En Tunisie, un prototype d'«école autonome» pour relancer un système essoufflé

Des élèves partagent le déjeuner à la cantine de l'internat de Makhtar, le 29 septembre 2022, dans la région tunisienne du centre-ouest du même nom.  (Photo par Fethi Belaid / AFP)
Des élèves partagent le déjeuner à la cantine de l'internat de Makhtar, le 29 septembre 2022, dans la région tunisienne du centre-ouest du même nom. (Photo par Fethi Belaid / AFP)
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Publié le Vendredi 04 novembre 2022

En Tunisie, un prototype d'«école autonome» pour relancer un système essoufflé

  • L'ONG Wallah We Can, qui a noué un partenariat avec l'établissement, ambitionne de reproduire ce «prototype d'école autonome» partout en Tunisie
  • Le collège, à trois heures de trajet de Tunis, accueille 565 élèves dont 80% d'internes issus de familles vivant loin de l'école, dans le nord-ouest pauvre et rural

MAKTHAR, Tunisie : Garçons et filles en rang par deux dans la cour: le collège-internat de Makthar en Tunisie ressemble à première vue aux autres écoles étatiques. Sa particularité: il produit de l'électricité et de la nourriture, finançant ainsi des activités originales permettant aux élèves de «s'ouvrir au monde».

L'ONG Wallah We Can, qui a noué un partenariat avec l'établissement, ambitionne de reproduire ce «prototype d'école autonome» partout en Tunisie, afin de relancer un système éducatif essoufflé, dans un pays autrefois très en pointe dans ce domaine.

Le collège, à trois heures de trajet de Tunis, accueille 565 élèves dont 80% d'internes issus de familles vivant loin de l'école, dans le nord-ouest pauvre et rural.

«Le système éducatif se porte très mal depuis la Révolution (qui a fait chuter le dictateur Ben Ali en 2011), pas à cause de la Révolution, mais parce que chaque gouvernement a cédé aux pressions du syndicat: on se retrouve avec un budget ministériel consacré à plus de 95% au paiement des salaires», déplore Lotfi Hamadi, fondateur de l'ONG.

Pourtant, rappelle à l'AFP l'ex-ministre et professeur de politiques publiques Hedi Larbi, «la Tunisie sous (son premier président) Habib Bourguiba se distinguait par une politique éducative volontariste: 15% du budget allait aux équipements et à la formation des enseignants». Résultat: le taux de scolarisation dépassait les 95% dans les années 90.

- «Ce qui est efficace dans l'entrepreneuriat» -

Aujourd'hui, 100.000 jeunes décrochent de l'école chaque année, les cours privés explosent, le niveau baisse. Face à «un Etat démissionnaire», M. Hamadi veut affronter le problème différemment.

Ce consultant de 46 ans, fils d'immigrés illettrés de Kesra, près de Makthar, revenu de France «contribuer» à la nouvelle Tunisie, entend «prendre ce qui est efficace dans l'entrepreneuriat et transformer les écoles en entreprises sociales».

Après 10 ans d'efforts, le collège décati est une pimpante «green school», dotée -- grâce à des mécènes -- de 140 panneaux solaires et 50 chauffe-eau solaires produisant quatre fois l'énergie consommée.

Avec ces excédents, l'école finance l'entretien du site et fournit du courant à trois autres établissements.

L'association loue huit hectares cultivés par une coopérative agricole, nommée Kidchen, qui emploie six parents d'élèves, anciens chômeurs, et un agronome.

Depuis l'été 2022, tomates, piments doux, oignons, pommes de terre ou petits pois alimentent la cantine du collège (10% de la production), et les surplus sont revendus.

Visage tanné, Chayeb Chayeb, 44 ans, responsable de l'équipe et père de trois enfants, dont deux au collège, a vu son quotidien chamboulé.

«Avant j'étais saisonnier avec des contrats de 5 ou 6 mois, chaque fois dans un endroit différent. Maintenant je travaille près de mon domicile», se réjouit-il.

A terme, les parents agriculteurs - actionnaires chacun à hauteur de 2% de Kidchen - ont vocation à racheter les parts de Wallah We Can et devenir propriétaires de la ferme: «Cela nous incite à travailler plus et produire plus pour gagner plus. C'est un projet pour nous-mêmes».

- Liste d'attente -

Avec les revenus énergétiques et agricoles, des clubs extra-scolaires ont été lancés: robotique, entrepreneuriat, langues et civilisations étrangères, médias, chant, «e-learning»...

«Pas pour combler les lacunes du système éducatif, il y en a trop, mais pour leur apprendre à apprendre, leur donner la curiosité de s'ouvrir au monde», explique M. Hamadi.

Dans un pays où une majorité de jeunes projettent d'émigrer, selon de nombreuses études, Wallah We Can voudrait que les enfants «se réconcilient avec leur pays et découvrent les opportunités qu'il peut leur offrir».

Habituée du club entrepreneuriat, Chahed Salhi, 14 ans, rêve de monter une entreprise touristique sur le site antique de Makthar: «Cette expérience m'a apporté énormément de confiance en moi», dit cette élève qui a surmonté sa timidité en apprenant «à parler en public» au club théâtre.

Chaïma Rhouma, étudiante en droit de 21 ans, passée par l'internat, apporte un témoignage aussi enthousiaste.

Des douches chaudes quotidiennes, un cinéma, un terrain omnisports, un grand jardin: «Avec Wallah We Can, tout a été métamorphosé ici, également pour les (good) +vibes+, les ondes positives», explique-t-elle.

Grâce aux clubs littérature et cinéma, «je suis plus curieuse, je cherche toujours des choses nouvelles: ici tu peux étudier en t'amusant», ajoute cette aspirante diplomate avide de «connaître d'autres cultures».

Avec son environnement privilégié, le collège est très populaire dans la région, assure son directeur Taher Meterfi, qui «a plus de 80 demandes en attente».

Prochaine étape pour Wallah We Can: une «ferme agro-énergétique» de 40 hectares pour fournir aliments et électricité aux 23 écoles de Makthar (70.000 habitants), soit 3.500 élèves.

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Israël a rendu à Gaza 30 corps de Palestiniens en échange de deux dépouilles d'otages 

Israël a rendu vendredi à l'hôpital Nasser les corps de 30 Palestiniens en échange de deux dépouilles d'otages israéliens restituées la veille par le mouvement islamiste palestinien Hamas, a indiqué à l'AFP cet établissement du sud de la bande de Gaza. (AFP)
Israël a rendu vendredi à l'hôpital Nasser les corps de 30 Palestiniens en échange de deux dépouilles d'otages israéliens restituées la veille par le mouvement islamiste palestinien Hamas, a indiqué à l'AFP cet établissement du sud de la bande de Gaza. (AFP)
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  • "Les corps de 30 prisonniers palestiniens ont été reçus de la partie israélienne dans le cadre de l'accord d'échange", a précisé l'hôpital, situé à Khan Younès
  • Au total, en échange de 15 dépouilles d'Israéliens, 225 dépouilles de Palestiniens ont été rendues conformément aux termes de l'accord de cessez-le feu en vigueur depuis le 10 octobre

GAZA: Israël a rendu vendredi à l'hôpital Nasser les corps de 30 Palestiniens en échange de deux dépouilles d'otages israéliens restituées la veille par le mouvement islamiste palestinien Hamas, a indiqué à l'AFP cet établissement du sud de la bande de Gaza.

"Les corps de 30 prisonniers palestiniens ont été reçus de la partie israélienne dans le cadre de l'accord d'échange", a précisé l'hôpital, situé à Khan Younès.

Les otages avaient été enlevés lors de l'attaque sans précédent du Hamas en Israël le 7 octobre 2023, qui avait déclenché la guerre dans la bande Gaza.

Au total, en échange de 15 dépouilles d'Israéliens, 225 dépouilles de Palestiniens ont été rendues conformément aux termes de l'accord de cessez-le feu en vigueur depuis le 10 octobre.

Depuis cette date, le Hamas a également rendu deux dépouilles d'otages non-israéliens, un Thaïlandais et un Népalais.

Le mouvement islamiste a jusqu'à présent restitué les restes de 17 des 28 corps qui se trouvaient encore à Gaza et auraient dû être rendus au début de la trêve, assurant que localiser les autres dépouilles est "complexe" dans le territoire dévasté par deux ans de guerre.

Des équipes égyptiennes autorisées à entrer dans le territoire palestinien par Israël participent aux recherches avec des engins de chantiers.

Lundi soir, le Hamas avait rendu à Israël les restes d'un otage, identifié comme étant ceux d'Ofir Tzarfati, dont une partie de la dépouille avait déjà été récupérée en deux fois.

Les retards successifs dans la remise des corps des otages ont provoqué la colère du gouvernement israélien, qui a accusé le Hamas de violer l'accord de trêve. Et les familles des otages ont exigé des mesures plus sévères pour contraindre le groupe palestinien à se conformer à l'accord.

Dix corps d'otages du 7-Octobre seraient encore à Gaza, ainsi que celui d'un soldat mort durant une guerre en 2014. Tous sont israéliens sauf un Tanzanien et un Thaïlandais.

Par ailleurs, à deux reprises depuis le 10 octobre, Israël a mené des bombardements massifs sur Gaza en représailles à des tirs qui ont tué trois de ses soldats. Le 19 octobre, les bombardements israéliens avaient fait au moins 45 morts et mardi 104.

Le Hamas, qui dément avoir tiré sur les soldats israéliens, a accusé Israël de violer le cessez-le-feu.


Frappe israélienne sur le sud du Liban: un mort 

Une frappe israélienne a tué vendredi un homme qui circulait à moto dans le sud du Liban, a annoncé le ministère de la Santé, ce qui porte à au moins 25 le nombre de morts dans des raids israéliens au cours du mois d'octobre. (AFP)
Une frappe israélienne a tué vendredi un homme qui circulait à moto dans le sud du Liban, a annoncé le ministère de la Santé, ce qui porte à au moins 25 le nombre de morts dans des raids israéliens au cours du mois d'octobre. (AFP)
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  • Vendredi, un drone a visé un homme à moto dans le village de Kounine, selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle). Le ministère de la Santé a fait état d'un mort et d'un blessé
  • Cette frappe intervient au lendemain de l'incursion d'une unité israélienne dans le village frontalier de Blida, où les soldats ont tué un employé municipal

BEYROUTH: Une frappe israélienne a tué vendredi un homme qui circulait à moto dans le sud du Liban, a annoncé le ministère de la Santé, ce qui porte à au moins 25 le nombre de morts dans des raids israéliens au cours du mois d'octobre.

Malgré le cessez-le-feu ayant mis fin en novembre 2024 à la guerre entre le Hezbollah et Israël, ce dernier continue de mener des frappes régulières au Liban, affirmer viser la formation pro-iranienne.

Vendredi, un drone a visé un homme à moto dans le village de Kounine, selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle). Le ministère de la Santé a fait état d'un mort et d'un blessé.

Israël n'a pas réagi dans l'immédiat.

Cette frappe intervient au lendemain de l'incursion d'une unité israélienne dans le village frontalier de Blida, où les soldats ont tué un employé municipal.

Le président Joseph Aoun a demandé à l'armée de "faire face" à toute nouvelle incursion israélienne en territoire libanais.

Ces derniers jours, l'aviation israélienne a intensifié ses frappes au Liban, affirmant viser des membres ou des infrastructures du Hezbollah.

Selon un bilan compilé par l'AFP à partir des données du ministère de la Santé, au moins 25 personnes, dont un Syrien, ont été tuées depuis le début du mois.

L'ONU avait indiqué mardi que 111 civils avaient été tués au Liban par les forces israéliennes depuis la fin de la guerre.

Lors d'un entretien vendredi avec son homologue allemand Johann Wadephul, en visite à Beyrouth, le ministre libanais des Affaires étrangères Youssef Rajji lui a demandé "d'aider à faire pression sur Israël pour qu'il cesse ses agressions".

"Seule une solution diplomatique, et non militaire, peut assurer la stabilité et garantir le calme dans le sud", a assuré le ministre libanais, selon ses propos rapportés par l'Ani.

Il a assuré que "le gouvernement libanais poursuit la mise en œuvre progressive de sa décision de placer toutes les armes sous son contrôle".

Le Hezbollah est sorti très affaibli du conflit et les Etats-Unis exercent une intense pression sur le gouvernement libanais pour que le mouvement chiite livre ses armes à l'armée nationale, ce qu'il refuse jusqu'à présent.

 


Liban: le chef de l'Etat demande à l'armée de «s'opposer à toute incursion israélienne»

Le président libanais Joseph Aoun a demandé jeudi à l'armée de "s'opposer à toute incursion israélienne", après la mort d'un employé municipal d'un village du sud du Liban où une unité israélienne a pénétré pendant la nuit. (AFP)
Le président libanais Joseph Aoun a demandé jeudi à l'armée de "s'opposer à toute incursion israélienne", après la mort d'un employé municipal d'un village du sud du Liban où une unité israélienne a pénétré pendant la nuit. (AFP)
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  • Dans un communiqué, le chef de l'Etat a condamné cette opération et "demandé à l'armée de faire face à toute incursion israélienne (...) pour défendre le territoire libanais et la sécurité des citoyens"
  • Selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), "dans une agression grave et sans précédent", une unité israélienne "appuyée par des véhicules a effectué une incursion dans le village de Blida, à plus d'un kilomètre de la frontière"

BERYROUTH: Le président libanais Joseph Aoun a demandé jeudi à l'armée de "s'opposer à toute incursion israélienne", après la mort d'un employé municipal d'un village du sud du Liban où une unité israélienne a pénétré pendant la nuit.

Dans un communiqué, le chef de l'Etat a condamné cette opération et "demandé à l'armée de faire face à toute incursion israélienne (...) pour défendre le territoire libanais et la sécurité des citoyens".

Selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), "dans une agression grave et sans précédent", une unité israélienne "appuyée par des véhicules a effectué une incursion dans le village de Blida, à plus d'un kilomètre de la frontière".

Cette unité "a investi le bâtiment de la municipalité du village, où dormait Ibrahim Salamé, un employé municipal, qui a été tué par les soldats de l'ennemi", a ajouté l'Ani.

Le ministère de la Santé a confirmé la mort de l'employé municipal.

Des villageois cités par l'Ani ont indiqué que l'incursion avait duré plusieurs heures et que les forces israéliennes s'étaient retirées à l'aube.

Sur X, le Premier ministre libanais Nawaf Salam a dénoncé "une agression flagrante contre les institutions de l'Etat libanais et sa souveraineté".