L'Occident doit s'attaquer aux cyberattaques menées par le régime iranien

Représentation du drapeau national de l’Iran en code binaire. (Getty)
Représentation du drapeau national de l’Iran en code binaire. (Getty)
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Publié le Mardi 13 septembre 2022

L'Occident doit s'attaquer aux cyberattaques menées par le régime iranien

L'Occident doit s'attaquer aux cyberattaques menées par le régime iranien
  • Dans certains cas, la guerre informatique peut se révéler plus dévastatrice que les opérations militaires
  • Afin de contrer la montée en puissance du cyberterrorisme employé par le régime iranien, les gouvernements doivent envoyer un message ferme à Téhéran

Le régime iranien fait de plus en plus appel à une nouvelle forme de terrorisme: la cyberguerre. La communauté internationale, notamment les puissances occidentales, ne doit pas sous-estimer cet outil.

Dans certains cas, la guerre informatique peut se révéler plus dévastatrice que les opérations militaires. Elle risque en effet de perturber ou de contrôler l'infrastructure d'un pays. Cet outil peut s'attaquer aux services publics, aux hôpitaux, aux transports, à Internet, aux institutions municipales ou gouvernementales, voire au secteur de l'énergie. Il peut également servir à pirater les informations privées des citoyens, mais aussi à contrôler les missiles, les drones et les services de renseignement des pays.

Nombreux sont les dirigeants qui ont dénoncé les méfaits grandissants de cette menace des temps modernes. Le secrétaire général de l'Otan, Jens Stoltenberg, a tiré la sonnette d'alarme l'année dernière: selon lui, les cyberattaques «s'avèrent aussi néfastes et dangereuses» que les attaques militaires et constituent «une menace aussi sérieuse que toute autre attaque dirigée contre un allié de l'Otan». Dans la même logique, l'ancien directeur du renseignement national américain, Dan Coats, a fait la déclaration suivante en 2018: «Nos adversaires et les autres acteurs malveillants recourent aux cyberattaques et à d'autres instruments pour façonner en leur faveur les sociétés et les marchés, les lois et les institutions internationales, ainsi que les points chauds de la planète.»

Afin de contrer la montée en puissance du cyberterrorisme employé par le régime iranien, les gouvernements doivent envoyer un message ferme à Téhéran, comme l'a fait l'Albanie la semaine dernière.

En réponse à la cyberattaque perpétrée par le régime iranien contre l'Albanie en juillet, Tirana a rompu ses relations diplomatiques avec Téhéran. Elle a ordonné aux diplomates iraniens et aux employés de l'ambassade de quitter le pays dans un délai de vingt-quatre heures. Dans une déclaration vidéo, le Premier ministre albanais, Edi Rama, a affirmé: «Nous avons mené une enquête approfondie qui a fourni des preuves irréfutables selon lesquelles la cyberattaque dirigée contre notre pays a été orchestrée et parrainée par l'Iran à travers quatre groupes qui ont exécuté cette agression.»

M. Rama s'est exprimé en ces termes: «Le gouvernement a décidé de rompre immédiatement ses relations diplomatiques avec l'Iran. Cette riposte radicale [...] est pleinement alignée sur la gravité et le danger de la cyberattaque qui a menacé de paralyser les services publics, de supprimer les systèmes informatiques, de pirater les archives de l'État, de détourner les données électroniques de l'intranet du gouvernement et de semer chaos et insécurité dans notre pays.»

En outre, l'Otan doit impérativement prendre des mesures proportionnées et analogues contre le régime iranien pour avoir attaqué un pays qui fait partie de l'alliance.

Le silence dans lequel baignent l'Otan et ses principaux pays membres ne fera qu'enhardir l'establishment théocratique.

 

Dr Majid Rafizadeh

Le silence dans lequel baignent l'Otan et ses principaux pays membres ainsi que les négociations qu'ils engagent avec le régime iranien pour relancer l'accord nucléaire – en amadouant les dirigeants iraniens et en supprimant les sanctions imposées à Téhéran – ne feront qu'enhardir l'establishment théocratique; ils lui offrent l’opportunité de mener des cyberattaques contre un plus grand nombre de gouvernements occidentaux.

Les États-Unis ont imposé vendredi des sanctions au ministère iranien du Renseignement. Ce pas en avant reste toutefois insuffisant. Il incombe aux États-Unis et aux autres puissances de cibler et de sanctionner les organisations ainsi que les politiciens iraniens qui dirigent et financent le programme de cyberguerre.

Le régime iranien privilégie la cyberguerre plutôt que les guerres directes, qui compromettraient la pérennité du pouvoir des religieux. La cyberguerre est en effet moins coûteuse et permet souvent à Téhéran d'agir dans l'anonymat. Le modus operandi du régime consiste depuis longtemps à mener des guerres asymétriques: il se sert de tiers, comme ses milices, ses mandataires et ses groupes terroristes, pour parvenir à ses fins.

Il ne s'agit pas là de la première cyberattaque massive que le régime iranien lance contre un autre pays. Il a multiplié par le passé ces agressions contre des nations et des organisations étrangères qu'il considère comme des rivaux. Prenons l'exemple des hackers iraniens connus sous les noms de «Cadelle» et «Chafer». Beaucoup d’agences de renseignement et de nombreux responsables ont rapporté l'attaque que ce groupe a menée en 2017 contre l'Arabie saoudite.

Il est fort probable que la guerre cybernétique menée par l'Iran soit orchestrée par le Corps des gardiens de la révolution islamique. Ce dernier profitera sans aucun doute de la conclusion, si elle se concrétise, d'un nouvel accord sur le nucléaire iranien. Selon l'Institut d'études de sécurité nationale, dont le siège se trouve en Israël, «le Corps des gardiens de la révolution place manifestement l'Iran parmi les nations les plus performantes et les plus avancées en matière de cyberguerre. Si les relations Iran-Occident s'enveniment, l'Iran lancera probablement une cyberattaque contre les infrastructures vitales des États-Unis et de leurs alliés; il ciblera ainsi les infrastructures du secteur de l'énergie, les institutions financières et les réseaux de transport».

En somme, il est grand temps que la communauté internationale mette un terme à l'impunité avec laquelle le régime iranien multiplie les cyberattaques contre d'autres pays.

 

Le Dr Majid Rafizadeh est un politologue irano-américain diplômé de Harvard.

Twitter: @Dr_Rafizadeh

NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com