons été informés par la coordination militaire et civile que l'occupation (Israël, NDLR) procédera à la démolition de 25 bâtiments le jeudi 18 décembre"
  • "Il n'y a aucune nécessité militaire à mener ces démolitions", a affirmé à l'AFP Roland Friedrich, responsable de l'agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (Unrwa) en Cisjordanie

TULKAREM: L'armée israélienne va démolir 25 immeubles d'habitation du camp de réfugiés de Nour Chams, dans le nord de la Cisjordanie, ont indiqué lundi à l'AFP des responsables locaux.

Abdallah Kamil, le gouverneur de Tulkarem où se situe le camp, a déclaré à l'AFP avoir été informé par le Cogat --l'organisme du ministère de la Défense israélien supervisant les activités civiles dans les Territoires palestiniens-- que les démolitions interviendraient d'ici la fin de la semaine.

"Nous avons été informés par la coordination militaire et civile que l'occupation (Israël, NDLR) procédera à la démolition de 25 bâtiments le jeudi 18 décembre", a indiqué à l'AFP Faisal Salama, responsable du comité populaire du camp de Tulkarem, proche de celui de Nour Chams, précisant qu'une centaine de familles seraient affectées.

Le Cogat n'a pas répondu dans l'immédiat aux sollicitations de l'AFP, l'armée israélienne indiquant se renseigner.

"Il n'y a aucune nécessité militaire à mener ces démolitions", a affirmé à l'AFP Roland Friedrich, responsable de l'agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (Unrwa) en Cisjordanie.

Il estime qu'elles s'inscrivent "dans une stratégie plus large visant à modifier la géographie sur le terrain", qualifiant la situation de "tout simplement inacceptable".

"Crise" 

La Cisjordanie est occupée par Israël depuis 1967.

Début 2025, l'armée israélienne y a lancé une vaste opération militaire visant selon elle à éradiquer des groupes armés palestiniens, en particulier dans les camps de réfugiés du nord, comme ceux de Jénine, Tulkarem et Nour Chams.

Au cours de cette opération, l'armée a détruit des centaines de maisons dans les camps, officiellement pour faciliter le passage des troupes.

Selon M. Friedrich, environ 1.600 habitations ont été totalement ou partiellement détruites dans les camps de la région de Tulkarem, entraînant "la crise de déplacement la plus grave que la Cisjordanie ait connue depuis 1967".

Lundi, une vingtaine de résidents de Nour Chams, tous déplacés, ont manifesté devant des véhicules militaires blindés bloquant l'accès au camp, dénonçant les ordres de démolition et réclamant le droit de rentrer chez eux.

"Toutes les maisons de mes frères doivent être détruites, toutes! Et mes frères sont déjà à la rue", a témoigné Siham Hamayed, une habitante.

"Personne n'est venu nous voir ni ne s'est inquiété de notre sort", a déclaré à l'AFP Aïcha Dama, une autre résidente dont la maison familiale de quatre étages, abritant environ 30 personnes, figure parmi les bâtiments menacés.

Disparaître 

Fin novembre, l'ONG Human Rights Watch a indiqué qu'au moins 32.000 personnes étaient toujours déplacées de chez elles dans le cadre de cette opération.

Comme des dizaines d'autres, le camp de Nour Chams a été établi au début des années 1950, peu après la création d'Israël en 1948, lorsque des centaines de milliers de Palestiniens ont fui ou été expulsés de leurs foyers.

Avec le temps, ces camps se sont transformés en quartiers densément peuplés, où le statut de réfugié se transmet de génération en génération.

De nombreux habitants ont affirmé à l'AFP ces derniers mois qu'Israël cherchait à faire disparaître les camps, en les transformant en quartiers des villes qu'ils jouxtent, afin d'éliminer la question des réfugiés.

Nour Chams a longtemps été un lieu relativement paisible où vivaient dans des maisons parfois coquettes des familles soudées entre elles.

Mais depuis quelques années, des mouvements armés s'y sont implantés sur fond de flambées de violence entre Palestiniens et Israéliens et de précarité économique.