Au procès Charlie, huit heures d' «apnée» aux mains des frères Kouachi

Michel Catalano, le patron de l'imprimerie de Dammartin-en-Goële qui s'est retrouvé otage des terroristes du 7 janvier 2015, au palais de justice du "Tribunal de Paris", le 16 septembre 2020, lors du procès de 14 personnes soupçonnées d'être complices des attentats de Charlie Hebdo et Hyper Cacher. (Thomas SAMSON / AFP)
Michel Catalano, le patron de l'imprimerie de Dammartin-en-Goële qui s'est retrouvé otage des terroristes du 7 janvier 2015, au palais de justice du "Tribunal de Paris", le 16 septembre 2020, lors du procès de 14 personnes soupçonnées d'être complices des attentats de Charlie Hebdo et Hyper Cacher. (Thomas SAMSON / AFP)
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Publié le Jeudi 17 septembre 2020

Au procès Charlie, huit heures d' «apnée» aux mains des frères Kouachi

  • « Je n'avais plus qu'un seul repère: mes oreilles »
  • « Michel s'est sacrifié pour moi. Michel, c'est mon héros, c'est celui qui m'a sauvé la vie »

PARIS : « J'ai arrêté de respirer »: l'ex-employé de l'imprimerie de Dammartin-en-Goële où s'étaient retranchés les frères Kouachi a raconté mercredi aux assises de Paris comment il était resté caché « sans bouger » huit heures sous un évier, grâce au « sacrifice » de son patron. 

« C'est eux, ils ont des kalachnikov. Va te cacher, j'y vais ». Ce 9 janvier 2015, Chérif et Saïd Kouachi, traqués depuis la tuerie commise au siège de Charlie Hebdo deux jours plus tôt, viennent de sonner à l'interphone de l'imprimerie de Michel Catalano, en Seine-et-Marne.

Lilian, jeune graphiste de l'entreprise, obtempère et, « sans hésitation », « décide de (se) cacher sous l'évier ». « Grand bien m'en fasse, j'y avais pensé la veille si jamais ils venaient ici », confie-t-il devant la cour d'assises spéciale, d'une voix faible. 

« Recroquevillé » dans une partie du minuscule meuble de cuisine, coincé près de flacons et de matériel d'entretien, il restera dissimulé « huit heures et demi » jusqu'à sa libération vers 17H00 par le GIGN, qui vient d'abattre les deux terroristes. 

Pendant les longues heures d'angoisse passées dans sa cachette, paralysé par la peur d'être découvert, « je n'avais plus qu'un seul repère: mes oreilles », explique, tendu, le jeune homme, chemise à carreaux et cheveux longs coiffés en chignon. 

Dans la pièce voisine, il entend « des bribes de conversations » entre Michel Catalano et les preneurs d'otages, et ce qui ressemble à « des sermons ». Puis le bruit de la machine à café et « des pas » se dirigeant vers lui. 

Lilian a sa première frayeur: il pense à « une inspection », à son « manteau » et sa « sacoche » restés sur une chaise. 

« Mon coeur s'est arrêté de battre. J'ai arrêté de respirer. Le moindre geste que je faisais aurait pu ouvrir la porte car j'étais vraiment collé à la porte. Puis j'ai entendu la porte se refermer et les pas repartir. J'ai ressenti un soulagement », se souvient le graphiste, partie civile au procès.

« C'est mon héros »

Le soulagement est de courte durée: cherchant de la nourriture pour lui et son frère blessé par un tir de riposte d'un gendarme, l'un des frères Kouachi s'approche à « 30 centimètres » du réduit où il est caché, laissant Lilian « tétanisé ». 

« Il s'est lavé les mains, il y avait de l'eau partout. Je n'avais qu'une peur, qu'il voit de l'eau qui coule et ouvre la porte », témoigne le jeune homme, en fondant en larmes à la barre. 

Les heures passent, son téléphone vibre de plus en plus d'appels inquiets de ses proches, et, sous l'évier, Lilian se « recroqueville encore plus ». Contacté par un responsable du GIGN, il implore: « Faites vite ». 

Arrive finalement l'assaut. Redoutant d'être tué lors d'échanges de tirs, le jeune graphiste contredit les ordres de « ne pas bouger » et « rampe » hors de sa cachette. 

Dehors, Michel Catalano, finalement relâché par les frères Kouachi, est « en apnée totale ». Jusqu'à ce message radio: « Cibles neutralisées, otage vivant ». « Là, j'ai respiré, enfin », a raconté plus tôt dans l'après-midi le gérant de l'imprimerie. 

Les mains agrippées à la barre, M. Catalano assure avoir « pris énormément sur (lui) ce jour-là pour rester le plus calme possible ». « Mon objectif était qu'ils ne trouvent pas Lilian », explique le chef d'entreprise.

Entré à l'âge de 19 ans dans son entreprise, Lilian est « gentil, réservé ». « J'aurais tellement aimé qu'il ne soit pas là ce jour-là », ajoute M. Catalano, le regard embué et la gorge nouée.

Tout aussi ému, son ancien employé lui a rendu hommage: « Michel s'est sacrifié pour moi. Michel, c'est mon héros, c'est celui qui m'a sauvé la vie ». 

Cinq ans plus tard, Lilian a toujours « peur dans les gares, les aérogares, le métro ». Michel Catalano a réussi à remettre sur pied son entreprise, détruite lors de l'intervention du GIGN, mais vit « à crédit ». 

Quatorze personnes - dont trois en leur absence - sont jugées jusqu'au 10 novembre pour leur soutien logistique aux frères Kouachi et à Amédy Coulibaly, auteurs des attentats qui ont fait 17 morts en janvier 2015 et provoqué l'effroi dans le monde. 


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
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  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».


Selon ManPowerGroup, l'IA pourrait réduire l'importance des « compétences » dans le recrutement

Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
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  • L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences ».
  • « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

PARIS : L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences », selon un dirigeant de ManPowerGroup.

En effet, « les compétences pourraient s'avérer obsolètes dans six mois », explique Tomas Chamorro-Premuzic, directeur de l'innovation du géant américain du travail temporaire, rencontré par l'AFP au salon Vivatech, à Paris, qui ferme ses portes samedi.  Selon lui, « il vaut mieux savoir que vous travaillez dur, que vous êtes curieux, que vous avez de bonnes aptitudes relationnelles et ça, l'IA peut vous aider à l'évaluer ».

Selon l'Organisation internationale du travail (OIT), « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

Cependant, les tâches informatiques (utilisation d'Internet, messagerie, etc.) pouvant être accomplies de manière autonome par des agents d'IA connaissent une « rapide expansion ». 

Dans ce contexte, les employeurs pourraient rechercher de plus en plus de salariés dotés de compétences hors de portée de l'IA, telles que le jugement éthique, le service client, le management ou la stratégie, comme l'indique une enquête de ManpowerGroup menée auprès de plus de 40 000 employeurs dans 42 pays et publiée cette semaine.

M. Chamorro-Premuzic déplore toutefois que ces compétences ne soient pas encore davantage mises en avant dans la formation. « Pour chaque dollar que vous investissez dans la technologie, vous devez investir huit ou neuf dollars dans les ressources humaines, la transformation culturelle, la gestion du changement », dit-il.

Les craintes d'un chômage de masse provoqué par l'IA restent par ailleurs exagérées à ce stade, estime le dirigeant, malgré certaines prédictions alarmistes.

D'après Dario Amodei, patron de la société d'intelligence artificielle Anthropic, cette technologie pourrait faire disparaître la moitié des emplois de bureau les moins qualifiés d'ici cinq ans. 

« Si l'histoire nous enseigne une chose, c'est que la plupart des prévisions sont fausses », répond M. Chamorro-Premuzic.

Concernant le recrutement, activité principale de ManPowerGroup, le dirigeant ajoute que « les agents d'intelligence artificielle ne deviendront certainement pas le cœur de notre métier dans un futur proche ». Il constate également que l'IA est utilisée par les demandeurs d'emploi.

« Des candidats sont capables d'envoyer 500 candidatures parfaites en une journée, de passer des entretiens avec leurs bots et de déjouer certains éléments des évaluations », énumère-t-il.