Les explosions de Khojir et de Natanz sabotent la stratégie de l’Iran

Le président iranien Hassan Rouhani s'exprimant lors d'une réunion du cabinet à Téhéran. (AFP)
Le président iranien Hassan Rouhani s'exprimant lors d'une réunion du cabinet à Téhéran. (AFP)
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Publié le Samedi 11 juillet 2020

Les explosions de Khojir et de Natanz sabotent la stratégie de l’Iran

  • Une explosion près d'un complexe militaire à l'extérieur de Téhéran le 26 juin a attiré l'attention du monde sur les capacités étendues du régime
  • Les experts disent que l'explosion et un autre incendie à Natanz rappellent la menace que l'Iran continue de faire peser sur la région

LONDRES: Une énorme explosion à l'est de Téhéran aux premières heures du 26 juin a provoqué une peur et une confusion généralisées dans la capitale iranienne. Cette situation a été causée en grande partie par le gouvernement lui-même qui a rapidement commencé à diffuser des informations erronées sur la cause et l'intensité de l'explosion qui s'est produite près d'un complexe militaire.

Malgré les actions et les déclarations évasives du régime, des bribes de vérité ont progressivement émergé. Les experts s'accordent à dire que l'explosion est une nouvelle gêne pour un régime tendu, mais derrière elle se cache un rappel de la menace qui pèse sur la région et, au-delà, par la République islamique.

Lorsque des séquences vidéo de l'explosion ont été diffusées en ligne, le ministère iranien de la Défense a rapidement déployé un porte-parole pour minimiser l'incident. Davoud Abdi, s'exprimant sur la chaîne de l’Etat, l’a qualifiée d'explosion mineure dans une installation de stockage de gaz située dans une « zone publique » du complexe militaire de Patrchine, à l’extérieur de la capitale iranienne.

Ancien site nucléaire bien connu, une explosion au complexe militaire de Partchine aurait sans aucun doute été un grave incident. Cependant, les analystes et les utilisateurs des réseaux sociaux ont rapidement jeté un froid sur cette affirmation et identifié une autre base militaire à l'est de Téhéran - Khojir – là où l'explosion a eu lieu.

Samuel Hickey, analyste de recherche au centre pour le contrôle des armes et la non-prolifération, basé à Washington, a expliqué à Arab News que l'imagerie satellite prouve que « l'explosion a eu lieu au complexe de production de missiles de Khojir, à l'est de Téhéran, et non à Partchine comme suggéré dans certains médias.

La raison pour laquelle Téhéran prétendrait que l'explosion s'est produite à Partchine et non pas à Khojir est "un mystère intrigant", a affirmé Hickey.

Cette question est particulièrement pertinente compte tenu de la transparence apparente de Téhéran concernant l’incendie du complexe de Natanz, installation nucléaire connue d’Ispahan, le 2 juillet. La publication rapide de photos des dommages causés et les voies de communication ouvertes avec l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) contrastaient fortement avec sa réponse à l'explosion de Khojir.

Ce comportement pourrait suggérer une sensibilité particulière aux informations autour de l'activité qui se déroule à Khojir.

Hickey a affirmé que Khojir « possède de nombreuses installations souterraines et de tunnels dont la fonction exacte reste inconnue ». Ainsi, bien que les détails spécifiques de l'activité sur le site ne soient pas clairs, il souligne que « fournir une couverture politique à toutes les activités à Khojir » est d'une importance capitale pour le régime.

Selon lui, cacher la vraie nature de la base militaire de Khojir et de son réseau de tunnels souterrains pourrait même « être plus prioritaire pour Téhéran que de couvrir son programme d'armes nucléaires passé ».

Alors que les analystes cherchent à dresser un tableau plus clair de l'incident et de ses implications, deux questions clés restent sans réponse : qu'est-ce qui a provoqué l'explosion et pourquoi la dissimulation ?

Les experts ont désormais identifié ce qu'ils considèrent comme les deux scénarios les plus probables qui pourraient avoir conduit à l'explosion - le sabotage par Israël, ou une erreur coûteuse du Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI).

Eloise Scott, analyste au Moyen-Orient, en Afrique du Nord et en Turquie au sein du cabinet de conseil en sécurité et en risques politiques Sibylline, a affirmé à Arab News que l'une ou l'autre de ces explications serait très embarrassante pour Téhéran et mériterait donc d'être dissimulée.

Elle a indiqué que l'explosion pourrait très bien être une « erreur imprudente » de la part des "gardiens de la révolution ayant accidentellement la gâchette facile ». Selon Scott, il existe un précédent pour ce type d'erreur, notamment lors de la destruction en janvier d'un jet ukrainien au-dessus de Téhéran par un missile du CGRI.

Elle n'a cependant pas ignoré la possibilité que l'explosion soit intentionnelle.

« Il y a eu beaucoup de spéculations quant à savoir s'il s'agissait d'un incident de sabotage. Je ne l’ignorerai pas. Je pense qu'il est très plausible qu'il puisse s'agir d'une cyberattaque israélienne, comme nous l'avons déjà vu auparavant », a-t-elle déclaré.

Et Scott d’ajouter qu'il y a eu un échange de cyberattaques entre Israël et l'Iran au cours des dernières semaines, et que l'explosion de Khojir pourrait très bien être le dernier front de la bataille secrète en cours entre les deux ennemis jurés.

Indépendamment du fait que l'explosion ait été causée par un sabotage ou un accident, les deux explications « rendent le CGRI complètement incompétent », a-t-elle affirmé.

Mais cette incompétence masque un régime imprévisible et instable qui reste un danger pour la région.

Michael Elleman, directeur du programme de non-prolifération et de politique nucléaire de l'Institut international d'études stratégiques, a indiqué que l'explosion de jeudi ne réduirait pas de manière significative le danger posé par le programme de missiles iranien, en dépit des vœux pieux de certains observateurs.

La capacité de missiles intérieure de l'Iran est de plus en plus autosuffisante, a-t-il déclaré à Arab News, et au cours des cinq à dix dernières années, leur arsenal s'est concentré sur « l'augmentation de la précision et de la létalité ».

La preuve de ceci est claire même au cours des six derniers mois seulement, selon Elleman.

« Comme en témoignent des attaques telles que la frappe de missiles sur la base aérienne d'Al-Asad en Irak, la force de missiles balistiques de l'Iran est devenue une arme de plus en plus efficace sur le champ de bataille », a-t-il souligné.

L'explosion de Téhéran « n'aura aucun impact significatif sur leur capacité de production ».

Le point de vue d'Elleman est repris par Ian Williams, directeur adjoint du programme de sécurité internationale au centre d’études stratégiques et internationales, basé à Washington, qui pense que la menace de l'Iran reste élevée : « Malgré des incidents comme celui-ci, la menace des missiles iraniens est bien réelle. Avec ses attaques de missiles contre les forces américaines en Irak et ses attaques de missiles et de drones contre l'Arabie saoudite, l'Iran a démontré qu'il possédait des missiles puissants et qu’il avait la volonté de les utiliser ».

Le développement d'un arsenal de missiles à longue portée aussi dangereux a cependant coûté cher.

Ali Safavi, membre du Parlement iranien en exil et président de Near East Policy Research, dit qu'en fin de compte, c'est le peuple iranien qui en paie le prix.

« Les mollahs se soucient peu des préoccupations, du bien-être et des moyens de subsistance du peuple iranien », a-t-il déclaré à Arab News.

« L'économie iranienne est en chute libre. Non seulement en raison de la politique de pression maximale des États-Unis, mais aussi de la chute des prix du pétrole ».

De même, il a accusé le guide suprême l’ayatollah Ali Khamenei et son gouvernement d’avoir versé de l’argent dans l’énorme programme d’armement avancé du CGRI, tout en ignorant les écoles, les hôpitaux et la pauvreté endémique.

« Dans une situation économique aussi désastreuse, on pourrait supposer que le régime concentrera les ressources dont il dispose sur la résolution de ses problèmes sociaux et économiques », dit Safavi.

« Au lieu de cela, ils dépensent des centaines de millions de dollars pour ces missiles balistiques qu'ils ne semblent pas capables de manipuler en toute sécurité ».

La tentative mal exécutée du régime de dissimuler la vérité sur l'explosion de Téhéran n'est pas une surprise pour Safavi, qui soutient que «la tromperie, le déni et la duplicité font partie de l'ADN de ce régime depuis 1979 ».

La désinformation qui a suivi l'explosion de Téhéran n'est que la dernière d'une longue série de tromperies, a-t-il prédit, ajoutant que le peuple iranien est de plus en plus conscient que ces dissimulations sont de vaines tentatives de cacher la fragilité du régime.

Quelques jours seulement après l’explosion à l’est de Téhéran, une autre explosion dans une clinique du quartier de Tajrish, dans la capitale, a exacerbé la nervosité du peuple due la pandémie dévastatrice de coronavirus (COVID-19). Quinze femmes faisaient partie des 19 personnes qui ont perdu la vie dans l'explosion au centre de santé de Sina Athar.

La capacité militaire de l'Iran pourrait rester intacte après toutes les explosions, mais ils ont démontré que la poursuite de l'hégémonie régionale par Téhéran face à un effondrement économique au ralenti crée des problèmes internes pour lesquels les missiles balistiques et les autres armes ne sont pas une panacée.

Ce texte est la traduction d'un article paru sur ArabNews.com


«Gaza brûle», déclare le ministre israélien de la Défense après des frappes intenses

Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a affirmé la détermination d'Israël à poursuivre son offensive dans la bande de Gaza après des frappes nocturnes intenses de l'armée israélienne aux abords et dans la ville de Gaza. (AFP)
Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a affirmé la détermination d'Israël à poursuivre son offensive dans la bande de Gaza après des frappes nocturnes intenses de l'armée israélienne aux abords et dans la ville de Gaza. (AFP)
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  • "Gaza brûle. Tsahal frappe d'une main de fer les infrastructures terroristes, et les soldats de Tsahal se battent vaillamment pour créer les conditions nécessaires à la libération des otages et à la défaite du Hamas"
  • "Nous ne céderons pas et ne reculerons pas jusqu'à ce que la mission soit achevée"

JERUSALEM: Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a affirmé la détermination d'Israël à poursuivre son offensive dans la bande de Gaza après des frappes nocturnes intenses de l'armée israélienne aux abords et dans la ville de Gaza.

"Gaza brûle. Tsahal frappe d'une main de fer les infrastructures terroristes, et les soldats de Tsahal se battent vaillamment pour créer les conditions nécessaires à la libération des otages et à la défaite du Hamas", a déclaré M. Katz sur X.

"Nous ne céderons pas et ne reculerons pas jusqu'à ce que la mission soit achevée", a-t-il ajouté.

 


Le Qatar est le seul pays capable d'être un médiateur concernant Gaza, souligne Rubio

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  • Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio a estimé mardi que le Qatar était le seul pays capable de jouer le rôle de médiateur pour Gaza
  • "Evidemment, ils doivent décider s'ils veulent le faire après la semaine dernière ou non, mais nous voulons qu'ils sachent que, s'il existe un pays dans le monde qui pourrait aider à mettre fin à cela par une négociation, c'est le Qatar"

TEL-AVIV: Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio a estimé mardi que le Qatar était le seul pays capable de jouer le rôle de médiateur pour Gaza, malgré une frappe israélienne ciblant des dirigeants du Hamas dans l'émirat.

"Evidemment, ils doivent décider s'ils veulent le faire après la semaine dernière ou non, mais nous voulons qu'ils sachent que, s'il existe un pays dans le monde qui pourrait aider à mettre fin à cela par une négociation, c'est le Qatar," a déclaré M. Rubio aux journalistes alors qu'il se rendait à Doha depuis Israël.

 

 


Forts bombardements sur la ville de Gaza après le soutien de Rubio à Israël

La ville de Gaza a été touchée par des bombardements forts et soutenus dans la nuit de lundi à mardi, ont indiqué plusieurs témoins à l'AFP, au lendemain d'une visite à Jérusalem du secrétaire d'Etat américain qui a réitéré l'appui des Etats-Unis à Israël. (AFP)
La ville de Gaza a été touchée par des bombardements forts et soutenus dans la nuit de lundi à mardi, ont indiqué plusieurs témoins à l'AFP, au lendemain d'une visite à Jérusalem du secrétaire d'Etat américain qui a réitéré l'appui des Etats-Unis à Israël. (AFP)
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  • Marco Rubio a promis lundi au gouvernement de Benjamin Netanyahu le "soutien indéfectible" des Etats-Unis à Israël pour éliminer le mouvement islamiste palestinien Hamas dans la bande de Gaza
  • Quelques heures plus tard, de très fortes frappes se sont fait entendre dans la bande de Gaza, assiégée et affamée, selon des témoins

GAZA: La ville de Gaza a été touchée par des bombardements forts et soutenus dans la nuit de lundi à mardi, ont indiqué plusieurs témoins à l'AFP, au lendemain d'une visite à Jérusalem du secrétaire d'Etat américain qui a réitéré l'appui des Etats-Unis à Israël.

Marco Rubio a promis lundi au gouvernement de Benjamin Netanyahu le "soutien indéfectible" des Etats-Unis à Israël pour éliminer le mouvement islamiste palestinien Hamas dans la bande de Gaza.

Quelques heures plus tard, de très fortes frappes se sont fait entendre dans la bande de Gaza, assiégée et affamée, selon des témoins.

"Il y a des bombardements massifs et incessants sur la ville de Gaza et le danger ne cesse d'augmenter", a déclaré à l'AFP Ahmed Ghazal, un habitant de cette zone.

Cet homme de 25 ans a décrit une "explosion qui a violemment secoué le sol du quartier" peu après 01H00 locale mardi (22H00 GMT lundi).

"J'ai couru dans la rue, sur le site de la frappe", "trois maisons" d'un bloc résidentiel "ont été complètement rasées". "De nombreuses personnes sont emprisonnées sous les débris et on peut entendre leurs cris."

Le porte-parole de la Défense civile de la bande de Gaza, Mahmoud Bassal, a déclaré à l'AFP que "les bombardements se (poursuivaient) intensément dans toute la ville de Gaza", précisant que "le nombre de morts et de blessés (continuait) d'augmenter".

"Il y a des morts, des blessés et des personnes disparues sous les décombres suite à des frappes aériennes israéliennes visant un bloc résidentiel près de la place Al-Shawa dans la ville de Gaza", a-t-il détaillé, évoquant "un massacre majeur".

La Défense civile avait fait état de 49 Palestiniens tués lundi, dont plus de la moitié à Gaza-ville, où l'armée a intensifié ses attaques avec l'objectif de s'en emparer.

Compte tenu des restrictions imposées aux médias à Gaza et des difficultés d'accès sur le terrain, l'AFP n'est pas en mesure de vérifier de manière indépendante les informations des différentes parties.

Le déplacement de M. Rubio dans la région intervient après une attaque israélienne inédite le 9 septembre au Qatar contre des chefs du Hamas.

Rassurer Doha 

Après Jérusalem, M. Rubio se rend mardi à Doha, où il devrait rencontrer le cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani, afin de "réaffirmer le soutien total des Etats-Unis à la sécurité et la souveraineté du Qatar après l'attaque israélienne", selon le département d'Etat.

La frappe aérienne au Qatar, pays médiateur entre Israël et le Hamas et qui abrite la plus grande base aérienne américaine de la région, avait provoqué de rares critiques de Donald Trump contre Israël.

Le président américain a assuré lundi à des journalistes dans le Bureau ovale qu'Israël "ne frappera pas au Qatar".

Réunis lundi à Doha après l'attaque israélienne, les dirigeants arabes et musulmans ont appelé à "revoir les relations diplomatiques et économiques avec Israël et à engager des poursuites à son encontre".

Le secrétaire d'Etat américain s'est montré pessimiste quant à la possibilité d'une solution "diplomatique" à Gaza, qualifiant le Hamas d'"animaux barbares".

L'offensive israélienne à Gaza a suivi l'attaque du 7-Octobre qui a entraîné la mort de 1.219 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des données officielles.

Les représailles israéliennes ont fait au moins 64.905 morts à Gaza, selon le ministère de la Santé du territoire. L'ONU y a déclaré la famine, ce qu'Israël dément.

M. Rubio a aussi affiché la solidarité des Etats-Unis avec Israël avant un sommet coprésidé par la France et l'Arabie saoudite le 22 septembre à l'ONU, destiné à promouvoir la reconnaissance d'un Etat de Palestine, au côté d'Israël.

Une initiative largement symbolique dans la mesure où Israël s'oppose fermement à la création d'un tel Etat auquel aspirent les Palestiniens.

En soirée, le secrétaire d'Etat a rencontré à Jérusalem des familles d'otages, selon un responsable du département d'Etat. Sur les 251 personnes enlevées durant l'attaque du 7-Octobre, 47 sont encore retenues à Gaza, dont 25 décédées selon l'armée israélienne.