60 ans après le massacre des Algériens à Paris, l'ultime combat pour la mémoire

Des manifestants crient des slogans en faveur de l'indépendance et de la paix en Algérie sur les Grands Boulevards à Paris le 18 novembre 1961. (AFP)
Des manifestants crient des slogans en faveur de l'indépendance et de la paix en Algérie sur les Grands Boulevards à Paris le 18 novembre 1961. (AFP)
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Publié le Jeudi 14 octobre 2021

60 ans après le massacre des Algériens à Paris, l'ultime combat pour la mémoire

  • Djamila Amrane «aurait bien pu mourir» le 17 octobre 1961. Poursuivie par la police avec son bébé de deux mois, elle doit la vie, s'émeut-elle, à une «dame française» qui a ouvert son portail et l'a «tirée par le bras»
  • Angoissée à l'idée qu'on «oublie» cette page de l'Histoire, la vétérante du FLN déroule d'une voix douce le fil de ses souvenirs

PARIS: Le 17 octobre 1961, Djamila Amrane manifestait avec son nourrisson dans les bras. Soixante ans après le massacre des Algériens à Paris, cette "guerrière dans l'âme" livre un dernier combat: à 87 ans, elle transmettra, "tant qu'il faudra", une mémoire longtemps occultée. 


A l'époque, elle battait pavé aux côtés de milliers d'hommes et de femmes à l'appel de la fédération de France du FLN (Front de libération nationale), dont elle était alors agent de liaison en Seine-Saint-Denis, contre le couvre-feu imposé aux "Français musulmans d'Algérie". 


"Ce devait être une manifestation pacifique. Les organisateurs nous avaient dit de n'avoir rien sur nous, même pas une épingle à nourrice. On voulait simplement combattre l'injustice", raconte l'un des derniers témoins de cette soirée, le cheveu et la mise impeccables. 


Angoissée à l'idée qu'on "oublie" cette page de l'Histoire, la vétérante du FLN déroule d'une voix douce le fil de ses souvenirs. 


"Certaines des femmes à qui j'avais demandé de venir s'étaient bien habillées, croyant aller à une sorte de fête. Moi je savais ce que l'on risquait. Je voulais pouvoir courir", retrace Djamila Amrane, caressant des symboles kabyles portés en pendentifs. 


Elle reçoit avec une tasse de thé à La Courneuve (Seine-Saint-Denis), dans les locaux d'Africa, une association antiraciste et féministe qui veut replacer l'épisode dans "l'Histoire de France". 


Impossible d'établir un bilan précis de la répression orchestrée par le préfet de police Maurice Papon, mais les historiens s'accordent a minima sur plusieurs dizaines de morts pendant la nuit, tués par balle ou jetés dans la Seine.  

Témoins taiseux 
Djamila Amrane aussi "aurait bien pu mourir" le 17 octobre 1961. Poursuivie par la police avec son bébé de deux mois, elle doit la vie, s'émeut-elle, à une "dame française" qui a ouvert son portail et l'a "tirée par le bras". 


En évoquant "les femmes qui ne sont pas revenues", sa voix se serre, puis s'éteint. Elle s'excuse: "Mes souvenirs ne sont pas flous mais j'essaye de les oublier par moments". 


Comme beaucoup de témoins, Djamila Amrane a si bien tenté d'oublier qu'elle n'a pas évoqué le massacre pendant dix longues années.


Les manifestants n'ont souvent parlé qu'à partir des années 1980 quand leurs propres enfants, de retour de la Marche des Beurs, ont demandé des réponses. 


A cette époque-là, c'est à l'université que Mimouna Hadjam, 61 ans aujourd'hui, découvre l'histoire de son pays d'origine. 


"Quand j'ai retrouvé ensuite des témoins pour les interroger, ma grand-mère m'a dit +ne remue pas ces histoires+. Je n'en veux pas à ma famille de ne pas avoir parlé, ils ont voulu nous épargner", rembobine la fondatrice d'Africa. 


"Il y a eu des parents bavards, d'autres taiseux. Mon père disait des choses comme +il pleuvait ce jour-là, on avait froid+. Sans trop entrer dans les détails", se souvient Samia Messaoudi, 77 ans. 


En 1990, "dans une volonté de reconnaissance politique et citoyenne", elle a cofondé avec Mehdi Lallaoui l'association Au nom de la mémoire.


"Il a fallu déterrer des archives disparues, retrouver des témoins. Des Algériens mais aussi des policiers qui accepteraient de parler à visage découvert", retrace Mehdi Lallaoui, réalisateur en 1991 du "Silence du fleuve", l'un des premiers documentaires sur le sujet. 

Quête de justice 
La même année, l'historien Jean-Luc Einaudi oppose pour la première fois à la version officielle (trois morts, une soixantaine de blessés) des règlements de compte le récit documenté d'un bain de sang. 


"On me demande souvent pourquoi on a oublié cet événement. Mais avant d'oublier il faut d'abord connaitre. Le 17 octobre 1961 n'a pas été oublié mais consciemment occulté par le pouvoir en place", analyse l'historien Gilles Manceron. 


Dans la mémoire collective, le souvenir qui s'est imprimé est celui des neuf morts du métro Charonne, des manifestants anti-OAS eux aussi tués par la police de Maurice Papon le 8 février 1962. 


L'émoi de la gauche est d'autant plus vif que huit victimes étaient syndiquées à la CGT et une membre du parti communiste. Quelques jours plus tard, plusieurs centaines de milliers de personnes défilent en hommage dans les rues de Paris. 


"Les victimes de Charonne ont été érigées en martyrs, celles du 17 octobre sont restées anonymes", résume Gilles Manceron. 


Il faut attendre 2001 pour qu'une plaque commémorative soit posée à Paris, sur le pont Saint-Michel, 2012 pour que le président Hollande évoque une "sanglante répression" et rende "hommage à la mémoire des victimes". 


Insuffisant, pour Samia Messaoudi et Mehdi Lallaoui, qui réclament "justice et réparation". 


Le duo écume les d'établissements scolaires pour transmettre la mémoire du massacre aux jeunes générations. 


Depuis Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), où elle doit participer dimanche à une journée d'hommage, Djamila Amrane, aujourd'hui arrière arrière-grand-mère, attendra d'Emmanuel Macron la reconnaissance d'un "crime d’État": "Il est grand temps, non ?".


«Simplification!» Bruno Le Maire dévoile son «plan d'action» anti-paperasse pour les entreprises

Le ministre français de l'Économie et des Finances, Bruno Le Maire, assiste à une conférence de presse pour présenter un plan visant à simplifier les démarches administratives des entreprises au ministère de l'Économie à Paris, le 24 avril 2024 (Photo, AFP).
Le ministre français de l'Économie et des Finances, Bruno Le Maire, assiste à une conférence de presse pour présenter un plan visant à simplifier les démarches administratives des entreprises au ministère de l'Économie à Paris, le 24 avril 2024 (Photo, AFP).
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  • La commande publique, «qui obéit à des règles dignes de Balzac», sera également simplifiée
  • Il comprend quelques mesures s'appliquant également aux particuliers

 

PARIS: "Balzac", "Kafka" et "Ubu" contre le 21e siècle: le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a présenté mercredi en conseil des ministres un plan visant à débarrasser les entreprises de "la paperasse", via notamment un nouveau bulletin de salaire.

Après le Premier ministre Gabriel Attal, qui a présenté mardi des mesures de "débureaucratisation" de l'administration à destination des particuliers, M. Le Maire a dévoilé mercredi comment l'Etat allait aider des patrons de TPE et PME "fatigués, exaspérés" par les tâches administratives auxquelles ils consacrent "en moyenne huit heures par semaine", l'équivalent de trois points de PIB par an.

Il y a en France 400.000 normes applicables, les huit principaux codes comptent 23.000 pages... contre 828 en 1833, et entreprises et administrations s'envoient chaque année 253 millions de courriers, met en avant Bercy.

Pour les petits patrons, "on est parfois chez Kafka", a remarqué la ministre des Entreprises, Olivia Grégoire.

D'où ce "plan d'action : simplification!", en 50 mesures dont la moitié feront l'objet d'un projet de loi discuté à partir du 3 juin au Sénat.

Il comprend quelques mesures s'appliquant également aux particuliers; une possible future feuille de paye simplifiée, qui devrait passer de 55 à 15 lignes, ou des astreintes pour les assureurs qui ne respectent pas les délais d'indemnisation.

M. Le Maire a aussi annoncé la suppression des 1.800 formulaires administratifs Cerfa d'ici à 2030, dont 80% d'ici à 2026. Cela dans le cadre d'une philosophie "dites le nous une fois", pour éviter de multiplier la communication des mêmes documents à plusieurs administrations.

Il a annoncé aussi "une revue complète" sur trois ans des 2.500 autorisations administratives. L'obligation pour l'employeur d'envoyer les arrêts-maladie à la Sécu est supprimée.

La commande publique, "qui obéit à des règles dignes de Balzac", sera également simplifiée, avec le dépôt de tous les appels d'offres publics sur une plateforme unique, Place, en 2027.

«Trouille»

M. Le Maire a confirmé l'institution d'un "test PME", pour évaluer l'impact de nouvelles normes pour les petites et moyennes entreprises, avant leur application.

"Certains patrons disent qu'ils ont la trouille d'avoir fait une erreur, mais il n'y a aucune raison d'avoir peur de l'administration", a-t-il observé.

Il a ainsi annoncé que le rescrit, la possibilité de demander au fisc de se prononcer sur tel ou tel point, afin d'éviter des problèmes ultérieurs, serait élargi à d'autres administrations comme la Direction générale de la concurrence, de la consommation, et de la répression des fraudes (DGCCRF) ou aux Douanes.

"Toujours dans cette logique de confiance", des peines de prison prévues pour certains manquements déclaratifs seront supprimées, au profit de sanctions moins lourdes. "Les chefs d’entreprise ne sont pas des bandits en puissance", a dit M. Le Maire.

Tandis que le ministre de l'Industrie Roland Lescure observait "qu'Ubu est encore un peu roi dans notre pays", M. Le Maire a dévoilé des mesures de simplification spéciales pour les industriels.

Notamment, "les grands projets industriels n'auront plus à organiser un débat au titre de la Commission nationale du débat public (CNDP)" et la compensation environnementale des projets pourra s'effectuer "dans un délai raisonnable", et non plus immédiatement.

Il s'est toutefois opposé "avec colère" à l'idée que Bercy reculerait ainsi sur l'écologie.

Chaque année enfin, sera organisée une nouvelle revue des mesures "inutiles ou trop lourdes". Le ministre de la Fonction publique Stanislas Guerini a assuré de "l'engagement de l'administration à installer le plan dans la durée".

Les patrons ont plutôt bien réagi au plan : "Je veux y croire", a indiqué à l'AFP François Asselin, président de la CPME, "car il semble que Bercy ait embarqué toute l'administration" sur ce projet.

Le Medef pour sa part "soutient l'esprit" du texte, qui néanmoins "n'épuise pas l'ensemble du chantier de simplification".

Le premier syndicat patronal a cependant mis en garde contre "des signaux contradictoires", évoquant la transposition en France de directives européennes complexes comme la CSRD et le devoir de vigilance, ou encore l'accord trouvé mardi sur le Compte épargne temps universel (Cetu) entre une autre organisation, l'U2P, et des syndicats.


Tournée du chef de la diplomatie française au Proche-Orient

Le ministre français des Affaires étrangères et européennes Stéphane Séjourne lit un dossier devant le 8e comité interministériel pour la transformation publique à l'hôtel Matignon à Paris, le 23 avril 2024. (Photo de Ludovic MARIN / AFP)
Le ministre français des Affaires étrangères et européennes Stéphane Séjourne lit un dossier devant le 8e comité interministériel pour la transformation publique à l'hôtel Matignon à Paris, le 23 avril 2024. (Photo de Ludovic MARIN / AFP)
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  • Il s'agira de la seconde visite de Stéphane Séjourné dans la région après celle qu'il avait faite début février, peu après sa prise de fonction
  • Samedi, il entamera sa tournée régionale par Beyrouth où il discutera des propositions de la France destinées à rétablir la stabilité à la frontière entre le Liban et Israël

PARIS: Le ministre français des Affaires étrangères va se rendre à partir de samedi au Proche-Orient où il évoquera notamment l'instabilité au sud Liban et la situation à Gaza, a-t-on appris mercredi auprès de son entourage.

Il s'agira de la seconde visite de Stéphane Séjourné dans la région après celle qu'il avait faite début février, peu après sa prise de fonction.

Samedi, il entamera sa tournée régionale par Beyrouth où il discutera des propositions de la France destinées à rétablir la stabilité à la frontière entre le Liban et Israël, a-t-on précisé.

Le président français Emmanuel Macron a reçu vendredi à l'Elysée le Premier ministre libanais Najib Mikati ainsi que le commandant en chef de l'armée libanaise, Joseph Aoun dans un nouvel effort pour contenir la montée des violences entre le Liban et Israël.

Stéphane Séjourné devrait, lui, évoquer les propositions françaises qu'il avait portées en février pour désamorcer le conflit à la frontière libano-israélienne.

Beyrouth a pris acte de ces propositions sans pour autant les endosser alors que les Etats-Unis sont aussi à la manoeuvre.

Stéphane Séjourné poursuivra sa tournée en Arabie saoudite. Il s'agira là de sa première visite bilatérale, qui sera centrée sur les enjeux économiques, énergétiques, environnementaux et de défense, a-t-on indiqué de même source.

Le 30 avril, le chef de la diplomatie sera en Israël avant de se rendre dans les territoires occupés le lendemain. La France entend jouer un rôle actif "dans les efforts pour trouver une solution politique" à la guerre à Gaza avec un double enjeu "obtenir la libération des otages" toujours retenus par le groupe islamiste palestinien Hamas dans la bande de Gaza et obtenir "un cessez le feu durable", a rappelé l'entourage du ministre.


Grève des contrôleurs: des «  dizaines de millions d'euros » en jeu, prévient ADP

Selon le Groupe ADP mercredi, Roissy en a accueilli lundi 203.000 et Orly 111.000, alors que ces deux aéroports concentrent environ la moitié de la fréquentation totale des aéroports français. (AFP).
Selon le Groupe ADP mercredi, Roissy en a accueilli lundi 203.000 et Orly 111.000, alors que ces deux aéroports concentrent environ la moitié de la fréquentation totale des aéroports français. (AFP).
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  • Les aiguilleurs du ciel sont appelés à cesser le travail jeudi pour protester contre les mesures d'accompagnement, notamment salariales, d'une refonte du contrôle aérien français
  • Pour mettre en adéquation les effectifs disponibles et le trafic, la Direction générale de l'aviation civile (DGAC) a demandé mardi aux compagnies aériennes de renoncer à une majorité de leurs vols jeudi

PARIS: La facture de la grève des contrôleurs aériens français prévue jeudi pourrait se chiffrer en "dizaines de millions d'euros" pour les compagnies aériennes et les aéroports, et affecter des dizaines de milliers de passagers, selon le gestionnaire des aéroports parisiens.

"Pour les compagnies aériennes, pour les aéroports, ce sont plusieurs dizaines de millions d'euros qui sont en jeu, chaque jour", a déclaré mercredi le PDG du Groupe ADP, Augustin de Romanet, au micro de la radio Franceinfo.

Les aiguilleurs du ciel sont appelés à cesser le travail jeudi pour protester contre les mesures d'accompagnement, notamment salariales, d'une refonte du contrôle aérien français.

Pour mettre en adéquation les effectifs disponibles et le trafic, la Direction générale de l'aviation civile (DGAC) a demandé mardi aux compagnies aériennes de renoncer à une majorité de leurs vols jeudi.

Cette proportion montera à 75% à Paris-Orly, deuxième aéroport français, et 65% à Roissy, le premier, et Marseille. Elle sera de 60% à Toulouse et Nice, et 50% pour les autres aéroports.

"Les abattements de vols qui vont être demandés aux compagnies sont extrêmement élevés, c'est rarement vu dans notre histoire", a commenté M. de Romanet.

"C'est vraiment très pénalisant pour les passagers", a déploré le PDG, alors que deux des trois grandes zones académiques sont en vacances de printemps.

Des dizaines voire des centaines de milliers de voyageurs risquent de voir leur vol annulé. Selon le Groupe ADP mercredi, Roissy en a accueilli lundi 203.000 et Orly 111.000, alors que ces deux aéroports concentrent environ la moitié de la fréquentation totale des aéroports français.

Face à l'échec des négociations avec la DGAC jusqu'ici, le SNCTA, syndicat majoritaire des contrôleurs aériens, a même déposé un deuxième préavis de grève en plein week-end de l'Ascension, les jeudi 9 (férié), vendredi 10 et samedi 11 mai.

"Je fais confiance aux négociateurs et à leur esprit de responsabilité pour que cette grève (...) n'ait pas lieu. On arrive à très fortement abîmer la sérénité des Français et des étrangers avec ces mouvements qui objectivement devraient pouvoir être réglés par la négociation", a jugé Augustin de Romanet.

Pour lui, "les réformes de productivité qui sont demandées (aux contrôleurs) par le gouvernement sont nécessaires, et sont demandées par les compagnies aériennes, notamment les compagnies européennes quand elles survolent la France. Elles ont besoin d'un contrôle aérien aussi efficace que possible".