La hausse du dollar américain ébranle la sécurité alimentaire et énergétique du Liban

Un boulanger retirant le pain d'un four dans une boulangerie de Sidon, dans le sud du Liban, le 1er juillet 2020. (Reuters)
Un boulanger retirant le pain d'un four dans une boulangerie de Sidon, dans le sud du Liban, le 1er juillet 2020. (Reuters)
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Publié le Mercredi 12 janvier 2022

La hausse du dollar américain ébranle la sécurité alimentaire et énergétique du Liban

Un boulanger retirant le pain d'un four dans une boulangerie de Sidon, dans le sud du Liban, le 1er juillet 2020. (Reuters)
  • Les manifestations commencent dans un contexte de fermetures de routes et de files d'attente dans les stations-service alors que l'impasse politique s'aggrave
  • Le gouverneur de la Banque centrale du Liban est frappé d'une interdiction de voyager liée à un procès

BEYROUTH: La livre libanaise a atteint 33 000 pour un dollar américain sur le marché noir libanais lundi. 

En réaction à cette nouvelle, les manifestants ont bloqué les routes, qui ont été rapidement rouvertes par les Forces armées libanaises. D'autres manifestations sont attendues dans les jours à venir, la journée de jeudi devant connaître des troubles graves en raison d’imminents problèmes d'approvisionnement en carburant. 

Le prix de vente d'un paquet de pain ayant atteint 10 000 livres, le chef du Syndicat des propriétaires de boulangeries, Ali Ibrahim, a mis en garde sur le fait que le pain pourrait ne plus être disponible en quantité suffisante en raison des pénuries de blé et de farine dans le pays, dues aux retards de paiement des importations. 

«Le prix actuel du pain est fixé par le ministère de l'Économie sur la base du taux de change du dollar à 30 000 livres libanaises, mais le prix du paquet de pain va probablement augmenter, vu que le taux de change du dollar sur le marché noir a dépassé ce chiffre», a-t-il précisé. 

Les gens ont fait la queue devant les stations-service lundi soir par crainte d'une augmentation du prix du carburant, provoquant la fermeture d’une dizaine d’entre elles plus tôt que d’habitude. 

Le représentant des distributeurs de carburant du Liban, Fadi Abou Chakra, a souligné que «la hausse folle du taux de change du dollar va provoquer la hausse du prix des hydrocarbures mardi». 

Il a déclaré: «Les dérivés du carburant ont été distribués sur la base du prix de 28 000 livres par dollar américain, alors que le taux de change du dollar américain sur le marché noir a dépassé les 30 000 livres. C'est une cause pure et simple d’effondrement et de faillite pour les institutions, les distributeurs de carburant et les propriétaires de stations-service, ainsi que pour les citoyens libanais qui ont subi de plein fouet la hausse des prix. 

«Nous soutenons le rassemblement de jeudi», a-t-il poursuivi, soulignant le fait que le carburant ne sera pas distribué ce jour-là «car les revendications des syndicats des transports sont justes et représentent celles de chaque citoyen libanais». 

La pandémie a provoqué de nouvelles perturbations, plusieurs responsables du ministère des Finances chargés d’achever le projet ayant été contaminés par le virus, retardant ainsi son renvoi au secrétaire général du cabinet. 

Le ministre des Affaires sociales, Hector Hajjar, a déclaré que «le nombre de familles libanaises inscrites à deux programmes d'aide en espèces tant attendus a atteint en un mois 410 000, soit 1,6 million de personnes de différentes régions, le Akkar dans le nord du Liban étant en tête de liste, suivi de Baabda, Tripoli, Baalbek, Beyrouth et Zahlé. Les données montrent que 59% des personnes inscrites sont au chômage. 

Le président Michel Aoun s’est abstenu de signer les décrets relatifs au paiement des salaires à plus de 6 000 personnes dans les institutions gouvernementales, ce qui a été imputé à «l'échec du Conseil des ministres à se réunir». 

Dans un communiqué, le bureau du président a déclaré: «Il n'est pas possible d’émettre des approbations exceptionnelles avec un gouvernement qui n'est ni démissionnaire ni en phase de transition.» 

Par ailleurs, des proches de soldats et de retraités se sont joints aux manifestations devant les casernes de l'armée libanaise, après que le salaire mensuel des militaires est tombé en dessous de 37 dollars. 

Le 5 janvier, le Premier ministre, Najib Mikati, et Michel Aoun sont convenus de signer un décret concernant l’ouverture d'une session extraordinaire du Parlement dans le but de signer des approbations exceptionnelles relatives aux indemnités de transport pour les institutions militaires et sécuritaires, portant l'indemnité de transport à 65 000 livres pour le secteur privé et 64 000 livres pour le secteur public, accordant un mois et demi de salaire aux employés du secteur public en novembre et décembre 2021, et renouvelant les accords des contractuels avec l'État. 

L'impasse politique du pays a été exacerbée par le Hezbollah et le mouvement Amal qui refusent d'assister à toute session du cabinet à moins que Tarek Bitar, le juge chargé de l'enquête sur l'explosion du port de Beyrouth en 2020, ne soit démis de ses fonctions. 

Aoun a appelé à un dialogue national urgent entre les partis au pouvoir du pays et a rencontré mardi au palais de Baabda le chef du groupe Loyauté à la Résistance, le député Mohammed Raad, qui a affirmé que le bloc soutient cette convocation. 

Le leader du Mouvement Marada, Sleiman Frangieh, a cependant annoncé qu'il boycotterait le dialogue, de même que les Forces libanaises et le Mouvement du futur. «Le dialogue devrait être établi entre deux parties et pas une», a déclaré Frangieh. 

Par ailleurs, de nombreux hommes politiques libanais ont créé un nouveau groupe d'opposition visant à mettre fin à ce qu'ils appellent l'occupation iranienne du Liban par le biais du Hezbollah. 

Lors d'une conférence de presse sur Zoom tenue à Beyrouth lundi, à laquelle ont assisté environ 200 politiciens, universitaires et personnalités clés de la société civile libanaise, le Conseil national pour la fin de l'occupation iranienne a été officiellement lancé. 

Dans un dernier développement ce mardi, la juge Ghada Aoun, procureure générale du Mont-Liban, a imposé une interdiction de voyager au gouverneur de la Banque centrale du Liban, Riad Salameh, en relation avec un procès intenté contre lui par des activistes. 

Cette décision fait suite à une plainte déposée par le service juridique du groupe The People Want Reform of the System, représenté par les avocats Haitham Ezzo et Pierre Gemayel. 

Dans sa plainte, le groupe a accusé Salameh de «détournement et dilapidation de l'argent public à des fins personnelles, d'enrichissement illicite et de blanchiment d'argent», le qualifiant de «parrain des accords des juntes politiques et de chef du système bancaire qui a volé les dépôts de la population et miné la situation financière de l'État». 

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com 


La diplomatie française estime qu'Israël doit faire preuve de « la plus grande retenue » au Liban

Le drapeau français flotte sur le lac d'Enghien, à Enghien-les-Bains, dans la banlieue nord de Paris, le 25 avril 2025. (Photo Thibaud MORITZ / AFP)
Le drapeau français flotte sur le lac d'Enghien, à Enghien-les-Bains, dans la banlieue nord de Paris, le 25 avril 2025. (Photo Thibaud MORITZ / AFP)
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  • l'armée israélienne continue de mener des frappes au Liban, affirmant viser des combattants et des infrastructures du mouvement libanais, Hezbollah.
  • Le Liban avait alors demandé à Washington et Paris, garants de l'accord de cessez-le-feu, de « contraindre Israël à cesser immédiatement ses attaques ».

PARIS : La France a exhorté mercredi Israël « à faire preuve de la plus grande retenue » au Liban après la frappe israélienne qui a touché Beyrouth dimanche dernier, et a souligné que le démantèlement des sites militaires du Hezbollah revenait « exclusivement aux forces armées libanaises ».

Malgré un cessez-le-feu entré en vigueur le 27 novembre après plus d'un an de guerre entre Israël et le Hezbollah, l'armée israélienne continue de mener des frappes au Liban, affirmant viser des combattants et des infrastructures du mouvement libanais, très affaibli, qui affirme de son côté respecter l'accord.

Le week-end dernier, Israël a assuré avoir visé un entrepôt de missiles.

Le Liban avait alors demandé à Washington et Paris, garants de l'accord de cessez-le-feu, de « contraindre Israël à cesser immédiatement ses attaques ».

« La France rappelle que le respect du cessez-le-feu s'impose à toutes les parties sans exception afin de garantir la sécurité des populations civiles des deux côtés de la Ligne bleue », la frontière de facto délimitée par les Nations unies, a souligné mercredi Christophe Lemoine, porte-parole du ministère français des Affaires étrangères.

« La France appelle donc Israël à faire preuve de la plus grande retenue et à se retirer au plus vite des cinq points toujours occupés sur le territoire libanais », a-t-il ajouté lors d'un point presse.

Une commission regroupant le Liban, Israël, les États-Unis, la France et l'ONU est chargée de superviser l'application du cessez-le-feu.

Beyrouth presse la communauté internationale de faire pression sur Israël pour qu'il mette fin à ses attaques et se retire des cinq positions frontalières où il s'est maintenu dans le sud du pays, malgré l'accord.


Les services de sécurité des Émirats déjouent un transfert illégal d'armes vers le Soudan

Les autorités ont saisi environ cinq millions de munitions de type Goryunov (7,62 x 54 mm) retrouvées dans l'avion. (AFP)
Les autorités ont saisi environ cinq millions de munitions de type Goryunov (7,62 x 54 mm) retrouvées dans l'avion. (AFP)
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  • Les services de sécurité ont réussi à empêcher le transfert d'une quantité d'équipements militaires aux forces armées soudanaises 
  • Les prévenus ont été arrêtés lors d'une inspection de munitions dans un avion privé dans l'un des aéroports du pays

ABU DHABI: Les services de sécurité des Émirats arabes unis ont déjoué une tentative de transfert illégal d'armes et d'équipements militaires aux forces armées soudanaises, a déclaré mercredi le procureur général des Émirats arabes unis, Hamad Saif al-Chamsi.

M. Al-Chamsi a déclaré que les services de sécurité avaient réussi à empêcher le transfert d'une quantité d'équipements militaires aux forces armées soudanaises après l'arrestation de membres d'une cellule impliquée dans la médiation non autorisée, le courtage et le trafic illicite d'équipements militaires, sans avoir obtenu les licences nécessaires auprès des autorités compétentes.

Les prévenus ont été arrêtés lors d'une inspection de munitions dans un avion privé dans l'un des aéroports du pays.

L'avion transportait environ cinq millions de munitions de type Goryunov (54,7 x 62 mm).

Les autorités ont également saisi une partie du produit financier de la transaction en possession de deux suspects dans leurs chambres d'hôtel.

M. Al-Chamsi a déclaré que l'enquête avait révélé l'implication de membres de la cellule des chefs militaires soudanais, notamment l'ancien chef des services de renseignement Salah Gosh, un ancien officier de l'agence de renseignement, un ancien conseiller du ministre des Finances et une personnalité politique proche du général Abdel Fattah al-Burhan et de son adjoint Yasser al-Atta. Plusieurs hommes d'affaires soudanais ont également été impliqués.

Selon les enquêteurs, les membres de la cellule ont conclu un marché d'équipement militaire portant sur des fusils Kalachnikov, des munitions, des mitrailleuses et des grenades d'une valeur de plusieurs millions de dollars.

Les armes ont été transférées de l'armée soudanaise à une société d'importation des Émirats arabes unis en utilisant la méthode de transfert des HAWALADARS.

La transaction a été facilitée par l'intermédiaire d'une société appartenant à un membre fugitif de la cellule travaillant pour les forces armées soudanaises, en coordination avec le colonel Othman al-Zubair, responsable des opérations financières au sein de l'armée soudanaise.

De faux contrats et de fausses factures commerciales ont été utilisés pour prétendre que les paiements concernaient un contrat d'importation de sucre.

L'enquête a conclu que ces transactions avaient été effectuées à la demande du comité d'armement des forces armées soudanaises, présidé par Al-Burhan et son adjoint Al-Atta, en toute connaissance de cause et avec leur approbation. Les membres de la cellule ont été directement chargés de négocier et de finaliser les transactions par Ahmed Rabie Ahmed al-Sayed, une personnalité politique proche du commandant en chef soudanais et responsable de la délivrance des certificats et des approbations des utilisateurs finaux.

Les enquêteurs ont confirmé que Salah Gosh jouait un rôle central dans la gestion du trafic illégal d'équipements militaires aux Émirats arabes unis, en coordination avec d'autres membres de la cellule.

Le groupe a réalisé une marge bénéficiaire de 2,6 millions de dollars (1 dollar = 0,88 euro) par rapport à la valeur réelle des deux transactions, qu'il s'est répartie entre lui et plusieurs complices. La part de Gosh a été retrouvée en possession du suspect Khalid Youssef Mukhtar Youssef, ancien officier de renseignement et ex-chef de cabinet de Gosh.

La cargaison saisie était arrivée à l'aéroport des Émirats arabes unis à bord d'un avion privé en provenance d'un pays étranger.

L'avion s'était posé pour faire le plein et avait officiellement déclaré qu'il transportait un lot de fournitures médicales.

Cependant, la cargaison militaire a été découverte sous la supervision du ministère public, sur la base de mandats judiciaires émis par le procureur général.

Les autorités ont également saisi des copies des contrats relatifs aux deux transactions, de faux documents d'expédition, ainsi que des enregistrements audio et des messages échangés entre les membres de la cellule.

L'enquête a permis de découvrir plusieurs sociétés appartenant à un homme d'affaires soudano-ukrainien, dont une opérant aux Émirats arabes unis.

Ces sociétés ont fourni à l'armée soudanaise des armes, des munitions, des grenades et des drones, en collaboration avec les membres de la cellule et le responsable financier de l'armée.

L'une des sociétés figure sur la liste des sanctions américaines.

Les enquêtes en cours ont révélé que les intérêts financiers et les profits du groupe sont étroitement liés à la poursuite du conflit interne au Soudan.

Le procureur général a souligné que cet incident représentait une grave atteinte à la sécurité nationale des Émirats arabes unis, en faisant de leur territoire une plateforme pour le trafic illégal d'armes à destination d'un pays en proie à des troubles civils, en plus de constituer des infractions pénales punissables par la loi.

Il a conclu en déclarant que le ministère public poursuivait ses procédures d'enquête en vue de déférer les suspects à une procédure judiciaire d'urgence.

Les résultats définitifs seront annoncés à la fin de l'enquête.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Retailleau engage la procédure de dissolution d'Urgence Palestine

Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau intervient lors d'un débat sur le narcotrafic à l'Assemblée nationale française à Paris, le 29 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau intervient lors d'un débat sur le narcotrafic à l'Assemblée nationale française à Paris, le 29 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
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  • A la veille du 1er mai, Bruno Retailleau a annoncé  mecredi l'engagement de la procédure de dissolution du groupe Urgence Palestine.
  • Le groupe organise régulièrement des manifestations, qui ont parfois été interdites par les autorités.

PARIS : A la veille du 1er mai, Bruno Retailleau a annoncé  mecredi l'engagement de la procédure de dissolution du groupe Urgence Palestine, ainsi que de Lyon Populaire, qui appartient à l'ultra droite, après avoir lancé mardi celle du groupe antifasciste La Jeune Garde.

Invité de CNews/Europe 1, le ministre de l'Intérieur a justifié la dissolution d'Urgence Palestine en affirmant qu'il fallait « taper sur les islamistes ». « L'islamisme est une idéologie qui essaie d'instrumentaliser une religion. Il y a une défiguration de la foi », a-t-il dit.

« Il ne faut pas défigurer la juste cause des Palestiniens », a poursuivi M. Retailleau, qui a insisté sur le fait que « beaucoup de nos compatriotes musulmans professent une foi parfaitement compatible avec les valeurs de la République ».

Créé au lendemain de l'attaque sans précédent du Hamas dans le sud d'Israël le 7 octobre 2023, qui a déclenché la guerre à Gaza, le collectif Urgence Palestine dit rassembler « des citoyens, des organisations et mouvements associatifs, syndicaux et politiques mobilisés pour l'auto-détermination du peuple palestinien ». 

Le groupe organise régulièrement des manifestations, qui ont parfois été interdites par les autorités.

« À l'heure où le peuple palestinien est confronté au génocide, à la famine, où les Israéliens cherchent à détruire et à anéantir le peuple palestinien, que fait le gouvernement français ? Il veut dissoudre notre collectif, c'est insupportable », a réagi Omar Al Soumi, l'un des militants d'Urgence Palestine.

« C'est la réalité d'une France complice du génocide », a-t-il accusé dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux.

Urgence Palestine a reçu de nombreux messages de soutien de la part d'organisations de l'extrême gauche et de la gauche radicale. 

« Non à la dissolution d'Urgence Palestine », a écrit sur Instagram le Nouveau Parti Anticapitaliste, dénonçant « des prétextes pour faire taire les voix solidaires avec la Palestine ! ».

L'eurodéputée insoumise Rima Hassan a également critiqué les dissolutions engagées contre la Jeune Garde et Urgence Palestine.

« La dérive autoritaire et fasciste de Macron est aussi réelle, tangible et concrète », a-t-elle réagi sur X.

Tsedek!, qui se présente comme un « collectif juif décolonial », a aussi apporté son soutien à ces deux organisations.

« Le gouvernement qui appelle à la dissolution d’Urgence Palestine, c’est la République qui reprend ses droits et réaffirme que l’antisémitisme ne passera pas en France », s'est au contraire félicitée Sarah Aizenman, présidente du collectif « Nous vivrons », auprès de l'AFP. 

« Cette organisation ne défend pas les droits des Palestiniens, elle soutient une organisation terroriste », a accusé Mme Aizenman.

Les annonces de procédures de dissolution contre La Jeune Garde et Urgence Palestine interviennent à la veille des rassemblements du 1er-Mai et pourraient tendre le climat des manifestations, notamment à Paris, selon un haut responsable de la police.

Le ministre de l'Intérieur et le préfet de police de Paris, Laurent Nuñez, ont par avance prévenu qu'aucun débordement ne serait toléré.

Environ 15 000 personnes sont attendues jeudi pour la manifestation parisienne.