Le président libanais critique indirectement le Hezbollah lors d’un discours télévisé

Le président libanais Michel Aoun prononce un discours télévisé au palais présidentiel de Baabda, au Liban, le 27 décembre 2021. (Reuters)
Le président libanais Michel Aoun prononce un discours télévisé au palais présidentiel de Baabda, au Liban, le 27 décembre 2021. (Reuters)
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Publié le Mardi 28 décembre 2021

Le président libanais critique indirectement le Hezbollah lors d’un discours télévisé

  • Michel Aoun a précisé qu’il souhaitait «avoir les meilleures relations possibles avec les pays arabes, notamment les pays du Golfe»
  • «Qu’est-ce qui justifie les tensions avec ces pays et l'ingérence dans des affaires qui ne nous concernent pas ?» a-t-il demandé

BEYROUTH: Lundi soir, le président libanais Michel Aoun a accusé le Hezbollah, sans nommer le parti, d’entraver le fonctionnement du gouvernement.

 «Il est vrai que la défense de la patrie requiert une coopération entre l’armée, le peuple et la Résistance, mais la responsabilité incombe principalement à l’État», a déclaré Aoun lors d’un discours télévisé.

 «Seul l’État peut définir la stratégie de défense et garantir son exécution. Mais, avant d’atteindre cet objectif, l’obstruction volontaire, systématique et injustifiée qui mène au démantèlement institutionnel et à la dissolution de l’État doit cesser.» 

Aoun a également précisé qu’il souhaitait «avoir les meilleures relations possibles avec les pays arabes, notamment les pays du Golfe» et a demandé : «Qu’est-ce qui justifie les tensions avec ces pays et l'ingérence dans des affaires qui ne nous concernent pas ? »

La semaine passée, la tension est montée entre le chef du Courant Patriotique Libre et le Hezbollah lorsque le Conseil constitutionnel a rejeté un recours présenté par le CPL en invalidation contre les amendements à la loi électorale qui ont été approuvés par le Parlement mais contrés par les députés aounistes. Le recours aurait limité le droit de vote des expatriés. Au lieu de pouvoir voter pour les 128 membres du Parlement, ils n’auraient pu voter que pour six dévolus à la diaspora.

Dans un discours qu’il a prononcé à la suite de la décision du Conseil, le chef du CPL, Gebran Bassil, a dénoncé le Hezbollah. Il était donc prévu que Aoun critique, lui aussi, le parti et qu’il l’accuse de perturber le fonctionnement du gouvernement.

Plus tôt le lundi, le ministre de l’Intérieur Bassam Mawlawi a annoncé qu’il avait signé un décret pour que les élections parlementaires soient tenues le 15 mai. Le Parlement avait recommandé que les élections se déroulent le 27 mars, mais Aoun s’était opposé à cette date et avait demandé qu’elles soient reportées au mois de mai.

Dans son discours, le président a appelé à «un dialogue national urgent pour réfléchir à ces trois questions : la décentralisation administrative et financière, la stratégie de défense et le plan de sauvetage économique.»

Tout en veillant à ne pas rompre totalement ses relations avec le Hezbollah, il a indirectement accusé le parti de perturber le fonctionnement de l’État.

 «Je ne veux me disputer avec personne, avec aucun parti. Je ne veux non plus briser l’unité d’aucune secte», a affirmé Aoun.

Il a cependant ajouté qu’il n’accepterait pas «d’être témoin de la chute de l’État et de la souffrance du peuple» et qu’il continuerait à travailler jusqu’au dernier jour de son mandat et de sa vie pour éviter cela.

 «La solution réside dans le dialogue et les moyens pacifiques. Tout commence par la réunion et le travail du Conseil des ministres et de toutes les institutions gouvernementales.»

Il a insisté sur le fait qu’il était «indispensable que le gouvernement se réunisse… et que le Parlement surveille son travail au lieu de contribuer à son dysfonctionnement. La perturbation du gouvernement est à l’origine de la paralysie de l’administration.»

Le président a également précisé que «seul l’État pouvait définir et implémenter la stratégie de défense et que l’obstruction volontaire, systématique et injustifiée devait cesser.»

Aoun a critiqué la perturbation de l’État causée par les demandes du Hezbollah et du mouvement Amal de mettre fin à l'enquête du juge Tarek Bitar sur les causes de l'explosion du port de Beyrouth en août 2020.

 «Par quelle charia, logique ou constitution, le Conseil des ministres est-il suspendu ? Pourquoi lui est-il demandé de prendre une décision qui ne relève pas de ses pouvoirs ? Pourquoi ses travaux sont-ils suspendus à cause d’un problème qui n’est pas en rapport avec le pacte national ?» a-t-il demandé.

Il a conclu son discours en disant qu’il transmettait «un message franc» et qu’il espérait «ne pas devoir en dire davantage.»

Le discours de Aoun coïncide avec une campagne sur les réseaux sociaux et les sites d’actualités en signe de protestation contre des incidents qui ont eu lieu sur la route qui mène vers l’aéroport de Beyrouth, où le Hezbollah a affiché des bannières et des images en soutien aux dirigeants iraniens, notamment Qassem Soleimani, ancien commandant de la force Al-Qods du Corps des gardiens de la révolution islamique, à l'approche du deuxième anniversaire de son assassinat par un drone américain, le 3 janvier 2020.

Les activistes trouvent que ces bannières et ces photos sont «provocatrices pour tout Libanais, et plus précisément pour les expatriés qui rentrent au Liban pour les fêtes.»

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

 

 


Centre de coordination militaro-civile pour Gaza: beaucoup de discussions, peu de résultats

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  • "Il y a des moments où on se dit qu'on a touché le fond mais qu'on creuse encore" ironise un humanitaire qui s'y est rendu plusieurs fois pour parler des abris fournis aux centaines de milliers de Palestiniens de Gaza déplacés
  • "Au départ, personne ne savait ce que c'était, mais tout le monde voulait en être", raconte un diplomate européen à l'AFP, "maintenant les gens déchantent un peu, ils trouvent que rien n'avance, mais on n'a pas le choix"

JERUSALEM: Lancé par les Etats-Unis dans le sillage du cessez-le-feu entre Israël et le Hamas pour surveiller la trêve et favoriser l'afflux d'aide humanitaire, le Centre de coordination militaro-civile (CMCC) pour Gaza peine à tenir ses promesses.

"Au départ, personne ne savait ce que c'était, mais tout le monde voulait en être", raconte un diplomate européen à l'AFP, "maintenant les gens déchantent un peu, ils trouvent que rien n'avance, mais on n'a pas le choix, il n'y a aucune autre initiative, c'est ça ou continuer à discuter dans le vent avec des Israéliens".

"Il y a des moments où on se dit qu'on a touché le fond mais qu'on creuse encore", ironise un humanitaire qui s'y est rendu plusieurs fois pour parler des abris fournis aux centaines de milliers de Palestiniens de Gaza déplacés par la campagne militaire israélienne.

Le CMCC doit permettre d'amorcer la suite des étapes du plan de paix pour Gaza après plus de deux ans d'une guerre dévastatrice déclenchée le 7 octobre 2023 par l'attaque sans précédent du mouvement palestinien Hamas sur Israël.

"Lorsque nous l'avons ouvert, nous avons clairement indiqué qu'il se concentrait sur deux choses: faciliter l'acheminement de l'aide humanitaire, logistique et sécuritaire vers Gaza et aider à surveiller en temps réel la mise en oeuvre de l'accord", insiste le capitaine Tim Hawkins, porte-parole du Commandement militaire central américain (Centcom), couvrant notamment le Moyen-Orient.

L'initiative a été présentée aux acteurs (ONG, agences des Nations unies, diplomates...) comme un générateur d'idées totalement inédites.

Frustrés par leurs difficultés avec les autorités israéliennes, de nombreux pays et acteurs humanitaires disent s'être jetés dans le projet, impatients d'avoir un nouvel interlocuteur se disant enclin à trouver des solutions: les Etats-Unis.

"Rien n'a changé" 

"Au début, les Américains nous ont dit qu'ils découvraient qu'Israël interdisaient l'entrée de tout un tas de choses dans Gaza, la fameuse liste des biens à double usage, ils avaient l'air choqués et on se disait qu'enfin on allait franchir cet obstacle", raconte un ingénieur humanitaire, "mais force est de constater que strictement rien n'a changé".

Deux mois après l'ouverture, nombre d'humanitaires et diplomates contactés par l'AFP jugent, sous couvert de l'anonymat, que la capacité ou la volonté américaines à contraindre Israël est limitée.

Les visiteurs réguliers ou occasionnels des lieux ont décrit à l'AFP le grand hangar occupé par le CMCC à Kiryat Gat (sud d'Israël), comme un entrepôt où de nombreux militaires, israéliens et américains principalement, rencontrent des humanitaires, diplomates, et consultants.

Le premier des trois étages du bâtiment est réservé aux Israéliens, et le dernier aux troupes américaines. Tous deux sont interdits d'accès aux visiteurs.

Le deuxième, recouvert de gazon artificiel, sert d'espace de rencontres avec le monde extérieur.

"On dirait un espace de coworking, mais avec des gens en uniforme", s'amuse une diplomate qui raconte y croiser des "GIs qui boivent de la bière" au milieu d'une sorte d'open-space, avec des panneaux récapitulant les principaux points du plan Trump.

Plusieurs personnes ont dit à l'AFP avoir vu un tableau blanc barré de l'inscription "What is Hamas?" ("Qu'est-ce que le Hamas?") en lettres capitales, sans éléments de réponse.

"Il y a des tables rondes sur des sujets qui vont de la distribution d'eau ou de nourriture à la sécurité", raconte un humanitaire, "en gros on nous écoute décrire ce qu'on veut faire, et quels problèmes on a rencontrés depuis deux ans".

"Boussole du droit" 

Mais "ce n'est pas là que les décisions sont prises", tranche un diplomate qui cite des canaux de discussions parallèles, notamment une équipe supervisée par Arieh Lighstone, un collaborateur de l'émissaire américain Steve Witkoff, à Tel-Aviv.

Plusieurs diplomates regrettent l'absence d'officiels palestiniens dans les murs.

Un autre problème réside dans l'émergence de concepts largement rejetés par la communauté internationale, notamment celui des "Alternative Safe Communities" (ASC), visant à regrouper des civils "vérifiés", non affiliés au Hamas, dans des communautés créées ex nihilo dans une zone de la bande de Gaza sous contrôle militaire israélien, et où les services de base seraient dispensés.

"On a perdu la boussole du droit", commente une diplomate.

Mais le reproche qui revient le plus souvent est le fait que les questions politiques (gouvernance, maintien de l'ordre...) sont évacuées au profit de questions techniques.

"Ils discutent d'où mettre les stations d'épuration, pas de qui les exploitera ni de qui paiera les employés", résume un autre.

Concédant "certaines frictions", sans plus de détail, le capitaine Hawkins, du Centcom, met en avant certaines avancées comme l'ouverture de nouveaux points de passage pour l'aide à destination de Gaza. "Nous progressons, assure-t-il, tout en reconnaissant pleinement qu'il reste encore beaucoup à faire."


Le Congrès américain approuve la levée définitive des sanctions contre la Syrie

La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars. (AFP)
La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars. (AFP)
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  • Le gouvernement américain a indiqué être favorable à l'abrogation de cette loi Caesar
  • Son application avait déjà été suspendue par deux fois pour six mois après l'annonce du président Trump en mai levant les sanctions contre la Syrie dans le cadre de la normalisation des relations entre ce pays et les Etats-Unis

WASIHNGTON: Le Congrès américain a approuvé mercredi la levée définitive des sanctions imposées par les Etats-Unis contre la Syrie du temps de Bachar al-Assad, devant permettre le retour d'investissements dans ce pays ravagé par des années de guerre civile.

L'abrogation d'une loi dite "Caesar", adoptée en 2019 lors du premier mandat de Donald Trump et qui imposait ces sanctions, figure en effet dans le texte sur la stratégie de défense (NDAA), que le Sénat américain a approuvé mercredi par 77 voix pour et 20 contre.

La Chambre des représentants s'était déjà prononcée la semaine dernière et le texte attend désormais d'être promulgué par le président américain.

Le gouvernement américain a indiqué être favorable à l'abrogation de cette loi Caesar. Son application avait déjà été suspendue par deux fois pour six mois après l'annonce du président Trump en mai levant les sanctions contre la Syrie dans le cadre de la normalisation des relations entre ce pays et les Etats-Unis.

Le chef de la diplomatie syrienne, Assaad al-Chaibani, a salué sur Telegram le vote du Sénat comme "ouvrant de nouveaux horizons pour la coopération et le partenariat entre notre pays et le reste du monde".

La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars.

Bien que son application soit suspendue, de nombreux responsables américains jugeaient qu'elle pouvait nuire à la confiance des investisseurs tant qu'elle n'était pas abrogée.

Le dirigeant syrien Ahmad al-Chareh a été reçu le 10 novembre à la Maison Blanche par le président Trump, une première pour un chef d'Etat syrien depuis l'indépendance du pays en 1946 et une consécration pour l'ancien jihadiste qui, en moins d'un an au pouvoir, a sorti son pays de l'isolement.

Donald Trump l'avait déjà rencontré lors d'un voyage dans le Golfe en mai, annonçant alors la levée des sanctions américaines.

Après 13 ans de guerre civile, la Syrie cherche à garantir des fonds pour sa reconstruction, dont le coût pourrait dépasser 216 milliards de dollars, selon la Banque mondiale.

"L'abrogation aujourd'hui de la loi Caesar est une étape décisive pour donner au peuple syrien une véritable chance de se reconstruire après des décennies de souffrances inimaginables", s'est félicité la sénatrice démocrate Jeanne Shaheen.


Les principales villes du Soudan privées de courant après des frappes de drones sur une centrale

Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts. (AFP)
Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts. (AFP)
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  • Les frappes ont ciblé les transformateurs de la station électrique d’Al-Muqrin à Atbara, dans l'Etat du Nil, dans l'est du pays, a précisé la compagnie d'électricité nationale
  • Deux secouristes ont été tués par une deuxième frappe de drone survenue alors qu'ils tentaient d'éteindre l'incendie provoqué par la première, a déclaré un responsable de la centrale en attribuant cette frappe aux paramilitaires des FSR

PORT-SOUDAN: Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts, ont indiqué plusieurs témoins à l'AFP.

Les frappes ont ciblé les transformateurs de la station électrique d’Al-Muqrin à Atbara, dans l'Etat du Nil, dans l'est du pays, a précisé la compagnie d'électricité nationale.

Deux secouristes ont été tués par une deuxième frappe de drone survenue alors qu'ils tentaient d'éteindre l'incendie provoqué par la première, a déclaré un responsable de la centrale en attribuant cette frappe aux paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR).

Le gouvernement de l’État du Nil a confirmé la mort des deux secouristes dans un communiqué officiel.

Cette station est un nœud stratégique du réseau électrique soudanais, recevant l’électricité produite par le barrage de Merowe — la plus grande source d'énergie hydroélectrique du pays — avant sa redistribution vers plusieurs régions.

Des témoins ont également indiqué qu’aux alentours de 02H00 (minuit GMT), les forces de l’armée régulière avaient activé leurs systèmes de défense antiaérienne, rapportant avoir vu des flammes et de la fumée s'élever au-dessus de la ville contrôlée par l'armée en guerre depuis avril 2023 contre les FSR.

Les coupures d’électricité se sont étendues à plusieurs États, notamment ceux du Nil, de la mer Rouge — où se trouve Port-Soudan, siège provisoire du gouvernement pro-armée — ainsi qu’à la capitale Khartoum, selon des témoins, l'incendie n'étant toujours pas maitrisé.

Les FSR n’ont jusqu'à présent pas commenté l'attaque.

Ces derniers mois, les FSR ont été accusées de lancer des attaques de drones sur de vastes zones contrôlées par l’armée, visant des infrastructures civiles et provoquant des coupures de courant affectant des millions de personnes.

La guerre, qui a éclaté en avril 2023, a fait plusieurs dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué "la pire crise humanitaire au monde", selon l'ONU.