L'Arabie saoudite, l'espoir dans la Syrie d'après-guerre

L'Arabie saoudite s'affirme comme une force de stabilité dans une région trop souvent marquée par la division (File/AFP)
L'Arabie saoudite s'affirme comme une force de stabilité dans une région trop souvent marquée par la division (File/AFP)
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Publié le Vendredi 23 mai 2025

L'Arabie saoudite, l'espoir dans la Syrie d'après-guerre

L'Arabie saoudite, l'espoir dans la Syrie d'après-guerre
  • Dans une tournure d'événements extraordinaire que beaucoup n'avaient pas anticipée, le président Donald Trump a annoncé la levée totale des sanctions américaines contre la Syrie lors de sa visite historique à Riyad
  • Ce moment a souligné le pouvoir de la diplomatie et l'influence croissante de l'Arabie saoudite sur la scène mondiale

Après plus d'une décennie de conflits incessants, d'effusions de sang et de destructions, la Syrie - autrefois l'un des piliers culturels et économiques du monde arabe - se trouve à un moment charnière de son histoire. Pendant des années, les Syriens ont vécu dans l'ombre du désespoir, endurant les sanctions, l'isolement et les ravages de la guerre sans grand espoir de répit. Pourtant, alors que la poussière commence à retomber, un nouveau chapitre est en train de s'écrire.

Les récents développements politiques et diplomatiques ont fait renaître un sentiment d'optimisme et de transformation. En cette période de profonde transition, l'Arabie saoudite est devenue une lueur d'espoir, offrant à la fois des bouées de sauvetage humanitaires et des percées diplomatiques qui pourraient redéfinir l'avenir de la Syrie.

Dans une tournure d'événements extraordinaire que beaucoup n'avaient pas anticipée, le président Donald Trump a annoncé la levée totale des sanctions américaines contre la Syrie lors de sa visite historique à Riyad la semaine dernière. Ce moment a souligné le pouvoir de la diplomatie et l'influence croissante de l'Arabie saoudite sur la scène mondiale.

Le Royaume avait appelé à la levée des sanctions contre la Syrie post-Assad, arguant que les mesures punitives ne servaient plus l'objectif visé et prolongeaient au contraire les souffrances des Syriens ordinaires. Le fait que M. Trump ait choisi de révéler ce changement de politique monumental non pas à Washington, mais à Riyad, en dit long sur la stature diplomatique du Royaume et sur le rôle déterminant qu'il joue dans ce pivot géopolitique.

Le message était clair : la nouvelle Syrie est ouverte à la réconciliation et l'Arabie saoudite est le pont qui facilite cette avancée

Majid Rafizadeh

Quelques heures après l'annonce, M. Trump a rencontré le nouveau président syrien Ahmad Al-Sharaa lors d'un sommet symbolique et très important organisé par l'Arabie saoudite. Le fait que cette rencontre se soit déroulée sur le sol saoudien a renforcé le caractère historique de ce moment. La réunion a représenté non seulement une avancée diplomatique, mais aussi un puissant geste de bonne volonté. La capacité du Royaume à réunir les deux parties - l'une étant une superpuissance mondiale de longue date et l'autre une nation émergeant des cendres de la guerre - témoigne de ses prouesses diplomatiques, de son engagement en faveur de la stabilité régionale et de son rôle de bâtisseur de paix. Le message était clair : la nouvelle Syrie est ouverte à la réconciliation et l'Arabie saoudite est le pont qui facilite cette avancée.

L'impact sur le peuple syrien a été immédiat et profond. Dans toutes les villes du pays, des milliers de personnes sont descendues dans les rues pour célébrer l'événement. De Damas à Alep, l'air était rempli de cris de soulagement, de chants de gratitude et d'un sentiment renouvelé de fierté nationale. Il était particulièrement émouvant de voir certains Syriens brandir non seulement leur drapeau national, mais aussi celui de l'Arabie saoudite, pour souligner publiquement et avec émotion le rôle du Royaume dans ce changement historique.

Iman, une institutrice de Damas, se tenait dans la foule, les larmes aux yeux. "Dieu merci pour l'Arabie saoudite", a-t-elle déclaré. "Ces sanctions seraient restées bien plus longtemps sans le prince héritier Mohammed bin Salman. Que Dieu le protège." Son sentiment a été repris par de nombreuses autres personnes sur le terrain, qui considéraient le prince héritier non pas comme une figure politique lointaine, mais comme une force bienveillante qui avait franchi les frontières pour aider les personnes blessées. La livre syrienne, qui était en chute libre depuis plus d'une décennie, a connu une hausse immédiate et significative de sa valeur par rapport au dollar, signe d'un regain de confiance à la fois économique et psychologique.

Pendant plus d'une décennie, les sanctions imposées par les États-Unis et d'autres puissances occidentales ont étranglé l'économie syrienne. Elles ont limité l'accès aux systèmes bancaires internationaux, bloqué les fonds de reconstruction et étouffé le commerce. L'aide humanitaire a été sévèrement restreinte.

La levée de ces sanctions marque le début d'une nouvelle ère économique et politique pour la Syrie. Libérés des entraves financières qui les liaient depuis si longtemps, les Syriens peuvent désormais commencer à reconstruire avec le soutien de la communauté internationale. Les investissements étrangers, qui avaient pratiquement disparu, peuvent maintenant revenir. Les agences internationales de développement et les institutions financières, qui n'étaient pas en mesure de s'engager auparavant, préparent désormais des programmes d'aide et de redressement.

Pour une population qui a été au bord de la survie pendant des années, ce changement est plus que politique, il est existentiel

Majid Rafizadeh

Plus important encore, le corridor humanitaire a été élargi. Les organisations humanitaires peuvent désormais se déplacer plus librement et plus efficacement pour acheminer de la nourriture, de l'eau potable, des soins médicaux et des ressources pour la reconstruction. Pour une population qui a été au bord de la survie pendant des années, ce changement est plus que politique, il est existentiel. Il ouvre la voie à la normalité, à la croissance et à la reconstruction d'une civilisation autrefois grandiose.

L'Arabie saoudite n'a pas limité ses efforts à l'arène diplomatique. Sur le plan humanitaire, ses contributions ont permis de sauver des vies. Cette année, le Royaume a lancé un pont aérien humanitaire massif vers la Syrie par l'intermédiaire de l'agence d'aide KSrelief, envoyant des fournitures médicales, des colis alimentaires et des kits de secours d'urgence. En outre, KSrelief a lancé en février le programme de bénévolat "Amal", qui consiste à déployer du personnel médical spécialisé, notamment des chirurgiens, des pédiatres et des traumatologues, dans les hôpitaux syriens qui ont un besoin urgent d'expertise.

Sur le plan financier, l'engagement de l'Arabie saoudite va encore plus loin. Le Royaume, ainsi que le Qatar, ont remboursé la dette de 15 millions de dollars que la Syrie avait contractée auprès de la Banque mondiale. Ce paiement supprime un obstacle majeur à l'accès de la Syrie au financement international et lui permet de bénéficier de nouvelles subventions et de nouveaux prêts indispensables au développement des infrastructures, de l'éducation et des services de santé. Cet allégement de la dette est un geste tangible de fraternité et de prévoyance stratégique. Il ne s'agit pas seulement d'apurer un compte, mais de tracer une voie. En veillant à ce que la Syrie puisse réintégrer les systèmes économiques mondiaux, l'Arabie saoudite contribue à jeter les bases de son redressement et de sa croissance à long terme.

Le prince héritier est au cœur de cette évolution. Il a démontré, par ses actions en Syrie, qu'il est motivé par une vision plus large : celle de la solidarité arabe, de la paix régionale et du leadership humanitaire. Sa capacité à combiner diplomatie stratégique et générosité humanitaire reflète un nouveau modèle de leadership régional, qui donne la priorité à la réconciliation plutôt qu'au conflit et à l'unité plutôt qu'au sectarisme. Les efforts qu'il a déployés en Syrie illustrent cette approche et permettent non seulement d'aider une nation déchirée par la guerre à guérir, mais aussi d'ouvrir la voie à un Moyen-Orient plus pacifique et plus coopératif.

En jouant le rôle de médiateur, de pacificateur et de fournisseur, l'Arabie saoudite s'affirme comme une force de stabilité dans une région trop souvent marquée par la division. Les efforts du Royaume ont éclairé la voie à suivre pour la Syrie et peut-être pour l'ensemble de la région. Ils nous rappellent qu'en période de désespoir, un leadership ancré dans la compassion et la vision peut redéfinir ce qui est possible.

Majid Rafizadeh est un politologue irano-américain formé à Harvard.

X : @Dr_Rafizadeh

NDLR: les opinions exprimées par les auteurs dans cette section leur sont propres et ne reflètent pas nécessairement le point de vue d'Arab News.