Ukraine: scepticisme après les annonces russes, en dépit de progrès dans les négociations

L'invasion a été stoppée sur la plupart des fronts par une forte résistance des forces ukrainiennes (Photo, Reuters).
L'invasion a été stoppée sur la plupart des fronts par une forte résistance des forces ukrainiennes (Photo, Reuters).
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Publié le Mercredi 30 mars 2022

Ukraine: scepticisme après les annonces russes, en dépit de progrès dans les négociations

  • Après environ cinq semaines de guerre, des milliers de victimes et des millions de régugiés, la prudence était également de mise au sein de l'état-major ukrainien
  • Les sirènes d'alerte ont été entendues à plusieurs reprises à Kiev dans la nuit de mardi à mercredi avant d'être annulées, signe de l'inquiétude qui règne toujours

KIEV: L'Ukraine ses alliés occidentaux attendaient mercredi avec scepticisme le retrait militaire autour de Kiev et d'une autre grande ville ukrainienne, annoncé par Moscou à l'issue de pourparlers de paix dans lesquels le président ukrainien Volodymyr Zelensky a néanmoins vu des signes "positifs".

"Nous pouvons dire que les signaux que nous entendons dans les négociations sont positifs, mais ils ne font pas oublier les explosions ou les obus russes", a affirmé mardi M. Zelensky dans un message-vidéo.

Et après environ cinq semaines de guerre, des milliers de victimes et des millions de réfugiés, la prudence était également de mise au sein de l'état-major ukrainien.

"Le soi-disant +retrait des troupes+, est probablement une rotation d'unités individuelles, qui vise à tromper le commandement militaire des Forces armées ukrainiennes", a-t-il jugé dans un communiqué mardi soir.

Les sirènes d'alerte ont été entendues à plusieurs reprises à Kiev dans la nuit de mardi à mercredi avant d'être annulées, signe de l'inquiétude qui règne toujours dans la capitale ukrainienne après les annonces des forces russes.

A l'issue de pourparlers à Istanbul, le vice-ministre de la Défense russe Alexandre Fomine a annoncé mardi que Moscou allait "réduire radicalement (son) activité militaire en direction de Kiev et Tcherniguiv", dans le nord du pays.

Mais pour le porte-parole du ministère américain de la Défense, John Kirby, il ne s'agit que d'un "repositonnement" et non d'un "vrai retrait". "Nous pouvons confirmer que nous avons vu un petit nombre" de troupes "commencer à se repositionner", a-t-il dit. Mais "nous devons être prêts à voir une offensive majeure contre d'autres zones d'Ukraine" et "cela ne signifie pas que la menace contre Kiev soit terminée".

"Il est très probable que la Russie cherche à transférer sa puissance de frappe depuis le nord vers les régions (séparatistes) du Donetsk et de Lougansk à l'est", a jugé de son côté le ministère britannique de la Défense sur son compte Twitter.

Ce qu'a confirmé le ministre russe de la Défense Sergueï Choïgou. La Russie a atteint son "objectif": "le potentiel militaire des forces armées ukrainiennes a été réduit de manière significative, ce qui permet de concentrer l'attention et les efforts sur le but principal, la libération du Donbass".

A l'ONU, la Russie accusée d'avoir provoqué une "crise alimentaire mondiale"

Le président russe "Vladimir Poutine a commencé cette guerre. Il a créé cette crise alimentaire mondiale. Et il est celui qui peut l'arrêter", a martelé la numéro deux de la diplomatie américaine Wendy Sherman lors d'une réunion du Conseil de sécurité consacrée à la situation humanitaire en Ukraine.
L'ambassadeur de France à l'ONU Nicolas de Rivière a enfoncé le clou: "L'agression de la Russie contre l'Ukraine accroît le risque de famine à travers le monde. Les populations des pays en voie de développement sont les premières touchées".
Et, a affirmé le diplomate français, "la Russie essaiera certainement de nous faire croire que ce sont les sanctions adoptées à son encontre qui déséquilibrent la sécurité alimentaire mondiale".

 

Juger sur pièce

Et pour les alliés occidentaux de Kiev, il faudra surtout juger sur pièce.

"On verra s'ils tiennent parole", a dit mardi le président américain Joe Biden à des journalistes, peu après s'être entretenu avec les dirigeants français, britannique, allemand et italien. "Il semble y avoir un consensus sur le fait qu'il faut voir ce qu'ils ont à offrir", a-t-il ajouté.

A Londres, un porte-parole du Premier ministre Boris Johnson n'a pas dit autre chose. Londres jugera "Poutine et son régime sur ses actes, pas ses paroles", a-t-il affirmé. Le Royaume-Uni organisera jeudi une conférence de donateurs pour mobiliser davantage d'armes létales pour l'Ukraine.

Auparavant, ces dirigeants occidentaux avaient mis en garde contre tout "relâchement" face à l'invasion russe, et exprimé "leur détermination à continuer d'accroître le coût payé par la Russie pour son attaque brutale de l'Ukraine.

Les bourses mondiales se sont néanmoins montrées pleines d'espoir, clôturant en nette hausse mardi après ces annonces russes, qui ont fait reculer le pétrole et bondir le rouble.

Après trois heures de négociations à Istanbul, le chef de la délégation russe et représentant du Kremlin, Vladimir Medinski, a fait état de "discussions substantielles" et dit que les propositions "claires" de Kiev en vue d'un accord seraient "étudiées très prochainement et soumises au président" Vladimir Poutine.

Le négociateur ukrainien a expliqué de son côté que Kiev réclamait un "accord international" signé par plusieurs pays garants qui "agiront de façon analogue à l'article 5 de l’Otan et même de façon plus ferme". L'article 5 du traité de l'Alliance atlantique stipule qu'une attaque contre l'un de ses membres est une attaque contre tous.

L'UE veut améliorer la vaccination des réfugiés ukrainiens

Les ministres européens de la Santé ont discuté mardi de la nécessité d'améliorer la vaccination des réfugiés fuyant l'Ukraine, en particulier celle des enfants contre les maladies telles que la poliomyélite et la rougeole.
Pour les réfugiés, "nous considérons que la couverture vaccinale contre la poliomyélite, la rougeole et le Covid-19 est une priorité", a déclaré la directrice du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC), Andrea Ammon, lors d'une réunion à Bruxelles.
La commissaire européenne à la Santé Stella Kyriakides a annoncé que quelque 200.000 vaccins contre la diphtérie et le tétanos allaient être envoyés à l'Ukraine grâce à un don du laboratoire Sanofi, et que 70.000 doses supplémentaires étaient destinées aux réfugiés ukrainiens en République tchèque, Slovaquie et Moldavie.

Temporairement exclus

M. Arakhamia a cité, parmi les pays que l'Ukraine voudrait avoir comme garants les Etats-Unis, la Chine, la France et le Royaume-Uni - membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU - mais aussi la Turquie, l'Allemagne, la Pologne et Israël.

Kiev demande également que cet accord n'interdise en rien l'entrée de l'Ukraine dans l'UE, et propose que la Crimée et les territoires du Donbass sous contrôle des séparatistes prorusses en soient "temporairement exclus".

Pour résoudre la question spécifique de la Crimée, annexée par la Russie en 2014, Kiev propose "quinze ans" de pourparlers russo-ukrainiens séparés, selon un autre négociateur ukrainien, Mykhaïlo Podoliak.

Sur le terrain, l'accalmie espérée se fait attendre. Une frappe russe a touché mardi matin le bâtiment de l'administration régionale de Mykolaïv, ville proche d'Odessa qui connaissait pourtant un répit dans les bombardements ces derniers jours.

Au moins douze personnes sont mortes et 33 autres blessées, selon un nouveau bilan donné par le président Zelensky lors d'une intervention en visioconférence devant le Parlement danois. Des journalistes de l'AFP ont vu les secours sortir deux corps des gravats, et le bâtiment éventré sur toute sa hauteur.

La situation reste également très difficile autour de Kiev où la population fuit les villages à l'est de la capitale, où les habitants assurent que les forces russes continuent d'y mener une occupation brutale.

"Les soldats russes sont venus et ont demandé s'ils pouvaient "héberger" cinq ou six personnes pour la nuit", a raconté Valerii Koriachenko, 50 ans, la lèvre inférieure tremblant d'émotion.

"Ils ont levé le cran de sécurité du fusil et nous ont +poliment demandé+ de partir n'importe où, en disant qu'ils vivaient là maintenant", relate-t-il, ajoutant qu'ils leur ont même pris "chaussettes et sous-vêtements".

Couloirs humanitaires

Dans l'ouest du pays, les forces russes ont aussi bombardé mardi l'aérodrome militaire de Starokostiantyniv, détruisant tous les stocks de carburant de cette ville, a annoncé son maire Mykola Melnytchouk.

Dans le sud, trois couloirs humanitaires ont été mis en place mardi, notamment depuis la ville assiégée de Marioupol, après une suspension lundi des évacuations de civils, a indiqué la vice-Première ministre ukrainienne Iryna Verechtchouk sur Telegram.

M. Zelensky a accusé mardi les Russes de "crime contre l'humanité" à Marioupol, cité portuaire stratégique sur la mer d'Azov dont l'armée russe tente de s'emparer depuis fin février, où environ 160.000 personnes seraient toujours coincées.

"Ils font même sauter des abris alors qu'ils savent pertinemment que des civils s'y cachent, des femmes, des enfants et des vieillards", a-t-il ajouté. Selon Tetyana Lomakina, conseillère de la présidence ukrainienne, "environ 5.000 personnes" y ont été enterrées, mais il pourrait y avoir en réalité "autour de 10.000 morts".

A la suite d'un échange téléphonique avec le président français Emmanuel Macron, Vladimir Poutine a posé comme condition à une évacuation des civils de Marioupol la reddition des forces ukrainiennes qui défendent la ville.   

"Pour trouver une solution à la situation humanitaire difficile dans cette ville, les combattants nationalistes ukrainiens doivent arrêter de résister et déposer les armes", a dit le président russe.

La présidence française a pour sa part estimé que les conditions pour lancer dans les prochains jours une opération humanitaire au secours des habitants de Marioupol ne "sont pas réunies à ce stade".

Autre sujet de préoccupation: la situation des centrales nucléaires de l'Ukraine. L'Agence internationale de l'énergie atomique a annoncé que son directeur général se trouvait en Ukraine "pour des discussions avec des responsables du gouvernement" afin de fournir "une assistance technique" garantissant la sécurité de ces installations.

Et à l'ONU, la Russie a été accusée mardi par les Etats-Unis devant le Conseil de sécurité d'avoir provoqué une "crise alimentaire mondiale", voire de faire courir un risque de "famine", en ayant déclenché une guerre contre l'Ukraine, le "grenier à blé de l'Europe".


Xi Jinping attendu en visite d'Etat en France les 6 et 7 mai, l'Ukraine à l'agenda

Le président chinois Xi Jinping (Photo, AFP).
Le président chinois Xi Jinping (Photo, AFP).
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  • Il s'agit du début de sa première tournée européenne depuis la pandémie de Covid-19
  • Paris évoque une visite très politique sans grands contrats à attendre, même si Emmanuel Macron espère attirer de nouveaux investissements chinois

PARIS: Le président chinois Xi Jinping est attendu en visite d'État en France les 6 et 7 mai pour évoquer avec Emmanuel Macron les crises internationales, dont la guerre en Ukraine, mais aussi célébrer les 60 ans des relations diplomatiques entre les deux pays.

Il s'agit du début de sa première tournée européenne depuis la pandémie de Covid-19, qui avait vu le géant asiatique couper longuement nombre d'interactions avec le reste du monde.

Xi Jinping doit atterrir à Paris dimanche 5 mai au soir, avant d'enchaîner des étapes en Serbie puis en Hongrie, où il est attendu du 8 au 10 mai, ont aussi confirmé lundi les autorités chinoises.

Cette visite en France intervient après celle du président français à Pékin et Canton en avril 2023, a rappelé l'Elysée dans un communiqué.

"Les échanges porteront sur les crises internationales, au premier rang desquelles la guerre en Ukraine et la situation au Moyen-Orient, les questions commerciales, les coopérations scientifiques, culturelles et sportives ainsi que sur nos actions communes face aux enjeux globaux, notamment l’urgence climatique, la protection de la biodiversité et la situation financière des pays les plus vulnérables", a ajouté la présidence française.

Paris évoque une visite très politique sans grands contrats à attendre, même si Emmanuel Macron espère attirer de nouveaux investissements chinois, notamment dans les batteries électriques.

Lin Jian, porte-parole de la diplomatie chinoise, a estimé pour sa part que les deux dirigeants tenteront de "faire de nouvelles contributions à la paix, à la stabilité, au développement et au progrès du monde".

Il y a un an en Chine, Emmanuel Macron avait appelé Xi Jinping à "ramener la Russie à la raison" à l'égard de l'Ukraine "et tout le monde à la table des négociations".

Peu après, le président chinois avait appelé son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky pour la première fois depuis le début du conflit en février 2022. Mais les avancées diplomatiques escomptées par Paris sur le front russo-ukrainien s'étaient arrêtées là.

Un an plus tard, l'analyse française n'a pas varié.

"Il faut continuer d'engager la Chine qui, objectivement, est l'acteur international qui dispose des leviers les plus importants pour changer le calcul de Moscou", dont elle reste le principal allié, glisse-t-on de source diplomatique française, tout en reconnaissant qu'il ne faut pas s'attendre à un tournant majeur du jour au lendemain.

Les autorités chinoises se disent officiellement neutres et appellent à une solution de paix, mais n'ont jamais condamné l'invasion russe. Le président russe Vladimir Poutine doit se rendre en Chine en mai.

"La France, par cette visite, démontre qu'elle fait partie des très rares pays au monde à être en mesure de maintenir des canaux de discussion à tous les niveaux avec la deuxième puissance économique mondiale, avec la Chine, dans un contexte où il y a une relation tendue avec les États-Unis et le Royaume-Uni", avance-t-on encore de source diplomatique française.

Dîner d'État

Le chancelier allemand Olaf Scholz a déjà demandé mi-avril à Pékin au président Xi de faire pression pour que Moscou cesse sa "campagne insensée" en Ukraine, tout en affirmant le soutien germano-chinois à une conférence de paix prévue en juin en Suisse.

Le numéro un chinois a aussi reçu la semaine dernière le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken, auprès duquel il a appelé les États-Unis à "être des partenaires, pas des rivaux". Le secrétaire d'État américain a pour sa part dit avoir fait part à la Chine de ses inquiétudes concernant le soutien apporté à la Russie, affirmant que l'invasion de l'Ukraine serait plus "difficile" sans le soutien de Pékin.

Le président chinois et son épouse Peng Liyuan seront reçus le 6 mai par Emmanuel et Brigitte Macron à Paris, où un dîner d'État est prévu à l'Élysée. Le 7 mai, les deux couples se rendront dans les Hautes-Pyrénées où le chef de l'État français veut partager un moment plus intime avec son homologue.

Il s'y est en effet beaucoup rendu dans son enfance pour rendre visite à sa grand-mère maternelle, Germaine Noguès, décédée en 2013 et qui habitait à Bagnères-de-Bigorre (sud-ouest).

L'an dernier, Xi Jinping avait reçu son invité à Canton pour une cérémonie du thé dans la résidence du gouverneur de la province du Guangdong, où son père, Xi Zhongxun, a vécu quand il occupait ce poste de 1978 à 1981.


Le Premier ministre écossais Humza Yousaf pourrait démissionner

Humza Yousaf, Premier ministre écossais et chef du Parti national écossais (SNP) (Photo, AFP).
Humza Yousaf, Premier ministre écossais et chef du Parti national écossais (SNP) (Photo, AFP).
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  • Humza Yousaf, 39 ans, avait été élu à la tête du SNP en mars 2023, après la démission surprise de la charismatique Nicola Sturgeon
  • Si Humza Yousaf démissionne, le parlement aura 28 jours pour se trouver un nouveau Premier ministre

ÉDIMBOURG: Le Premier ministre écossais Humza Yousaf envisage de démissionner, rapportent lundi des médias britanniques, menacé par un vote de défiance quelques jours après avoir mis fin à la coalition gouvernementale entre son parti, le SNP, et les écologistes.

Humza Yousaf, 39 ans, avait été élu à la tête du SNP en mars 2023, après la démission surprise de la charismatique Nicola Sturgeon.

Premier dirigeant musulman à diriger un grand parti britannique, il incarnait la continuité avec sa prédecesseure, dont il était un des plus proches alliés, et avait continué de porter haut le combat pour l'indépendance de l'Ecosse.

Mais jeudi dernier, Humza Yousaf avait annoncé mettre fin à la coalition gouvernementale entre le SNP et les Verts écossais, sur fonds notamment de désaccord sur la politique environnementale. Le SNP, le Scottish National Party, domine largement le Parlement local d'Edimbourg depuis 2007 - avec 63 sièges sur 129 -, mais il gouvernait depuis 2021 grâce à son alliance avec les Verts.

Dans la foulée de la fin de la coalition, les oppositions conservatrice et travailliste avaient déposé chacune une motion de défiance contre Humza Yousaf, dont le vote est prévu cette semaine. Et les Verts ont annoncé qu'ils voteraient contre le Premier ministre.

Mis en minorité, le SNP se cherche donc de nouveaux alliés, mais selon la BBC, il a écarté une alliance avec le parti Alba, autre formation indépendantiste.

Si Humza Yousaf démissionne, le parlement aura 28 jours pour se trouver un nouveau Premier ministre.

Tourmente

Le parti indépendantiste au pouvoir est dans la tourmente depuis la démission surprise en février 2023 de sa dirigeante Nicola Sturgeon.

Il est plombé par une enquête pour détournement de fonds pour laquelle a été inculpé son ancien directeur général.

Au niveau national, le parti, qui compte 43 députés au Parlement à Londres, se trouve menacé d'un retour en force du parti travailliste en Ecosse lors des élections législatives prévues cette année.

Son combat pour l'autodétermination de l'Ecosse se trouve quant à lui dans l'impasse depuis que la Cour suprême britannique a statué fin 2022 que seul le gouvernement britannique pouvait autoriser un nouveau référendum.

Le dernier vote, en 2014, avait été remporté par le "non" à l'indépendance à 55%.

Dans le système politique britannique, le gouvernement écossais est compétent sur de nombreux domaines, comme l'éducation, la santé, la justice et l'environnement, tandis que le gouvernement britannique, basé à Londres, conserve notamment les pouvoirs de défense et de politique étrangère.


Négociations de la dernière chance pour protéger efficacement le monde de futures pandémies

"La prochaine pandémie n'est pas une question de si, mais quand elle aura lieu", a rappelé mercredi le chef de l'OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus. (AFP).
"La prochaine pandémie n'est pas une question de si, mais quand elle aura lieu", a rappelé mercredi le chef de l'OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus. (AFP).
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  • Après deux années de travaux, les négociateurs ont dû se rendre à l'évidence le mois dernier: il leur faut plus de temps pour tenter de se mettre d'accord sur ce texte historique sur la prévention, la préparation et la réponse aux futures pandémies
  • Le temps presse, il doit être adopté lors de l'Assemblée mondiale de la santé qui commence le 27 mai

GENEVE: Il s'agit de protéger efficacement et équitablement le monde de futures pandémies. Les négociations de la dernière chance commencent lundi à l'OMS pour trouver un consensus autour d'un projet d'accord sur un texte déjà édulcoré de certains de ses aspects les plus disputés.

Après deux années de travaux, les négociateurs ont dû se rendre à l'évidence le mois dernier: il leur faut plus de temps pour tenter de se mettre d'accord sur ce texte historique sur la prévention, la préparation et la réponse aux futures pandémies. Le temps presse, il doit être adopté lors de l'Assemblée mondiale de la santé qui commence le 27 mai.

Les 194 pays de l'Organisation mondiale de la santé reviennent donc à son siège, à Genève, de lundi au 10 mai.

"La prochaine pandémie n'est pas une question de si, mais quand elle aura lieu", a rappelé mercredi le chef de l'OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus.

Le souvenir des millions de morts, de la souffrance, des injustices et des immenses dégâts économiques de la pandémie de Covid-19 s'estompe et "si une nouvelle pandémie commençait demain, nous serions confrontés à bon nombre des mêmes problèmes auxquels nous avons été confrontés avec le Covid-19", regrette le patron de l'OMS.

Nouveau projet édulcoré

Malgré un large consensus sur la nécessité d'un texte contraignant pour rendre la réponse de la communauté internationale plus efficace et plus équitable, de grandes divergences subsistent sur la manière de s’y prendre.

Arrivés à une impasse - le document de travail était quasiment illisible à force d'ajouts et de réserves - les négociateurs se retrouvent avec une version simplifiée de 23 pages et un quart de mots de moins.

Les principaux différends tournent autour de l'accès et de l'équité: accès aux agents pathogènes découverts, accès aux produits de lutte contre la pandémie tels que les vaccins développés à partir de ces découvertes et distribution équitable non seulement des tests, traitements et vaccins contre la pandémie mais aussi des moyens de les produire.

Le nouveau projet se concentre sur les points d'accord pour établir un cadre et tenter de trouver l'indispensable consensus.

Il réserve certains des points les plus délicats à de futures discussions au cours des deux prochaines années, tout particulièrement l'accès aux pathogènes et le partage des produits issus de la recherche sur ces microbes.

Rien de concret 

K. M. Gopakumar, chercheur principal au Third World Network - l'une des ONG qui suit de près les négociations et a décortiqué le nouveau texte - estime qu'il "est dépourvu de tout résultat concret en matière d'équité et ne crée aucune obligation juridique pour faciliter un accès prévisible et durable au financement, aux produits et à la technologie liés à la pandémie".

Pour Médecins sans frontières, les obligations en matière de transfert de technologie vers les pays les plus pauvres "restent faibles".

En revanche, la garantie d'un accès équitable aux médicaments issus de la recherche et développement sur des fonds publics a survécu aux coupes claires, salue l'organisation Initiative Médicaments contre les maladies négligées (DNDi).

Mais les obligations "qui auraient garanti que les gens puissent bénéficier du progrès scientifique et avoir un accès équitable aux produits dont ils auront besoin ont été affaiblies ou supprimées du texte et doivent être rétablies", a demandé Michelle Childs, de la DNDi.

« Chronologie féroce »

Les négociateurs pourraient être encouragés à trouver un terrain d'entente par les nouvelles sur le front de l'épizootie de grippe aviaire qui refait des ravages depuis 2020.

Le virus H5N1 a récemment infecté des troupeaux de vaches aux Etats-Unis, une première.

Si pour l'heure aucun cas de transmission d'humain à humain n'a été enregistré, la circulation intense du H5N1 et sa capacité à sauter d'une espèce à l'autre inquiètent.

Deux semaines, "c'est un calendrier très serré", a reconnu vendredi Margaret Harris, une porte-parole de l'OMS.

La Maison Blanche a réaffirmé l'engagement des Etats-Unis pour arriver à un accord.

Tsegab Kebebew Daka, ambassadeur d'Ethiopie à Genève, estime que "les différences dans le texte ne sont pas énormes. Ce sont principalement des différences d'idées, et elles ne sont pas si nombreuses".

Et l'ambassadrice d'Australie Amanda Gorely de résumer: "Toutes les délégations doivent se rassembler et se concentrer sur la recherche d'un consensus".