En Amérique, quand les choses tournent mal, il n’est pas rare qu’on s’en prenne aux Arabes

Les décisions de l'Opep ont engendré une montée de la colère antiarabe aux États-Unis (Photo, AFP).
Les décisions de l'Opep ont engendré une montée de la colère antiarabe aux États-Unis (Photo, AFP).
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Publié le Vendredi 04 novembre 2022

En Amérique, quand les choses tournent mal, il n’est pas rare qu’on s’en prenne aux Arabes

En Amérique, quand les choses tournent mal, il n’est pas rare qu’on s’en prenne aux Arabes
  • Le président Joe Biden a accusé les Saoudiens, en coopération avec Moscou, de réduire la production du pétrole
  • Le vrai problème est qu'il y a très peu de leaders politiques prêts à se distancier de l'extrémisme de leur parti et à ramener le peuple américain à la raison

Depuis que le groupe des nations de l'Opep+ a annoncé, le mois dernier, qu'il réduirait sa production de pétrole de 2 millions de barils par jour, on assiste à une montée de la colère antiarabe aux États-Unis. À presque tous les niveaux du pays, on reproche à l'Arabie saoudite de «se ranger du côté de la Russie» en forçant les prix du pétrole à augmenter.

Tentant de remédier au déclin de la popularité de son parti dans les dernières semaines avant les élections de mi-mandat, le 8 novembre prochain, le président Joe Biden a accusé les Saoudiens, en coopération avec Moscou, de réduire la production du pétrole. Cette baisse, prévue pour le présent mois, est également mise en cause dans la hausse des prix de l'essence aux États-Unis.

Les Saoudiens ont nié toute implication avec la Russie, soulignant qu'ils prévoient des réductions de production depuis de nombreux mois. Mais leurs démentis sont marginalisés dans la plupart des médias occidentaux, submergés d'attaques antisaoudiennes. En effet, en Occident, et aux États-Unis en particulier, il est plus facile d’incriminer les Arabes que de croire à la vérité.

Et quelle est la vérité? On a appris la semaine dernière que quatre des cinq plus grandes compagnies pétrolières du monde avaient déclaré des bénéfices trimestriels combinés de plus de 50 milliards de dollars (1 dollar = 1,03 euro). L’entreprise Exxon a fait état de près de 20 milliards de dollars de bénéfices à elle seule, dépassant de plus de 10% son précédent record trimestriel. Quant à Chevron, elle a enregistré des bénéfices de 11,2 milliards de dollars, ce qui correspond pratiquement à son record. Enfin, Shell a affiché des bénéfices de 9 milliards de dollars, ce qui a plus que doublé son total par rapport à la même période l'année dernière.

Alors, qui est vraiment à l'origine de la crise de l'essence en Amérique et en Occident? Il est difficile d'obtenir une réponse claire de la part de Biden, qui a affirmé le mois dernier que les prix de l'essence avaient considérablement baissé sous son mandat. Le président a faussement déclaré que le prix de l'essence était inférieur à 2,99 dollars le gallon et que les prix avaient baissé de plus de 1,30 dollar depuis son entrée en fonction. En réalité, son prix moyen est aujourd'hui de près de 4 dollars le gallon et il est supérieur à 3 dollars depuis mai de l'année dernière.

 

Attaquer l'Arabie saoudite en raison de la réduction de la production de l’Opep+ est sans conséquence sur le prix de l'essence aux États-Unis.

Ray Hanania

 

Biden a essayé de persuader les pays producteurs de pétrole de retarder la réduction de la production d'un mois, jusqu'à la fin des élections de mi-mandat aux États-Unis. Mais il n'y est pas parvenu. Le président est très inquiet à l’idée que les démocrates perdent le contrôle de la Chambre des représentants et du Sénat la semaine prochaine. Sa peur est légitime, car, dans presque toutes les élections de mi-mandat – qui suivent de deux ans l'élection présidentielle –, le parti qui contrôle la Maison Blanche perd le contrôle du Congrès.

La réalité est que l'Amérique est un pays gravement divisé. Le fossé entre les républicains et les démocrates est large, et il y a très peu de gens au milieu.

Biden sait que, lorsque les démocrates perdront le contrôle de la Chambre et du Sénat, les enquêtes du Congrès sur son prédécesseur Donald Trump et sur les affaires de sa famille seront probablement remplacées par des investigations sur sa propre famille. Plusieurs membres du Congrès, dont les républicains Darrell Issa et Tom Tiffany, ont promis de lancer une enquête exhaustive sur les accusations selon lesquelles Hunter Biden, d’une part, aurait utilisé l'influence de son père pour obtenir des contrats de plusieurs milliards de dollars et, d’autre part, consommerait de la drogue.

Il n'est donc pas étonnant que Biden ait eu recours au sentiment antiarabe comme solution de repli pour détourner l'attention du public américain de ce qui s'annonce comme une enquête peu glorieuse sur sa famille et les transactions financières d'autres démocrates.

Attaquer l'Arabie saoudite pour la réduction de la production de l'Opep+ est sans conséquence sur le prix de l'essence aux États-Unis, mais c'est apparemment la seule option dont disposent Biden et les démocrates pour tenter de détourner la dynamique électorale des républicains.

Bien que la haine antiarabe continue de proliférer, le vrai problème est qu'il y a très peu de leaders politiques prêts à se distancier de l'extrémisme de leur parti et à ramener le peuple américain à la raison ainsi qu’à une réalité modérée et centriste.

 

Ray Hanania est un ancien journaliste politique et chroniqueur plusieurs fois primé de la mairie de Chicago. Vous pouvez le joindre sur son site personnel à l'adresse suivante: www.Hanania.com
Twitter: @RayHanania

NDLR : L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com