Tebboune veut traquer le magot de la corruption

La corruption mine le pays. Grâce à ses richesses naturelles, des milliards de dollars affluent chaque année dans les caisses de l'État. Durant la période 1999-2019, les recettes cumulées en devises ont dépassé les mille milliards de dollars, de l’aveu même d’un ex-Premier ministre. (AFP).
La corruption mine le pays. Grâce à ses richesses naturelles, des milliards de dollars affluent chaque année dans les caisses de l'État. Durant la période 1999-2019, les recettes cumulées en devises ont dépassé les mille milliards de dollars, de l’aveu même d’un ex-Premier ministre. (AFP).
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Publié le Vendredi 25 septembre 2020

Tebboune veut traquer le magot de la corruption

  • Pouvoir d’achat dégradé, économie à bout de souffle, infrastructures insuffisantes et insécurité larvée sont le lot de beaucoup d’Algériens
  • À de rares occasions, la justice a pu se pencher sur des cas de grande corruption, comme dans les affaires de l’autoroute Est-Ouest, Sonatrach ou encore Khalifa

PARIS: L’Algérie aurait pu avoir le potentiel pour se hisser au rang des puissances émergentes. Grâce à ses richesses naturelles, des milliards de dollars affluent chaque année dans les caisses de l'État. Durant la période 1999-2019, les recettes cumulées en devises ont dépassé les mille milliards de dollars, de l’aveu même d’un ex-Premier ministre.

Pourtant, le pays fait face à d'immenses défis. Pouvoir d’achat dégradé, économie à bout de souffle, infrastructures insuffisantes et insécurité larvée sont le lot de beaucoup d’Algériens. La corruption, qui prive l’Algérie des ressources nécessaires à son développement, est en grande partie responsable de cette situation.

En germe depuis l’indépendance, elle a atteint des proportions alarmantes ces vingt dernières années. Évasion fiscale, blanchiment d’argent, transferts illicites, fausse facturation… rien n’a été laissé au hasard pour détourner l’argent public. Ces fléaux ont pu prospérer grâce au népotisme et au favoritisme des dirigeants, jusqu’au plus haut sommet de l'État.

En 2002, Bouteflika a ouvert une voie royale vers la corruption en favorisant le «gré à gré simple» dans le code des marchés publics. Censé être exceptionnel, ce mode de passation est devenu la règle, tout en étant soumis à l’aval du Conseil des ministres – présidé par le chef de l'État lui-même.

Par ce tour de passe-passe juridique, Bouteflika pouvait attribuer les marchés à sa convenance, mais surtout en fonction du degré d’allégeance des postulants. Et pour mieux écarter les interférences, tous les organes de contrôle ont été marginalisés, à l’exemple de la Cour des comptes, de l’Inspection générale des finances (IGF), ou de l’Organe national de prévention et de lutte contre la corruption (ONPLC).

À de rares occasions, la justice a pu se pencher sur des cas de grande corruption, comme dans les affaires de l’autoroute Est-Ouest, Sonatrach ou encore Khalifa. L’issue de ces procès a néanmoins laissé un goût d’inachevé. Pour beaucoup, il s’agissait de règlements de comptes entre clans au pouvoir plutôt que d’une réelle volonté d’appliquer la loi. D’autres dossiers, bien que médiatisés, n’ont toujours pas trouvé le chemin des tribunaux : BRC, SCN-Lavalin, Saipem, General Electric, Alstom… sans compter ceux qui croupissent encore dans les tiroirs des différents services de police judiciaire.

Délinquance financière

L’opacité qui entoure généralement la grande délinquance financière ne permet pas de chiffrer avec précision l’ampleur du désastre. En revanche, il est admis que les marchés publics favorisent la corruption, en raison de la complexité du processus d’attribution des contrats, des intérêts financiers en jeu et de l’interaction entre agents de l’État et soumissionnaires.

Or, sur les vingt dernières années, l’Algérie a engagé quelque 600 milliards de dollars de commandes publiques, transactions locales et transnationales confondues. Selon des estimations dignes de foi, les commissions occultes engrangées au cours de cette période tournent autour de 10 % de la valeur globale des marchés. Auxquelles il convient d’ajouter le produit des autres infractions : blanchiment, fuite des capitaux…

L’opération «mains propres» lancée après le départ de Bouteflika, le 2 avril 2019, a mis en évidence la collusion entre les milieux d’affaires et la sphère politique. Deux ex-Premiers ministres, plusieurs ex-ministres, hauts responsables de l’État, officiers supérieurs et hommes d’affaires sont aujourd’hui sous les verrous, alors que les procès se succèdent.

«Combattre la corruption» était l’une des promesses phares d’Abdelmadjid Tebboune durant sa campagne. Une fois élu, en décembre 2019, le nouveau président a réitéré sa volonté de «lutter contre la corruption et toutes les formes de dilapidation des deniers publics» et à «récupérer les fonds détournés et placés à l’étranger». Cet engagement fait d’ailleurs écho à la principale revendication du mouvement de contestation du 22 avril 2019, exigeant la fin de la corruption.

Dans les affaires récemment examinées, la justice a ordonné la saisie des fortunes illicites et la confiscation des biens mal acquis. À ce stade, les montants récupérés s’élèvent déjà à plusieurs dizaines de milliards de dinars. Abdelmadjid Tebboune est revenu sur le sujet comme pour enfoncer le clou. «Ce qui est rendu public à partir des procès anti-corruption […] dénote le niveau de la déliquescence morale et la profondeur du mal fait aux institutions […], mais aussi une crise de confiance de fond entre gouvernants et gouvernés», a-t-il martelé, ajoutant: «Le règlement de cette crise est une condition sine qua non de l'édification de l'Algérie nouvelle, où personne ne sera protégé par son immunité ni par son influence». 

Mais le président veut aller plus loin, en traquant les fonds dissimulés à l’étranger. Dès le 22 janvier 2020, il annonce la couleur: «J’attends le feu vert de la justice, qui n’a pas encore statué sur les dossiers ni sur les montants pillés. […] Les fonds détournés sont cachés ici mais aussi à l’étranger, à Genève et dans des paradis fiscaux. Une fois ces dossiers définitivement clos par la justice, nous allons entamer les procédures nécessaires, soit par le biais d’avocats […]soit par l’activation des conventions conclues avec ces pays. Ces fonds seront récupérés par le biais de la justice », s’est-il engagé face à la presse.

La partie émergée de l’iceberg

De récentes commissions rogatoires internationales ont permis, pour l’heure, de localiser quelque 3 milliards de dollars, dit-on. Ce n’est que la partie émergée de l’iceberg, selon certains experts qui évaluent le préjudice, au bas mot, à vingt fois ce montant. Tous recommandent à l’État d’ordonner rapidement le gel des fortunes identifiées afin d’éviter leur disparition dans les méandres des paradis fiscaux.

En matière d’entraide judiciaire, l’Algérie a demandé le concours de la France, censée abriter le gros du butin. D’autres États, essentiellement européens, devraient également être sollicités. Néanmoins, les législations de ces pays sont très en retard par rapport au droit international, notamment la Convention des Nations unies contre la corruption (Convention UNCAC), qu’ils ont pourtant ratifiée. Adoptée le 31 octobre 2003, cette dernière stipule que «la restitution des avoirs détournés est un principe fondamental du droit international».

Pendant longtemps, la France ne disposait d’aucun mécanisme juridique permettant la restitution des avoirs et des biens mal acquis. Après leur confiscation, ils étaient simplement intégrés au budget de l’État français, au grand dam des victimes. Les choses n’ont commencé à changer qu’en mai 2019, avec l’adoption par le Sénat de la «loi relative à l’affectation des avoirs issus de la corruption transnationale», en mai 2019.

L’Algérie pourrait bénéficier des nouvelles dispositions de la loi sénatoriale, ainsi que de la récente décision du gouvernement français de lever le secret bancaire sur les coffres-forts. À condition que les deux États arrivent à se mettre d’accord sur l’application des accords bilatéraux et des conventions internationales en matière de corruption.

Cette opération prendra sans doute plusieurs années, comme le montre l’expérience des pays africains engagés dans le même combat. Le président Tebboune le sait. C’est probablement pour cette raison qu’il s’est prononcé en faveur du «plaider coupable», une procédure qui permet aux repentis d’écoper de peines allégées contre la restitution des sommes pillées. «Il se peut qu’il y ait des accords entre la justice et les accusés, des remises de peine ou des négociations si ces derniers acceptent de rendre 50 % du montant. C’est entre eux et la justice, moi je ne le refuserai pas» a annoncé Tebboune dès le 22 janvier.


Vision 2030: le Cabinet remercie les agences impliquées

Le prince héritier d'Arabie saoudite, Mohammed ben Salmane, assiste à la session du Cabinet, mardi. (SPA)
Le prince héritier d'Arabie saoudite, Mohammed ben Salmane, assiste à la session du Cabinet, mardi. (SPA)
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  • Le Conseil des ministres a souligné que la sécurité du Moyen-Orient exigeait d'accélérer la recherche d'une solution juste et globale à la question palestinienne
  • Le Conseil a affirmé que le Royaume poursuivait ses efforts pour accélérer le redressement économique de la République arabe syrienne

RIYAD: Le Conseil des ministres a salué les efforts des agences gouvernementales ayant contribué aux avancées réalisées dans le cadre de la Vision saoudienne 2030, alors que le Royaume se rapproche de l’atteinte de ses objectifs clés, a rapporté mardi l’Agence de presse saoudienne (SPA).

D’après le rapport annuel 2024 de la Vision, 93% des principaux indicateurs de performance ont été entièrement ou partiellement atteints depuis le lancement de l’initiative il y a neuf ans.

Le ministre des Médias, Salman al-Dosari, a précisé que le cabinet avait discuté de la troisième et dernière phase de la Vision 2030, qui débutera en 2026. Cette phase visera à pérenniser l’impact des transformations déjà engagées tout en exploitant de nouvelles opportunités de croissance.

Le Conseil des ministres a également salué le don généreux d’un milliard de riyals saoudiens (266,6 millions de dollars; 1 dollar = 0,88 euro) effectué par le prince héritier Mohammed ben Salmane, destiné à soutenir des projets de logement pour les bénéficiaires saoudiens éligibles et les familles dans le besoin.

Le cabinet a souligné que ce don illustre l’engagement constant du prince héritier à améliorer la qualité de vie des citoyens, ainsi que son intérêt soutenu pour le secteur du logement et les initiatives visant à offrir des logements décents aux familles méritantes à travers le Royaume.

Le prince Mohammed a également informé le Conseil de sa rencontre avec le roi Abdallah II de Jordanie, ainsi que de ses échanges avec le Premier ministre indien Narendra Modi.

Le cabinet a salué les résultats de la deuxième réunion du Conseil de partenariat stratégique saoudo-indien, soulignant le développement continu des relations économiques, commerciales et d’investissement entre les deux pays.

Le Conseil des ministres a souligné que la sécurité du Moyen-Orient exigeait d'accélérer la recherche d'une solution juste et globale à la question palestinienne, conformément aux résolutions de la légitimité internationale, à l'initiative de paix arabe et à la création d'un État palestinien indépendant le long des frontières de 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale.

Le Conseil a affirmé que le Royaume poursuivait ses efforts pour accélérer le redressement économique de la République arabe syrienne et a renouvelé son appel aux institutions financières régionales et internationales pour qu'elles reprennent et étendent leurs opérations dans le pays.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


L'Arabie saoudite condamne les actions d'Israël à Gaza devant la CIJ

 Le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, s'exprime devant la Cour. (Capture d'écran)
Le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, s'exprime devant la Cour. (Capture d'écran)
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  • Tel-Aviv "continue d'ignorer" les décisions de la Cour internationale de justice, déclare le représentant du Royaume
  • M. Alnasser a ajouté qu'"Israël a transformé Gaza en un tas de décombres", soulignant la dévastation généralisée et les souffrances infligées aux civils.

DUBAI : L'Arabie saoudite a condamné mardi devant la Cour internationale de justice la campagne militaire israélienne en cours à Gaza, l'accusant de défier les décisions internationales et de commettre de graves violations des droits de l'homme.

S'exprimant devant la Cour, le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, a déclaré qu'Israël "continue d'ignorer les ordres de la Cour" et a insisté sur le fait que "rien ne justifie les violations commises par Israël à Gaza".

M. Alnasser a ajouté qu'"Israël a transformé Gaza en un tas de décombres", soulignant la dévastation généralisée et les souffrances infligées aux civils.

Ses remarques ont été formulées au deuxième jour des audiences de la CIJ sur les obligations humanitaires d'Israël à l'égard des Palestiniens, qui se déroulent dans le cadre d'un blocus israélien total de l'aide à la bande de Gaza, qui dure depuis plus de 50 jours.

Ces audiences s'inscrivent dans le cadre d'efforts plus larges visant à déterminer si Israël a respecté les responsabilités juridiques internationales dans sa conduite lors de la guerre contre Gaza.

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com


Syrie: neuf morts dans des affrontements entre forces de sécurité et combattants druzes près de Damas

Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants. (AFP)
Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants. (AFP)
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  • Dans un communiqué, les autorités religieuses druzes locales ont "vivement dénoncé l'attaque armée injustifiée contre Jaramana (...) qui a visé les civils innocents", faisant assumer aux autorités syriennes "l'entière responsabilité "
  • "La protection de la vie, de la dignité et des biens des citoyens est l'une des responsabilités les plus fondamentales de l'Etat et des organismes de sécurité", a ajouté le communiqué

DAMAS: Neuf personnes ont été tuées dans des affrontements entre les forces de sécurité syriennes et des combattants de la minorité druze à Jaramana, dans la banlieue de Damas, sur fond de tension confessionnelle, selon un nouveau bilan mardi d'une ONG.

Ces violences interviennent un mois après des massacres qui ont visé la minorité alaouite, faisant des centaines de morts, dans le pays où la coalition islamiste qui a pris le pouvoir en décembre est scrutée par la communauté internationale.

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), "les forces de sécurité ont lancé un assaut" contre la banlieue à majorité druze de Jaramana, après la publication sur les réseaux sociaux d'un message vocal attribué à un druze et jugé blasphématoire envers l'islam.

L'OSDH, basée au Royaume-Uni mais qui dispose d'un solide réseau de sources en Syrie, a précisé que six combattants locaux de Jaramana et trois "assaillants" avaient été tués.

Plusieurs habitants de Jaramana joints au téléphone par l'AFP ont indiqué avoir entendu des échanges de tirs dans la nuit.

"Nous ne savons pas ce qui se passe, nous avons peur que Jaramana devienne un théâtre de guerre", a affirmé Riham Waqaf, une employée d'une ONG terrée à la maison avec son mari et ses enfants.

"On devait emmener ma mère à l'hôpital pour un traitement, mais nous n'avons pas pu" sortir, a ajouté cette femme de 33 ans.

Des combattants locaux se sont déployés dans les rues et aux entrées de la localité, demandant aux habitants de rester chez eux, a dit à l'AFP l'un de ces hommes armés, Jamal, qui n'a pas donné son nom de famille.

"Jaramana n'a rien connu de tel depuis des années". La ville est d'habitude bondée, mais elle est morte aujourd'hui, tout le monde est à la maison", a-t-il ajouté.

Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants.

 "Respecter l'ordre public" 

Dans un communiqué, les autorités religieuses druzes locales ont "vivement dénoncé l'attaque armée injustifiée contre Jaramana (...) qui a visé les civils innocents", faisant assumer aux autorités syriennes "l'entière responsabilité de ce qui s'est produit et de toute aggravation de la situation".

"La protection de la vie, de la dignité et des biens des citoyens est l'une des responsabilités les plus fondamentales de l'Etat et des organismes de sécurité", a ajouté le communiqué.

Il a dénoncé dans le même temps "toute atteinte au prophète Mahomet" et assuré que le message vocal était fabriqué "pour provoquer la sédition".

Le ministère de l'Intérieur a souligné mardi "l'importance de respecter l'ordre public et de ne pas se laisser entraîner dans des actions qui perturberaient l'ordre public".

Il a ajouté qu'il enquêtait sur le message "blasphématoire à l'égard du prophète" Mahomet pour identifier l'auteur et le traduire en justice.

Les druzes, une minorité ésotérique issue de l'islam, sont répartis notamment entre le Liban, la Syrie et Israël.

Dès la chute du pouvoir de Bachar al-Assad le 8 décembre en Syrie, après plus de 13 ans de guerre civile, Israël multiplié les gestes d'ouverture envers cette communauté.

Début mars, à la suite d'escarmouches à Jaramana, Israël avait menacé d'une intervention militaire si les nouvelles autorités syriennes s'en prenaient aux druzes.

Ces propos ont été immédiatement rejetés par les dignitaires druzes, qui ont réaffirmé leur attachement à l'unité de la Syrie. Leurs représentants sont en négociation avec le pouvoir central à Damas pour parvenir à un accord qui permettrait l'intégration de leurs groupes armés dans la future armée nationale.

Depuis que la coalition islamiste dirigée par Ahmad al-Chareh, qui a été proclamé président intérimaire, a pris le pouvoir, la communauté internationale multiplie les appels à protéger les minorités.

Début mars, les régions du littoral dans l'ouest de la Syrie ont été le théâtre de massacres qui ont fait plus de 1.700 tués civils, en grande majorité des alaouites, selon l'OSDH.