Présidentielle: comment Zemmour a décroché dans les sondages

lE candidat à l'élection présidentielle de 2022, Eric Zemmour, lors de l'émission politique "Elysée 2022" sur la chaîne de télévision française France 2, à Saint-Denis, près de Paris, le 5 avril. (Photo, AFP)
lE candidat à l'élection présidentielle de 2022, Eric Zemmour, lors de l'émission politique "Elysée 2022" sur la chaîne de télévision française France 2, à Saint-Denis, près de Paris, le 5 avril. (Photo, AFP)
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Publié le Mercredi 06 avril 2022

Présidentielle: comment Zemmour a décroché dans les sondages

  • Eric Zemmour choisit de continuer à radicaliser ses positions et ne « croit pas aux sondages» qui mettent pouvoir d'achat, environnement et santé, avant l'immigration dans les préoccupations des Français
  • Des divisions se manifestent en interne. Les regards se tournent vers Sarah Knafo, compagne et stratège du candidat, dont certains contestaient dès l'automne l'omniprésence

PARIS : À l' entendre, il y a un vote Zemmour "caché", et le second tour de la présidentielle est encore accessible. Mais le candidat d'extrême droite Eric Zemmour dégringole dans les enquêtes depuis fin février, affaibli par ses positions radicales, par exemple sur les réfugiés ukrainiens.

Le 6 octobre dernier, son camp exulte. Pour la première fois, un sondage donne le futur candidat en deuxième position, devant Marine Le Pen. Un lointain souvenir pour celui qui patine aujourd'hui entre la quatrième et la cinquième place, au coude-à-coude avec la LR Valérie Pécresse, même si ses partisans promettent une "belle surprise" le 10 avril.

Dans cette campagne atone, "le seul phénomène atypique et particulièrement clivant, qui explique aussi sa percée, aura été Zemmour. Mais sur le mode du rejet et de l'inquiétude plutôt que de l'envie", estime le sondeur Brice Teinturier (Ipsos) dans Le Monde.

Que s'est-il passé en six mois ? "La guerre en Ukraine", répond inexorablement Eric Zemmour, qui exhorte ses troupes à ne pas se "laisser voler l'élection".

«Ferveur»

Le candidat Reconquête! ne "comprend pas", répète-t-il. Pourquoi tant de "ferveur" dans ses meetings pleins, "120 000 adhérents" à son parti et ce ressac sondagier qui n'en finit pas ?

Après une visite à l'aube du marché de gros de Rungis (Val-de-Marne), l'ancien polémiste de CNews peste, le 1er avril, attablé dans un café. "À chaque fois que je fais un meeting réussi, on me trouve une merde", grince-t-il.

La dernière en date, ce sont les "Macron Assassin!" sonores scandés par une partie de la foule le 27 mars lors du meeting du Trocadéro, sans être interrompus. Le candidat dit qu'il n'a "pas entendu" et son entourage s'y reprend à plusieurs fois pour "condamner" le slogan.

La "démonstration de force" espérée, grâce aux dizaines de milliers de personnes présentes, est parasitée par la polémique.

Comme le 5 décembre à Villepinte (Seine-Saint-Denis) où son grand meeting de plus de 10 000 personnes marque surtout les esprits par les violences commises contre des militants de SOS Racisme, chaises qui volent et courses poursuites à l'arrière du vaste hangar.

Soupçonné, le groupuscule d'extrême droite des Zouaves a été dissous depuis par le gouvernement. Eric Zemmour ne les "connaît pas", assure-t-il. Mais de tels profils se retrouvent dans la foule des partisans du seul candidat à dire qu'islam et islamisme "c'est la même chose" ou à faire campagne sur la théorie complotiste du grand remplacement des populations européennes par des immigrés non européens.

«Seul regret»

Comme un retour au Front National des années 80, alors que plusieurs identitaires font partie de l'équipe de campagne.

À l'extrême droite, Marine Le Pen se frotte les mains, en expliquant qu'Eric Zemmour la "recentre", malgré nombre de propositions similaires dans leur programme.

Un tournant a lieu avec la guerre en Ukraine, où l'ancien éditorialiste semble faire office de paratonnerre pour la candidate du RN, malgré leur attirance partagée pour la Russie de Vladimir Poutine. Dès décembre à la télévision, Eric Zemmour avait commis l'erreur de prendre le "pari" que la Russie n'envahirait pas l'Ukraine.

À propos des réfugiés ukrainiens, fin février, quand sa rivale dit qu'il faut "bien sûr les accueillir", il hésite trois jours avant de "privilégier" un accueil en Pologne, plutôt qu'en France.

La position déplaît à la frange catholique très conservatrice qui le soutient. "Ses propos ont été extrêmement choquants. Ca été perçu comme injuste, brutal", glisse à l'AFP un membre de la Manif' pour tous.

"C'est mon seul regret" de cette campagne, ajoute un proche du candidat.

Des divisions se manifestent en interne. Les regards se tournent vers Sarah Knafo, compagne et stratège du candidat, dont certains contestaient dès l'automne l'omniprésence.

Eric Zemmour choisit de continuer à radicaliser ses positions et ne "croit pas aux sondages" qui mettent pouvoir d'achat, environnement et santé, avant l'immigration dans les préoccupations des Français.

Le 21 mars, il promet un "ministère de la remigration" pour expulser un million d'étrangers en cinq ans: clandestins, délinquants, criminels et fichés S. Pas consultés, certains proches se crispent.

Le candidat enchaîne les déplacements chocs, dans des campements de fortune d'addicts au crack et de migrants - "c'est la France dans dix ans", dit-il - ou en banlieue pour promettre "d'éradiquer la racaille". 

En fin de campagne, il vise surtout Valérie Pécresse, espérant au moins la devancer et faire exploser le parti de droite, et évoque sa candidature aux législatives. 


Lille: enquête ouverte après les propos sur internet d'une étudiante gazaouie

L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
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  • Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie

LILLE: Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie, dont Sciences Po Lille a annulé l'inscription mercredi.

"Une enquête a été ouverte pour apologie du terrorisme, apologie de crime contre l'humanité avec utilisation d'un service de communication au public en ligne", a écrit la procureure de la République de Lille, Carole Etienne, à l'AFP.

Des captures d'écran circulant sur les réseaux sociaux montrent qu'un compte, attribué à cette étudiante par des internautes et fermé depuis, a repartagé des messages appelant à tuer des juifs.

Elle a été désinscrite de l'Institut d'études politiques de Lille, où elle devait étudier à partir de septembre, en raison du contenu de certaines de ses publications qui "entre en contradiction frontale avec les valeurs portées par Sciences Po Lille", a indiqué l'établissement mercredi.

"Pourquoi on est passé à travers? Il y a quand même une question, il faut y répondre", a reconnu jeudi sur RMC François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre de l'Intérieur.

"Il y aura des poursuites qui seront engagées et sur la base de ces éléments-là, elle est susceptible d'être renvoyée dans son pays, bien évidemment", a-t-il ajouté.

"Administrativement, semble-t-il, je suis très prudent, il n'y avait pas de difficulté particulière, sauf que sur les réseaux sociaux, voilà, on s'en est rendu compte", a-t-il ajouté, précisant que "les services des titres de séjour relèvent du ministère des Affaires étrangères".

Sollicité par l'AFP, Sciences Po Lille a expliqué avoir "accueilli cette étudiante sur proposition du consulat général de France à Jérusalem".

L'incident a fait largement réagir dans la classe politique, jusqu'au gouvernement.

"Une étudiante gazaouie tenant des propos antisémites n'a rien à faire en France", a réagi sur X le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot. Il a indiqué avoir "demandé à ce qu'une enquête interne soit diligentée pour que cela ne puisse en aucun cas se reproduire".

Le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a souligné sur le même réseau social avoir "demandé de faire fermer ce compte haineux", et a martelé que "les propagandistes du Hamas n'ont rien à faire dans notre pays".


Restitutions coloniales: le gouvernement français annonce un projet de loi

La ministre française de la Culture Rachida Dati (G) et la ministre française des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative Marie Barsacq quittent le Palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 30 juillet 2025, après la réunion hebdomadaire du conseil des ministres. (AFP)
La ministre française de la Culture Rachida Dati (G) et la ministre française des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative Marie Barsacq quittent le Palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 30 juillet 2025, après la réunion hebdomadaire du conseil des ministres. (AFP)
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  • Le gouvernement français a présenté mercredi en conseil des ministres un projet de loi-cadre visant à faciliter la restitution à leur pays d'origine de biens culturels pillés pendant la colonisation
  • Ce projet de loi-cadre crée une dérogation au principe d'inaliénabilité pour les œuvres des collections nationales françaises

PARIS: Le gouvernement français a présenté mercredi en conseil des ministres un projet de loi-cadre visant à faciliter la restitution à leur pays d'origine de biens culturels pillés pendant la colonisation.

S'appliquant en priorité aux pays africains mais de "portée géographique universelle", ce texte vise à accélérer le retour dans leur pays d'origine de biens culturels appartenant aux collections nationales françaises.

Ils doivent revenir à des "Etats qui, du fait d'une appropriation illicite, en ont été privés" entre 1815 et 1972, selon le ministère français de la Culture.

Ce projet de loi-cadre crée une dérogation au principe d'inaliénabilité pour les œuvres des collections nationales françaises. Les oeuvres à restituer devront avoir été acquises "dans une situation de vol, de pillage, de cession ou de libéralité obtenue par contrainte ou violence ou d'une personne qui ne pouvait en disposer", a précisé le ministère.

La décision de sortie des collections pour opérer cette restitution ne passera plus par un processus législatif au cas par cas mais pourra intervenir sur seul décret du Conseil d'Etat et après avis, le cas échéant, d'une commission scientifique bilatérale.

Cette commission devra en effet documenter et déterminer, si besoin, le caractère illicite de l'appropriation des oeuvres réclamées à travers un travail qui associerait des experts et historiens français et l'Etat demandeur, selon le ministère.

Concernant la période historique retenue, 1815 correspond à la date d'un règlement des conquêtes napoléoniennes qui est dû à un premier mouvement de restitution d'œuvres à l'échelle européenne. 1972 est celle de l'entrée en application de la convention internationale de l'Unesco protégeant les biens culturels contre le trafic illicite.


Droits de douane: la France déçue de l'accord UE-USA

Le ministre français de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, Eric Lombard, s'exprime lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale française, la chambre basse du parlement français, à Paris, le 10 juin 2025. (AFP)
Le ministre français de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, Eric Lombard, s'exprime lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale française, la chambre basse du parlement français, à Paris, le 10 juin 2025. (AFP)
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  • La France, déçue de l'accord commercial annoncé dimanche entre l'Union européenne (UE) et les Etats-Unis, a plaidé lundi pour que l'Europe se montre plus ferme lors des négociations à venir
  • Le président français Emmanuel Macron n'avait pas réagi lundi. Mais son Premier ministre François Bayrou a évoqué un "jour sombre" pour l'Europe, qui "se résout à la soumission"

PARIS: La France, déçue de l'accord commercial annoncé dimanche entre l'Union européenne (UE) et les Etats-Unis, a plaidé lundi pour que l'Europe se montre plus ferme lors des négociations à venir sur ses modalités d'application.

Le président français Emmanuel Macron n'avait pas réagi lundi. Mais son Premier ministre François Bayrou a évoqué un "jour sombre" pour l'Europe, qui "se résout à la soumission".

Se projetant vers la suite, le ministre de l'Economie Eric Lombard a lui estimé lundi soir que "cet accord n'est pas complet" et que "le travail continue". Car "l'accord n'est pas finalisé et nous veillerons à ce qu'il soit amélioré", a-t-il dit dans une interview à Libération.

"Les discussions doivent se poursuivre pour les produits pharmaceutiques - on comprend que certains génériques seront exemptés -, sur l'acier, sur l'aluminium, sur les produits chimiques, sur les semi-conducteurs et sur les vins et les produits agricoles", précise-t-il.

"Il ne faudrait pas que cet accord soit la fin de l'histoire, auquel cas nous nous serions tout simplement juste affaiblis", avait estimé sur France Inter dès lundi matin le ministre français délégué au Commerce extérieur, Laurent Saint-Martin.

"Maintenant, il va y avoir une négociation technique" et "nous pouvons nous saisir de cette séquence pour nous renforcer", a-t-il ajouté.

Le président américain Donald Trump et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen ont annoncé dimanche en Ecosse un accord douanier prévoyant que les produits européens exportés aux Etats-Unis soient taxés à 15%.

Avec l'espoir d'éviter une escalade commerciale, l'UE s'est aussi engagée à 750 milliards de dollars d'achats d'énergie - visant notamment à remplacer le gaz russe - et à 600 milliards d'investissements supplémentaires aux Etats-Unis.

A Paris, si on concède que cet accord va apporter de la "stabilité" aux entreprises, on insiste surtout sur son caractère "déséquilibré", selon les termes utilisés par plusieurs membres du gouvernement.

"Notre responsabilité aujourd'hui, c'est de faire en sorte que cet accord, in fine, soit le moins déséquilibré possible", a déclaré sur RTL le ministre de l'Industrie et de l'Energie Marc Ferracci.

- Prochains jours déterminants -

MM. Ferracci et Saint-Martin ont plaidé pour un "rééquilibrage" portant sur les services, en particulier le numérique, en rappelant que si la balance commerciale des Etats-Unis avec l'Europe est déficitaire pour les biens, celle des services est excédentaire.

Concernant les échanges de biens, la France affichait en 2024 un excédent commercial de 16,4 milliards de dollars à l'égard des Etats-Unis selon les Américains, mais les Douanes françaises évoquent pour la même période un déficit de 4,2 milliards d'euros.

Les négociateurs européens devront utiliser "l'ensemble des outils qui sont à leur disposition" et notamment envisager "de limiter l'accès des entreprises américaines aux marchés publics européens", a insisté M. Ferracci.

Du côté des entreprises, Patrick Martin, le président du Medef, première organisation patronale française, a estimé que "si les choses sont bien ce qui nous a été annoncé, ce n'est pas admissible". "Il faut continuer à négocier", selon lui.

La CPME, deuxième organisation patronale, a dit anticiper "des répercussions désastreuses" pour les petites et moyennes entreprises. Et le mouvement des ETI (Meti) a évoqué "des conséquences particulièrement préoccupantes pour les entreprises de taille intermédiaire".

Selon les secteurs, les sentiments sont ambivalents.

"Il y a du soulagement parce que cet accord donne de la visibilité", a déclaré à l'AFP Emmanuel Guichard, délégué général de la Fédération des entreprises de la beauté (FEBEA). Mais "ce n'est pas un bon accord pour nous, tout simplement parce qu'on avait 0% de droits de douane en janvier vers les Etats-Unis et maintenant on va être à 15%."

"La catastrophe est évitée", en référence aux 30% de droits de douane évoqué par M. Trump, "mais les prochains jours seront déterminants pour le secteur français des vins et spiritueux", déclare dans un communiqué la Fédération des Exportateurs de Vins et Spiritueux (FEVS), à laquelle se joint l’ensemble des interprofessions françaises (CNIV) et de la filière.

Dans l'agroalimentaire, l'organisation patronale du secteur, l'Ania, a dénoncé un "accord clairement inéquitable (...) qui fragilise notre position".

Seuls les secteurs qui pourraient bénéficier d'une exemption de droits de douane, comme l'aéronautique, se sont montrés complètement soulagés.

Le Gifas (Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales) a salué dans une déclaration transmise à l'AFP une exonération "bonne pour une industrie équilibrée entre la France et les Etats-Unis" et qui permettra de "conserver des emplois qualifiés en France à tous les niveaux de la chaîne de sous-traitance."

Les organisations patronales et les fédérations des filières économiques affectées par cet accord seront reçues mercredi à Bercy.