Toutes les parties semblent vouloir un nouvel accord sur le nucléaire iranien

L'Union européenne (UE) semble déterminée à finaliser un nouvel accord avec l'Iran (Photo fournie).
L'Union européenne (UE) semble déterminée à finaliser un nouvel accord avec l'Iran (Photo fournie).
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Publié le Vendredi 08 juillet 2022

Toutes les parties semblent vouloir un nouvel accord sur le nucléaire iranien

Toutes les parties semblent vouloir un nouvel accord sur le nucléaire iranien
  • Les pays européens ne veulent pas mettre en péril leurs relations économiques et commerciales avec l'Iran
  • En ce qui concerne les États-Unis, l'administration Biden a investi tout son capital politique dans le renouvellement de l'accord nucléaire et elle semble réticente à toute alternative

Les derniers développements indiquent qu'il y a une forte probabilité que les puissances mondiales P5+1 (Royaume-Uni, Russie, Chine, États-Unis, France et Allemagne) et le régime iranien finissent par conclure un nouvel accord nucléaire. Cela s'explique par le fait que les Européens, les États-Unis et l'Iran le souhaitent tous désespérément pour des raisons différentes.

L'Union européenne (UE) semble déterminée à finaliser un nouvel accord avec l'Iran malgré la défiance croissante de Téhéran, le développement rapide de son programme nucléaire et ses exigences vaines et irrationnelles. Après l'enlisement des pourparlers de Vienne, le responsable de la politique étrangère de l'UE, Josep Borrell, s'est rendu à Téhéran afin de «remédier aux tensions actuelles» et conclure l'accord nucléaire. Il a réussi à relancer les discussions, ses efforts ayant abouti aux pourparlers indirects de la semaine dernière entre les États-Unis et l'Iran au Qatar.

Les pays européens ne veulent pas mettre en péril leurs relations économiques et commerciales avec l'Iran. Ils continuent à commercer avec Téhéran en dépit des sanctions américaines actuelles. Le Tehran Times a rapporté en février: «La valeur des échanges commerciaux entre l'Iran et l'UE a atteint 4,863 milliards d'euros (5,07 milliards de dollars) en 2021, enregistrant une croissance de 9 % par rapport à l'année précédente... Selon les données publiées par la Chambre de commerce, d'industrie, des mines et d'agriculture de Téhéran, l'Iran a exporté des marchandises pour un montant de 554 millions d'euros vers l'UE au cours des neuf premiers mois de 2021, tandis qu'il a importé des marchandises à hauteur de 2,7 milliards d'euros.» Selon le Financial Tribune, l'Allemagne est le premier partenaire commercial européen de l'Iran, suivie de l'Italie.

Parallèlement, alors que les Européens réduisent leurs importations de gaz et de pétrole en provenance de Russie, ils semblent chercher l'Iran pour combler le déficit. En mai, M. Borrell a déclaré au Financial Times: «Nous, Européens, bénéficierons largement de cet accord nucléaire, la situation a changé désormais. Pour nous, c'est quelque chose de... en réalité, nous n’avons pas besoin du brut iranien. Dorénavant, il serait très intéressant pour nous d'avoir un autre fournisseur.»

En ce qui concerne les États-Unis, l'administration Biden a investi tout son capital politique dans le renouvellement de l'accord nucléaire et elle semble réticente à toute alternative. La Maison-Blanche peut craindre que, si un accord n'est pas conclu avec le gouvernement iranien, un conflit militaire soit inévitable afin d'empêcher le régime d'obtenir des armes nucléaires.

En parvenant à un accord, l'administration Biden pourrait marquer un point en politique étrangère et se prévaloir d’une victoire politique.

Dr Majid Rafizadeh

Le fait d'être impliqué dans une nouvelle guerre au Moyen-Orient pourrait être un autre point négatif pour la cote de popularité de l'administration Biden aux États-Unis. Selon un sondage Gallup, la majorité des Américains désapprouvent actuellement la gestion des affaires étrangères par le président, Joe Biden. Mais en concluant un accord nucléaire, l'administration Biden pourrait se prévaloir d'un accomplissement en matière de politique étrangère et d'une victoire politique en faisant valoir qu'elle a freiné le programme nucléaire iranien, empêché Téhéran de se doter d'armes nucléaires, évité une nouvelle guerre au Moyen-Orient et mis fin à une course aux armements nucléaires dans la région.

L'autre acteur essentiel est le régime iranien. L'Iran souhaite-t-il un accord nucléaire et, dans l'affirmative, pourquoi met-il des obstacles qui empêchent sa conclusion? Les dirigeants iraniens souhaitent clairement un accord, car il les aiderait à augmenter leurs exportations de pétrole et de gaz et à accroître leurs revenus. L'Iran est actuellement confronté à une forte inflation, à une crise budgétaire, à la dévaluation de sa monnaie et à une dissidence croissante.

Le mois dernier, plus de soixante économistes nationaux ont averti le gouvernement iranien qu'il devait agir immédiatement pour redresser l'économie. Ils ont suggéré que Téhéran doit conclure un accord avec le P5+1 afin d’obtenir la levée des sanctions et répondre aux exigences du Groupe d'action financière, qui a mis l'Iran sur liste noire. Ils ont ajouté : «La situation du pays est extrêmement fragile... La patience du peuple va s’épuiser et le gouvernement et le régime devront lui faire face.»

Mais le régime reste inflexible pour obtenir le plus de concessions possible avant d'accepter un accord avec les puissances mondiales. Les deux concessions que l'Iran réclame sont le retrait du Corps des Gardiens de la révolution islamique (CGRI) de la liste américaine des organisations terroristes étrangères et la garantie que Washington ne renoncera pas à l'accord nucléaire, comme il l'a fait précédemment sous Donald Trump. Les autorités iraniennes semblent toutefois disposées à abandonner leurs exigences, puisqu'elles ont récemment proposé un nouveau plan qui exclut la question du CGRI.

Comme les États-Unis et l'UE, le régime iranien veut conclure l'accord nucléaire, mais il joue son jeu classique afin d’obtenir le plus de concessions possible avant de signer.

Le Dr Majid Rafizadeh est un politologue irano-américain formé à Harvard.

Twitter : @Dr_Rafizadeh

NDLR : L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com