La lettre du Liban à l'ONU fait pression sur Israël pour la démarcation des frontières maritimes

Le Liban et Israël sont officiellement toujours en guerre et il n'y a pas de démarcation de frontières terrestres ou maritimes entre les deux pays. (Photo, AFP/Archives)
Le Liban et Israël sont officiellement toujours en guerre et il n'y a pas de démarcation de frontières terrestres ou maritimes entre les deux pays. (Photo, AFP/Archives)
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Publié le Dimanche 06 février 2022

La lettre du Liban à l'ONU fait pression sur Israël pour la démarcation des frontières maritimes

  • La lettre du Liban souligne que «les opérations d'exploration israélienne dans cette zone contestée met en danger la paix et la sécurité internationales»
  • Le Liban a revendiqué lors des sessions de négociation une zone supplémentaire de 1 430 km2 qui comprend une partie du champ gazier israélien de Karish dans lequel opère la société grecque Energean PLC

BEYROUTH : En prévision de la visite envisagée de l'envoyé américain pour les affaires énergétiques Amos Hochstein au Liban la semaine prochaine pour discuter de la démarcation des frontières maritimes, le Liban a envoyé une lettre à l'ONU «pour changer les négociations sur la frontière maritime sud de la ligne 23 à la ligne 29, tout en conservant le droit de modifier le décret n° 6433 en cas de réticence et d'échec afin de parvenir à une solution équitable».

La lettre indique clairement que «la zone entre les lignes 1 et 23 jusqu'à la zone entre les lignes 23                      et 29, avec une augmentation de 1 430 km2 en plus des 860 km2 précédents, est la zone contestée, notamment le champ gazier de Karish».

Dans cette lettre, le Liban ne respecte pas le principe de négociation «gisement de pétrole en échange d'un gisement de pétrole», c'est-à-dire le champ de Qana en faveur du Liban contre le champ de Karish pour Israël. Au contraire, la lettre inclut une indication claire que le champ de Karish «est une zone contestée, et Israël ne peut pas poursuivre ses opérations d'exploration ni commencer les opérations d'extraction».

La lettre du Liban souligne que «les opérations d'exploration israélienne dans cette zone contestée met en danger la paix et la sécurité internationales».

Cette évolution est considérée comme une escalade par le Liban dans le but d’accélérer les négociations indirectes avec Israël, qui sont menées par les États-Unis sous les auspices de l'ONU.

La lettre, adressée sous la direction du président Michel Aoun au président du Conseil de sécurité le 28 janvier et dont le contenu vient d'être rendu public, stipule que le Liban adhère à son droit à une superficie de 2 290 km2 et non 860 km2 seulement. 

Un observateur politique a déclaré à Arab News qu'Aoun avait envoyé la lettre au gouvernement mais n'avait pas reçu de réponse qui montre qu’il  l'approuve ou s'y oppose.

«La lettre comprenait une menace voilée visant à accélérer les négociations et à obtenir des résultats avant la fin du mandat d'Aoun, et peut-être à ouvrir des portes politiques fermées pour que son gendre, le député Gebran Bassil, soit recommandé comme son successeur», a révélé l'observateur. 

La lettre disait : «Par respect pour le principe de la «voie de négociation» qui n'a pas été atteint après les négociations indirectes, on ne peut pas prétendre qu'il existe une zone économique exclusive israélienne prouvée, contrairement à ce que la partie israélienne a affirmé concernant le soi-disant champ de Karish».

Maroun Al-Khawli, coordinateur national de la Coalition libanaise pour la bonne gouvernance dans les industries extractives, a déclaré : « La lettre… constituera un élan pour les négociations entre le Liban              et Israël et accélérera le processus de conclusion d'un accord final.

«Changer les négociations de la ligne 23 à la ligne 29 vise à entraver l'ambition d'Israël de s'emparer de la zone contestée, en particulier le champ de Karish, et de commencer les opérations de forage, profitant de l'absence d’une décision souveraine libanaise sur cette zone car ses intérêts pétroliers                         et ses contrats d'exploration sont prêts pour la zone contestée».

Al-Khawli a ajouté : «Il existe un consensus général parmi les différentes parties à l'intérieur et à l'extérieur de l'autorité au pouvoir sur la nécessité de tenir les conflits internes à l'écart des négociations avec Israël et de placer cette question au-dessus de toutes considérations politiques, partisanes ou personnelles».

À la fin décembre 2021, l'ambassadeur d'Israël auprès de l'ONU, Gilad Erdan, a présenté une objection au secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, concernant «l'ouverture par le Liban du deuxième cycle de licences pour l'exploration pétrolière et gazière dans les eaux offshore, qui a été annoncé par                   le ministre de l'Énergie Walid Fayad en novembre 2021 et s'étend sur 860 km2 d'une zone contestée.

La lettre libanaise souligne en outre que le Liban «compte toujours sur le succès des efforts de médiation menés par le médiateur américain et souligne son engagement à parvenir à une solution négociée pour les frontières maritimes, sous les auspices de l'ONU, ce qui signifie reprendre les négociations là où elles étaient, quelles que soient les conditions préalables à l'exception du respect des lois. Dans ce contexte, nous réaffirmons que le Liban n'a pris aucune mesure supplémentaire par respect du principe de médiation».

La visite de Hochstein au Liban a été reportée à plusieurs reprises jusqu'à ce que les parties libanaises acceptent «de continuer avec les cartes qui leur ont été distribuées».

Le Liban et Israël sont officiellement toujours en guerre et il n'y a pas de démarcation de frontières terrestres ou maritimes entre les deux pays. L'ONU avait tracé ce qu'on appelle la Ligne bleue pour remplacer la frontière terrestre, qui comprend plusieurs zones contestées.

Le Liban a fait preuve d'une certaine incohérence dans la délimitation de ses frontières maritimes, puisqu'il a tracé une frontière de Ras Al-Naqoura à la ligne 23 et l'a portée à l'attention de l'ONU en 2011. Cependant, le Liban a déclaré plus tard que cela était basé sur de mauvaises estimations, et que  la bonne était la ligne 29.

Le Liban a revendiqué lors des sessions de négociation une zone supplémentaire de 1 430 km2 qui comprend une partie du champ gazier israélien de Karish dans lequel opère la société grecque Energean PLC.

Cependant, la demande libanaise de modification de la frontière maritime n'a pas encore été envoyée à l'ONU car le décret n° 6433, qui prolonge la frontière jusqu'à la ligne 29, n'a pas été modifié, le Conseil des ministres devra encore approuver l'amendement avant de le renvoyer au Parlement. 

Israël avait accusé le Liban d'avoir changé sa position sur la démarcation des frontières maritimes lors du précédent cycle de négociations.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

 


Le pape appelle à «de nouvelles approches» au Moyen-Orient pour rejeter la violence

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  • Le chef de l'Eglise catholique, qui achève une visite de trois jours au Liban, a également appelé les chrétiens d'Orient, dont la présence diminue du fait des guerres et de l'émigration, à faire preuve de "courage"
  • "Le Moyen-Orient a besoin de nouvelles approches afin de rejeter la mentalité de vengeance et de violence, de surmonter les divisions politiques, sociales et religieuses, et d'ouvrir de nouveaux chapitres au nom de la réconciliation et de la paix"

BEYROUTH: Le pape Léon XIV a appelé mardi, devant 150.000 personnes réunies pour une messe en plein air à Beyrouth, à "de nouvelles approches au Moyen-Orient" meurtri par les conflits, pour y faire prévaloir la paix.

Le chef de l'Eglise catholique, qui achève une visite de trois jours au Liban, a également appelé les chrétiens d'Orient, dont la présence diminue du fait des guerres et de l'émigration, à faire preuve de "courage".

"Le Moyen-Orient a besoin de nouvelles approches afin de rejeter la mentalité de vengeance et de violence, de surmonter les divisions politiques, sociales et religieuses, et d'ouvrir de nouveaux chapitres au nom de la réconciliation et de la paix", a déclaré le souverain pontife.

Affirmant "prier spécialement pour le Liban bien-aimé", il a demandé "à la communauté internationale de ne ménager aucun effort pour promouvoir des processus de dialogue et de réconciliation" dans cette région meurtrie par les conflits.

La visite du chef de l'église catholique a donné un souffle d'espoir au Liban, qui a connu une guerre meurtrière avec Israël il y a un an et craint une nouvelle escalade malgré le cessez-le-feu.

Léon XIV a également appelé les dirigeants "dans tous les pays marqués par la guerre et la violence" à "écouter le cri" des "peuples qui appellent à la paix".

S'adressant aux "chrétiens du Levant, citoyens à part entière de ces terres", le pape leur a dit: "ayez du courage. Toute l'Église vous regarde avec affection et admiration".


Une plainte en France pour «entrave» au travail des reporters à Gaza

Le Syndicat national des journalistes (SNJ) et la Fédération internationale des journalistes (FIJ) ont annoncé mardi porter plainte à Paris pour "entrave à la liberté d'exercer le journalisme", visant les autorités israéliennes pour avoir empêché les reporters français de couvrir la guerre à Gaza. (AFP)
Le Syndicat national des journalistes (SNJ) et la Fédération internationale des journalistes (FIJ) ont annoncé mardi porter plainte à Paris pour "entrave à la liberté d'exercer le journalisme", visant les autorités israéliennes pour avoir empêché les reporters français de couvrir la guerre à Gaza. (AFP)
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  • "Cette plainte est la première déposée à ce jour sur le fondement du délit d'entrave à la liberté d'exercer le journalisme, et la première à inviter le ministère public à se prononcer sur l'application de cette incrimination"
  • "Cette plainte (...) dénonce une entrave concertée, parfois violente, empêchant les journalistes français de travailler dans les Territoires palestiniens et portant atteinte à la liberté de la presse"

PARIS: Le Syndicat national des journalistes (SNJ) et la Fédération internationale des journalistes (FIJ) ont annoncé mardi porter plainte à Paris pour "entrave à la liberté d'exercer le journalisme", visant les autorités israéliennes pour avoir empêché les reporters français de couvrir la guerre à Gaza.

Ces faits pourraient selon ces organisations constituer des "crimes de guerre", pour lesquels le parquet national antiterroriste à Paris peut enquêter, dès lors qu'ils sont commis contre des Français.

"Cette plainte est la première déposée à ce jour sur le fondement du délit d'entrave à la liberté d'exercer le journalisme, et la première à inviter le ministère public à se prononcer sur l'application de cette incrimination dans un contexte international où les atteintes à la liberté de la presse sont devenues structurelles", soulignent les plaignants dans la centaine de pages de leur requête, rendue publique par franceinfo.

"Cette plainte (...) dénonce une entrave concertée, parfois violente, empêchant les journalistes français de travailler dans les Territoires palestiniens et portant atteinte à la liberté de la presse", a commenté Me Louise El Yafi, l'une des avocates à l'origine de la plainte.

Elle "souligne aussi l'insécurité croissante visant les journalistes français en Cisjordanie (...). Ces atteintes, en violation du droit international humanitaire, relèvent également de crimes de guerre", ajoute sa consoeur Me Inès Davau.

Un journaliste français travaillant pour plusieurs rédactions francophones, qui a tenu à garder l'anonymat, porte lui aussi plainte: il dénonce son "agression" par des colons lors d'un reportage dans les territoires occupés.

Reporters sans frontières (RSF) a décompté plus de 210 journalistes tués depuis le début des opérations militaires israéliennes à Gaza, en représailles à l'attaque du 7 octobre 2023 par le mouvement islamiste palestinien Hamas.

Depuis le début de la guerre, les autorités israéliennes ont empêché les journalistes de médias étrangers d'entrer de manière indépendante à Gaza, autorisant seulement au cas par cas une poignée de reporters à accompagner leurs troupes.

En France, plusieurs plaintes ont été déposées en lien avec le conflit. Elles visent notamment des soldats franco-israéliens d'une unité d'élite de l'armée israélienne, l'entreprise française d'armement Eurolinks ou encore des Franco-Israéliens qui se rendraient complices du crime de colonisation.

Suite à une plainte, le parquet national antiterroriste a aussi demandé à un juge d'instruction parisien d'enquêter pour "crimes de guerre" dans le dossier de la mort de deux enfants français dans un bombardement israélien à Gaza en octobre 2023.


Trump avertit Israël de ne pas «interférer» avec la Syrie

Une incursion vendredi des forces israéliennes dans un village du sud de la Syrie avait fait 13 morts, selon Damas, tandis que l'armée israélienne a affirmé avoir visé un groupe islamiste. (AFP)
Une incursion vendredi des forces israéliennes dans un village du sud de la Syrie avait fait 13 morts, selon Damas, tandis que l'armée israélienne a affirmé avoir visé un groupe islamiste. (AFP)
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  • Le président américain a échangé au téléphone avec Benjamin Netanyahu et l'a de nouveau invité à la Maison Blanche, ont affirmé les services du Premier ministre israélien peu après l'avertissement lancé par Donald Trump
  • "Il est très important qu'Israël maintienne un dialogue fort et véritable avec la Syrie, que rien ne vienne interférer avec l'évolution de la Syrie en un Etat prospère"

WASHINGTON: Donald Trump a mis en garde Israël lundi contre toute ingérence en Syrie qui risquerait de compromettre la transition du pays arabe en "Etat prospère", après une incursion vendredi de forces israéliennes dans le sud de la Syrie.

Le président américain a échangé au téléphone avec Benjamin Netanyahu et l'a de nouveau invité à la Maison Blanche, ont affirmé les services du Premier ministre israélien peu après l'avertissement lancé par Donald Trump.

"Il est très important qu'Israël maintienne un dialogue fort et véritable avec la Syrie, que rien ne vienne interférer avec l'évolution de la Syrie en un Etat prospère", a déclaré le président américain sur sa plateforme Truth Social, affirmant que les Etats-Unis étaient "très satisfaits des résultats affichés" par Damas.

Une incursion vendredi des forces israéliennes dans un village du sud de la Syrie avait fait 13 morts, selon Damas, tandis que l'armée israélienne a affirmé avoir visé un groupe islamiste.

Depuis la chute il y a près d'un an du président Bachar al-Assad, renversé par une coalition islamiste, Israël a mené des centaines de frappes et conduit des incursions en Syrie. L'opération de vendredi est la plus meurtrière de celles-ci et le ministère syrien des Affaires étrangères a dénoncé un "crime de guerre".

Donald Trump avait reçu début novembre à la Maison Blanche le nouveau chef d'Etat syrien, Ahmad al-Chareh, pour une visite cordiale, au cours de laquelle l'ancien jihadiste avait annoncé que son pays rejoindrait la coalition internationale contre le groupe Etat islamique (EI). Le président américain, qui a levé les sanctions contre Damas, pousse également pour qu'un accord de sécurité soit conclu entre Israël et la Syrie.

"Le nouveau président de la Syrie, Ahmad al-Chareh, travaille de manière assidue pour s'assurer que des bonnes choses arrivent et que la Syrie et Israël aient à l'avenir une relation longue et prospère ensemble", a déclaré lundi Donald Trump dans son post sur Truth Social.

"C'est une opportunité historique, et elle s'ajoute au SUCCÈS, déjà atteint, pour la PAIX AU MOYEN-ORIENT", a-t-il affirmé.

Invitation 

Lors de leur échange par téléphone lundi, Benjamin Netanyahu et Donald Trump ont évoqué un "élargissement" des accords de paix régionaux, selon un communiqué des services du Premier ministre israélien publié dans la foulée du post de Donald Trump.

"Trump a invité le Premier ministre Netanyahu à une rencontre à la Maison Blanche dans un avenir proche", ont-ils ajouté.

Benjamin Netanyahu a déjà effectué davantage de visites auprès de Donald Trump que n'importe quel autre dirigeant étranger depuis le retour du républicain au pouvoir.

"Les deux dirigeants ont souligné l'importance et le devoir de désarmer le Hamas et de démilitariser la bande de Gaza", précise le communiqué.

Depuis la chute de Bachar al-Assad, Israël a déployé des troupes dans la zone démilitarisée sur le plateau du Golan, au-delà de la ligne de démarcation entre la partie de ce territoire syrien annexée unilatéralement par Israël en 1981 et le reste de la Syrie.

Israël attache une "importance immense" à sa présence militaire dans la zone tampon en Syrie, avait déclaré le 19 novembre son Premier ministre, Benjamin Netanyahu, lors d'une visite à des soldats israéliens déployés dans cette zone censée être sous le contrôle de l'ONU.

Cette visite avait été dénoncée par Damas et par l'ONU.

Pendant l'été, des contacts de haut niveau entre responsables israéliens et syriens ont eu lieu, avec l'aide de Paris et Washington, les deux parties indiquant vouloir parvenir à un accord de sécurité.

Mais Benjamin Netanyahu exige pour cela une démilitarisation de toute la partie du territoire syrien courant du sud de Damas jusqu'à la ligne de démarcation de 1974, instituée après la guerre israélo-arabe de 1973.