Au Liban, la crise du carburant menace d'une catastrophe industrielle et agricole

Les rues de Beyrouth se sont transformées en un parking à grandeur de la ville, en raison des files devant les stations-service, espérant pouvoir faire le plein d'essence. (Photo, AFP/Archives)
Les rues de Beyrouth se sont transformées en un parking à grandeur de la ville, en raison des files devant les stations-service, espérant pouvoir faire le plein d'essence. (Photo, AFP/Archives)
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Publié le Vendredi 11 juin 2021

Au Liban, la crise du carburant menace d'une catastrophe industrielle et agricole

  • «Arrêter les importations d'un coup et laisser le pays sans carburant est un acte criminel et destructeur»
  • Une rumeur courait sur les réseaux sociaux, selon laquelle «le prix de l’essence pourrait atteindre les 140 000 LBP (93 $)

BEYROUTH : De longues files d'attente s’étiraient devant les stations-service jeudi au Liban, aux prises avec un nombre de pénuries de médicaments, de carburant, ainsi que d'autres produits de base.

Le pays est en proie à une crise économique et financière inégalée, marquée par l'effondrement de la monnaie locale et les restrictions imposée par les banques sur les retraits et les transferts de fonds.

Le ballet politique en cours n'a toujours pas réussi à mettre fin à l'impasse sur la formation d’un gouvernement.

En marge des manifestations contre la détérioration des conditions de vie, les rues de Beyrouth se sont transformées en un parking à grandeur de la ville en raison des files devant les stations-service. Espérant pouvoir faire le plein d'essence, certains conducteurs ont même passé la nuit dans leurs voitures.

Une rumeur courait sur les réseaux sociaux, selon laquelle «le prix de l’essence pourrait atteindre les 140 000 LBP (93 $), calculés sur le taux de change du dollar sur le marché noir, et du prix du baril de pétrole en ce moment».

Le taux de change du dollar sur le marché noir a augmenté jeudi, atteignant 14 750 livres libanaises.

Walid Dib, président du syndicat des ouvriers de compagnies pétrolières, prévient que «le secteur pétrolier et gazier est sur le point de s'effondrer, car les réserves seront épuisées la semaine prochaine».

 «C'est étrange que les responsables et les décideurs soient si peu investis. Aucune décision n'est prise par les responsables du dossier afin de mettre fin à cette crise».

Les réservoirs des stations-service sont constamment à court d'essence subventionnée depuis des semaines. Mais les pénuries ont atteint une nouvelle dimension jeudi, amplifiées par les craintes accrues des gens au sujet des rationnement, ce qui a entraîné la fermeture de plusieurs stations-service.

Le syndicat des propriétaires de stations-service a exhorté le gouvernement, ainsi que la Banque du Liban (BDL) «à annoncer clairement leur stratégie en ce qui concerne ce secteur, et à être francs avec nous et les gens concernant leurs véritables intentions».

Cette nouvelle crise, qui s'ajoute aux nombreuses catastrophes qui accablent les Libanais, est dangereuse, car elle affecte la structure des services au Liban et tous ses secteurs. La dernière en date étant la pénurie de carburant consacré aux centrales électriques il y a deux jours.

Le député Michel Daher, qui s'est retiré du bloc de Gebran Bassil l'an dernier, a exprimé sa crainte de voir «la crise du carburant conduire à une catastrophe industrielle et agricole».

Daher révèle qu’un grand nombre de propriétaires d'usines l'ont informé qu'ils comptent fermer boutique la semaine prochaine en raison d'une pénurie de mazout, trafiqué sans relâche en Syrie.

«L’absence de carburant va empêcher les agriculteurs d'irriguer leurs récoltes».

Daher a déclaré à Arab News qu’il «existe un plan systématique afin de détruire l'économie libanaise, surtout en été, lorsque les Libanais attendent le retour des émigrés qui rafraîchissent l'économie avec leurs dollars. Je sais qu'un grand nombre d'entre eux ont annulé leurs voyages».

Il note que «la classe politique au Liban vit dans le déni, et les gens se dirigent rapidement vers la crise, alors que l'État n'a aucun plan de sauvetage».

Le député déplore «l’inflation mortelle» et estime que personne ne veut admettre le problème.

Il s'est dit préoccupé par le fait que certaines parties «souhaitent que l'effondrement se produise».

Daher a confié qu'il croit que certains partis politiques au Liban «veulent reformuler l'accord de Taëf, et l'effondrement complet aide à tenir une convention constitutionnelle».

Il a ajouté : «Chaque camp veut se relancer politiquement, en faisant valoir son point de vue. Chaque parti a son programme politique, et la solution interne peut nécessiter le chaos, car cela amène au pouvoir des personnes qui ne pourraient autrement pas l'atteindre. Ils précèdent la solution régionale afin de rester toujours sur la table».

Jeudi, les sociétés importatrices de pétrole ont appelé à annuler les subventions sur l'essence «dans le cadre du rationnement des transferts de la BDL, et qui a fait passer le nombre mensuel de navires producteurs d'électricité de quatre à un».

George Brax, porte-parole du syndicat des propriétaires de stations-service, rappelle que la BDL «n'a pas encore donné son approbation préalable aux sociétés d'importation de pétrole, incontournable étape afin de pouvoir décharger les navires-centrales présentes dans les eaux libanaises ou qui y arrivent dans quelques jours».

Il a fait référence à «des appels passés pour tenter de trouver des solutions».

Brax craint qu’«humilier les citoyens et les propriétaires des stations-service en ce moment soit dans le cadre du jeu politique actuel au Liban».

Un navire produisant de l'électricité attend toujours en mer. Un autre navire devra arriver dans deux jours, mais la BDL n'a pas débloqué les fonds nécessaires.

Brax a aussi critiqué le gouvernement et la BDL qui ont dépensé «des dizaines de milliards de dollars de l'argent des déposants et se sont abstenus de payer quelques millions de dollars pour sauver l'été qui va certainement multiplier les dollars dépensés».

Il a ajouté : «Arrêter les importations d'un coup et laisser le pays sans carburant est un acte criminel et destructeur».

La levée sans prévenir des subventions sur l'essence à indice d'octane 98 fait partie du plan de rationalisation des subventions qui affectaient auparavant les produits alimentaires, avec seulement huit produits actuellement subventionnés.

Une source au ministère des Finances a déclaré à Arab News : «Le fait de ne pas annoncer directement la suppression des subventions est dû à la crainte que cela ne conduise à des protestations publiques avec des conséquences imprévues. Aucun politicien ne veut assumer ces conséquences».

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


La diplomatie française estime qu'Israël doit faire preuve de « la plus grande retenue » au Liban

Le drapeau français flotte sur le lac d'Enghien, à Enghien-les-Bains, dans la banlieue nord de Paris, le 25 avril 2025. (Photo Thibaud MORITZ / AFP)
Le drapeau français flotte sur le lac d'Enghien, à Enghien-les-Bains, dans la banlieue nord de Paris, le 25 avril 2025. (Photo Thibaud MORITZ / AFP)
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  • l'armée israélienne continue de mener des frappes au Liban, affirmant viser des combattants et des infrastructures du mouvement libanais, Hezbollah.
  • Le Liban avait alors demandé à Washington et Paris, garants de l'accord de cessez-le-feu, de « contraindre Israël à cesser immédiatement ses attaques ».

PARIS : La France a exhorté mercredi Israël « à faire preuve de la plus grande retenue » au Liban après la frappe israélienne qui a touché Beyrouth dimanche dernier, et a souligné que le démantèlement des sites militaires du Hezbollah revenait « exclusivement aux forces armées libanaises ».

Malgré un cessez-le-feu entré en vigueur le 27 novembre après plus d'un an de guerre entre Israël et le Hezbollah, l'armée israélienne continue de mener des frappes au Liban, affirmant viser des combattants et des infrastructures du mouvement libanais, très affaibli, qui affirme de son côté respecter l'accord.

Le week-end dernier, Israël a assuré avoir visé un entrepôt de missiles.

Le Liban avait alors demandé à Washington et Paris, garants de l'accord de cessez-le-feu, de « contraindre Israël à cesser immédiatement ses attaques ».

« La France rappelle que le respect du cessez-le-feu s'impose à toutes les parties sans exception afin de garantir la sécurité des populations civiles des deux côtés de la Ligne bleue », la frontière de facto délimitée par les Nations unies, a souligné mercredi Christophe Lemoine, porte-parole du ministère français des Affaires étrangères.

« La France appelle donc Israël à faire preuve de la plus grande retenue et à se retirer au plus vite des cinq points toujours occupés sur le territoire libanais », a-t-il ajouté lors d'un point presse.

Une commission regroupant le Liban, Israël, les États-Unis, la France et l'ONU est chargée de superviser l'application du cessez-le-feu.

Beyrouth presse la communauté internationale de faire pression sur Israël pour qu'il mette fin à ses attaques et se retire des cinq positions frontalières où il s'est maintenu dans le sud du pays, malgré l'accord.


Les services de sécurité des Émirats déjouent un transfert illégal d'armes vers le Soudan

Les autorités ont saisi environ cinq millions de munitions de type Goryunov (7,62 x 54 mm) retrouvées dans l'avion. (AFP)
Les autorités ont saisi environ cinq millions de munitions de type Goryunov (7,62 x 54 mm) retrouvées dans l'avion. (AFP)
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  • Les services de sécurité ont réussi à empêcher le transfert d'une quantité d'équipements militaires aux forces armées soudanaises 
  • Les prévenus ont été arrêtés lors d'une inspection de munitions dans un avion privé dans l'un des aéroports du pays

ABU DHABI: Les services de sécurité des Émirats arabes unis ont déjoué une tentative de transfert illégal d'armes et d'équipements militaires aux forces armées soudanaises, a déclaré mercredi le procureur général des Émirats arabes unis, Hamad Saif al-Chamsi.

M. Al-Chamsi a déclaré que les services de sécurité avaient réussi à empêcher le transfert d'une quantité d'équipements militaires aux forces armées soudanaises après l'arrestation de membres d'une cellule impliquée dans la médiation non autorisée, le courtage et le trafic illicite d'équipements militaires, sans avoir obtenu les licences nécessaires auprès des autorités compétentes.

Les prévenus ont été arrêtés lors d'une inspection de munitions dans un avion privé dans l'un des aéroports du pays.

L'avion transportait environ cinq millions de munitions de type Goryunov (54,7 x 62 mm).

Les autorités ont également saisi une partie du produit financier de la transaction en possession de deux suspects dans leurs chambres d'hôtel.

M. Al-Chamsi a déclaré que l'enquête avait révélé l'implication de membres de la cellule des chefs militaires soudanais, notamment l'ancien chef des services de renseignement Salah Gosh, un ancien officier de l'agence de renseignement, un ancien conseiller du ministre des Finances et une personnalité politique proche du général Abdel Fattah al-Burhan et de son adjoint Yasser al-Atta. Plusieurs hommes d'affaires soudanais ont également été impliqués.

Selon les enquêteurs, les membres de la cellule ont conclu un marché d'équipement militaire portant sur des fusils Kalachnikov, des munitions, des mitrailleuses et des grenades d'une valeur de plusieurs millions de dollars.

Les armes ont été transférées de l'armée soudanaise à une société d'importation des Émirats arabes unis en utilisant la méthode de transfert des HAWALADARS.

La transaction a été facilitée par l'intermédiaire d'une société appartenant à un membre fugitif de la cellule travaillant pour les forces armées soudanaises, en coordination avec le colonel Othman al-Zubair, responsable des opérations financières au sein de l'armée soudanaise.

De faux contrats et de fausses factures commerciales ont été utilisés pour prétendre que les paiements concernaient un contrat d'importation de sucre.

L'enquête a conclu que ces transactions avaient été effectuées à la demande du comité d'armement des forces armées soudanaises, présidé par Al-Burhan et son adjoint Al-Atta, en toute connaissance de cause et avec leur approbation. Les membres de la cellule ont été directement chargés de négocier et de finaliser les transactions par Ahmed Rabie Ahmed al-Sayed, une personnalité politique proche du commandant en chef soudanais et responsable de la délivrance des certificats et des approbations des utilisateurs finaux.

Les enquêteurs ont confirmé que Salah Gosh jouait un rôle central dans la gestion du trafic illégal d'équipements militaires aux Émirats arabes unis, en coordination avec d'autres membres de la cellule.

Le groupe a réalisé une marge bénéficiaire de 2,6 millions de dollars (1 dollar = 0,88 euro) par rapport à la valeur réelle des deux transactions, qu'il s'est répartie entre lui et plusieurs complices. La part de Gosh a été retrouvée en possession du suspect Khalid Youssef Mukhtar Youssef, ancien officier de renseignement et ex-chef de cabinet de Gosh.

La cargaison saisie était arrivée à l'aéroport des Émirats arabes unis à bord d'un avion privé en provenance d'un pays étranger.

L'avion s'était posé pour faire le plein et avait officiellement déclaré qu'il transportait un lot de fournitures médicales.

Cependant, la cargaison militaire a été découverte sous la supervision du ministère public, sur la base de mandats judiciaires émis par le procureur général.

Les autorités ont également saisi des copies des contrats relatifs aux deux transactions, de faux documents d'expédition, ainsi que des enregistrements audio et des messages échangés entre les membres de la cellule.

L'enquête a permis de découvrir plusieurs sociétés appartenant à un homme d'affaires soudano-ukrainien, dont une opérant aux Émirats arabes unis.

Ces sociétés ont fourni à l'armée soudanaise des armes, des munitions, des grenades et des drones, en collaboration avec les membres de la cellule et le responsable financier de l'armée.

L'une des sociétés figure sur la liste des sanctions américaines.

Les enquêtes en cours ont révélé que les intérêts financiers et les profits du groupe sont étroitement liés à la poursuite du conflit interne au Soudan.

Le procureur général a souligné que cet incident représentait une grave atteinte à la sécurité nationale des Émirats arabes unis, en faisant de leur territoire une plateforme pour le trafic illégal d'armes à destination d'un pays en proie à des troubles civils, en plus de constituer des infractions pénales punissables par la loi.

Il a conclu en déclarant que le ministère public poursuivait ses procédures d'enquête en vue de déférer les suspects à une procédure judiciaire d'urgence.

Les résultats définitifs seront annoncés à la fin de l'enquête.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Retailleau engage la procédure de dissolution d'Urgence Palestine

Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau intervient lors d'un débat sur le narcotrafic à l'Assemblée nationale française à Paris, le 29 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau intervient lors d'un débat sur le narcotrafic à l'Assemblée nationale française à Paris, le 29 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
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  • A la veille du 1er mai, Bruno Retailleau a annoncé  mecredi l'engagement de la procédure de dissolution du groupe Urgence Palestine.
  • Le groupe organise régulièrement des manifestations, qui ont parfois été interdites par les autorités.

PARIS : A la veille du 1er mai, Bruno Retailleau a annoncé  mecredi l'engagement de la procédure de dissolution du groupe Urgence Palestine, ainsi que de Lyon Populaire, qui appartient à l'ultra droite, après avoir lancé mardi celle du groupe antifasciste La Jeune Garde.

Invité de CNews/Europe 1, le ministre de l'Intérieur a justifié la dissolution d'Urgence Palestine en affirmant qu'il fallait « taper sur les islamistes ». « L'islamisme est une idéologie qui essaie d'instrumentaliser une religion. Il y a une défiguration de la foi », a-t-il dit.

« Il ne faut pas défigurer la juste cause des Palestiniens », a poursuivi M. Retailleau, qui a insisté sur le fait que « beaucoup de nos compatriotes musulmans professent une foi parfaitement compatible avec les valeurs de la République ».

Créé au lendemain de l'attaque sans précédent du Hamas dans le sud d'Israël le 7 octobre 2023, qui a déclenché la guerre à Gaza, le collectif Urgence Palestine dit rassembler « des citoyens, des organisations et mouvements associatifs, syndicaux et politiques mobilisés pour l'auto-détermination du peuple palestinien ». 

Le groupe organise régulièrement des manifestations, qui ont parfois été interdites par les autorités.

« À l'heure où le peuple palestinien est confronté au génocide, à la famine, où les Israéliens cherchent à détruire et à anéantir le peuple palestinien, que fait le gouvernement français ? Il veut dissoudre notre collectif, c'est insupportable », a réagi Omar Al Soumi, l'un des militants d'Urgence Palestine.

« C'est la réalité d'une France complice du génocide », a-t-il accusé dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux.

Urgence Palestine a reçu de nombreux messages de soutien de la part d'organisations de l'extrême gauche et de la gauche radicale. 

« Non à la dissolution d'Urgence Palestine », a écrit sur Instagram le Nouveau Parti Anticapitaliste, dénonçant « des prétextes pour faire taire les voix solidaires avec la Palestine ! ».

L'eurodéputée insoumise Rima Hassan a également critiqué les dissolutions engagées contre la Jeune Garde et Urgence Palestine.

« La dérive autoritaire et fasciste de Macron est aussi réelle, tangible et concrète », a-t-elle réagi sur X.

Tsedek!, qui se présente comme un « collectif juif décolonial », a aussi apporté son soutien à ces deux organisations.

« Le gouvernement qui appelle à la dissolution d’Urgence Palestine, c’est la République qui reprend ses droits et réaffirme que l’antisémitisme ne passera pas en France », s'est au contraire félicitée Sarah Aizenman, présidente du collectif « Nous vivrons », auprès de l'AFP. 

« Cette organisation ne défend pas les droits des Palestiniens, elle soutient une organisation terroriste », a accusé Mme Aizenman.

Les annonces de procédures de dissolution contre La Jeune Garde et Urgence Palestine interviennent à la veille des rassemblements du 1er-Mai et pourraient tendre le climat des manifestations, notamment à Paris, selon un haut responsable de la police.

Le ministre de l'Intérieur et le préfet de police de Paris, Laurent Nuñez, ont par avance prévenu qu'aucun débordement ne serait toléré.

Environ 15 000 personnes sont attendues jeudi pour la manifestation parisienne.