L’économie libanaise «au bord de l’effondrement», avertit l’ambassadrice américaine

L’ambassadrice américaine au Liban, Dorothy Shea. (Photo, AFP)
L’ambassadrice américaine au Liban, Dorothy Shea. (Photo, AFP)
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Publié le Mardi 17 août 2021

L’économie libanaise «au bord de l’effondrement», avertit l’ambassadrice américaine

  • Le président refuse de se soumettre à la volonté du peuple et des politiciens qui réclament sa démission
  • Le Hezbollah appelle à la formation urgente d’un gouvernement, «coûte que coûte»

BEYROUTH: L’ambassadrice américaine Dorothy Shea a averti lundi que l’économie du Liban ainsi que les services de base sont «au bord de l’effondrement», alors que le président Michel Aoun et le Premier ministre désigné Najib Mikati s’étaient entretenus pour aboutir à une formule satisfaisante afin de former un nouveau gouvernement.

Prenant la parole après sa rencontre avec Aoun et Mikati, l’ambassadrice a affirmé que les Libanais souffraient et que chaque jour passé sans «un gouvernement compétent engagé à et capable de mettre en œuvre des réformes indispensables» contribue à transformer la situation déjà désastreuse en une véritable catastrophe humanitaire.

 «Nous appelons tous ceux qui continuent d’entraver la formation du gouvernement et la mise en place de réformes à mettre de côté leurs intérêts partisans», a-t-elle ajouté.

Les États-Unis ont approuvé le nouveau cadre de sanctions établi par l’UE pour promouvoir la responsabilisation et les réformes au Liban. Sur ce, l’ambassadrice a confirmé que son pays «continuerait de coordonner» avec ses partenaires sur des mesures adéquates.  

«Il faut que les dirigeants libanais prennent des mesures de sauvetage urgentes, et cela ne peut avoir lieu sans un gouvernement compétent qui commence à répondre aux besoins de son peuple et qui œuvre pour le redressement économique.»

Lundi, des sources ont révélé que la France et les États-Unis exerçaient la pression sur tous les partis politiques du Liban afin qu’ils forment un gouvernement.

Malgré les crises continues, le taux de change est tombé à 18,500 livres libanaises contre un dollar, en début de semaine.

Il paraît que les concertations pour former un gouvernement ont permis d’atteindre une nouvelle étape: celle de choisir des ministres, suite à un accord pour répartir les portefeuilles entre les différentes confessions et les partis politiques.  

La semaine passée, Aoun et Mikati se sont mis d’accord pour respecter l’ancienne répartition de portefeuilles, attribuant ainsi le ministère des Finances aux Chiites, le ministère de l’Intérieur aux Sunnites et le ministère de la Justice aux Maronites. 

Cependant, le député Mohammad Hajjar, membre du bloc parlementaire du "Futur", a gâché l’optimisme qui régnait.

«Nous verrons comment les choses vont se passer à la fin», a-t-il dit à Arab News. «Des pressions intérieures et extérieures sont exercées sur Aoun pour faciliter la formation du gouvernement.» 

Il a exprimé son inquiétude quant à l’effort de Aoun «de tolérer ces pressions en essayant d’être optimiste, pour ensuite revenir sur ses promesses.» 

Lundi, Aoun a dit qu’il ne démissionnerait pas, répondant ainsi à tous ceux qui le lui avaient demandé. 

Il a dit qu’il remplirait ses fonctions jusqu’à la fin et que le président de la République – «malgré les prérogatives qu’il a perdues» – est partenaire dans la formation du gouvernement avec le Premier ministre désigné. Il a le droit de choisir entre les noms proposés, «en raison de l'autorité dont il dispose.»

«Personne ne va pouvoir ébranler ma détermination à poursuivre le travail que j’ai commencé dans la lutte contre la corruption», a-t-il ajouté. 

Aoun a accusé certains de chercher à entraver la formation du gouvernement, affirmant que les grèves ont perturbé le commerce, l’industrie et la production. Il a également dit que l’audit juricomptable était indispensable.

 «Plus nous nous rapprochons de l’audit, plus les efforts pour s’y opposer s’intensifient. La corruption est le produit de la mentalité mafieuse, comme les faits l’ont prouvé au fil des années.»

Le président a tenu ces propos alors que le drapeau libanais était baissé au palais présidentiel, en deuil pour les victimes de l’explosion du camion-citerne au Akkar qui a eu lieu dimanche.

La Croix-Rouge libanaise a trouvé encore un corps brûlé sur les lieux de l’incident, portant le nombre de victimes à 29.

Les efforts pour se mettre d’accord sur un nouveau gouvernement ont été stimulés par une crise d’essence qui a paralysé une grande partie du pays.

La tragédie de l’explosion du dimanche et la lutte désespérée pour avoir accès aux produits de première nécessité, comme le fuel, ont mis en évidence la détérioration de l’État et des secteurs de sécurité. Le Hezbollah a également prévenu que le chaos pourrait s’aggraver et a appelé à la formation urgente d’un gouvernement, «sous n’importe quelle forme et à n’importe quel prix.»

«La solution pour la levée des subventions est de former un gouvernement qui soit capable de prendre la bonne décision. La situation du pays est insupportable. Que la formation ait lieu le plus tôt possible», a dit Hassan Nasrallah, le secrétaire général du Hezbollah.

Le Hezbollah a été accusé de ne pas avoir suffisamment poussé Aoun, son allié, à former un gouvernement; mais Nasrallah avait l’air de s’adresser au president dans son discours: «Ça suffit. Renoncez à vos quotas. Formez un gouvernement, coûte que coûte. Tout le monde doit faire des sacrifices.»


Centre de coordination militaro-civile pour Gaza: beaucoup de discussions, peu de résultats

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  • "Il y a des moments où on se dit qu'on a touché le fond mais qu'on creuse encore" ironise un humanitaire qui s'y est rendu plusieurs fois pour parler des abris fournis aux centaines de milliers de Palestiniens de Gaza déplacés
  • "Au départ, personne ne savait ce que c'était, mais tout le monde voulait en être", raconte un diplomate européen à l'AFP, "maintenant les gens déchantent un peu, ils trouvent que rien n'avance, mais on n'a pas le choix"

JERUSALEM: Lancé par les Etats-Unis dans le sillage du cessez-le-feu entre Israël et le Hamas pour surveiller la trêve et favoriser l'afflux d'aide humanitaire, le Centre de coordination militaro-civile (CMCC) pour Gaza peine à tenir ses promesses.

"Au départ, personne ne savait ce que c'était, mais tout le monde voulait en être", raconte un diplomate européen à l'AFP, "maintenant les gens déchantent un peu, ils trouvent que rien n'avance, mais on n'a pas le choix, il n'y a aucune autre initiative, c'est ça ou continuer à discuter dans le vent avec des Israéliens".

"Il y a des moments où on se dit qu'on a touché le fond mais qu'on creuse encore", ironise un humanitaire qui s'y est rendu plusieurs fois pour parler des abris fournis aux centaines de milliers de Palestiniens de Gaza déplacés par la campagne militaire israélienne.

Le CMCC doit permettre d'amorcer la suite des étapes du plan de paix pour Gaza après plus de deux ans d'une guerre dévastatrice déclenchée le 7 octobre 2023 par l'attaque sans précédent du mouvement palestinien Hamas sur Israël.

"Lorsque nous l'avons ouvert, nous avons clairement indiqué qu'il se concentrait sur deux choses: faciliter l'acheminement de l'aide humanitaire, logistique et sécuritaire vers Gaza et aider à surveiller en temps réel la mise en oeuvre de l'accord", insiste le capitaine Tim Hawkins, porte-parole du Commandement militaire central américain (Centcom), couvrant notamment le Moyen-Orient.

L'initiative a été présentée aux acteurs (ONG, agences des Nations unies, diplomates...) comme un générateur d'idées totalement inédites.

Frustrés par leurs difficultés avec les autorités israéliennes, de nombreux pays et acteurs humanitaires disent s'être jetés dans le projet, impatients d'avoir un nouvel interlocuteur se disant enclin à trouver des solutions: les Etats-Unis.

"Rien n'a changé" 

"Au début, les Américains nous ont dit qu'ils découvraient qu'Israël interdisaient l'entrée de tout un tas de choses dans Gaza, la fameuse liste des biens à double usage, ils avaient l'air choqués et on se disait qu'enfin on allait franchir cet obstacle", raconte un ingénieur humanitaire, "mais force est de constater que strictement rien n'a changé".

Deux mois après l'ouverture, nombre d'humanitaires et diplomates contactés par l'AFP jugent, sous couvert de l'anonymat, que la capacité ou la volonté américaines à contraindre Israël est limitée.

Les visiteurs réguliers ou occasionnels des lieux ont décrit à l'AFP le grand hangar occupé par le CMCC à Kiryat Gat (sud d'Israël), comme un entrepôt où de nombreux militaires, israéliens et américains principalement, rencontrent des humanitaires, diplomates, et consultants.

Le premier des trois étages du bâtiment est réservé aux Israéliens, et le dernier aux troupes américaines. Tous deux sont interdits d'accès aux visiteurs.

Le deuxième, recouvert de gazon artificiel, sert d'espace de rencontres avec le monde extérieur.

"On dirait un espace de coworking, mais avec des gens en uniforme", s'amuse une diplomate qui raconte y croiser des "GIs qui boivent de la bière" au milieu d'une sorte d'open-space, avec des panneaux récapitulant les principaux points du plan Trump.

Plusieurs personnes ont dit à l'AFP avoir vu un tableau blanc barré de l'inscription "What is Hamas?" ("Qu'est-ce que le Hamas?") en lettres capitales, sans éléments de réponse.

"Il y a des tables rondes sur des sujets qui vont de la distribution d'eau ou de nourriture à la sécurité", raconte un humanitaire, "en gros on nous écoute décrire ce qu'on veut faire, et quels problèmes on a rencontrés depuis deux ans".

"Boussole du droit" 

Mais "ce n'est pas là que les décisions sont prises", tranche un diplomate qui cite des canaux de discussions parallèles, notamment une équipe supervisée par Arieh Lighstone, un collaborateur de l'émissaire américain Steve Witkoff, à Tel-Aviv.

Plusieurs diplomates regrettent l'absence d'officiels palestiniens dans les murs.

Un autre problème réside dans l'émergence de concepts largement rejetés par la communauté internationale, notamment celui des "Alternative Safe Communities" (ASC), visant à regrouper des civils "vérifiés", non affiliés au Hamas, dans des communautés créées ex nihilo dans une zone de la bande de Gaza sous contrôle militaire israélien, et où les services de base seraient dispensés.

"On a perdu la boussole du droit", commente une diplomate.

Mais le reproche qui revient le plus souvent est le fait que les questions politiques (gouvernance, maintien de l'ordre...) sont évacuées au profit de questions techniques.

"Ils discutent d'où mettre les stations d'épuration, pas de qui les exploitera ni de qui paiera les employés", résume un autre.

Concédant "certaines frictions", sans plus de détail, le capitaine Hawkins, du Centcom, met en avant certaines avancées comme l'ouverture de nouveaux points de passage pour l'aide à destination de Gaza. "Nous progressons, assure-t-il, tout en reconnaissant pleinement qu'il reste encore beaucoup à faire."


Le Congrès américain approuve la levée définitive des sanctions contre la Syrie

La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars. (AFP)
La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars. (AFP)
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  • Le gouvernement américain a indiqué être favorable à l'abrogation de cette loi Caesar
  • Son application avait déjà été suspendue par deux fois pour six mois après l'annonce du président Trump en mai levant les sanctions contre la Syrie dans le cadre de la normalisation des relations entre ce pays et les Etats-Unis

WASIHNGTON: Le Congrès américain a approuvé mercredi la levée définitive des sanctions imposées par les Etats-Unis contre la Syrie du temps de Bachar al-Assad, devant permettre le retour d'investissements dans ce pays ravagé par des années de guerre civile.

L'abrogation d'une loi dite "Caesar", adoptée en 2019 lors du premier mandat de Donald Trump et qui imposait ces sanctions, figure en effet dans le texte sur la stratégie de défense (NDAA), que le Sénat américain a approuvé mercredi par 77 voix pour et 20 contre.

La Chambre des représentants s'était déjà prononcée la semaine dernière et le texte attend désormais d'être promulgué par le président américain.

Le gouvernement américain a indiqué être favorable à l'abrogation de cette loi Caesar. Son application avait déjà été suspendue par deux fois pour six mois après l'annonce du président Trump en mai levant les sanctions contre la Syrie dans le cadre de la normalisation des relations entre ce pays et les Etats-Unis.

Le chef de la diplomatie syrienne, Assaad al-Chaibani, a salué sur Telegram le vote du Sénat comme "ouvrant de nouveaux horizons pour la coopération et le partenariat entre notre pays et le reste du monde".

La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars.

Bien que son application soit suspendue, de nombreux responsables américains jugeaient qu'elle pouvait nuire à la confiance des investisseurs tant qu'elle n'était pas abrogée.

Le dirigeant syrien Ahmad al-Chareh a été reçu le 10 novembre à la Maison Blanche par le président Trump, une première pour un chef d'Etat syrien depuis l'indépendance du pays en 1946 et une consécration pour l'ancien jihadiste qui, en moins d'un an au pouvoir, a sorti son pays de l'isolement.

Donald Trump l'avait déjà rencontré lors d'un voyage dans le Golfe en mai, annonçant alors la levée des sanctions américaines.

Après 13 ans de guerre civile, la Syrie cherche à garantir des fonds pour sa reconstruction, dont le coût pourrait dépasser 216 milliards de dollars, selon la Banque mondiale.

"L'abrogation aujourd'hui de la loi Caesar est une étape décisive pour donner au peuple syrien une véritable chance de se reconstruire après des décennies de souffrances inimaginables", s'est félicité la sénatrice démocrate Jeanne Shaheen.


Les principales villes du Soudan privées de courant après des frappes de drones sur une centrale

Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts. (AFP)
Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts. (AFP)
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  • Les frappes ont ciblé les transformateurs de la station électrique d’Al-Muqrin à Atbara, dans l'Etat du Nil, dans l'est du pays, a précisé la compagnie d'électricité nationale
  • Deux secouristes ont été tués par une deuxième frappe de drone survenue alors qu'ils tentaient d'éteindre l'incendie provoqué par la première, a déclaré un responsable de la centrale en attribuant cette frappe aux paramilitaires des FSR

PORT-SOUDAN: Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts, ont indiqué plusieurs témoins à l'AFP.

Les frappes ont ciblé les transformateurs de la station électrique d’Al-Muqrin à Atbara, dans l'Etat du Nil, dans l'est du pays, a précisé la compagnie d'électricité nationale.

Deux secouristes ont été tués par une deuxième frappe de drone survenue alors qu'ils tentaient d'éteindre l'incendie provoqué par la première, a déclaré un responsable de la centrale en attribuant cette frappe aux paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR).

Le gouvernement de l’État du Nil a confirmé la mort des deux secouristes dans un communiqué officiel.

Cette station est un nœud stratégique du réseau électrique soudanais, recevant l’électricité produite par le barrage de Merowe — la plus grande source d'énergie hydroélectrique du pays — avant sa redistribution vers plusieurs régions.

Des témoins ont également indiqué qu’aux alentours de 02H00 (minuit GMT), les forces de l’armée régulière avaient activé leurs systèmes de défense antiaérienne, rapportant avoir vu des flammes et de la fumée s'élever au-dessus de la ville contrôlée par l'armée en guerre depuis avril 2023 contre les FSR.

Les coupures d’électricité se sont étendues à plusieurs États, notamment ceux du Nil, de la mer Rouge — où se trouve Port-Soudan, siège provisoire du gouvernement pro-armée — ainsi qu’à la capitale Khartoum, selon des témoins, l'incendie n'étant toujours pas maitrisé.

Les FSR n’ont jusqu'à présent pas commenté l'attaque.

Ces derniers mois, les FSR ont été accusées de lancer des attaques de drones sur de vastes zones contrôlées par l’armée, visant des infrastructures civiles et provoquant des coupures de courant affectant des millions de personnes.

La guerre, qui a éclaté en avril 2023, a fait plusieurs dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué "la pire crise humanitaire au monde", selon l'ONU.