Les Turcs en quête de médicaments rendus introuvables par la crise

Le pharmacien turc Gokberk Bulmus (à droite) sert des clients dans une pharmacie d'Ankara, la capitale turque, le 13 décembre 2021. (Photo, AFP)
Le pharmacien turc Gokberk Bulmus (à droite) sert des clients dans une pharmacie d'Ankara, la capitale turque, le 13 décembre 2021. (Photo, AFP)
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Publié le Dimanche 19 décembre 2021

Les Turcs en quête de médicaments rendus introuvables par la crise

  • Toute une gamme de médicaments destinés à traiter des maladies comme le diabète, les cancers ou même un simple rhume sont devenus introuvables dans les 27 000 pharmacies en Turquie
  • Ignorant les théories économiques classiques, le chef de l'Etat turc impose à la Banque centrale de baisser régulièrement les taux d'intérêt, encourageant ainsi une inflation qui a dépassé les 21% sur l'année

ANKARA : Depuis des semaines, Fatih Yüksel court les pharmacies d'Ankara. Comme des milliers de Turcs, il cherche désespérément à mettre la main sur des médicaments qui ont disparu du marché avec l'effondrement de la livre turque.

"Parfois je n'arrive pas du tout à trouver mes médicaments et mon état empire. C'est très douloureux", explique cet homme de 35 ans qui souffre depuis neuf ans  de la maladie de Behçet, une pathologie auto-immune rare caractérisée par de violents maux de tête.

"C'est alors très difficile, mais je dois continuer à travailler", ajoute-t-il.

Le secteur médical est l'un des plus gravement touchés en raison de sa dépendance aux importations, alors que la monnaie nationale s'écroule.

Toute une gamme de médicaments destinés à traiter des maladies comme le diabète, les cancers ou même un simple rhume sont devenus introuvables dans les 27 000 pharmacies en Turquie. 

La livre turque a perdu plus de la moitié de sa valeur depuis le début de l'année par rapport au dollar. Elle est même en chute libre depuis la déclaration le mois dernier d'une "guerre d'indépendance économique" par le président Recep Tayyip Erdogan. 

Ignorant les théories économiques classiques, le chef de l'Etat turc impose à la Banque centrale de baisser régulièrement les taux d'intérêt, encourageant ainsi une inflation qui a dépassé les 21% sur l'année.

Vendredi, le taux de change de 9,6 livres début novembre frôlait les 17 livres pour un dollar.

«Déni de réalité»

"La Turquie traverse une crise du médicament. De nombreux fournisseurs se sont retirés du marché parce qu'ils commençaient à perdre de l'argent, le ministère de la santé continuant de les payer avec un cours du dollar arrêté à 4 livres", explique Vedat Bulut, secrétaire général de l'Union des médecins de Turquie.

Selon M. Bulut, plus de 700 médicaments sont aujourd'hui introuvables et la liste s’allonge de jour en jour. Mais les autorités turques nient l'existence de la crise.

"Les nouvelles évoquant la pénurie de médicaments ne reflètent pas la réalité", martelait la semaine dernière le ministre de la Santé Fahrettin Koca, accusant les entreprises pharmaceutiques de tenter de vendre "chers" leurs produits. 

"C'est un déni de réalité", rétorque M. Bulut qui explique que la même crise touche aussi le matériel médical, indispensable aux interventions chirurgicales.

"De nombreuses opérations sont aujourd'hui suspendues. La santé de nos citoyens est en danger", s'alarme-t-il.

«De l'huile sur le feu»

Face au désespoir des patients qui les sollicitent pour dénicher des médicaments introuvables, les pharmaciens appellent le gouvernement à réévaluer le prix des médicaments au moins trois fois par an.

"La situation s'est détériorée à cause de la chute de la livre turque. Imaginez un feu sur lequel on verse de l'huile... C'est ce qu'on est en train de vivre", explique Taner Ercanli, président de l'Ordre des pharmaciens d'Ankara.

Mais relever aujourd'hui les prix des médicaments importés ne suffira pas forcément.

La pandémie ayant provoqué une hausse des prix des matières premières, les traitements produits en Turquie en sont eux aussi affectés. 

Les producteurs locaux réclament donc au gouvernement que les retards de paiement tiennent compte du taux de change actuel et non du taux convenu à l'époque. Les associations patronales préviennent que certaines entreprises devront mettre la clé sous la porte si elles n'arrivent pas à compenser leurs pertes.

«Situation misérable»

Les médicaments introuvables sont parfois ceux qui étaient autrefois si répandus sur le marché, comme les sirops pour enfant contre la toux.

Emin Durmus, 62 ans, en a fait l'expérience amère lorsqu'il en a cherché, en vain, pour son petit-fils âgé de 5 ans.

"Nous sommes dans une situation misérable. J'espère que les responsables nous entendent", se lamente-t-il.

Erkan Ozturk, qui dirige un centre de santé à Ankara, se débat aussi contre le manque de médicaments contre la fièvre et les nausées, ou les antidouleurs.

"Nous rencontrons de sérieuses difficultés pour trouver des injections pour faire baisser la fièvre des enfants", explique-t-il.

Lorsque le réseau d'entraide des hôpitaux est impuissant à répondre, il doit administrer des médicaments par voie orale ou faire appel à des compresses froides, qui agissent plus lentement que les injections.

Le pharmacien Gokhan Bulmus voit la crise s'empirer. 

"Il nous reste de moins en moins de médicaments contre le diabète, l'hypertension, l'asthme ou les pneumonies", s'inquiète-t-il.

"On va vers une pénurie générale. Ce qui reste aujourd'hui, ce sont les derniers médicaments: après, on ne pourra pas les remplacer", affirme-t-il.


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.


Ouragan Melissa: près de 50 morts dans les Caraïbes, l'aide afflue

Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
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  • L’ouragan Melissa, le plus puissant à frapper la Jamaïque en près de 90 ans, a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque, laissant derrière lui des destructions massives et des centaines de milliers de sinistrés
  • L’aide internationale afflue vers les Caraïbes, avec des secours venus des États-Unis, du Venezuela, de la France et du Royaume-Uni, alors que les experts rappellent le rôle du réchauffement climatique dans l’intensification de ces catastrophes

CUBA: L'aide internationale afflue vendredi vers les Caraïbes dévastées par le passage de l'ouragan Melissa qui a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque.

Habitations en ruines, quartiers inondés et communications coupées... L'heure est à l'évaluation des dégâts causés par Melissa qui devrait désormais faiblir au dessus dans l'Atlantique nord après avoir passé les Bermudes.

Selon le Centre national américain des ouragans (NHC), les inondations devraient s'atténuer aux Bahamas, mais les crues pourraient demeurer à un niveau élevé à Cuba, en Jamaïque, en Haïti et en République dominicaine voisine.

Rendu plus destructeur par le réchauffement climatique, l'ouragan a été le plus puissant à toucher terre en 90 ans lorsqu'il a frappé la Jamaïque mardi en catégorie 5, la plus élevée sur l'échelle Saffir-Simpson, avec des vents d'environ 300 km/h.

"Le bilan confirmé est désormais de 19 morts" dont neuf à l'extrémité ouest de l'île, a déclaré jeudi soir la ministre jamaïcaine de l'Information Dana Morris Dixon, citée par les médias locaux.

De nombreux habitants n'ont toujours pas pu contacter leurs proches, ont expliqué les autorités. L'armée jamaïcaine s'emploie à dégager les routes bloquées, selon le gouvernement.

"Il y a eu une destruction immense, sans précédent, des infrastructures, des propriétés, des routes, des réseaux de communication et d'énergie", a déclaré depuis Kingston Dennis Zulu, coordinateur pour l'ONU dans plusieurs pays des Caraïbes. "Nos évaluations préliminaires montrent que le pays a été dévasté à des niveaux jamais vus auparavant".

- Melissa "nous a tués" -

A Haïti, pas directement touché par l'ouragan mais victime de fortes pluies, au moins 30 personnes, dont dix enfants, sont mortes, et 20 portées disparues, selon le dernier bilan des autorités communiqué jeudi. Vingt-trois de ces décès sont dus à la crue d'une rivière dans le sud-ouest du pays.

A Cuba, les communications téléphoniques et routières restent largement erratiques.

A El Cobre, dans le sud-ouest de l'île communiste, le son des marteaux résonne sous le soleil revenu: ceux dont le toit s'est envolé s'efforcent de réparer avec l'aide d'amis et de voisins, a constaté l'AFP.

Melissa "nous a tués, en nous laissant ainsi dévastés", a déclaré à l'AFP Felicia Correa, qui vit dans le sud de Cuba, près d'El Cobre. "Nous traversions déjà d'énormes difficultés. Maintenant, évidement, notre situation est bien pire."

Quelques 735.000 personnes avaient été évacuées, selon les autorités cubaines.

- Secouristes -

L'aide promise à l'internationale s'achemine dans la zone dévastée.

Les États-Unis ont mobilisé des équipes de secours en République dominicaine, en Jamaïque et aux Bahamas, selon un responsable du département d'État. Des équipes étaient également en route vers Haïti.

Le secrétaire d'État Marco Rubio a également indiqué que Cuba, ennemi idéologique, est inclus dans le dispositif américain.

Le Venezuela a envoyé 26.000 tonnes d'aide humanitaire à son allié cubain.

Le président du Salvador Nayib Bukele a annoncé sur X envoyer vendredi "trois avions d'aide humanitaire en Jamaïque" avec "plus de 300 secouristes" et "50 tonnes" de produits vitaux.

Kits de première nécessité, unités de traitement de l'eau: la France prévoit de livrer "dans les prochains jours" par voie maritime une cargaison d'aide humanitaire d'urgence en Jamaïque, selon le ministère des Affaires étrangères.

Le Royaume-Uni a débloqué une aide financière d'urgence de 2,5 millions de livres (2,8 millions d'euros) pour les pays touchés.

Le changement climatique causé par les activités humaines a rendu l'ouragan plus puissant et destructeur, selon une étude publiée mardi par des climatologues de l'Imperial College de Londres.

"Chaque désastre climatique est un rappel tragique de l'urgence de limiter chaque fraction de degré de réchauffement, principalement causé par la combustion de quantités excessives de charbon, de pétrole et de gaz", a déclaré Simon Stiell, secrétaire exécutif de l'ONU chargé du changement climatique, alors que la grande conférence climatique des Nations unies COP30 s'ouvre dans quelques jours au Brésil.

Avec le réchauffement de la surface des océans, la fréquence des cyclones (ou ouragans ou typhons), les plus intenses augmente, mais pas leur nombre total, selon le groupe d'experts du climat mandatés par l'ONU, le Giec.