Paris veut désamorcer la crise avec Alger

Le président français Emmanuel Macron, un Bleuet-de-France commémoratif épinglé au revers de son manteau, rend hommage lors d'une cérémonie à l'Arc de Triomphe et la Tombe du Soldat inconnu à Paris, le 11 novembre 2021 (Photo, AFP)
Le président français Emmanuel Macron, un Bleuet-de-France commémoratif épinglé au revers de son manteau, rend hommage lors d'une cérémonie à l'Arc de Triomphe et la Tombe du Soldat inconnu à Paris, le 11 novembre 2021 (Photo, AFP)
Short Url
Publié le Jeudi 11 novembre 2021

Paris veut désamorcer la crise avec Alger

Le président français Emmanuel Macron, un Bleuet-de-France commémoratif épinglé au revers de son manteau, rend hommage lors d'une cérémonie à l'Arc de Triomphe et la Tombe du Soldat inconnu à Paris, le 11 novembre 2021 (Photo, AFP)
  • Le chef de l'Etat «regrette les polémiques et les malentendus engendrés par les propos rapportés » et est « fortement attaché au développement de la relation» entre la France et l'Algérie
  • Le président Abdelmadjid Tebboune, qui entretient une relation plutôt cordiale avec son homologue français, lui avait reproché samedi, d'avoir insulté l'Algérie

PARIS: Le président français Emmanuel Macron tente de recoller les morceaux avec Alger après les tensions alimentées par certains de ses propos, alors que la coopération entre les deux pays reste jugée cruciale à Paris dans plusieurs crises régionales. 

Le chef de l'Etat « regrette les polémiques et les malentendus engendrés par les propos rapportés » et est « fortement attaché au développement de la relation » entre la France et l'Algérie, a dit un conseiller de l'Elysée au détour d'un briefing presse consacré à la conférence internationale sur la Libye organisée vendredi à Paris.  

Emmanuel Macron avait déclenché l'ire d'Alger après des propos, rapportés par le quotidien Le Monde, accusant le système « politico-militaire » algérien d'entretenir une « rente mémorielle » autour de la guerre d'indépendance avec l'ex-puissance coloniale française.  

D'après le quotidien, il s'était également interrogé sur l'existence d'une « nation algérienne » avant la colonisation française, suscitant de vives réactions dans la société algérienne. 

Avec ces regrets, « on assiste à un semi mea culpa de la part du président Macron », relève Hasni Abidi, directeur du Centre d'études et de recherche sur le monde arabe et méditerranéen à Genève (Suisse). 

« C'est un rétropédalage calculé car, pour des raisons de politique intérieure, il ne peut pas aller au-delà », ajoute-t-il en référence au poids de l'extrême droite et à la sensibilité des rapatriés d'Algérie sur ce sujet, à cinq mois de la présidentielle en France. 

Dans un premier signe d'apaisement, le chef de la diplomatie algérienne, Ramtane Lamamra, a salué mercredi ces déclarations, y voyant du « respect pour la nation algérienne ». 

Objectif Libye 

Jusque-là, l'Algérie, qui a rappelé son ambassadeur à Paris le 3 octobre et interdit le survol de son territoire aux avions militaires français ralliant le Sahel, ne décolérait pas. D'autant que Paris a annoncé la réduction du nombre de visas accordés à l'Algérie, la Tunisie et le Maroc pour pousser ces pays à accepter leurs ressortissants expulsés de France. 

Le président Abdelmadjid Tebboune, qui entretient une relation plutôt cordiale avec son homologue français, lui avait reproché samedi, dans une interview à l'hebdomadaire allemand Der Spiegel, d'avoir insulté l'Algérie.   

« Je ne serai pas celui qui fera le premier pas », avait-il alors averti. La coopération bilatérale, « c'est peut-être terminé maintenant », avait-il ajouté. 

Selon Hasni Abidi, plus que la relation bilatérale elle-même, ce sont les dossiers régionaux, de la Libye au Mali, qui conduisent à cette main tendue de Paris.    

L'Algérie est un acteur régional influent au Mali, mais aussi en Libye. Le président Macron a d'ailleurs invité en vain son homologue algérien à la conférence sur la Libye de Paris. 

Il a même tenté de le joindre par téléphone lundi soir, sans réussir à lui parler, affirme le quotidien français L'Opinion, une information non confirmée par l'Elysée. 

« En déclinant l’invitation, Abdelmadjid Tebboune confirme que la crise diplomatique entre Alger et Paris ne se réglera pas de sitôt et ne retrouvera pas son cours normal à court terme », analyse le quotidien francophone algérien Liberté. 

« Passer à autre chose »  

Pour le quotidien Echourouk, « les regrets ne suffisent pas ». « Ces déclarations floues émanant de la présidence française ne sauraient réparer les relations franco-algériennes », juge-t-il, attribuant cette main tendue à la volonté de voir l'Algérie participer à la conférence. 

La France salue elle les premiers signes de détente avec Alger. « C'est positif si d'un côté comme de l'autre on se dit qu'on peut passer à autre chose et avancer sur les autres sujets, notamment la Libye », résume une source diplomatique française. 

Alger enverra finalement son ministre des Affaires étrangères vendredi à Paris, a précisé la présidence française. 

L'Algérie joue aussi un rôle politique important au Mali, où la junte au pouvoir défie la France, engagée militairement dans ce pays, en menaçant de faire appel aux mercenaires du groupe russe Wagner. 

La possible arrivée des Russes dans cet ancien pré carré français irrite profondément Paris qui menace d'en retirer ses troupes. Le Kremlin dément de son côté tout lien avec le groupe Wagner, sans convaincre à Paris. 

Proche de la Russie, l'Algérie se retrouve au carrefour de la crise. « Si les Maliens sont confrontés à une attaque demain, nous interviendrons à leur demande », a assuré le président Tebboune. 


Le partenariat stratégique franco-saoudien: une dynamique renforcée par la vision 2030

De gauche à droite, l’ancien ambassadeur de France en Arabie Bertrand Besancenot, l’ancien conseiller présidentiel Maurice- Gourdault montagne, et les deux anciens ambassadeurs an Arabie François Gouyette et Frédéric Pouille. (Photo Arlette Khouri)
De gauche à droite, l’ancien ambassadeur de France en Arabie Bertrand Besancenot, l’ancien conseiller présidentiel Maurice- Gourdault montagne, et les deux anciens ambassadeurs an Arabie François Gouyette et Frédéric Pouille. (Photo Arlette Khouri)
Short Url
  • L’Ambassadeur d’Arabie Saoudite en France et Monaco Fahad Al-Ruwaily a partagé les chiffres saisissants d’un programme de réformes nationales qui dépasse déjà largement ses objectifs
  • Dans ce contexte de mutation rapide, la relation entre la France et l’Arabie Saoudite s’est hissée à un niveau inédit d’intensité

PARIS: Organisé par l’Ambassadeur d’Arabie Saoudite en France et Monaco Fahad Al-Ruwaily, en collaboration avec le Forum Francophone des Affaires, le deuxième colloque sur « le partenariat stratégique saoudo-français à la lumière de la Vision 2030 » a illustré de manière éclatante la profondeur des transformations en cours au Royaume ainsi que la qualité grandissante des relations bilatérales entre Riyad et Paris. 

S’exprimant à l’ouverture du colloque Al-Ruwaily, a dressé un état des lieux des avancées impressionnantes du Royaume, tout en mettant en lumière les partenariats économiques, culturels, technologiques et diplomatiques qui unissent la France et l’Arabie Saoudite.

À l’occasion du neuvième anniversaire de la Vision 2030 lancée par le prince héritier d’Arabie, Al-Ruwaily a partagé les chiffres saisissants d’un programme de réformes nationales qui dépasse déjà largement ses objectifs initiaux. 

Selon le dernier rapport officiel, 93 % des cibles fixées ont été atteintes ou dépassées, a-t-il indiqué, citant parmi les exemples les plus marquants l’accueil par le royaume de 100 millions de touristes, bien avant l’échéance de 2030.

La diversification économique du pays s’est fortement accélérée, selon Al-Ruwaily le secteur non pétrolier occupe désormais une part croissante du PIB, porté par des investissements massifs dans les infrastructures, les nouvelles technologies, le divertissement ou encore le tourisme. 

Sur le plan social, les réformes en faveur des femmes ont permis d’atteindre un taux d’emploi féminin de plus de 33,5 %, tandis que des opportunités éducatives et professionnelles sont créées pour une jeunesse qui représente 70 % de la population saoudienne.

Ces transformations trouvent aussi leur expression sur la scène internationale, indique l’ambassadeur, Riyad se préparant à accueillir l’Exposition universelle de 2030, puis la Coupe du monde de football en 2034.

Tout cela souligne Al-Ruwaily vient s’ajouter à d’autres événements comme le Rallye Dakar ou les concerts d’artistes internationaux, positionnant le Royaume comme un acteur central de la culture globale.

Au cœur de cette dynamique se trouve le Fonds Public d’Investissement (PIF), véritable bras armé financier de la Vision 2030. 

Les liens d’amitié, de coopération et de partenariat sont plus étroits que jamais, comme l’a rappelé l’Ambassadeur Al-Ruwaily, et la visite d’État du Président Français Emmanuel Macron en décembre dernier a marqué un tournant symbolique, scellé par la signature d’un mémorandum sur le partenariat stratégique entre les deux pays.

Grâce à lui, des projets structurants voient le jour dans des secteurs aussi variés que les fintech, les énergies renouvelables, les biotechnologies ou encore la cybersécurité. 

Le PIF contribue à faire du pays un hub économique et technologique régional, voire mondial.

Des projets comme Neom, ville futuriste en construction dans le nord-ouest du pays, ou AlUla, combinant tourisme de luxe et durabilité environnementale, illustrent cette ambition, et sont le reflet d’un changement de paradigme où l’économie pétrolière laisse place à une société de la connaissance et de l’innovation.

France-Arabie saoudite, une relation en plein essor

Dans ce contexte de mutation rapide, la relation entre la France et l’Arabie Saoudite s’est hissée à un niveau inédit d’intensité. 

Les liens d’amitié, de coopération et de partenariat sont plus étroits que jamais, comme l’a rappelé l’Ambassadeur Al-Ruwaily, et la visite d’État du Président Français Emmanuel Macron en décembre dernier a marqué un tournant symbolique, scellé par la signature d’un mémorandum sur le partenariat stratégique entre les deux pays.

Un des exemples les plus éclatants de cette coopération est le projet d’AlUla, piloté conjointement par une commission royale saoudienne, et l’Agence Française pour le développement d’AlUla (AFALULA).

Prenant la parole lors du colloque, le président d'AFALLA Jean-Yves Le Drian estime que ce projet singulier incarne un modèle de développement culturel, touristique et environnemental durable. 

Le Drian, ancien ministre français de la Défense puis des Affaires étrangères, a souligné l’ambition du Royaume de faire d’AlUla un hub mondial de l’archéologie, tout en y intégrant des dimensions artistiques, économiques et sociales. 

Dans le domaine aérien, la compagnie Saudia a signé en 2024 un accord historique avec Airbus pour l’achat de 105 avions, dont une vingtaine d’A330 annoncés récemment à Toulouse.

Aujourd’hui, indique-t-il, 150 archéologues travaillent sur les sites historiques, et des projets comme la Villa Hegra viendront renforcer l’attractivité du lieu à l’automne prochain.

Le partenariat ne se limite pas au secteur culturel, mais s’étend à la santé, l’aéronautique, les infrastructures et l’environnement. 

La Vision 2030 redéfinit l’identité de l’Arabie saoudite

Mi-avril, le ministre saoudien de la Santé Fahad Aljalajel a effectué une visite officielle en France pour renforcer la coopération dans le domaine médical et pharmaceutique. 

Dans le domaine aérien, la compagnie Saudia a signé en 2024 un accord historique avec Airbus pour l’achat de 105 avions, dont une vingtaine d’A330 annoncés récemment à Toulouse.

Le groupe Suez, représenté au colloque par son directeur des affaires publiques Vincent Menuet, illustre aussi l’engagement du secteur privé français. 

Présent depuis les années 1950 au Moyen-Orient, Suez gère aujourd’hui l’eau et l’assainissement pour des villes stratégiques comme La Mecque, Djeddah et Taïf, couvrant près de 9 millions d’habitants, indique Menuet. 

Suez, ajoute-t-il, est également impliquée dans les projets Neom, et AlUla, avec des solutions intégrées combinant énergie renouvelable, traitement de l’eau et durabilité.

La transformation engagée par la Vision 2030 dépasse largement les objectifs économiques. Elle redéfinit l’identité du Royaume et renforce son ouverture sur le monde. 

Laurent Vigier, président du premier fonds français dédié à l’Arabie Saoudite et actuel directeur exécutif de Five Capital, a souligné que cette vision n’est plus un projet mais une réalité, bâtissant une centralité géopolitique et économique majeure dans le Moyen-Orient.

D’autres intervenants représentant de grands groupes français ont mis l’accent sur l’enthousiasme de la jeunesse saoudienne, le soutien constant de partenaires comme la France, et une capacité d’innovation et de projection rare, qui laissent croire que l’Arabie Saoudite semble désormais prête à jouer un rôle moteur dans la définition du monde de demain.


La France condamne les cyberattaques attribuées au service de renseignement russe

Les vols de données et attaques au rançongiciel se sont multipliés ces derniers mois dans le monde. (Photo, AFP)
Les vols de données et attaques au rançongiciel se sont multipliés ces derniers mois dans le monde. (Photo, AFP)
Short Url
  • Depuis 2021, ce mode opératoire d'attaque (MOA) a été utilisé pour cibler ou compromettre une dizaine d'entités françaises, ce qui représente un nombre significatif d'occurrences.
  • De nombreux partenaires européens ont également été visés par APT28 au cours des dernières années.

PARIS :  La France condamne avec la plus grande fermeté le recours par le service de renseignement militaire russe (GRU) au mode opératoire d'attaque APT28, à l'origine de plusieurs cyberattaques contre des intérêts français.

Depuis 2021, ce mode opératoire d'attaque (MOA) a été utilisé pour cibler ou compromettre une dizaine d'entités françaises, ce qui représente un nombre significatif d'occurrences.

Ces entités sont des acteurs de la vie publique française : des services publics, des entreprises privées, ainsi qu’une organisation sportive liée à l’organisation des Jeux olympiques et paralympiques de 2024.

Ce mode opératoire a également été utilisé par le GRU dans le sabotage de la chaîne de télévision TV5Monde en 2015, ainsi que dans la tentative de déstabilisation du processus électoral français en 2017.

APT28 est aussi employé pour exercer une pression constante sur les infrastructures ukrainiennes dans le contexte de la guerre d'agression menée par la Russie contre l'Ukraine, notamment lorsqu'il est opéré par l'unité 20728 du GRU.

De nombreux partenaires européens ont également été visés par APT28 au cours des dernières années, ce qui démontre une continuité dans les opérations de cette organisation. À ce titre, l'UE a imposé des sanctions aux personnes et entités responsables des attaques menées à l’aide de ce mode opératoire.

Ces activités déstabilisatrices sont inacceptables de la part d'un membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies. Elles sont par ailleurs contraires aux normes des Nations unies en matière de comportement responsable des États dans le cyberespace, auxquelles la Russie a souscrit.

Aux côtés de ses partenaires, la France est résolue à employer l'ensemble des moyens à sa disposition pour anticiper les comportements malveillants de la Russie dans le cyberespace, les décourager et y réagir le cas échéant, afin de protéger ses intérêts et garantir la sécurité de ses citoyens.

L’Agence nationale de sécurité des systèmes d’information publie aujourd'hui un rapport qui alerte sur la menace liée à APT28, dans le but de prévenir de futures attaques.

 


La cour d'assises de Paris se dit bien compétente pour juger un ex-rebelle salafiste syrien

La cour d'assises de Paris a rejeté mercredi la demande des avocats d'un ancien rebelle syrien qui voulaient qu'elle se déclare incompétente pour le juger pour complicité de crimes de guerre. (AFP)
La cour d'assises de Paris a rejeté mercredi la demande des avocats d'un ancien rebelle syrien qui voulaient qu'elle se déclare incompétente pour le juger pour complicité de crimes de guerre. (AFP)
Short Url
  • Mes Romain Ruiz et Raphaël Kempf arguaient notamment que la chute du régime de Bachar al-Assad, survenue en décembre 2024, changeait la donne, et appelaient à ce que leur client soit jugé par la justice de transition en Syrie
  • La cour d'assises a rejeté cette demande, se disant "régulièrement saisie" et "compétente pour connaître des faits reprochés à Majdi Nema", permettant ainsi au procès de se poursuivre

PARIS: La cour d'assises de Paris a rejeté mercredi la demande des avocats d'un ancien rebelle syrien qui voulaient qu'elle se déclare incompétente pour le juger pour complicité de crimes de guerre.

La défense de Majdi Nema, un ancien membre du groupe salafiste syrien Jaysh al-Islam (JAI, Armée de l'islam) arrêté en France en 2020, a contesté mardi, au premier jour du procès, le principe de compétence universelle permettant à la justice française de juger un étranger pour des crimes commis à l'étranger sur des étrangers.

Mes Romain Ruiz et Raphaël Kempf arguaient notamment que la chute du régime de Bachar al-Assad, survenue en décembre 2024, changeait la donne, et appelaient à ce que leur client soit jugé par la justice de transition en Syrie.

La cour d'assises a rejeté cette demande, se disant "régulièrement saisie" et "compétente pour connaître des faits reprochés à Majdi Nema", permettant ainsi au procès de se poursuivre.

Cet homme de 36 ans comparaît pour complicité de crimes de guerre, soupçonné notamment d'avoir aidé à enrôler et à former à l'action armée des mineurs, et pour entente en vue de la préparation de crimes de guerre, des faits pour lesquels il encourt 20 ans de réclusion criminelle.

Il conteste les accusations, affirmant n'avoir eu qu'un "rôle limité" dans JAI, un groupe prônant la charia et qui combattait le régime syrien, qu'il dit avoir quitté en 2016.

Alors qu'une plainte avait été déposée en France contre JAI en 2019, il avait été arrêté en janvier 2020 à Marseille, où il se trouvait pour un séjour d'études de quelques mois. Il avait été mis en examen et écroué par un juge du pôle crimes contre l'humanité du tribunal de Paris.