En Egypte, l'invasion de l'Ukraine fait plonger le pouvoir d'achat

Des hommes égyptiens travaillent dans une boulangerie sur un marché du Caire, le 17 mars 2022. La flambée des prix du pain provoquée par l'invasion de l'Ukraine par la Russie a réduit le pouvoir d'achat des consommateurs en Égypte, l'un des principaux importateurs de blé des anciens États soviétiques. (AFP).
Des hommes égyptiens travaillent dans une boulangerie sur un marché du Caire, le 17 mars 2022. La flambée des prix du pain provoquée par l'invasion de l'Ukraine par la Russie a réduit le pouvoir d'achat des consommateurs en Égypte, l'un des principaux importateurs de blé des anciens États soviétiques. (AFP).
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Publié le Jeudi 17 mars 2022

En Egypte, l'invasion de l'Ukraine fait plonger le pouvoir d'achat

  • L'invasion de l'Ukraine cause une flambée inédite des prix des céréales. L'Egypte, premier importateur de blé du monde, et ses 103 millions d'habitants en sont une victime collatérale
  • La crise des prix des aliments est devenue «une menace existentielle pour l'économie égyptienne», explique Michaël Tanchum du Middle East Institute

LE CAIRE: En Egypte, premier importateur de blé russe et ukrainien, on ne parle que d'une chose: le prix du pain. Face à une hausse allant parfois jusqu'à 50%, Le Caire va pour la première fois encadrer le tarif du pain non subventionné.

Le président Abdel Fattah al-Sissi en personne a convoqué mardi les plus hauts responsables en Egypte, où "maintenir un prix abordable pour les denrées de base est le socle de la stabilité du régime depuis 60 ans", explique Michaël Tanchum du Middle East Institute.

Mais le prix du pain n'est pas le seul problème de Chaima Mohammed, habitante d'un quartier modeste du Vieux Caire.

Au début du mois, cette quadragénaire avait fait le plein de courses pour 1.500 livres égyptiennes (87 euros). Aujourd'hui, elle a prévenu ses trois filles: avec une inflation au plus haut et un kilo de riz passé de huit à douze livres, soit de 0,50 à 0,70 euro, il va falloir se serrer la ceinture.

"J'étais dans le même magasin il y a 15 jours, et aujourd'hui, pour le même prix, j'ai la moitié de mon chariot, qu'est-ce qui s'est passé?", s'emporte Mme Mohammed. 

Ce qui s'est passé, c'est l'invasion de l'Ukraine par la Russie et une flambée inédite des prix des céréales et du pétrole.

L'Egypte, premier importateur de blé du monde, et ses 103 millions d'habitants -- dont le tiers vivent sous le seuil de pauvreté -- en sont une victime collatérale.

Car, en Egypte, 85% du blé et 73% de l'huile de tournesol viennent des deux pays en guerre.

Inflation et consommation «raisonnée»

En Egypte, où la consommation de pain par habitant atteint 130 kg par an -- bien au-dessus de la moyenne mondiale --, le premier indicateur de la crise sont les petites galettes.

Ces derniers jours, leur prix est passé d'une livre à 1,25 livre et le kilo de poulet a grimpé de 20 à 35 livres, note Mme Mohammed. 

Et alors que le ramadan et ses dîners gargantuesques débutent en avril, l'inflation caracole déjà pour la première fois en trois ans à 10%, portée par les prix des aliments en hausse de 20,1%.

A cela, s'ajoute un autre risque, prévient la banque JP Morgan qui anticipe une dévaluation.

De quoi raviver de douloureux souvenirs dans le plus peuplé des pays arabes qui avait subi en 2016 une dévaluation de près de 50% dans le cadre d'une austérité décrétée en échange d'un prêt de 10,8 milliards d'euros du Fonds monétaire international (FMI).

Le gouvernement a déjà annoncé avoir rehaussé son budget pour l'achat de blé de 865 millions d'euros. Une mesure qui s'ajoute à des subventions de plus de cinq milliards d'euros pour les denrées de base, dont plus de 57% uniquement pour le pain, qui profitent à plus de 70% des Egyptiens.

En échange, le Premier ministre, Mostafa Madbouli, a exhorté les commerçants à "ne pas exploiter la situation", tout en appelant les Egyptiens à "être raisonnable dans leur consommation pour ne pas forcer (l'Etat) à devoir se tourner vers des marchés mondiaux" où les prix flambent.

Boycotter ou pas?

La crise des prix des aliments est devenue "une menace existentielle pour l'économie égyptienne", explique M. Tanchum.

Chaque jour, la presse fait ses gros titres avec des milliers de tonnes de biens saisies et des dizaines d'intermédiaires déférés devant la justice pour avoir tenté de jouer sur les prix.

Réunions ministérielles et discours présidentiels consacrés à ce sujet se multiplient, et mardi, M. Sissi a ordonné "un plafonnement du prix du pain non subventionné pour arrêter sa flambée".

Mais pour Islam Mohammed, responsable marketing d'une entreprise de produits alimentaires importés, les commerçants sont loin d'être seuls responsables de la hausse des prix.

"Le coût du transport et du déchargement des cargaisons venant d'Europe par exemple a augmenté de 30% avec la hausse du pétrole" aujourd'hui à près de 100 dollars le baril, explique-t-il à l'AFP: "Cela se répercutera sur les prix à la consommation".

Si le gouvernement ne cesse de répéter que le prix du pain subventionné ne bougera pas, "dans certaines boulangeries, le pain non subventionné est aujourd'hui à une livre et demi", rapporte à l'AFP M. Mohammed.

Dans son quartier cossu du 6-Octobre dans l'ouest du Caire, "il y a aussitôt eu débat et certains ont proposé de boycotter ces boulangeries. Mais les autres ont dit que de toute façon tout est devenu plus cher et que le boycott n'y changerait rien", assure-t-il.


IA: Google investit 5 milliards de livres au Royaume-Uni avant la visite de Trump

Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
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  • Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat
  • Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres

LONDRES: Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays.

Cette somme financera "les dépenses d'investissement, de recherche et développement" de l'entreprise dans le pays, ce qui englobe Google DeepMind (le laboratoire d'IA du géant californien), a indiqué le groupe dans un communiqué.

Google ouvre mardi un centre de données à Waltham Cross, au nord de Londres, dans lequel il avait déjà annoncé l'an dernier injecter un milliard de dollars (850 millions d'euros). La somme annoncée mardi viendra aussi compléter ce financement, a précisé un porte-parole de l'entreprise à l'AFP.

Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat.

Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres.

Selon un responsable américain, qui s'exprimait auprès de journalistes, dont l'AFP, en amont de la visite, les annonces se porteront à "plus de dix milliards, peut-être des dizaines de milliards" de dollars.

Le gouvernement britannique avait déjà dévoilé dimanche plus d'un milliard de livres d'investissements de banques américaines dans le pays, là aussi en amont de la visite d'Etat du président Trump.

Et l'exécutif britannique a annoncé lundi que Londres et Washington allaient signer un accord pour accélérer les délais d'autorisation et de validation des projets nucléaires entre les deux pays.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, Londres redouble d'efforts pour se dégager des hydrocarbures et a fait du nucléaire l'une de ses priorités.

Le partenariat avec Washington, baptisé "Atlantic Partnership for Advanced Nuclear Energy", doit lui aussi être formellement signé lors de la visite d'État de Donald Trump.

 


La note française menacée de passer en catégorie inférieure dès vendredi

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
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  • La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne
  • Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie

PARIS: Fitch sera-t-elle vendredi la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure? Les économistes, qui le pensaient il y a quelques jours, discernent des raisons d'en douter, mais ce ne pourrait être que partie remise.

Fitch ouvre le bal des revues d'automne des agences de notation. Toutes, au vu de l'état des finances publiques françaises et de la crise politique persistante depuis la dissolution, classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette "haute ou bonne"), avec, pour certaines comme Fitch, une "perspective négative".

Ce qui préfigure une dégradation: en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité "moyenne supérieure"), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, accroissant d'autant les remboursements de cette dette.

Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management, une dégradation serait "logique". D'abord parce que la situation politique n'aide pas à mettre en œuvre "un plan crédible d'assainissement budgétaire", comme Fitch l'exigeait en mars.

Mais aussi pour effacer "une incohérence" : 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu'ils ont - à très peu d'exceptions près - des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024.

Coup d'envoi 

Depuis mardi, la nomination rapide à Matignon de Sébastien Lecornu pour succéder à François Bayrou, tombé la veille lors du vote de confiance, ravive l'espoir d'un budget 2026 présenté en temps et heure.

Lucile Bembaron, économiste chez Asterès, juge ainsi "plausible" que Fitch "attende davantage de visibilité politique" pour agir.

D'autant, remarque Hadrien Camatte, économiste France chez Natixis, que les finances publiques n'ont pas enregistré cette année de nouveau dérapage inattendu, et que "la croissance résiste".

L'Insee a même annoncé jeudi qu'en dépit du "manque de confiance" généralisé, celle-ci pourrait dépasser la prévision du gouvernement sortant - 0,7% - pour atteindre 0,8% cette année.

Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l'institut Rexecode, observe aussi que Fitch, la plus petite des trois principales agences internationales de notation, "donne rarement le coup d'envoi" des dégradations.

Mais il estime "très probable" que la principale agence, S&P Global, abaissera le pouce lors de sa propre revue, le 28 novembre.

Selon ses calculs, la France ne sera en effet pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l'an prochain, contre les 4,6% qu'espérait François Bayrou.

Les économistes affirment cependant qu'une dégradation ne troublerait pas les marchés, "qui l'ont déjà intégrée", relève Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade.

Syndrome 

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne.

Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie.

Il craint des taux qui resteraient "durablement très élevés", provoquant "un étranglement progressif", avec des intérêts à rembourser captant "une part significative de la dépense publique, alors qu'on a des besoins considérables sur d'autres postes".

L'économiste décrit une France en proie au "syndrome du mauvais élève".

"Lorsqu'on avait 20/20", explique-t-il - la France était jusqu'à 2012 notée AAA, note maximale qu'a toujours l'Allemagne - "on faisait tout pour s'y maintenir. Maintenant on dit que 17/20 (AA-) ça reste une très bonne note. Bientôt ce sera +tant qu'on est au-dessus de la moyenne, c'est pas si mal+. Quand on est la France, en zone euro, on devrait quand même être un peu plus ambitieux que cela!", dit-il à l'AFP.

Pour autant, même abaissée à A+, "la dette française resterait de très bonne qualité", relativise M. Camatte, préférant souligner "la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui reste très saine".


La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, alerte le Secours populaire

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
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  • "La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire
  • "La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg

PARIS: La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, touchant tous les aspects de la vie des plus fragiles, alerte jeudi le Secours Populaire, qui publie un baromètre témoignant de cette situation jugée préoccupante.

"La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire.

L'association publie un baromètre qui indique qu'un tiers des Français (31%) rencontrent des difficultés financières pour se procurer une alimentation saine permettant de faire trois repas par jour. De même 39% ont du mal à payer leurs dépenses d'électricité et 49% à partir en vacances au moins une fois par an, selon ce sondage réalisé par l'Institut Ipsos, auprès d'un échantillon de 1.000 personnes, représentatif de la population nationale âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas.

"La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg.

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier.

Malgré un "léger mieux" constaté sur certains indicateurs lié au "ralentissement de l'inflation", ce baromètre révèle "une situation sociale toujours très préoccupante", selon le Secours populaire.

En début de semaine, la déléguée interministérielle à la prévention et la lutte contre la pauvreté, Anne Rubinstein, a évoqué des "difficultés" rencontrées par l'Etat pour résorber un taux de pauvreté qui a atteint un niveau record en 2023 en France métropolitaine.

Face à cette situation, la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) a appelé mardi à une "mobilisation collective" pour "débloquer la lutte contre la précarité".

Au niveau européen, 28% de la population déclare se trouver en situation précaire, également selon ce baromètre du Secours Populaire, qui s'appuie aussi sur des échantillons de 1.000 personnes représentatifs de neuf autres pays (Allemagne, Grèce, Italie, Pologne, Royaume-Uni, Moldavie, Portugal, Roumanie, Serbie).

La part des personnes se considérant comme précaires demeure à un niveau "très alarmant" en Grèce (46%) et en Moldavie (45%), pointe le baromètre.

En 2024, le Secours populaire a soutenu 3,7 millions de personnes en France. L'association fournit notamment de l'aide alimentaire et organise des activités pour différents publics pour rompre l'isolement.