Attentat du 14 juillet en France: prélever des organes entiers de victimes «ne se justifiait pas»

L'ancien procureur antiterroriste François Molins (Photo, AFP).
L'ancien procureur antiterroriste François Molins (Photo, AFP).
Short Url
Publié le Mardi 11 octobre 2022

Attentat du 14 juillet en France: prélever des organes entiers de victimes «ne se justifiait pas»

  • Si la justice peut autoriser les prélèvements d'organes, les familles de Nice n’ont jamais été informées de ces actes
  • L'ancien chef de l'État François Hollande et son ministre de l'Intérieur de l'époque Bernard Cazeneuve sont également appelés à témoigner lundi après-midi,

PARIS: L'ancien procureur antiterroriste français François Molins a estimé lundi, au procès de l'attentat du 14 juillet 2016 en France, que le choix fait par les médecins légistes de prélever l'entièreté des organes de certaines victimes "ne se justifiait pas", tout en défendant la nécessité des autopsies pour les besoins de l'enquête.

Après l'attaque, plusieurs familles s'étaient vivement émues en constatant que des victimes avaient été dépouillées de leurs organes lors des autopsies, sans qu'elles en soient prévenues.

"Mon sentiment, c'est que le prélèvement de la totalité des viscères n’était pas indispensable", a déclaré devant la cour d'assises spéciale de Paris celui qui est aujourd'hui procureur général près la Cour de cassation, l'un des plus hauts magistrats français.

"Si c'était à refaire, il n'y aurait pas eu de prélèvements systématiques", a-t-il ajouté, reconnaissant aussi des insuffisances dans l'information aux familles.

Après l'attaque du 14 juillet 2016 au camion-bélier sur la promenade des Anglais à Nice (sud de la France), qui a fait 86 morts et plus de 450 blessés, des autopsies ont été pratiquées sur les corps de 14 victimes, dont quatre enfants, avait expliqué au début du procès l'ex-directeur de l'institut médico-légal (IML) de Nice, Gérald Quatrehomme.

François Molins, en tant que procureur de Paris alors chargé de toutes les enquêtes en matière de terrorisme, a confirmé à la barre les trois critères fixés par le parquet pour déterminer la nécessité d'une autopsie.

«Sujet douloureux»

Le premier, pour "établir scientifiquement les causes du décès" si l'examen externe du corps n'y a pas suffi. Le deuxième, lorsque la victime a eu une prise en charge médicale avant de décéder, "pour faire la part des choses" entre ce qui est dû à l'attaque et ce qui est lié à une "éventuelle négligence médicale". Et enfin en cas de suspicion d'atteinte par balle.

"J'ai conscience que c'est un sujet douloureux pour les victimes", mais "on ordonne une autopsie non pas pour faire de la peine, mais parce qu'on en a besoin", a-t-il fait valoir Ce n'est pas parce qu'"après coup l'autopsie n'a servi à rien qu'on peut inférer qu'il ne fallait pas l’ordonner".

Sur chaque corps autopsié, des organes ont été prélevés et placés sous scellés, au cas où des analyses complémentaires seraient nécessaires à l'enquête, avait expliqué le Pr Quatrehomme.

"On n'a pas abordé la question des prélèvements d'organes" au cours de la réunion de travail organisée entre les magistrats et l'IML, a expliqué M. Molins, disant s'en être remis sur ce point à l'expertise des médecins légistes.

Hormis pour certains organes qu'il est nécessaire de prélever en entier lorsqu'on veut les analyser, le protocole habituel à Paris est de "prélever un échantillon, quelques centimètres", et lorsque le parquet de Paris donne ses instructions, "on n'imagine pas que ça va être autrement", a souligné le magistrat.

La majorité des familles concernées n'ont pas été informées de ces actes et ne les ont appris que lors de la procédure, voire à l'audience, ont rappelé à la barre de nombreuses parties civiles dans des témoignages déchirants.

«Absurdité»

"Je cherche à comprendre comment le système médico-judiciaire a pu en arriver à une telle absurdité : découper ma fille de 12 ans en morceaux pour déterminer qu'elle est décédée d’un +polytraumatisme compatible avec la percussion avec un engin à haute cinétique+. Tout ça pour ça. Mais on le savait déjà!", avait ainsi déclaré à la barre Anne Gourvès.

En 2018, elle avait découvert "avec effroi un procès-verbal de mise sous scellés d'organes". Elle avait dressé la liste des organes prélevés sur le corps de sa fille Amie : encéphale et dure-mère, cœur, foie, poumons, reins, bloc cervical, glandes surrénales, rate...

Anne Gourvès a fait une demande de restitution des organes, assortie d'un test ADN qui lui a été refusé. Un document médical (qui évoque une personne de sexe féminin âgée d'une vingtaine d'années) l'a même fait douter du fait qu'il s'agissait bien de ceux de sa fille.

Pour ces cas, "je ne vois pas d'autres solutions que de faire des analyses ADN pour restituer ces organes aux familles", a déclaré M. Molins, précisant qu'il s'exprimait en son nom, et déclenchant quelques applaudissements dans la salle d'audience.

Dans l'après-midi, l'ancien chef de l'Etat François Hollande et son ministre de l'Intérieur de l'époque Bernard Cazeneuve, cités tous deux comme témoins, ont soutenu à la barre qu'il n'y avait "pas eu de relâchement" face à la menace terroriste.

Bien que ce ne soit pas le sujet du procès, les questions relatives aux mesures de sécurité le soir du 14 juillet 2016 à Nice sont sans cesse posées par les parties civiles.


Chrétiens d'Orient: l'Assemblée française vote à son tour sur le «génocide» des Assyro-Chaldéens

La "proposition de résolution", portée par le président du groupe Renaissance (majorité présidentielle) Sylvain Maillard, répond à une demande récurrente de cette communauté  (Photo, AFP).
La "proposition de résolution", portée par le président du groupe Renaissance (majorité présidentielle) Sylvain Maillard, répond à une demande récurrente de cette communauté (Photo, AFP).
Short Url
  • Un vote dans le même sens à l'Assemblée nationale lundi n'aurait pas de valeur contraignante pour l'exécutif
  • «Le massacre des Assyriens souffre d'un manque de reconnaissance en tant que génocide»

PARIS: L'Assemblée nationale française doit se prononcer lundi sur un texte appelant le gouvernement à reconnaître comme un génocide les "massacres" infligés en 1915-1918 par les autorités ottomanes aux Assyro-Chaldéens, une communauté chrétienne originaire de Mésopotamie.

La "proposition de résolution", portée par le président du groupe Renaissance (majorité présidentielle) Sylvain Maillard, répond à une demande récurrente de cette communauté en faveur d'une reconnaissance comme celle du génocide arménien.

Co-signée par des députés d'opposition, principalement issus des rangs des Républicains (LR, droite), elle fait écho à un texte similaire, largement adopté en février 2023 par le Sénat français.

Un vote dans le même sens à l'Assemblée nationale lundi n'aurait pas de valeur contraignante pour l'exécutif. Ce dernier, bien que réticent face à cette initiative parlementaire, ne devrait pas appeler à voter contre, selon une source gouvernementale.

Massacre

Si le génocide arménien "est reconnu par de nombreux pays et organisations internationales, considéré comme l'un des quatre génocides officiellement acceptés par l'ONU, et est commémoré chaque 24 avril par la France, le massacre des Assyriens souffre d'un manque de reconnaissance en tant que génocide", pose l'exposé des motifs de la résolution.

Or, "entre 1915 et 1918, la population assyrienne du nord de la Mésopotamie (régions du sud‑est de l'actuelle Turquie et région du nord‑ouest de l'Iran) a été massacrée et déplacée de force par les troupes ottomanes et kurdes", est-il écrit dans le texte qui évoque aussi sa "conversion forcée à ̀l'islam" organisée par "le régime ottoman".

La résolution "invite" donc le gouvernement "à reconnaître officiellement comme ayant un caractère génocidaire, l'extermination de masse, la déportation et la suppression de l'héritage culturel de plus de 250.000 Assyro‑Chaldéens" et à "condamner" ce "génocide".


Avant les JO-2024, la chasse aux faux taxis parisiens

Les sanctions sont généralement des amendes entre 800 et 1.500 euros mais peuvent aller jusqu'à un passage en comparution immédiate si le parquet en fait le choix. (AFP).
Les sanctions sont généralement des amendes entre 800 et 1.500 euros mais peuvent aller jusqu'à un passage en comparution immédiate si le parquet en fait le choix. (AFP).
Short Url
  • À trois mois des Jeux olympiques de Paris (26 juillet-11 août), les taxis clandestins seront l'un des premiers problèmes que devront affronter les visiteurs venus assister aux épreuves
  • Malgré une signalétique renforcée et des communications mettant en garde contre ces chauffeurs opérant sans licence, qui peuvent pratiquer des tarifs démesurés, le phénomène reste endémique

ORLY: "Nous sommes déjà en retard pour notre vol!", s'affole une touriste britannique, dont le taxi clandestin vient d'être arraisonné par un groupe de policiers en civil surgis de nulle part, sur la rampe d'accès à l'aéroport d'Orly.

Pour cette famille d'outre-Manche en partance après un tour à Disneyland Paris, le séjour en France s'achève sur une attraction d'un tout autre genre mais non moins typique: la chasse aux faux taxis par une unité spécialisée de la préfecture de police de Paris, les "Boers".

À trois mois des Jeux olympiques de Paris (26 juillet-11 août), les taxis clandestins seront l'un des premiers problèmes que devront affronter les visiteurs venus assister aux épreuves. "Taxi, taxi", susurrent les immanquables racoleurs à la sortie des aéroports et gares ferroviaires.

Malgré une signalétique renforcée et des communications mettant en garde contre ces chauffeurs opérant sans licence, qui peuvent pratiquer des tarifs démesurés, le phénomène reste endémique et donne lieu à un éternel jeu du chat et de la souris avec la police.

"Nous nous fondons parmi les passagers pour repérer les personnes qui ne collent pas avec le décor. Vous n'attendez pas quelqu'un dans un aéroport pendant 5-6h", explique à l'AFP le capitaine Patrice Desbleds, 47 ans.

Dans les bureaux de l'antenne d'Orly des Boers, un groupe de policiers observe en direct les conducteurs de taxis clandestins sur un écran de vidéosurveillance de l'aéroport. "Lui, il connaît mon visage par coeur", commente un fonctionnaire en désignant un individu.

En cette matinée de printemps, un discret dispositif de surveillance est en place à l'arrivée des véhicules à l'aéroport d'Orly. Dans la masse des voyageurs, les fonctionnaires en civil se font invisibles.

Au milieu de l'embouteillage de voitures cherchant à déposer des voyageurs au niveau des départs, les effectifs fondent soudain sur un van aux vitres fumées immatriculé en République tchèque, sans signalétique de taxi ou VTC.

Dispositions olympiques

Enfilant un brassard "police" orange fluo, les Boers le font garer sur le bas-côté et contrôlent son chauffeur. Dans le mille: ce ressortissant géorgien s'avère n'avoir aucune licence, pas même de permis de conduire et d'assurance du véhicule.

À l'intérieur du van, les clients britanniques paniquent à la vue des policiers: "c'est un cauchemar", souffle la mère de famille.

Le chauffeur devait être payé 140 euros pour les conduire de Disneyland à Orly, un prix dans la fourchette haute de ce qu'auraient proposé des transporteurs légaux, mais qui n'est pas exorbitant.

Pendant que les touristes courent avec leurs valises à roulettes jusqu'au comptoir de la compagnie aérienne, une policière s'efforce de suivre leur allure pour prendre leur déposition sur une feuille.

Après une palpation et une vérification de ses documents, le conducteur géorgien se voit lui notifier son placement en garde à vue. Il se laisse emmener avec résignation au poste dans une voiture de police banalisée.

Créée en 1938, l'unité de contrôle des transports de personnes, son nom officiel, compte près de 90 policiers en civils, dont une vingtaine d'officiers de police judiciaire, selon le site de la préfecture de police.

La légende attribue leur surnom de "Boers" à la mauvaise prononciation, par les Russes ayant fui la révolution bolchévique de 1917 et s'étant reconvertis en cochers à Paris, de l'argot "bourre" qui désignait alors un policier.

Durant les JO, en plus de leur présence habituelle dans les gares ferroviaires et aéroports, les Boers étendront leur présence aux sites d'épreuves olympiques. "Nous allons garder le savoir-faire de cette unité (...) nous avons pris des dispositions, on s'adapte à l'événement", dit le capitaine Desbleds.

Les sanctions sont généralement des amendes entre 800 et 1.500 euros mais peuvent aller jusqu'à un passage en comparution immédiate si le parquet en fait le choix.

D'après la préfecture de police, les opérations de lutte contre les faux taxis dans les aéroports donnent lieu ces derniers temps à une cinquantaine de gardes à vue par mois.


Adieu le diesel! Les JO de Paris promettent de faire sans groupes électrogènes

"Pas une goutte de gasoil": au Stade de France comme au Vélodrome national, les Jeux olympiques de Paris seront éclairés et alimentés par une électricité d'origine renouvelable. (AFP).
"Pas une goutte de gasoil": au Stade de France comme au Vélodrome national, les Jeux olympiques de Paris seront éclairés et alimentés par une électricité d'origine renouvelable. (AFP).
Short Url
  • Le fait est méconnu mais les grands événements sportifs comme culturels utilisent quasi systématiquement des groupes électrogènes
  • Mais l'organisation des JO de Paris veut "changer de paradigme", souligne-t-on chez Enedis: la règle sera de faire appel au réseau électrique dans les stades olympiques pour l'alimentation électrique principale

MONTIGNY-LE-BRETONNEUX: "Pas une goutte de gasoil": au Stade de France comme au Vélodrome national, les Jeux olympiques de Paris seront éclairés et alimentés par une électricité d'origine renouvelable, de quoi rompre avec les habitudes des grandes compétitions sportives, très gourmandes en diesel.

Le fait est méconnu mais les grands événements sportifs comme culturels utilisent quasi systématiquement des groupes électrogènescarburant au diesel pour alimenter leurs gros besoins en énergie: retransmission TV, écrans, éclairage...

"Un soir de match de foot, 4.000 litres de gazole sont consommés, et 12 tonnes équivalent de CO2 (tCO2eq) rejetées dans l'atmosphère", a expliqué à l'AFP Nicolas Perrin, directeur pour Paris d'Enedis, le gestionnaire du réseau public de distribution d'électricité.

Mais l'organisation des JO de Paris veut "changer de paradigme", souligne-t-on chez Enedis: la règle sera de faire appel au réseau électrique dans les stades olympiques pour l'alimentation électrique principale, et non aux groupes électrogènes.

Ceux-ci seront bien là, mais ne seront allumés qu'en cas d'"ultime recours".

Cet engagement s'inscrit dans l'objectif plus large de diviser par deux les rejets de gaz à effet de serre, directs et indirects, de ces Jeux, par rapport à ceux de Londres et de Rio.

Pour écarter les groupes électrogènes des 42 sites olympiques et 19 sites paralympiques, Enedis a engagé 100 millions d'euros d'investissements sur 8.000 opérations et chantiers de raccordement ou de sécurisation du réseau électrique.

"Pour garantir une qualité maximale, on a proposé de doubler l'alimentation pour avoir deux points de livraison par site", explique Nicolas Perrin.

Ainsi des sites historiquement raccordés mais dont l'alimentation n'était pas suffisamment dimensionnée, ont été renforcés, comme le Stade de France ou le Vélodrome national à Montigny-le-Bretonneux (Yvelines).

Risque de coupure? « Quasi-nul »

"On ne peut pas se permettre sur un 100 m de 9,58 secondes d'avoir une coupure de courant", souligne Damien Pillac, energy manager de Paris-2024, en évoquant le record du Jamaïcain Usain Bolt.

A Montigny, au pied de la piste cycliste de 250 mètres, "Jeannie" se sentira moins seule: le poste d'alimentation principal, baptisé en hommage à la championne cycliste Jeannie Longo, sera complété par un 2e poste provisoire. Au Stade de France, le 2e poste sera pérennisé au-delà des JO.

L'objectif est de profiter de la "vitrine de Paris-2024" pour "aider le monde de l'événementiel à franchir le pas du raccordement au réseau" et "sortir de l'utilisation massive des groupes électrogènes", souligne Marc Fleury, directeur d'Enedis Yvelines.

Concrètement, le système est conçu de telle sorte que "si on avait un problème sur le schéma normal (le poste principal), le site basculerait sur une alimentation de secours" (le 2e poste), explique Nicolas Perrin.

Sur l'ensemble des sites, Paris-2024 a bien prévu une "troisième ligne de sécurisation par groupes électrogènes, mais ceux-ci ne démarreront que si les schémas 1 et 2 ne sont plus opérationnels", soit "une probabilité quasi nulle", souligne Enedis qui revendique un réseau sûr à "99,9%".

Enedis a aussi amené son réseau jusqu'aux sites temporaires, zones de célébrations, relais de la flamme... en mettant à disposition des "bornes événementielles". Ces boîtes d'alimentation rétractables dans le sol pourront resservir lors de grands événements publics, comme des défilés de mode ou des concerts.

L'épreuve d'équitation cross-country dans le parc du château de Versailles, trop éloignée du réseau, bénéficiera elle d'une alimentation par groupe électrogène "zéro émission", sorte de grande batterie électrique acheminée par camion.

Dernière nouveauté: les Jeux promettent d'être alimentés avec "100% d'énergies renouvelables" grâce à un partenariat avec l'électricien tricolore EDF.

Comme le réseau ne peut pas remonter aux sources de l'électricité, les volumes consommés par les JO seront couverts par des garanties d'origines issues de huit parcs éoliens et solaires certifiant qu'une quantité équivalente d'électricité verte aura bien été injectée dans le réseau.

Au pays de l'atome, ce choix des énergies vertes s'explique par le contexte de la candidature de Paris en 2015. A l'époque, il était question de débrancher des réacteurs nucléaires, plutôt que d'en construire de nouveaux, comme le souhaite aujourd'hui le gouvernement français.