Turquie: le feu aux portes d'une centrale thermique

L'opposition a reproché au président Erdogan d'avoir échoué à maintenir sa flotte de bombardiers d'eau et d'avoir mis du temps à accepter l'aide internationale. (Photo, AFP)
L'opposition a reproché au président Erdogan d'avoir échoué à maintenir sa flotte de bombardiers d'eau et d'avoir mis du temps à accepter l'aide internationale. (Photo, AFP)
Short Url
Publié le Jeudi 05 août 2021

Turquie: le feu aux portes d'une centrale thermique

  • Le feu avait d'abord pu être maîtrisé mercredi grâce à deux avions bombardiers d'eau envoyés par l'Espagne et à des hélicoptères
  • Les réservoirs d'hydrogène utilisés pour refroidir la centrale, qui fonctionne au fuel et au charbon, avaient été vidés et emplis d'eau par précaution

MILAS: Le feu a atteint mercredi une centrale thermique qui a dû être évacuée dans le sud de la Turquie, alors que les incendies sans précédent auxquels fait face le pays depuis plus d'une semaine mettent à l'épreuve le pouvoir du président Erdogan.

Une équipe de l'AFP a pu voir des pompiers, la police et des habitants fuir la centrale thermique située près de la ville de Milas, tandis que les flammes s'approchaient.

Les autorités locales avaient auparavant indiqué que les réservoirs d'hydrogène utilisés pour refroidir la centrale, qui fonctionne au fuel et au charbon, avaient été vidés et emplis d'eau par précaution.

Des images mises en ligne par le maire de Milas, Muhammet Tokat, montraient un feu violent aux portes de la centrale.

"La centrale est en cours d'évacuation totale", a tweeté M. Tokat.

Le feu avait d'abord pu être maîtrisé mercredi grâce à deux avions bombardiers d'eau envoyés par l'Espagne et à des hélicoptères, qui avaient déversé de l'eau sur les sommets boisés et zones résidentielles proches. Mais les flammes sont reparties dans l'après-midi.

"On vous supplie et vous avertit depuis des jours. L'incendie a encerclé la centrale", avait tweeté dans la journée le maire de Milas, demandant "qu'un avion bombardier d'eau soit envoyé ici de manière urgente".

Erdogan

Critiqué sur sa gestion de ces incendies, qui ont déjà fait huit morts, le président Recep Tayyip Erdogan, qui donnait une interview à la télévision dans la soirée, a admis que la centrale "risquait d'être détruite par le feu".

Plus de 180 feux ont ravagé des forêts et des terres agricoles, ainsi que des zones habitées sur les côtes méditerranéennes de la Turquie depuis mercredi dernier.

Les incendies ont aussi gravement touché les sites touristiques qui avaient récemment pu reprendre leurs activités après des mois de restrictions liées à la pandémie de la Covid-19.

Selon le service de surveillance par satellite de l'Union européenne, la "puissance radiative" des incendies en Turquie a atteint une intensité "sans précédent" depuis 2003.

L'opposition a reproché au président Erdogan d'avoir échoué à maintenir sa flotte de bombardiers d'eau et d'avoir mis du temps à accepter l'aide internationale. 

Le Haut Conseil turc de l'audiovisuel (RTUK en turc) a de son côté mis en garde les chaînes de télévision contre la diffusion d'informations sur les incendies qui pourraient "provoquer la peur et l'inquiétude" au sein de la population.

M. Erdogan, dans son interview à la télévision, a accusé l'opposition de tenter de tirer un bénéfice politique de la situation, alors que des pays voisins comme la Grèce sont aussi touchés par les incendies.

"Les feux de forêt sont une menace internationale tout comme la pandémie de Covid-19", s'est-il défendu.

"Comme partout dans le monde, il y a eu une forte augmentation des feux de forêt dans notre pays. Il ne devrait pas y avoir de place pour la politique dans cette question", a-t-il ajouté.

Une guerre

Lors des premiers jours des incendies, des chroniqueurs sur les médias pro-gouvernementaux avaient accusé le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), une organisation considérée comme terroriste par la Turquie et ses alliés occidentaux, d'en être responsable.

Mais les autorités citent désormais la vague de chaleur extrême qui continue de frapper le sud de la Turquie.

Selon des experts, le changement climatique dans des pays comme la Turquie augmente la fréquence et l'intensité des incendies de forêt. 

Le ministre turc de l'Agriculture, Bekir Pakdemirli, a déclaré que les températures dans la ville égéenne de Marmaris avaient atteint un record historique de 45,5 degrés cette semaine.

"Nous menons une guerre", a déclaré le ministre aux journalistes. "Nous devons garder notre moral et notre motivation. J'exhorte tout le monde à être patient", a-t-il ajouté.


Troisième navire humanitaire de KSrelief pour Gaza

Le troisième navire d’aide humanitaire de l’Arabie saoudite pour Gaza est arrivé à Port-Saïd, en Égypte. (SPA)
Le troisième navire d’aide humanitaire de l’Arabie saoudite pour Gaza est arrivé à Port-Saïd, en Égypte. (SPA)
Short Url
  • Le navire transporte 300 grands conteneurs d’aide humanitaire pesant 1 246 tonnes
  • Les produits seront distribués par l'organisme d’aide humanitaire saoudien KSrelief

PORT-SAÏD, Égypte: Le troisième navire d’aide humanitaire saoudien pour Gaza est arrivé à Port-Saïd, en Égypte.

Les produits seront distribués par l’organisme d’aide humanitaire du Royaume, KSrelief, a rapporté jeudi l’Agence de presse saoudienne.

Le navire transporte 300 grands conteneurs pesant 1 246 tonnes, dont 200 conteneurs contenant des fournitures médicales, et 100 contenant de la nourriture, du lait pour nourrissons de longue conservation, ainsi que du matériel pour les abris.

Il y a quelques jours, deux navires envoyés par le KSrelief sont arrivés à Port-Saïd avec un chargement similaire pour aider les Palestiniens touchés par les bombardements israéliens.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Les relations turco-israéliennes mises à l’épreuve après la dernière dispute au sujet du Hamas

Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, (à droite) et le ministre turc de la Santé, Fahrettin Koca, (à gauche) s'entretenant avec une patiente palestinienne atteinte d'un cancer, qui a passé la frontière de Gaza pour se rendre en Égypte et a été transportée en Turquie pour y être soignée, au Bilkent City Hospital, à Ankara. (AFP)
Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, (à droite) et le ministre turc de la Santé, Fahrettin Koca, (à gauche) s'entretenant avec une patiente palestinienne atteinte d'un cancer, qui a passé la frontière de Gaza pour se rendre en Égypte et a été transportée en Turquie pour y être soignée, au Bilkent City Hospital, à Ankara. (AFP)
Short Url
  • Dans un enregistrement diffusé dimanche à la télévision israélienne, Ronen Bar, le chef du Shin Bet, a déclaré qu’Israël avait l’intention d’éliminer les dirigeants du Hamas au Qatar, au Liban et en Turquie
  • Les relations bilatérales entre la Turquie et Israël n'ont jamais été à l'abri des acteurs mondiaux ou régionaux, affirme l’analyste Betul Dogan-Akkas à Arab News

ANKARA: À la suite de l’engagement du directeur du Service de sécurité intérieure israélien, Ronen Bar, de poursuivre les dirigeants du Hamas à l’étranger, tous les regards sont désormais tournés vers la Turquie pour savoir si cette évolution va encore aggraver les tensions entre les deux pays.

Dans un enregistrement diffusé dimanche sur la chaîne publique israélienne Kan, Ronen Bar, le chef du Shin Bet, a déclaré qu’Israël avait l’intention d’éliminer les dirigeants du Hamas au Qatar, au Liban et en Turquie.

«C'est notre Munich. Cela prendra quelques années, mais nous serons là pour le faire», a-t-il signalé, faisant allusion à l’attaque de 1972 au cours de laquelle des hommes armés palestiniens de Septembre noir avaient tué 11 membres de l’équipe olympique israélienne lors des jeux de Munich.

Israël avait ensuite mené des opérations en guise de représailles contre les membres de Septembre Noir dans différents pays, pendant plusieurs années.

 


A Nahariya dans le Nord d'Israël, les habitants craignent un deuxième front

Un Israélien armé à Nahariya, ville côtière du nord d'Israël, près de la frontière avec le Liban, le 8 décembre 2023 (Photo, AFP).
Un Israélien armé à Nahariya, ville côtière du nord d'Israël, près de la frontière avec le Liban, le 8 décembre 2023 (Photo, AFP).
Short Url
  • En visite jeudi dans le nord auprès des troupes, le Premier ministre Benjamin Netanyahou a menacé de transformer Beyrouth «en Gaza»
  • Les violences à la frontière ont fait plus de 110 morts au Liban et une dizaine côté israélien

NAHARIYA: Daniel Bussidan semble encore sous le choc: une roquette vient de tuer l'un de ses proches, et comme tous les habitants de la station balnéaire israélienne la plus proche du Liban, il craint l'embrasement régional.

"J'ai peur d'une attaque depuis le Liban", lance ce jeune homme de 26 ans qui travaille à l'abri des rangées d'eucalyptus immenses dans une boulangerie de la principale rue commerçante de Nahariya, verdoyant lieu de villégiature sur les rives de la Méditerranée.

En temps normal, les 75.000 habitants et les promeneurs profitent de la douceur du climat et des spots de surf.

Mais depuis plus de deux mois, ils vivent sous la menace des échanges de tirs quotidiens entre l'armée israélienne et le puissant Hezbollah.

Car la destination se situe à quelques kilomètres seulement de la frontière septentrionale, bien visible sur la colline au loin. Et le mouvement chiite, l'un des ennemis jurés d'Israël, dit être "entré dans la bataille depuis le 8 octobre", pour soutenir le Hamas palestinien, au pouvoir à Gaza.

«On est pas venus habiter en Suisse»

En visite jeudi dans le nord auprès des troupes, le Premier ministre Benjamin Netanyahou a menacé de transformer Beyrouth "en Gaza", intensément bombardée depuis l'attaque sanglante du Hamas sur le sol israélien le 7 octobre, si le Hezbollah "choisissait de déclencher une guerre totale".

Dans ce contexte:  A la station service, Mair, 52 ans, qui vend du bois de construction et ne souhaite pas donner son nom de famille, parle d'un chiffre d'affaires en chute libre.

Même son de cloche dans les restaurants du front de mer et dans les boutiques affichant fièrement le drapeau national: peu de lèche-vitrine au retour de plage, beaucoup de fusils en bandoulières.

"Il peut y avoir une infiltration" de combattants du Hezbollah depuis le Liban et "dès qu'on sort, on repère les abris", explique Nathalie Betito, 44 ans, qui a quand même tenu à célébrer Hanouka, la fête juive des lumières.

Elle a retrouvé une centaine de personnes dans la salle attenante de la synagogue centrale avec sa fille et son mari Arié, avec lequel elle a immigré depuis la France il y a cinq ans.

"On est pas venus habiter en Suisse", dit ce dernier, 47 ans, qui s'occupe des nouveaux arrivants à la mairie de Nahariya, attractive pour son cadre de vie comme pour ses avantages fiscaux, concédés en raison de sa position exposée.

«On attend la guerre»

Pas question de suivre des Russes et des Ukrainiens qui ne voulaient pas subir encore un front et sont repartis massivement trouver un point de chute moins angoissant, dans un pays d'Europe occidentale.

Même si les violences à la frontière ont fait plus de 110 morts au Liban et une dizaine côté israélien, où l'armée a tenu à montrer à l'AFP des troupes à l'entraînement sur le plateau du Golan annexé, prêtes à en découdre. Quant à Gaza, près de 17.500 Palestiniens ont été tués dans la riposte israélienne à l'attaque sans précédent de commandos du Hamas, qui a fait 1.200 morts sur le sol israélien le 7 octobre, selon les autorités locales.

"On a un revolver pointé sur la tempe", estime Arié Betito à Nahariya, qui craint l'arsenal du Hezbollah "pointé sur nous", mais ne croit toutefois pas à une guerre "totale".

"Le prix à payer serait exorbitant" et "ni d'un côté ni de l'autre", "quelqu'un a "envie de ça".

"Totale" ou pas, Efi Dayan, 60 ans, "sait qu'il va y avoir une guerre ici". "On se prépare avec de la nourriture, des vêtements. On l'attend", souffle-t-il calmement sous le soleil hivernal.