La part de responsabilité des États-Unis dans l’attaque houthie contre Abu Dhabi

Des hommes se tiennent devant une installation de stockage de l'ADNOC à Abou Dhabi, le 17 janvier 2022. Trois personnes ont été tuées lundi lors d'une attaque présumée par drone contre les installations de l'ADNOC. (Photo, AFP)
Des hommes se tiennent devant une installation de stockage de l'ADNOC à Abou Dhabi, le 17 janvier 2022. Trois personnes ont été tuées lundi lors d'une attaque présumée par drone contre les installations de l'ADNOC. (Photo, AFP)
Short Url
Publié le Mardi 18 janvier 2022

La part de responsabilité des États-Unis dans l’attaque houthie contre Abu Dhabi

La part de responsabilité des États-Unis dans l’attaque houthie contre Abu Dhabi
  • Les Émirats arabes unis et l’Arabie saoudite étaient loin de s’imaginer que les États-Unis – leurs alliés de longue date – pouvaient, sous l’administration Biden, leur tourner le dos comme ils l’ont fait
  • C’est triste à dire, mais l’Iran n’est actuellement pas le seul responsable des actes de ces terroristes

Aussi méprisable que soit l’attaque terroriste meurtrière menée lundi par la milice houthie du Yémen contre Abu Dhabi, elle n’était guère surprenante pour nous dans la région, en particulier ici en Arabie saoudite. En effet, nous savons déjà à quel point ces terroristes sont capables du pire. 

Grâce au soutien de leurs commanditaires en Iran, les Houthis ont mené plusieurs attaques de drones et de missiles, prenant pour cible des civils et des infrastructures essentielles au sein du Royaume, aussi bien à Jazan, dans le sud-ouest, qu’au cœur même de la capitale Riyad. 

Il est vrai qu’une guerre est en cours au Yémen et que les guerres ont souvent des conséquences inévitables. D’aucuns diraient que les Émirats arabes unis (EAU) et l’Arabie saoudite doivent s’attendre à ce que des victimes civiles en fassent partie. 
Des non-combattants, y compris des innocents au Yémen, sont morts – bien qu’il soit important de souligner qu’il ne s’agit en aucun cas d'équivalence morale. Lorsque la coalition pour restaurer la légitimité au Yémen fait des victimes civiles, elle le fait par accident, enquête puis présente ses excuses; les Houthis, eux, tuent délibérément des innocents, avant de s’en vanter.  

C’est triste à dire, mais l’Iran n’est actuellement pas le seul responsable des actes de ces terroristes; ces derniers n’auraient jamais osé frapper de cette manière s'ils ne s’étaient pas sentis libres d’agir, compte tenu de l’incapacité de l’administration Biden à soutenir ses alliés et partenaires  - Faisal J. Abbas


Les EAU et l’Arabie saoudite étaient cependant loin de s’imaginer que les États-Unis – leurs alliés de longue date – pouvaient, sous l’administration Biden, leur tourner le dos comme ils l’ont fait. Ils ont révoqué la désignation des Houthis comme groupe terroriste et ils ont retiré les batteries de défense aérienne Patriot d’Arabie saoudite, alors que le Royaume faisait l’objet d’attaques par de missiles aux mains des tirés par les Houthis. 
Ces actions étaient inattendues, non seulement en raison de l’Histoire et de la logique stratégique derrière l’alliance, mais parce que les États-Unis ont pu voir de leurs propres yeux ce dont les Houthis sont capables. 

La devise officielle des Houthis est «Mort à l'Amérique» et la milice a également attaqué la marine américaine à trois reprises, à la fin de l’année 2016, au moment où Barack Obama tentait d’apaiser les tensions avec l’Iran. 
Les États-Unis affirment avoir révoqué la désignation de groupe terroriste parce qu’elle entravait le flux d’aide au Yémen – un argument qui ne convainc personne. Comme l’a déclaré Adel al-Joubeir, ministre d'État saoudien aux Affaires étrangères, dans un entretien accordé à Arab News l’année dernière, les talibans, Daech, le Hezbollah, Al-Chabab et Boko Haram figurent tous sur la liste du terrorisme américain, mais cela n’empêche pas l’aide d’être acheminée vers l’Afghanistan, la Syrie, le Liban, la Somalie ou le Sahel. 

Quant au retrait des batteries Patriot, les États-Unis affirment que cette mesure était prévue depuis un moment déjà, dans le cadre d’une réorientation régionale stratégique et qu’elle n’était pas spécifiquement orientée contre l’Arabie saoudite. Si c’était vrai, pourquoi la décision ne pourrait-elle pas être annulée quand Washington constate que le Royaume continue d’être attaqué par des missiles? Plus encore, dans un comportement qui échappe à toute logique, alors que certains députés américains tentent continuellement de bloquer les ventes d’armes américaines à l’Arabie saoudite, certains commentateurs des médias ont l’audace de reprocher au Royaume de se tourner vers d’autres pays pour obtenir des armes au moyen desquelles il pourrait se défendre. 
La guerre au Yémen n’est pas en faveur des Houthis. Les forces de la coalition les ont chassés de Chabwa et elles ont remporté des batailles militaires dans la province de Marib. Les animaux blessés se déchaînent. L’attaque d’Abu Dhabi était, à bien des égards, prévisible. C’est triste à dire, mais l’Iran n’est actuellement pas le seul responsable des actes de ces terroristes; ces derniers n’auraient jamais osé frapper de cette manière s'ils ne s’étaient pas sentis libres d’agir, compte tenu de l’incapacité de l’administration Biden à soutenir ses alliés et partenaires. 
Bloomberg a rapporté lundi que les EAU demanderaient aux États-Unis de réintégrer les Houthis sur leur liste terroriste. Le moins que les États-Unis puissent faire, c’est d’accepter leur requête. 

Faisal J. Abbas, rédacteur en chef à Arab News, a débuté sa carrière de journaliste au Liban. Twitter : @FaisalJAbbas

NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com