Lavage automobile: les interdictions s'étendent, beaucoup de stations restent ouvertes

Le lavage sans eau (photo, wash-totalenergies.fr)
Le lavage sans eau (photo, wash-totalenergies.fr)
Short Url
Publié le Samedi 13 août 2022

Lavage automobile: les interdictions s'étendent, beaucoup de stations restent ouvertes

  • Certaines préfectures ont interdit explicitement le lavage des voitures depuis mercredi en raison de l’alerte sécheresse
  • Seule exception: les stations qui réutilisent l’eau en circuit presque fermé ont parfois le droit de rester ouvertes

PARIS : Laver sa voiture est désormais interdit dans de nombreuses communes pour cause de sécheresse, mais les stations sont encore nombreuses à accueillir les inconditionnels de la propreté automobile.

Rouleaux, traitement déperlant, séchage: vendredi, les automobilistes se relayaient à une station Eni lyonnaise. La préfecture a pourtant interdit explicitement le lavage des voitures depuis mercredi car presque tout le département est en alerte sécheresse.

«Si j'avais su (que c'était interdit), je ne l'aurais pas fait, mais ne le sachant pas, je ne pense pas avoir fait un crime», expliquait Robert, retraité.

Les interdictions de lavage touchent une part croissante des 10.000 stations de l'Hexagone depuis ces dernières années, et elles se sont multipliées au cours de cet été historiquement sec.

Seule exception: les stations qui réutilisent l’eau en circuit presque fermé ont parfois le droit de rester ouvertes. Elles restent extrêmement rares: la plupart retraitent l’eau dans des cuves avant de la jeter à l’égout.

- «Cacophonie» -

Dans les faits, la plupart des stations restent ouvertes. A Pierre-Bénite, près de Lyon, une station a affiché que le lavage était réservé aux véhicules d'urgence, comme les ambulances. «Après, moi, je peux pas interdire aux gens de venir (...) je ne suis pas policier», lance le gérant de la station, Eric Marcoccia.

TotalEnergies, leader du secteur avec 1.000 stations, n'a pas su préciser combien d'entre elles étaient fermées, la situation étant «évolutive». Mais une porte-parole a souligné qu'elles avaient toutes été sensibilisées au sujet des arrêtés préfectoraux.

Il y a une «cacophonie» au niveau des préfectures, avec des mesures différentes selon les départements, explique Jean-Luc Cottet, exploitant de centres de lavage en région parisienne et représentant du secteur chez Mobilians, qui rassemble les professionnels de l’automobile.

A l'entrée d'Auxerre (Yonne), Jean-Claude, 50 ans, fait passer sa Renault Mégane entre les rouleaux d'une station Total. «De toute façon on sait qu'on va droit dans le mur! Et on nous demande à nous, consommateurs, de faire des efforts». Difficile par ailleurs de savoir si la station dispose d'un système de recyclage.

Quelque 40 km plus au sud du même département, l'hypermarché Auchan d'Avallon a fermé sa station de lavage alors que le Cousin, la petite rivière qui traverse la ville, est au plus bas. Selon son directeur, le propriétaire de l'établissement envisage de mettre en place un système de recyclage de l'eau pour rester ouvert les étés prochains.

«C’est un peu ambigu comme situation et pas confortable pour les exploitants. On demande aux gens de ne plus laver leur véhicule», déplore M. Cottet, qui craint que les stations ne doivent fermer plusieurs mois par an.

Au total, 0,6% de l’eau consommée en France est utilisée pour le lavage des voitures, dont un tiers en station, avec six lavages en moyenne par voiture et par an.

Un lavage au jet à haute pression consomme en moyenne 60 litres d’eau, soit une très longue douche. Un portique en consomme 120 litres et un tunnel de lavage 160.

«Si on les empêche d’aller dans les stations, les accros de la voiture vont les laver à la maison. Et c’est polluant et consommateur d’eau», fait valoir M. Cottet.

Il est interdit de laver sa voiture à grande eau sur la voie publique, sous peine d'une amende de 450 euros. Dans sa cour ou son jardin, il est limité, avec obligation de récupérer l'eau sale.

Au total, 5.650 contrôles ont été effectués pour faire respecter les mesures liées à la sécheresse depuis le début de l'été, tous secteurs confondus, avec 163 PV à la clé et une vingtaine de procédures pénales, selon le ministère de la Transition écologique. Et tous les services de police, municipaux et de gendarmerie sont autorisés à sévir.

Jean-Luc Cottet insiste toutefois sur le rôle «écologique» des stations de lavage, qui récoltent chaque année 48.000 tonnes de boue, chargées de résidus toxiques. Selon lui, la profession s'adapte, notamment face à la concurrence du lavage à sec: celui-ci, bien plus cher, utilise des produits chimiques sur des dizaines de lingettes qui doivent être ensuite lavées... à l'eau.

Comment conduire en consommant (et en polluant) moins

Comment consommer moins d'essence sur la route (et moins polluer) alors que les prix sont au plus haut? Entretien du véhicule, conduite sereine: les solutions sont basiques mais demandent un peu d'entraînement.

Eviter la voiture

«On n’y pense pas forcément, mais le plus simple pour économiser du carburant c’est de ne pas prendre sa voiture», souligne Guillaume Sabiron, de l’institut français du pétrole-Energies nouvelles (Ifpen). Et donc de se déplacer en transports en commun, à vélo, ou en covoiturage.

C'est d'autant plus valable pour les courts trajets que les systèmes de post-traitement (catalyseurs) restent froids: on pollue gravement l'air de son quartier en allant chercher le pain.

Globalement, l'Agence internationale de l'énergie (AIE) recommande de soutenir davantage les transports publics, généraliser le télétravail, la circulation alternée et les dimanches sans voitures dans les grandes villes.

Ecoconduite

Pour économiser 15 à 20% de carburant et donc plusieurs centaines d'euros par an, il faut adapter son style de conduite, selon l'Ifpen.

Il s'agit de:

- Réduire sa vitesse, en passant par exemple de 120 à 110 km/h sur autoroute.

- Garder une vitesse constante, si possible avec un régulateur de vitesse (5% d'économie).

- Rouler à un régime mesuré (2.000 tours/min environ pour un diesel, 2.500 pour un moteur essence).

- Anticiper les phases de freinage. Cela épargne aussi les freins et les pneus.

- Couper le moteur en cas d'arrêt prolongé (à partir de 10 secondes, hors bouchons), ou profiter du «Stop & start» sur une voiture récente (le moteur s'éteint si l'on est au point mort et qu'on lâche l’embrayage). Cela permet d’économiser 18% de carburant dans le trafic.

- Activer le mode «éco», s'il est disponible: il permet de réduire jusqu'à 3% de la consommation.

Ces conseils ne s’additionnent pas forcément, tout dépend des usages et des trajets.

La plupart de ces conseils sont aussi valables pour une voiture électrique, et préservent son autonomie.

Pour faire le point, on peut surveiller sa consommation sur l’ordinateur de bord ou sur une application (comme Geco Air).

Quelques réflexes

- Réduire la charge en vidant le coffre de tout objet inutile.

- Enlever les barres de toit si elles ne servent pas: elles ajoutent jusqu’à 2% de consommation sur un trajet autoroutier, et un coffre de toit bien plus. Un coffre d’attelage a moins de prise à l'air.

- Fermer les fenêtres à haute vitesse (+5% de consommation sur autoroute).

- Mais éviter aussi de mettre la climatisation à 16° quand il fait 40° dehors (jusqu'à 13% d'économie), ou sur les trajets courts. Au démarrage, il vaut mieux rouler un peu pour aérer la voiture avant d’enclencher l’air conditionné. Et se garer à l’ombre.

- Débrancher les auxiliaires électriques (prises USB…), qui entraînent une petite surconsommation (+0,7%).

Fausses bonnes idées

- Débrayer et rouler au point mort: le moteur continue de tourner. Mieux vaut continuer sur sa lancée en lâchant l'accélérateur, et rétrograder (utiliser le frein moteur) quand on veut ralentir. Cela évite aussi des émissions de particules liées au freinage.

- Se coller à l'arrière d'un véhicule pour profiter de son aspiration est évidemment très dangereux.

- Surgonfler ses pneus accélère leur usure.

- Couper le contact en descente coupe aussi l'assistance au freinage.

- Faire chauffer le moteur plus de 30 secondes avant de partir est inutile.

- Aller à la pompe tôt le matin: l'essence peut être un peu plus dense car plus froide qu'en fin de journée, mais la variation est négligeable.

- Reprogrammer son moteur reste hasardeux. Par ailleurs, aucun des accessoires promettant des économies n'a montré une réelle efficacité lors de tests menés par l'Agence américaine de protection de l'environnement (EPA).

- Passer au bioéthanol: ce carburant coûte moins cher, limite un peu les émissions. Mais l'utilisation de terres, d'eau et de produits chimiques pour la culture des plantes, qui seront transformées en carburant, est dénoncée par des ONG.


France: vote crucial pour le Premier ministre Sébastien Lecornu

Le Premier ministre français Sébastien Lecornu assiste à une séance de questions au gouvernement au Sénat, la chambre haute du Parlement français, à Paris, le 26 novembre 2025. (AFP)
Le Premier ministre français Sébastien Lecornu assiste à une séance de questions au gouvernement au Sénat, la chambre haute du Parlement français, à Paris, le 26 novembre 2025. (AFP)
Short Url
  • Sébastien Lecornu joue son avenir politique sur le vote du budget de la Sécurité sociale, menacé d’être rejeté faute de soutien des Républicains et d’Horizons, malgré l’appui inattendu des socialistes
  • Un rejet pourrait provoquer sa chute, alors que le gouvernement avertit qu’un échec ferait bondir le déficit de la Sécurité sociale et que le scrutin reste extrêmement incertain

PARIS: L'avenir du Premier ministre français Sébastien Lecornu pourrait dépendre mardi de son pari de faire adopter sans majorité le projet de budget de la Sécurité sociale par l'Assemblée nationale, où il s'est assuré du soutien des socialistes mais risque d'être lâché par les siens.

Le texte proposé par son gouvernement de centre-droit pourrait être rejeté. Pas à cause du parti Socialiste (PS), dont le patron Olivier Faure a appelé à voter "pour" et avec lequel le Premier ministre a mené les négociations, mais parce que dans son propre camp, les partis de droite Les Républicains (LR) et du centre-droit Horizons refusent de soutenir un budget qui, à leurs yeux, fait trop de concessions à la gauche.

Le scrutin s'annonce donc extrêmement serré sur ce projet de loi, dans lequel le chef du gouvernement a concédé la suspension de l'emblématique réforme des retraites.

Son rejet pourrait précipiter la chute de Sébastien Lecornu, même si la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon a jugé dimanche qu'une démission "n'aurait pas de sens".

Nommé il y a trois mois, le chef du gouvernement, qui défend la méthode des "petits pas", a en effet renoncé à recourir à un dispositif, celui de l'article 49.3 de la constitution, qui permet de faire passer un texte sans vote mais expose à la censure.

Sébastien Lecornu a déjà senti le vent du boulet souffler sur le volet "recettes" du texte, adopté à peu de voix grâce à plusieurs compromis et a de nombreux absents dans la chambre basse.

Il est reparti à la pêche aux voix pour le volet "dépenses" et surtout pour le vote final sur l'ensemble du projet de loi, prévus tous deux mardi.

Lundi soir, le président du parti Horizons, Edouard Philippe, candidat déclaré pour la présidentielle de 2027, a recommandé à ses députés de s'abstenir, en affirmant n'avoir "jamais voulu" une chute du gouvernement.

Les députés écologistes, dont le vote est crucial, pourraient s'abstenir quant à eux si le gouvernement cède à leur demande d'une augmentation des dépenses de l'assurance maladie.

Le gouvernement ne cesse d'avertir que si aucun texte n'est adopté, le déficit de la Sécurité sociale flamberait à 30 milliards d'euros en 2026, contre 23 en 2025.

L'issue du scrutin est d'autant plus incertaine que les votes ne seront pas unanimes au sein des groupes. LFI (gauche radicale) et RN (extrême-droite) avec l'UDR devraient voter contre, et les communistes majoritairement contre.

Le chef des LR, Bruno Retailleau a appelé à ne pas voter un "budget socialiste", mais certains de ses élus pourraient voter pour.

Si le texte est adopté, son chemin n'est pas terminé pour autant: il repartira au Sénat (chambre haute), avant de revenir à l'Assemblée, à qui le gouvernement pourra alors donner le dernier mot.


Paris cherche à dynamiser ses relations économiques avec Oman et le Koweït

La visite en Oman doit permettre de consolider une relation économique « peu nourrie à ce stade », selon la source diplomatique, mais qui s’oriente clairement vers des projets structurants liés à la stratégie Oman 2040. (AFP)
La visite en Oman doit permettre de consolider une relation économique « peu nourrie à ce stade », selon la source diplomatique, mais qui s’oriente clairement vers des projets structurants liés à la stratégie Oman 2040. (AFP)
Short Url
  • Le déplacement de Nicolas Forissier en Oman et au Koweït confirme la volonté française de renforcer sa présence économique dans une région stratégique et en pleine transformation
  • La France cherche à positionner ses entreprises sur les secteurs prioritaires identifiés par les stratégies nationales omanaise et koweïtienne, afin de bâtir des partenariats durables dans une dynamique “gagnant-gagnant”

PARIS: À moins d’un mois de sa visite en Arabie saoudite, le ministre délégué au Commerce extérieur, Nicolas Forissier, repart dans le Golfe du 9 au 11 décembre.
Il se rend successivement en Oman puis au Koweït, pour un déplacement qui confirme la volonté française de renforcer sa présence économique dans une région stratégique et en pleine transformation.

« C’est un voyage qui vise clairement à approfondir nos relations bilatérales avec deux pays dont les marchés, encore peu explorés, recèlent un potentiel considérable pour nos entreprises », explique une source diplomatique.

Il y a trois semaines, Nicolas Forissier menait déjà une mission ambitieuse en Arabie saoudite, centrée sur la mobilisation des acteurs français pour les grands rendez-vous internationaux que le royaume s’apprête à accueillir : l’Exposition universelle de 2030 et la Coupe du monde 2034.

Cette fois, la logique est différente puisqu’il s’agit de développer en profondeur des partenariats économiques avec Oman et le Koweït, deux pays de plus petite taille mais aux marchés dynamiques et en pleine diversification.

Oman comme le Koweït affichent aujourd’hui des visions nationales ambitieuses à l’horizon 2040, toutes deux axées sur la diversification économique et la modernisation de l’appareil productif.

« Ce sont deux économies historiquement centrées sur les hydrocarbures, mais qui veulent désormais aller beaucoup plus loin en matière d’infrastructures, d’énergies renouvelables, de gestion de l’eau ou encore de technologies propres », souligne la source diplomatique.

Malgré un socle économique bilatéral encore limité, comparé à l’Arabie saoudite ou aux Émirats, l’intérêt pour les entreprises françaises est réel.
Les chiffres l’illustrent clairement : les échanges commerciaux France–Oman ont atteint 703 millions d’euros en 2024, en hausse spectaculaire de 60 % par rapport à 2023.
Le Koweït reste quant à lui le troisième partenaire commercial de la France dans la région, avec 2,6 milliards d’euros d’échanges en 2024.

« Il y a un vivier économique existant, mais nous voulons aller beaucoup plus loin. L’objectif du ministre est d’accélérer, d’appuyer des contrats déjà signés ou en cours de négociation, et de mettre en avant nos entreprises sur les appels d’offres ouverts », résume la source diplomatique.

Une vingtaine d’entreprises françaises

Le ministre est accompagné d’une vingtaine d’entreprises françaises, reflétant la diversité de l’offre tricolore : grandes multinationales, entreprises de taille intermédiaire, start-ups et fonds d’investissement.
La liste inclut notamment Aéroports de Paris, Airbus, Bouygues, Artelia, Bpifrance, Schneider Electric, Suez, Veolia, Société Générale, ainsi que plusieurs acteurs industriels et financiers.

Pour le volet koweïtien, d’autres grands noms rejoignent la délégation, parmi lesquels JCDecaux, Aegis, Neoen, Serena Capital, TKO ou TotalEnergies.

« C’est une délégation intersectorielle, représentative de l’ensemble du savoir-faire français, dans l’énergie, l’eau, les transports, les infrastructures, la finance ou encore le génie urbain », précise la source.

La visite en Oman doit permettre de consolider une relation économique « peu nourrie à ce stade », selon la source diplomatique, mais qui s’oriente clairement vers des projets structurants liés à la stratégie Oman 2040.

Les entreprises françaises y sont déjà positionnées sur plusieurs secteurs clés, tels que la gestion de l’eau et la rénovation des réseaux de distribution, un enjeu central pour un pays en tension hydrique.

Autre secteur : les transports, avec un projet majeur, celui du métro de Mascate, dont la planification progresse et pour lequel des entreprises françaises répondent aux appels d’offres.

Dans le domaine des énergies, plusieurs projets sont en cours, notamment l’un des plus vastes projets de production énergétique carbonée du pays, ainsi qu’une stratégie nationale axée sur l’hydrogène, le solaire et l’éolien.
S’ajoutent les secteurs de la gestion des déchets et de l’économie circulaire, où des acteurs français comme Suez ou Veolia sont déjà bien implantés.

La culture et le soft power

Oman manifeste aussi un intérêt croissant pour la culture et le soft power, un domaine où la France dispose d’atouts déterminants. « Les autorités omanaises veulent développer leur attractivité culturelle, et notre influence dans ce domaine est un atout important », note la même source.

Le passage du ministre au Koweït s’inscrit dans la dynamique ouverte par la visite de l’émir à Paris en juillet 2025, qui a marqué une relance du dialogue politique et économique. « Cette visite avait posé les bases d’un partenariat renouvelé, à l’approche du 65ᵉ anniversaire de nos relations diplomatiques prévu en 2026 », rappelle Paris.

Le Koweït, qui souhaite diversifier son économie tout en modernisant ses infrastructures, ouvre aujourd’hui plusieurs projets majeurs sur lesquels les entreprises françaises sont engagées, comme l’extension de la flotte de Kuwait Airways — avec un besoin important d’appareils neufs — ou la rénovation complète de l’aéroport international, projet structurant pour l’ouverture du pays.

Il y a également la première tranche d’une ferme solaire de 1,1 GW à Shagaya, l’un des projets énergétiques les plus ambitieux de la région, ainsi que la construction de villes durables, en cohérence avec les objectifs de transition énergétique nationale.

Selon la source diplomatique, « le Koweït est aussi en demande d’investissements croisés : il souhaite investir davantage en France, mais encourage tout autant les investissements français au Koweït, dans l’énergie, les infrastructures et la santé ».

À travers ce double déplacement, la France entend affirmer un message clair : celui d’une politique économique résolument tournée vers le Golfe. « Notre volonté est simple : accompagner les stratégies nationales, positionner les entreprises françaises sur les secteurs prioritaires et bâtir des partenariats durables, dans une dynamique “gagnant-gagnant” », conclut la source.


Le gouvernement lance des conférences sur la «souveraineté alimentaire», sur fond de méfiance agricole

 Aujourd'hui, la France importe la moitié des fruits, légumes et du poulet qu'elle consomme, 60% de la viande ovine, 25% du bœuf...Photo de Rungis le 1er février 2024. (AFP)
Aujourd'hui, la France importe la moitié des fruits, légumes et du poulet qu'elle consomme, 60% de la viande ovine, 25% du bœuf...Photo de Rungis le 1er février 2024. (AFP)
Short Url
  • Ces conférences, promises par la loi d'orientation agricole de mars 2025, se dérouleront sur plusieurs mois, par filières de production et au niveau régional, pour des conclusions en juin
  • La ministre Annie Genevard a livré en février une vision de la souveraineté alimentaire conçue comme un "réarmement" dans un monde secoué de conflits: "la France doit produire plus pour manger mieux", avait-elle assené

PARIS: Dans une France agricole affaiblie, le gouvernement lance lundi les "conférences de la souveraineté alimentaire" destinées à définir une stratégie agricole nationale sur dix ans, un exercice que les agriculteurs, échaudés, abordent avec méfiance.

De l'élevage à la viticulture en passant par les céréales, les difficultés sont telles que la balance agricole française pourrait être déficitaire en 2025, pour la première fois en près de 50 ans. Aujourd'hui, la France importe la moitié des fruits, légumes et du poulet qu'elle consomme, 60% de la viande ovine, 25% du bœuf...

Ces conférences, promises par la loi d'orientation agricole de mars 2025, se dérouleront sur plusieurs mois, par filières de production et au niveau régional, pour des conclusions en juin.

La ministre Annie Genevard a livré en février une vision de la souveraineté alimentaire conçue comme un "réarmement" dans un monde secoué de conflits: "la France doit produire plus pour manger mieux", avait-elle assené, appelant à la "mobilisation générale".

Retour "symbolique" à Rungis 

Elle franchit une étape supplémentaire lundi en lançant son opération "grand réveil alimentaire" au marché de gros de Rungis, avec un discours qualifié de "majeur" par son entourage.

Cette entrée en matière a fait bondir le premier syndicat FNSEA, qui participera au chantier mais pas à son lancement, "s'apparentant davantage à une opération de communication".

"Cela fait 15, 20 ans qu'on dit qu'on va dans le mauvais sens. Ce qui nous intéresse maintenant, c'est ce qu'on va faire, (...) comment on assure des revenus sur les exploitations", souligne le secrétaire général de la FNSEA Hervé Lapie.

Le premier syndicat goûte assez peu ce retour "symbolique" à Rungis, où Emmanuel Macron avait en 2017 prôné une stratégie de "montée en gamme", depuis percutée par l'inflation et la concurrence accrue sur les marchés.

Huit ans plus tard, l'ambiance est morose. Après deux hivers de colère dans les campagnes, le monde agricole reste au bord de l'explosion, entre crises sanitaires dans l'élevage et prix en berne.

La mobilisation s'organise, en France contre la politique d'abattage systématique de bovins touchés par la dermatose, et à Bruxelles, où une manifestation est prévue le 18 décembre contre l'accord de libre-échange UE-Mercosur ou la taxe carbone aux frontières pour les engrais.

Pour la Coordination rurale, 2e syndicat agricole qui boude aussi le discours de Rungis, "le ministère ne répond pas aux attentes actuelles des agriculteurs" qu'on "empêche de produire" avec des contraintes trop fortes.

A rebours de cette vision anti-normes, la Confédération paysanne est aussi critique du gouvernement, estimant que la souveraineté est avant tout la capacité d'une société à choisir son agriculture et non une course pour produire et exporter plus.

Plusieurs filières soulignent que le temps n'est plus "aux nouvelles consultations" mais aux "décisions": "il y a urgence", a résumé l'interprofession de la viande mercredi.

Certaines ont établi des diagnostics précis, comme celle de la betterave sucrière, ou lancé des "plans de souveraineté" comme les fruits et légumes en 2023, ou le blé dur et la viande en 2024. Qu'espérer donc de ces conférences ?

Impliquer la transformation 

L'idée est de construire à partir "de l'évolution de la demande", en interrogeant notamment les industriels: "il s'agit bien d'élaborer un plan d'action de production et de transformation à dix ans et on fera en sorte de partir de la demande du consommateur français, européen et mondial", explique le ministère.

Des "projets structurants" seront identifiés, de même que des "trajectoires de production", assure-t-on.

Ce plan devra aussi tenir compte de la stratégie française de lutte contre le changement climatique ou de réduction des pesticides.

Ludovic Spiers, ex-directeur général du géant coopératif agricole Agrial, a été nommé "coordinateur général" du chantier. Des groupes de travail sectoriels sont prévus (cultures, viandes blanches, viticulture...), réunissant les interprofessions, l'amont (l'agriculture) et l'aval (la transformation), l'établissement public FranceAgrimer, la recherche.

Ces conférences "doivent être l'occasion d'un sursaut national. Je veux impliquer le consommateur citoyen, lui faire prendre conscience que par son acte d'achat, il a une importance capitale. Ce +grand réveil alimentaire+ s'adresse d'abord à lui", a affirmé Mme Genevard dans Les Echos dimanche.

Elles devront aussi prendre en considération des stratégies nationales nutrition et climat (Snanc, SNBC...) qui se font toujours attendre.