Sur un ferry à Marseille, 700 réfugiés ukrainiens «comme dans un village»

Une fillette ukrainienne joue avec des ballons aux couleurs du drapeau de son pays à bord du ferry Corsica Linea «Méditerranée» à Marseille, dans le sud de la France, le 26 avril 2022. (AFP)
Une fillette ukrainienne joue avec des ballons aux couleurs du drapeau de son pays à bord du ferry Corsica Linea «Méditerranée» à Marseille, dans le sud de la France, le 26 avril 2022. (AFP)
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Publié le Mercredi 27 avril 2022

Sur un ferry à Marseille, 700 réfugiés ukrainiens «comme dans un village»

  • En un mois, les réfugiés comme Anna ont investi les couloirs, les ponts et les salons du ferry où toute la signalisation a été traduite en ukrainien
  • Le gros navire blanc n'est plus un moyen de transport mais «comme un village où ils se sentent bien», décrit le commissaire de bord

MARSEILLE: Anna et ses enfants profitent du soleil sur le pont d'un ferry amarré à Marseille : sur ce bateau, ces réfugiés ukrainiens ont enfin trouvé la sécurité, "comme dans un village", avec 700 autres compatriotes.


Le "Méditerranée" dessert habituellement l'Algérie, pour la compagnie maritime Corsica Linea. Il reste désormais à quai dans cette ville portuaire du sud-est de la France, avec ses inhabituels passagers.


Anna Ivzhenko, 37 ans, n'était jamais montée sur un bateau de toute sa vie. Elle trouve ce mode d'hébergement "insolite", mais "ce qui compte, c'est que c'est un endroit sûr".


Avec ses quatre enfants, cette chanteuse, animatrice de spectacles, a dû fuir son grand appartement de Kiev: "On étaient réveillés par des bombardements pendant des jours, on ne pouvait plus dormir ni vivre".


En un mois, les réfugiés comme elle ont investi les couloirs, les ponts et les salons du ferry où toute la signalisation a été traduite en ukrainien. Les 200 enfants présents ont décoré le navire de leurs dessins et l'ont parsemé de jouets, peluches et ballons jaune et bleu un peu partout.


Loué par l'État français à la Corsica Linea depuis fin mars, pour un montant non dévoilé, ce centre d'hébergement flottant constitue "l'opération la plus importante de France" par sa capacité d'accueil : jusqu'à 1.600 passagers, selon la préfecture.


Le gros navire blanc n'est plus un moyen de transport mais "comme un village où ils se sentent bien", décrit le commissaire de bord. "Quand on demande aux enfants de dessiner leur maison, ils dessinent un bateau", s'amuse-t-il.


"C'est bien plus qu'un hébergement", insiste le directeur général de la Corsica, Pierre-Antoine Villanova, faisant défiler sur son téléphone les vidéos de la chasse aux oeufs organisée à Pâques, "un moment très émouvant".


Une centaine d'enfants, aiguillés par un référent de l'éducation nationale, sont scolarisés dans les établissements du quartier.


À bord, les réfugiés ont aussi accès à de précieux services qui facilitent leur arrivée en France : des employés de banque pour ouvrir un compte, des assistants sociaux, des référents de la Caisse d'assurance maladie, des médecins, des gardes d'enfants et même une permanence de Pôle emploi, l'agence nationale de l'emploi.


Ce mardi matin, c'est la Corsica Linea elle-même qui recrute : avec une dizaine d'autres femmes, Anna assiste à une réunion menée par la DRH de l'armateur qui cherche du personnel pour l'été.

Alertes aux bombardements sur les téléphones 
M. Villanova l'assure, il veut "les intégrer, le plus possible". Pourtant, la plupart n'ont qu'une envie, "rentrer chez eux", assurent deux infirmières de la cellule d'urgence médico-psychologique de l'AP-HM, le groupement des hôpitaux publics de Marseille.


Les deux professionnelles, habituées à intervenir sur des événements de crise, décrivent "des personnes chez qui l'événement traumatique perdure : il y a un début, mais pas de fin".


Ces hommes et femmes ont connu la guerre, la fuite, l'exil, et sont toujours en tension, comme en transit, "et donc ils ne s'autorisent pas encore à craquer", explique l'infirmière Céline Nguyen.


Dans leur tête, "ils sont encore en Ukraine ; ils sont en communication constante avec le front, certains n'ont même pas désactivé les alertes aux bombardements sur leur téléphone".


Le cocon du bateau peut les sécuriser, estiment les psychologues, "mais l'écueil, c'est que c'est aussi une forme de confinement, donc on les encourage à sortir".


"C'est comme une grande famille de près de mille personnes ici, mais on ne peut pas aimer tout le monde", glisse Alona Diordiieva, professeure d'anglais de 40 ans, qui déplore le manque d'espace privé.


"Épuisée de vivre dans une toute petite pièce sans fenêtre" avec son fils, elle rêve d'espace: "C'est fait pour une traversée de trois jours, pas pour vivre des mois. Je ne sais même pas si c'est le jour ou la nuit quand je suis dans ma cabine".


L'hébergement sur ce bateau est temporaire, insiste la préfecture, qui pilote le projet avec le groupe SOS (entreprenariat social et solidaire) et a identifié un millier de places d'hébergement sur le département. Le 15 juin, le "Méditerranée" reprendra la mer vers l'Algérie.


France: l'adoption d'un budget compromise après le rejet des députés

Les résultats du vote sur le projet de loi de finances pour 2026 à l'Assemblée nationale, à Paris, tôt dans la matinée du 22 novembre 2025. (AFP)
Les résultats du vote sur le projet de loi de finances pour 2026 à l'Assemblée nationale, à Paris, tôt dans la matinée du 22 novembre 2025. (AFP)
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  • L’Assemblée nationale a rejeté massivement en première lecture le budget 2026, renvoyant le texte au Sénat et illustrant l’extrême fragmentation politique depuis la dissolution de 2024
  • Le gouvernement minoritaire, sous pression pour réduire un déficit public record, peine à trouver une majorité, malgré l’espoir d’un compromis sur fond de tensions entre blocs politiques

PARIS: Les députés français ont rejeté à la quasi-unanimité en première lecture le budget de l'État pour 2026, dans la nuit de vendredi à samedi, un vote inédit depuis des décennies qui augure mal d'une adoption avant la fin de l'année.

Après des semaines de débats parfois houleux sur la fiscalité du patrimoine, ou celle des grandes entreprises, 404 députés ont rejeté la partie "recettes" du texte (un seul a voté pour), emportant ainsi l'ensemble du projet de loi, sans même étudier la partie "dépenses".

En vertu des procédures parlementaires françaises, ce vote renvoie le texte initial du gouvernement à la chambre haute du Parlement, qui s'en saisira la semaine prochaine.

Dans un paysage politique très facturé depuis la dissolution de l'Assemblée nationale décidée par le président Emmanuel Macron en 2024, la difficulté à adopter un budget de l'Etat constitue le sujet majeur à l'origine de la chute des derniers Premier ministres.

Le gouvernement minoritaire de Sébastien Lecornu, un proche d'Emmanuel Macron, se trouve pourtant sous forte pression pour réduire le déficit public, le plus élevé de la zone euro, dont l'ampleur inquiète les marchés financiers.

L'Assemblée avait déjà rejeté en 2024 le budget de l'État, de manière inédite depuis l'adoption de la Ve République en 1958. Mais c'est une première qu'il le soit avec une telle ampleur.

Les groupes de gauche et l'extrême droite ont voté contre, ceux du camp gouvernemental se sont divisés entre votes contre et abstentions. Seul un député centriste a voté en faveur du texte.

- Compromis? -

Si l'exécutif espère toujours une adoption avant la fin de l'année, cela apparaît comme une gageure, en terme de délais comme en terme de majorité pour le voter.

Minoritaire, le quatrième gouvernement en moins d'un an et demi, le sixième depuis la réélection de M. Macron en mai 2022, avait promis de laisser le dernier mot au Parlement pour éviter une censure.

Mais la recherche d'un compromis reste très difficile entre un camp présidentiel fracturé, une gauche traversée de tensions et une extrême droite favorable à une union des droites.

Si elle a vu dans le "plus long débat budgétaire" de la Ve République, un "travail utile", la ministre des Comptes publics Amélie de Montchalin a aussi déploré un "certain nombre de mesures inconstitutionnelles, irréalistes ou inapplicables".

Dans le viseur du camp gouvernemental, plusieurs hausses d'impôts, dont un "impôt universel" sur les multinationales, une hausse de taxe sur les rachats d'action, ou une contribution sur les dividendes.

Avec elles, le déficit passerait à "4,1%" du PIB (contre un objectif à 4,7% dans le texte initial), sans elles il serait de "5,3%", a estimé Amélie de Montchalin.

Sur X, elle a dénoncé l'"attitude cynique" des "extrêmes", se disant cependant "convaincue" de la possibilité d'un compromis.

"Le compte n'y est pas", a lancé le chef de files des élus socialistes, Boris Vallaud, estimant les "recettes" insuffisantes pour "effacer" des économies irritantes sur les politiques publiques.

Le PS continuera toutefois à "chercher le compromis", a-t-il assuré.

Les socialistes, qui avaient accepté de ne pas censurer le Premier ministre en échange notamment de la suspension de la réforme des retraites, espéraient que les débats permettent d'arracher une taxe sur le patrimoine des ultra-riches. Mais les propositions en ce sens ont été rejetées.

Si le Parlement ne se prononce pas dans les délais, le gouvernement peut exécuter le budget par ordonnance. Une loi spéciale peut aussi être votée permettant à l'Etat de continuer à percevoir les impôts existants l'an prochain, tandis que ses dépenses seraient gelées, en attendant le vote d'un réel budget.


Narcobanditisme: la porte-parole du gouvernement sera à la marche blanche samedi à Marseille

La porte-parole du gouvernement, Maud Bregeon, a annoncé vendredi qu'elle irait à la marche blanche prévue samedi à Marseille en hommage à Mehdi Kessaci, le frère du militant Amine Kessaci engagé contre le narcobanditisme, soulignant que sa présence devait illustrer le "soutien de l'Etat". (AFP)
La porte-parole du gouvernement, Maud Bregeon, a annoncé vendredi qu'elle irait à la marche blanche prévue samedi à Marseille en hommage à Mehdi Kessaci, le frère du militant Amine Kessaci engagé contre le narcobanditisme, soulignant que sa présence devait illustrer le "soutien de l'Etat". (AFP)
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  • "Au-delà des actes forts et des engagements du ministre de l'Intérieur et du garde des Sceaux, l'État et singulièrement le gouvernement devaient marquer, symboliquement et humblement, leur soutien et leur solidarité lors de ce rassemblement
  • "Les réflexes partisans n'ont pas leur place dans une telle marche et dans un tel combat", a estimé Mme Bregeon, espérant que les participants seraient "le plus nombreux possible" samedi

PARIS: La porte-parole du gouvernement, Maud Bregeon, a annoncé vendredi qu'elle irait à la marche blanche prévue samedi à Marseille en hommage à Mehdi Kessaci, le frère du militant Amine Kessaci engagé contre le narcobanditisme, soulignant que sa présence devait illustrer le "soutien de l'Etat".

Le jeune homme de 20 ans a été assassiné le 13 novembre par deux hommes à moto, et la justice étudie la piste d'"un crime d'intimidation" lié au militantisme de son frère.

"Le gouvernement sera présent et je me rendrai samedi à Marseille en compagnie de mon collègue Vincent Jeanbrun, qui est ministre de la Ville et du Logement", a déclaré Maud Bregeon sur TF1 vendredi, ajoutant que ce drame avait "profondément choqué tous nos concitoyens".

La porte-parole a assuré que son déplacement serait fait "humblement, avec la modestie et la pudeur que cet événement nécessite, sans communication sur place".

Il s'agit, selon elle, de "marquer l'engagement total du gouvernement et le soutien de l'État, du président de la République et du Premier ministre, à cette famille et aux proches de Mehdi Kessaci".

"Au-delà des actes forts et des engagements du ministre de l'Intérieur et du garde des Sceaux, l'État et singulièrement le gouvernement devaient marquer, symboliquement et humblement, leur soutien et leur solidarité lors de ce rassemblement où habitants, élus locaux et nationaux feront bloc contre le narcotrafic", a précisé l'entourage de Maud Bregeon à l'AFP.

La porte-parole retrouvera à Marseille de nombreuses autres personnalités politiques, dont beaucoup issues de gauche, comme Olivier Faure (PS) ou Marine Tondelier (les Ecologistes).

"Les réflexes partisans n'ont pas leur place dans une telle marche et dans un tel combat", a estimé Mme Bregeon, espérant que les participants seraient "le plus nombreux possible" samedi.

Si les courants politiques s'accordent sur le constat, ils s'opposent sur les voies à suivre pour contrer le narcotrafic.

Le député LFI du Nord Ugo Bernalicis a ainsi affirmé sur franceinfo que "ce qu'on demande au gouvernement, c'est pas tant la participation à cette marche, c'est de faire en sorte que les moyens soient à la hauteur des enjeux". Et "le compte n'y est pas", a-t-il dit.

Il a notamment appelé à s'attaquer au "cœur du problème" en légalisant le cannabis, dont la vente est "le moteur financier" des trafiquants, selon lui.

Le député insoumis des Bouches-du-Rhône Manuel Bompard, qui sera présent samedi, a exhorté à un "changement de doctrine complet", demandant par exemple plus de moyens pour la police judiciaire.

"Plutôt que d'envoyer des policiers chasser le petit consommateur, je pense au contraire qu'il faut concentrer les moyens dans le démantèlement des réseaux de la criminalité organisée", a-t-il dit.

Quant à la suggestion du maire de Nice Christian Estrosi d'engager l'armée contre le narcotrafic, Maud Bregeon a rappelé que ce n'était "pas les prérogatives de l'armée" et "qu'on a pour ça la police nationale, la gendarmerie nationale, la justice de la République française".


Une centaine de personnes en soutien à un directeur d'école menacé de mort

Un rassemblement de soutien d'environ 150 personnes se tenait vendredi matin devant une école maternelle située à Rennes, dans l'ouest de la France, dont le directeur a été menacé de mort par une famille refusant que leur fillette soit encadrée par un homme. (AFP)
Un rassemblement de soutien d'environ 150 personnes se tenait vendredi matin devant une école maternelle située à Rennes, dans l'ouest de la France, dont le directeur a été menacé de mort par une famille refusant que leur fillette soit encadrée par un homme. (AFP)
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  • Cet enseignant a porté plainte le 14 octobre "pour des faits de menace de mort datant du 10 octobre", a affirmé jeudi le procureur de la République de Rennes, Frédéric Teillet. Le rectorat a également porté plainte
  • "On reproche simplement au collègue d'être un homme et d'encadrer des jeunes enfants", a déploré Mickaël Bézard, du syndicat Force Ouvrière (FO) des écoles, présent devant l'établissement

RENNES: Un rassemblement de soutien d'environ 150 personnes se tenait vendredi matin devant une école maternelle située à Rennes, dans l'ouest de la France, dont le directeur a été menacé de mort par une famille refusant que leur fillette soit encadrée par un homme.

Cet enseignant a porté plainte le 14 octobre "pour des faits de menace de mort datant du 10 octobre", a affirmé jeudi le procureur de la République de Rennes, Frédéric Teillet. Le rectorat a également porté plainte.

Selon des sources syndicales, la famille n'aurait pas toléré que l'instituteur accompagne la fillette aux toilettes.

"On reproche simplement au collègue d'être un homme et d'encadrer des jeunes enfants", a déploré Mickaël Bézard, du syndicat Force Ouvrière (FO) des écoles, présent devant l'établissement.

"Il n'y a pas d'aspect religieux derrière tout ça" a insisté Fabrice Lerestif, un autre représentant de ce syndicat à l'échelle départementale, reprenant les termes du ministre français de l'Éducation, Édouard Geffray, en marge d’un déplacement la veille près de Lyon (centre-est).

Environ 150 personnes, dont des enseignants d'écoles voisines et une trentaine de parents d'élèves, étaient présents devant l'école, fermée pour la journée. "Soutien à notre collègue", "Parents unis! Respect et soutien total à nos enseignants", clamaient deux pancartes accrochées aux grilles.

Parmi les parents d'élèves, Pierre Yacger est venu avec ses enfants soutenir l'équipe éducative "en qui on a pleinement confiance". Concernant le directeur, "on n'a jamais eu de retour négatif", a-t-il affirmé.

Choqué, l'enseignant est depuis en arrêt de travail. Il est "meurtri par la situation" qui a "eu un impact fort sur l'ensemble de l'école", alors qu'il s'agit d'un établissement "où tout se passe bien", a précisé Mickaël Bézard.

Le corps enseignant demande que la fillette, toujours scolarisée dans cette école, soit changée d'établissement, "pour retrouver aussi un climat serein", a-t-il poursuivi.

"Cette enfant, peut-être, va être scolarisée ailleurs", a estimé Gaëlle Rougier, adjointe à l'éducation à la municipalité de Rennes. "Il va bien falloir poursuivre une médiation avec la famille", a-t-elle ajouté.