ANNAYA: "Saint Charbel m'a sauvé la vie". Comme de nombreux pèlerins, Charbel Matar se recueille sur la tombe du saint patron des Libanais, auquel sont attribués de nombreux miracles, avant la venue du pape Léon XIV.
La visite du monastère qui abrite la tombe de Saint Charbel, au nord de Beyrouth, sera un moment fort de la visite du pape américain, attendu au Liban le 30 novembre.
"Ma famille et moi avons une grande foi en Saint Charbel et nous lui rendons toujours visite", déclare Charbel Matar, 69 ans, entouré de son épouse et ses amis.
"J'ai failli mourir quand j'avais cinq ans. Il a accompli un miracle, il m'a sauvé de la mort et m'a maintenu en vie pendant 64 années de plus", ajoute l'homme dont les parents ont changé le prénom de Roger à Charbel en l'honneur du saint.
Saint Charbel Makhlouf (1828-1898), un moine-ermite maronite, canonisé en 1977, est populaire parmi les Libanais de toutes les communautés qui croient en ses miracles.
Les portraits du saint, avec sa longue barbe blanche, ornent maisons, voitures, mêmes bureaux, et les visiteurs affluent au monastère, qui porte le nom de Saint Maron, en toutes saisons.
"J'étais certaine que le pape allait visiter Saint Charbel (..) car Rome ne peut pas nier les miracles qu'il accomplit", dit Randa Saliba, une femme de 60 ans. "Saint Charbel est un message d'amour (..), il garde vivant le message chrétien".
La dernière visite d'un souverain pontife au Liban avait été celle de Benoit XVI en 2012.
Toutes les confessions
En prévision de l'arrivée du pape, des ouvriers appliquent une couche d'asphalte sur la route menant au paisible monastère, dans les montagnes boisées d'Annaya qui surplombent la mer.
Des visiteurs, dont des femmes musulmanes voilées, se promènent sur le site, où la cellule monacale de Saint Charbel a été gardée intacte. Certains allument des bougies et récitent des prières.
Fils de bergers, le moine originaire du nord du Liban était entré dans les ordres à l'âge de 23 ans, avant de mener une vie d'ermite.
L'abbé Tannous Nehmé, vice-recteur de Saint Maron, affirme que le monastère attire environ trois millions de visiteurs chaque année.
"Ce ne sont pas seulement des chrétiens - beaucoup de musulmans, ou des personnes non croyantes, viennent. Des gens arrivent de partout: d'Afrique, d'Europe, de Russie", affirme-il.
Au milieu des effluves d'encens, seul le bruit des travaux de restauration de la tombe de Saint Charbel troublent la quiétude du monastère.
C'est là que, lorsque la tombe a été ouverte en 1950, des représentants du clergé ont constaté que le corps du saint était intact, plus d'un demi-siècle après sa mort.
Le monastère a recensé des dizaines de milliers de personnes qui ont affirmé avoir été guéries par Saint Charbel.
La miraculée la plus célèbre est une Libanaise, Nohad Chami, diagnostiquée avec une maladie en phase terminale en 1993.
Elle affirme avoir eu une vision de Saint Charbel qui l'a guérie. Elle est décédée cette année, à l'âge de 75 ans.
"L'espoir"
Le Liban, un pays multiconfessionnel, est le seul Etat arabe où le président de la République est un chrétien maronite, en vertu du partage du pouvoir entre les communautés.
"La visite du pape est très importante pour le Liban. Elle apporte du bien et la bénédiction", se réjouit Claude Issa, une mère de trois enfants âgée de 56 ans.
Le Liban est sorti d'une guerre meurtrière il y a près d'un an entre le Hezbollah et Israël, qui continue de mener des frappes dans le pays, disant viser des membres ou infrastructures du mouvement pro-iranien.
Secoué par une crise économique inédite depuis 2019, il a également connu en août 2020 une énorme explosion, qui a fait plus de 220 morts et dévasté une partie de Beyrouth.
Le pape doit tenir le 2 décembre une prière silencieuse sur le site de l'explosion, au port de Beyrouth, et célébrer une messe publique.
"Sa visite donnera un élan aux gens, leur fera sentir qu'il y a toujours de l'espoir au Liban", affirme Claude Issa.