Tunisie 2021: la deuxième grande discorde

Des Tunisiens lors d'une manifestation de soutien au président Kaïs Saïed en octobre dernier à Tunis. (Photo, AFP)
Des Tunisiens lors d'une manifestation de soutien au président Kaïs Saïed en octobre dernier à Tunis. (Photo, AFP)
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Publié le Vendredi 31 décembre 2021

Tunisie 2021: la deuxième grande discorde

  • L’État risque de tomber à tout moment en cessation de paiement, ce qui plongerait plus de 600000 personnes dans les affres de la pauvreté
  • La vie politique tunisienne se résume depuis 2011 à une lutte continue et sans merci entre pouvoir et opposition, et partis opposés politiquement et idéologiquement

TUNIS : Huit ans après la crise de l’été 2013, la Tunisie replonge dans une guerre sans merci entre une coalition menée par Ennahdha, et le président Kaïs Saïed. Alors qu’en même temps sa situation continue de se dégrader sur les tous plans, avec à l’horizon une possible explosion sociale XXL.

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L'entrée du Parlement tunisien bloquée par un véhicule blindé le 26 juillet 2021 lors de la suspension du pouvoir législatif par le Président Saïed. (Photo, AFP)

 

Durant l’année 2021, les Tunisiens ont été tiraillés entre des sentiments contradictoires. D’un côté, joie et fierté, procurées notamment par les sportifs qui ont remporté, en 2021, de nombreux succès régionaux – à l’échelle arabe et africaine – et internationaux. La moisson du seul mois de décembre 2021 est impressionnante. Ghofrane Belkhir a remporté le 9 deux médailles d’or aux championnats du monde d’haltérophilie à Tachkent. Le 16, Ons Jabeur, première tenniswoman arabe entrée cette année dans le top ten (10e) du classement de la Women's Tennis Association (WTA), est également devenue la première joueuse arabe à jouer et à remporter le championnat du monde de tennis de Mubadala (MWTC) d’Abu Dhabi. Cinq jours plus tard, le nageur Ahmed Hafnaoui, champion olympique du 400 m nage libre en juillet dernier, est devenu vice-champion du monde du 1500 m, battant au passage les records d’Afrique de cette distance et du 800 m.

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Dès 2018 déjà, l’Institut national de la statistique estimait la baisse du niveau de vie des Tunisiens à 40%. L'instabilité politique et la pandémie n'ont fait qu'empirer la situation économique. (Photo, AFP)

 

Déception et colère, d’autre part, ont été plus souvent le lot quotidien des Tunisiens, parce que leur situation et celle de leur pays n’a jamais été aussi difficile, sur tous les plans, qu’en 2021. Un chiffre suffit pour le prouver. Alors que le taux de pauvreté avait baissé de 25,4% en 2000 à 15,2% en 2015, la Banque mondiale s’attend à voir la proportion des personnes pauvres et des vulnérables augmenter de 16,7 à 20,1% de la population totale, estimée à 11,7 millions d’habitants.

Et si la pandémie de Covid-19 a aggravé les conditions de vie des Tunisiens, ces dernières ont commencé à se détériorer depuis bien plus longtemps. En 2018 déjà, l’Institut national de la statistique estimait la baisse du niveau de vie à 40%. Et ce n’est pas peut être fini.

En effet, surendetté – la dette était estimée à 99,3 milliards de dinars en juin dernier et pourrait passer à 109 milliards de dinars à la fin de cette année – et peinant à boucler les budgets de 2021 et 2022, l’État risque de tomber à tout moment en cessation de paiement, ce qui plongerait plus de 600 000 personnes dans les affres de la pauvreté.

Les Tunisiens – dont un nombre de plus en plus grand regrette les années Ben Ali – tiennent les politiques pour seuls responsables de cette situation. Car ces derniers ont omis de s’atteler à régler les vrais problèmes du pays et passé le plus clair de leur temps à se disputer le pouvoir et ses avantages.

De fait, la vie politique tunisienne se résume depuis 2011 à une lutte continue et sans merci entre pouvoir et opposition, et partis opposés politiquement et idéologiquement. Cet affrontement a connu deux pics, en 2013 et en 2021.

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La Première ministre tunisienne Najla Bouden reçue par le président Emmanuel Macron à l'Elysée le 12 novembre 2021. (Photo, AFP)

 

En 2013, le bras de fer a été provoqué par l’assassinat de deux figures de la gauche et du nationalisme, Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi. Il avait vu s’affronter deux camps opposés politiquement et idéologiquement, la Troïka menée par Ennahdha et une coalition de partis conduite par le futur président Béji Caïd Essebsi.

Aujourd’hui, la ligne de fracture passe entre le parti islamiste de Rached Ghannouchi, président de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), allié à des formations et des personnalités venant d’horizons divers, et le président Kaïs Saïed, qui joue le peuple contre l’élite. Pourtant, le parti islamiste et le président appartiennent à la même famille idéologique, l’islam conservateur.

L’élite politique ayant perdu toute crédibilité, bon nombre de Tunisiens se sont jetés dans les bras d’un nouvel acteur dont la présence dans la vie politique a fortement augmenté au cours des deux dernières années: le populisme. Ce phénomène ne date pas d’aujourd’hui, mais il s’est accentué au cours des deux dernières années, plus particulièrement depuis le coup de force par lequel le président Saïed a écarté du pouvoir la coalition menée par Ennahdha.

Il est apparu en Tunisie au lendemain du 14 janvier 2011 et son étendard a été porté successivement par plusieurs personnalités. Le premier fut Mohamed Hechmi Hamdi, ancien cadre du mouvement Ennahdha, qui, lors de la campagne pour les élections de l’Assemblée nationale constituante, le 23 octobre 2011, promet monts et merveilles aux Tunisiens, notamment les soins gratuits pour tous, une prime aux 500 000 chômeurs, le transport gratuit pour les plus de 65 ans…

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La Première ministre nouvellement désignée Najla Bouden, lors de sa première réunion officielle avec le Président Saïed le 29 septembre dernier. (Photo, AFP)

 

En 2021, les figures les plus en vue du populisme ont été Abir Moussi et le président Saïed. Mais, contrairement à la présidente du PDL qui combat spécifiquement l’intégrisme et veut l’exclure du jeu politique, c’est tout le système politique traditionnel actuel instauré par la Constitution de 2014 que le chef de l’État tunisien veut démanteler. À la place, il veut mettre en place un régime des «masses», semblable à celui de la «République des masses» (Jamahiriya) de Mouammar Kadhafi.

Marginalisé jusqu’au 24 juillet 2021 du fait d’une Constitution qui accorde les plus larges prérogatives au chef du gouvernement, le président a changé la donne le 25 juillet en suspendant le Parlement puis en s’octroyant le 22 septembre tous les pouvoirs exécutifs et législatifs, et pour une année encore (puisque le chef de l’État a annoncé la tenue d’élections législatives le 17 décembre 2022).

À cause de l’incurie, de l’incompétence et de l’égoïsme de la classe politique – l’ancien chef du gouvernement Habib Essid a dit qu’elle a pour seul objectif l’enrichissement et l’accès à la notabilité –, le ras-le-bol est quasi général parmi les Tunisiens. En effet, d’après le Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES), le nombre de mouvements de protestation a fait un bond de près de 25% passant de 8 729 en 2020 à 10 722 durant les seuls onze premiers mois de 2021. La grande déflagration sociale couve peut-être. En même temps, la crise politique se durcit de jour en jour.

En 2013, la guerre entre l’opposition et Ennahdha s’était soldée par un compromis selon lequel cette dernière avait accepté la nomination d’un gouvernement d’indépendants qui avait organisé les élections de novembre 2014. Aujourd’hui, une telle solution semble exclue, car le président Saïed, convaincu du soutien du «Peuple qui veut», est déterminé à faire cavalier seul et à reconstruire le pays sans son élite.


Vision 2030: le Cabinet remercie les agences impliquées

Le prince héritier d'Arabie saoudite, Mohammed ben Salmane, assiste à la session du Cabinet, mardi. (SPA)
Le prince héritier d'Arabie saoudite, Mohammed ben Salmane, assiste à la session du Cabinet, mardi. (SPA)
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  • Le Conseil des ministres a souligné que la sécurité du Moyen-Orient exigeait d'accélérer la recherche d'une solution juste et globale à la question palestinienne
  • Le Conseil a affirmé que le Royaume poursuivait ses efforts pour accélérer le redressement économique de la République arabe syrienne

RIYAD: Le Conseil des ministres a salué les efforts des agences gouvernementales ayant contribué aux avancées réalisées dans le cadre de la Vision saoudienne 2030, alors que le Royaume se rapproche de l’atteinte de ses objectifs clés, a rapporté mardi l’Agence de presse saoudienne (SPA).

D’après le rapport annuel 2024 de la Vision, 93% des principaux indicateurs de performance ont été entièrement ou partiellement atteints depuis le lancement de l’initiative il y a neuf ans.

Le ministre des Médias, Salman al-Dosari, a précisé que le cabinet avait discuté de la troisième et dernière phase de la Vision 2030, qui débutera en 2026. Cette phase visera à pérenniser l’impact des transformations déjà engagées tout en exploitant de nouvelles opportunités de croissance.

Le Conseil des ministres a également salué le don généreux d’un milliard de riyals saoudiens (266,6 millions de dollars; 1 dollar = 0,88 euro) effectué par le prince héritier Mohammed ben Salmane, destiné à soutenir des projets de logement pour les bénéficiaires saoudiens éligibles et les familles dans le besoin.

Le cabinet a souligné que ce don illustre l’engagement constant du prince héritier à améliorer la qualité de vie des citoyens, ainsi que son intérêt soutenu pour le secteur du logement et les initiatives visant à offrir des logements décents aux familles méritantes à travers le Royaume.

Le prince Mohammed a également informé le Conseil de sa rencontre avec le roi Abdallah II de Jordanie, ainsi que de ses échanges avec le Premier ministre indien Narendra Modi.

Le cabinet a salué les résultats de la deuxième réunion du Conseil de partenariat stratégique saoudo-indien, soulignant le développement continu des relations économiques, commerciales et d’investissement entre les deux pays.

Le Conseil des ministres a souligné que la sécurité du Moyen-Orient exigeait d'accélérer la recherche d'une solution juste et globale à la question palestinienne, conformément aux résolutions de la légitimité internationale, à l'initiative de paix arabe et à la création d'un État palestinien indépendant le long des frontières de 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale.

Le Conseil a affirmé que le Royaume poursuivait ses efforts pour accélérer le redressement économique de la République arabe syrienne et a renouvelé son appel aux institutions financières régionales et internationales pour qu'elles reprennent et étendent leurs opérations dans le pays.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


L'Arabie saoudite condamne les actions d'Israël à Gaza devant la CIJ

 Le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, s'exprime devant la Cour. (Capture d'écran)
Le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, s'exprime devant la Cour. (Capture d'écran)
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  • Tel-Aviv "continue d'ignorer" les décisions de la Cour internationale de justice, déclare le représentant du Royaume
  • M. Alnasser a ajouté qu'"Israël a transformé Gaza en un tas de décombres", soulignant la dévastation généralisée et les souffrances infligées aux civils.

DUBAI : L'Arabie saoudite a condamné mardi devant la Cour internationale de justice la campagne militaire israélienne en cours à Gaza, l'accusant de défier les décisions internationales et de commettre de graves violations des droits de l'homme.

S'exprimant devant la Cour, le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, a déclaré qu'Israël "continue d'ignorer les ordres de la Cour" et a insisté sur le fait que "rien ne justifie les violations commises par Israël à Gaza".

M. Alnasser a ajouté qu'"Israël a transformé Gaza en un tas de décombres", soulignant la dévastation généralisée et les souffrances infligées aux civils.

Ses remarques ont été formulées au deuxième jour des audiences de la CIJ sur les obligations humanitaires d'Israël à l'égard des Palestiniens, qui se déroulent dans le cadre d'un blocus israélien total de l'aide à la bande de Gaza, qui dure depuis plus de 50 jours.

Ces audiences s'inscrivent dans le cadre d'efforts plus larges visant à déterminer si Israël a respecté les responsabilités juridiques internationales dans sa conduite lors de la guerre contre Gaza.

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com


Syrie: neuf morts dans des affrontements entre forces de sécurité et combattants druzes près de Damas

Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants. (AFP)
Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants. (AFP)
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  • Dans un communiqué, les autorités religieuses druzes locales ont "vivement dénoncé l'attaque armée injustifiée contre Jaramana (...) qui a visé les civils innocents", faisant assumer aux autorités syriennes "l'entière responsabilité "
  • "La protection de la vie, de la dignité et des biens des citoyens est l'une des responsabilités les plus fondamentales de l'Etat et des organismes de sécurité", a ajouté le communiqué

DAMAS: Neuf personnes ont été tuées dans des affrontements entre les forces de sécurité syriennes et des combattants de la minorité druze à Jaramana, dans la banlieue de Damas, sur fond de tension confessionnelle, selon un nouveau bilan mardi d'une ONG.

Ces violences interviennent un mois après des massacres qui ont visé la minorité alaouite, faisant des centaines de morts, dans le pays où la coalition islamiste qui a pris le pouvoir en décembre est scrutée par la communauté internationale.

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), "les forces de sécurité ont lancé un assaut" contre la banlieue à majorité druze de Jaramana, après la publication sur les réseaux sociaux d'un message vocal attribué à un druze et jugé blasphématoire envers l'islam.

L'OSDH, basée au Royaume-Uni mais qui dispose d'un solide réseau de sources en Syrie, a précisé que six combattants locaux de Jaramana et trois "assaillants" avaient été tués.

Plusieurs habitants de Jaramana joints au téléphone par l'AFP ont indiqué avoir entendu des échanges de tirs dans la nuit.

"Nous ne savons pas ce qui se passe, nous avons peur que Jaramana devienne un théâtre de guerre", a affirmé Riham Waqaf, une employée d'une ONG terrée à la maison avec son mari et ses enfants.

"On devait emmener ma mère à l'hôpital pour un traitement, mais nous n'avons pas pu" sortir, a ajouté cette femme de 33 ans.

Des combattants locaux se sont déployés dans les rues et aux entrées de la localité, demandant aux habitants de rester chez eux, a dit à l'AFP l'un de ces hommes armés, Jamal, qui n'a pas donné son nom de famille.

"Jaramana n'a rien connu de tel depuis des années". La ville est d'habitude bondée, mais elle est morte aujourd'hui, tout le monde est à la maison", a-t-il ajouté.

Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants.

 "Respecter l'ordre public" 

Dans un communiqué, les autorités religieuses druzes locales ont "vivement dénoncé l'attaque armée injustifiée contre Jaramana (...) qui a visé les civils innocents", faisant assumer aux autorités syriennes "l'entière responsabilité de ce qui s'est produit et de toute aggravation de la situation".

"La protection de la vie, de la dignité et des biens des citoyens est l'une des responsabilités les plus fondamentales de l'Etat et des organismes de sécurité", a ajouté le communiqué.

Il a dénoncé dans le même temps "toute atteinte au prophète Mahomet" et assuré que le message vocal était fabriqué "pour provoquer la sédition".

Le ministère de l'Intérieur a souligné mardi "l'importance de respecter l'ordre public et de ne pas se laisser entraîner dans des actions qui perturberaient l'ordre public".

Il a ajouté qu'il enquêtait sur le message "blasphématoire à l'égard du prophète" Mahomet pour identifier l'auteur et le traduire en justice.

Les druzes, une minorité ésotérique issue de l'islam, sont répartis notamment entre le Liban, la Syrie et Israël.

Dès la chute du pouvoir de Bachar al-Assad le 8 décembre en Syrie, après plus de 13 ans de guerre civile, Israël multiplié les gestes d'ouverture envers cette communauté.

Début mars, à la suite d'escarmouches à Jaramana, Israël avait menacé d'une intervention militaire si les nouvelles autorités syriennes s'en prenaient aux druzes.

Ces propos ont été immédiatement rejetés par les dignitaires druzes, qui ont réaffirmé leur attachement à l'unité de la Syrie. Leurs représentants sont en négociation avec le pouvoir central à Damas pour parvenir à un accord qui permettrait l'intégration de leurs groupes armés dans la future armée nationale.

Depuis que la coalition islamiste dirigée par Ahmad al-Chareh, qui a été proclamé président intérimaire, a pris le pouvoir, la communauté internationale multiplie les appels à protéger les minorités.

Début mars, les régions du littoral dans l'ouest de la Syrie ont été le théâtre de massacres qui ont fait plus de 1.700 tués civils, en grande majorité des alaouites, selon l'OSDH.