Face aux industriels du cacao, la Côte d'Ivoire et le Ghana se rebiffent

Un cacaoculteur remue son cacao étalé au soleil pour le faire sécher à Bringakro, un village de la sous-préfecture de Djekanou, le 17 novembre 2022 (Photo, AFP).
Un cacaoculteur remue son cacao étalé au soleil pour le faire sécher à Bringakro, un village de la sous-préfecture de Djekanou, le 17 novembre 2022 (Photo, AFP).
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Publié le Vendredi 18 novembre 2022

Face aux industriels du cacao, la Côte d'Ivoire et le Ghana se rebiffent

  • Selon certains experts, si le DRD a bien été intégré aux coûts par les chocolatiers, ces derniers compensent en faisant pression sur la prime censée rémunérer la qualité des fèves
  • Après avoir boycotté une réunion à Bruxelles fin octobre, la Cote d'Ivoire et le Ghana ont montré les muscles

BRINGAKRO: Le ton monte entre les deux premiers producteurs mondiaux de cacao et les multinationales: la Côte d'Ivoire et le Ghana ont donné jusqu'à dimanche aux industriels pour payer une prime promise aux planteurs, un bras de fer symptomatique des tensions récurrentes dans ce secteur.

"Le planteur ivoirien de cacao ne vit pas décemment de sa production. Je demande aux chocolatiers de respecter le prix fixé aux planteurs", s'agace Venance Brou Kouadio, au coeur de sa plantation de cinq hectares à Bringakro.

Comme ce quadragénaire, dans ce village à 200km au nord d'Abidjan, les planteurs sont nombreux à se plaindre de ne pas recevoir le prix promis pour un kilo de cacao, fixé cette année en Côte d'Ivoire à 900 francs CFA (1,3 euros).

Au coeur de la grogne, le différentiel de revenu décent (DRD), un mécanisme de prime instauré en 2019 visant à faire payer aux chocolatiers un bonus de 400 dollars par tonne de cacao aux planteurs.

L'objectif espéré: mieux rémunérer les agriculteurs dont on estime qu'ils perçoivent autour de 6% de la valeur générée par le marché du chocolat.

Mais selon le Conseil Café-cacao ivoirien (CCC) et le Ghana Cocoa Board (Cocobod) les organes nationaux de gestion des filières cacao des deux premiers producteurs mondiaux (60% de la production à eux deux), le compte n'y est pas.

La Covid a été un "prétexte pour ne pas payer. Or, les multinationales ont augmenté leurs profits, elles sont capables de payer", assure Yves Brahima Koné, le président du CCC. Sans le DRD, explique-t-il, difficile pour le planteur d'obtenir sa marge, une centaine de francs CFA par kilo.

Une prime visant à améliorer le revenu des planteurs, mais des compagnies "contournent ce processus", déplore Fiifi Boafo, porte-parole du Cocobod.

Menaces sur le cacao durable

Selon certains experts, si le DRD a bien été intégré aux coûts par les chocolatiers, ces derniers compensent en faisant pression sur la prime censée rémunérer la qualité des fèves.

Après avoir boycotté une réunion à Bruxelles fin octobre, la Cote d'Ivoire et le Ghana ont montré les muscles.

Si les multinationales ne respectent pas leurs engagements d'ici le 20 novembre, les deux pays menacent "d'interdire l'accès aux plantations pour effectuer des prévisions des récoltes" et de "suspendre les programmes de durabilité".

Ces programmes visant notamment à lutter contre la déforestation et le travail des enfants, permettent aux industriels de faire valoir que leur chocolat est issu d'une production durable, critère privilégié par le consommateur.

"Cet ultimatum permet d'attirer l'attention sur le fait qu'aussi importantes soient les questions de déforestation ou de travail des enfants, celle du revenu des planteurs l'est tout autant", affirme Fiifi Boafo.

"Si le cacao est bien payé, on peut envoyer nos enfants à l'école (...) et moderniser notre village avec la construction d’hôpitaux", plaide Apolline Yao Ahou, agricultrice dans la plantation de Bringakro.

Future réglementation

Mais les chocolatiers pourraient être tentés de jouer la montre.

"La Côte d'Ivoire a une économie fortement dépendante des revenus du cacao (...) Elle a besoin de vendre ses fèves", note un expert du secteur. "Arrêter les programmes de durabilité, c'est difficile à expliquer au grand public. L'image de la Côte d'Ivoire risquerait d'en pâtir".

Plusieurs multinationales, comme Barry Callebaut, Olam, Cargill, Ecom, Sucgen, Nestlé ou Touton dominent le marché ivoirien et achètent la quasi-totalité de la production de cacao du pays dont plus de 80% est acheminée vers l'Europe.

La World cocoa foundation qui regroupe les entreprises du chocolat et du cacao n'a pas souhaité commenter. Mais certains industriels, comme Nestlé, assurent faire leur part.

"Nous pensons que les producteurs de cacao devraient gagner un revenu qui leur permette de maintenir un niveau de vie décent (...) Nestlé paye le DRD depuis sa création en Côte d'Ivoire et au Ghana", explique un porte-parole du groupe.

D'ici 2024, une réglementation européenne devrait empêcher l'entrée dans l'UE de tout cacao issu de la déforestation.

Une opportunité à saisir pour les  producteurs.

"Pour que le prix change il faut que le produit change. Si un travail est fait contre la déforestation, le travail des enfants et pour gérer les quantités mises sur le marché, les pays pourront dire que leur cacao ne peut pas avoir le même prix qu'un cacao conventionnel", estime Francesca di Mauro, ambassadrice de l'UE en Côte d'Ivoire.

"Je dis aux grands groupes que le cacao que nous cultivons respecte les normes. En retour, nous vous demandons de bien nous rémunérer", plaide déjà Venance Brou Kouadio, dans sa plantation de Bringakro.


Climat: l'UE face aux pays pétroliers et émergents, la COP30 dans l'impasse

Vue des camions de pompiers depuis l'extérieur de la COP30 à Belém au Brésil, le 20 novembre 2025, après qu'un incendie s'est déclaré dans un pavillon. (AFP)
Vue des camions de pompiers depuis l'extérieur de la COP30 à Belém au Brésil, le 20 novembre 2025, après qu'un incendie s'est déclaré dans un pavillon. (AFP)
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  • Les négociations de la COP30 à Belém sont dans l’impasse, l’Union européenne se retrouvant isolée face aux pays pétroliers et émergents qui refusent d’inscrire la sortie des énergies fossiles dans l’accord final
  • Les pays en développement exigent davantage de financements pour la transition et l’adaptation, tandis que les Européens menacent de quitter la conférence sans accord

BELEM: La conférence de l'ONU sur le climat à Belém (Brésil) est entrée en prolongation samedi, avec un face-à-face entre Union européenne d'un côté et des pays pétroliers et émergents de l'autre, en désaccord frontal.

Les négociations se sont poursuivies dans la nuit de vendredi à samedi, alors que la COP30 devait s'achever vendredi soir, après deux semaines de travaux. Où en est-on au petit matin?

"Nulle part", répond la ministre française de la Transition écologique, Monique Barbut, en arrivant à une réunion avec les Vingt-Sept tôt samedi. De nombreux négociateurs n'ont pas dormi de la nuit, alors que des parties du site à Belem commencent à être démontées.

Que doit dire la déclaration finale de cette COP30? La question divise les délégations venues jusqu'en Amazonie.

Une séance de clôture est programmée à 10h00 (13h00 GMT), mais l'horaire pourrait changer.

Pour les Européens, l'avenir passe obligatoirement par un message pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et les énergies fossiles. Celles-ci sont responsables de la grande majorité du réchauffement.

Des pays comme la Chine, la Russie, l'Arabie saoudite ou l'Inde sont désignés par la France comme menant le camp du refus.

Mais une partie du monde en développement ne soutient pas non plus la bataille contre les fossiles.

Ils expliquent que de nombreuses économies, pauvres ou émergentes, n'ont pas à l'heure actuelle les moyens d'une transition vers une consommation et une croissance moins denses en carbone, ou tout simplement de s'adapter à un climat déréglé. Ils réclament des pays les plus riches des engagements financiers supplémentaires pour aider les nations qui le sont moins.

- Européens "isolés" -

La présidence brésilienne de la conférence a consulté tout le monde vendredi sur une proposition d'accord qui ne contient plus le mot "fossiles". Et encore moins la création d'une "feuille de route" sur la sortie du pétrole, du charbon et du gaz, réclamée par au moins 80 pays européens, latino-américains ou insulaires, et soutenue par le président brésilien Lula lui-même.

L'Union européenne a évoqué vendredi la perspective de partir "sans accord". Ce serait un échec retentissant pour l'hôte, le Brésil, et pour une conférence organisée dans l'une des régions emblématiques des questions environnementales posées à la planète, l'Amazonie.

Mais cela pose un dilemme. Les Européens se retrouvent "isolés" dans leur refus du texte, selon une délégation d'un des 27. Ils hésitent sur l'attitude à adopter: claquer la porte pour marquer la gravité de la situation, ou chercher encore une conciliation par "peur (...) d'endosser la responsabilité" de l'échec du sommet.

Le projet d'accord de la présidence brésilienne demande des "efforts" pour tripler les financements pour l'adaptation des pays pauvres au changement climatique. Or les État appelés à contribuer appelés sont réticents, un an après une COP29, à Bakou, qui les a déjà engagés sur dix ans.

"Concentrons-nous sur l'essentiel: l'accès à l'énergie pour les plus pauvres, la sécurité énergétique pour tous et la durabilité énergétique pour la planète", dit à l'AFP l'Indien Arunabha Ghosh, émissaire de la COP30 pour l'Asie du Sud.

- "Nous mettre d'accord" -

Selon plusieurs observateurs et délégués interrogés par l'AFP, les débats se concentrent sur des modifications à la marge des trois principaux points de friction: l'ambition de réduction des énergies fossiles, l'aide financière due par les pays développés, et les tensions commerciales sur les taxes carbone aux frontières.

"Ceux qui doutent que la coopération soit la meilleure chose à faire pour le climat seront absolument ravis de voir qu'on n'arrive pas à nous mettre d'accord", lançait le président de la COP30, le diplomate André Corrêa do Lago.

L'idée d'une "feuille de route" pour accélérer la sortie du pétrole, du charbon et du gaz, est née de la frustration face au manque de concrétisation de l'engagement à leur abandon progressif pris à la COP28 il y a deux ans.

Peu comptaient sur le retour de cette question au menu, jusqu'à ce que le président brésilien la remette au centre du jeu au début du sommet.

Premier producteur de pétrole au monde, les États-Unis sont eux-mêmes absents de cette COP30, le président Donald Trump jugeant ces négociations inutiles.


Sept accords technologiques avec les États-Unis pour accélérer l’IA saoudienne

L'Autorité saoudienne des données et de l'intelligence artificielle a signé sept accords stratégiques avec des entreprises technologiques américaines de premier plan dans le cadre des efforts visant à accélérer la transformation numérique du Royaume et à développer ses capacités en matière d'intelligence artificielle. (SPA)
L'Autorité saoudienne des données et de l'intelligence artificielle a signé sept accords stratégiques avec des entreprises technologiques américaines de premier plan dans le cadre des efforts visant à accélérer la transformation numérique du Royaume et à développer ses capacités en matière d'intelligence artificielle. (SPA)
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  • La cérémonie de signature a été dirigée par le président de la SDAIA, Abdullah Alghamdi, en marge du Forum d’investissement saoudo-américain à Washington DC

WASHINGTON : L’Autorité saoudienne des données et de l’intelligence artificielle (SDAIA) a signé sept accords stratégiques avec des entreprises technologiques américaines de premier plan dans le cadre des efforts visant à accélérer la transformation numérique du Royaume et à développer ses capacités en intelligence artificielle (IA).

Les accords ont été signés en marge du Forum d’investissement saoudo-américain à Washington DC, qui a rassemblé des hauts responsables, dignitaires, PDG et cadres de grandes entreprises saoudiennes et américaines, a rapporté l’Agence de presse saoudienne (SPA).

La cérémonie de signature a été dirigée par le président de la SDAIA, Abdullah Alghamdi, a ajouté la SPA.

Ces accords couvrent un large spectre de collaborations visant à renforcer l’infrastructure des données, développer les compétences nationales et promouvoir l’adoption de l’IA dans des secteurs clés.

Dans le cadre d’un partenariat, Supermicro travaillera avec la SDAIA sur des solutions serveur, la conception de centres de données, des événements centrés sur l’IA, des programmes de formation et des initiatives d’apprentissage en ligne destinées à développer l’expertise locale.

Dell coopérera avec la SDAIA pour accélérer l’adoption des technologies IA grâce à l’amélioration de l’infrastructure, au transfert de connaissances et à des initiatives de renforcement des capacités nationales.

Un accord distinct avec Accenture permettra aux deux parties d’échanger leur expertise pour renforcer les capacités de leadership en IA. Le partenariat comprend le développement des infrastructures de données et d’IA, le soutien à la transformation de la main-d’œuvre et la sensibilisation du public à l’importance de l’adoption de l’IA.

La collaboration de Cisco se concentrera sur l’accélération de la transformation numérique dans le secteur public, la promotion d’initiatives IA et le développement d’environnements de centres de données évolutifs et dotés d’IA.

L’accord-cadre de la SDAIA avec Boomi renforcera l’innovation au sein de l’écosystème IA du Royaume grâce au développement de centres de données IA alimentés par la technologie Boomi, ainsi qu’à des programmes plus larges d’échange de connaissances.

SambaNova soutiendra la SDAIA à travers des événements conjoints, des camps de formation, le partage de connaissances et des campagnes de sensibilisation pour renforcer les capacités nationales en IA et en données.

Par ailleurs, GitLab explorera des opportunités conjointes dans le développement des compétences, les projets d’innovation, les solutions commerciales et l’expansion de la portée mondiale des applications IA développées en Arabie saoudite.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


BNP Paribas rehausse ses objectifs de solidité financière et bondit en Bourse

Plus ce ratio est élevé, plus une banque est capable d'absorber, grâce à son capital, des pertes liées à des crédits non honorés ou à des investissements risqués. (AFP)
Plus ce ratio est élevé, plus une banque est capable d'absorber, grâce à son capital, des pertes liées à des crédits non honorés ou à des investissements risqués. (AFP)
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  • Une banque peut améliorer ce ratio soit en augmentant ses fonds propres, par exemple en mettant en réserve ses bénéfices ou en émettant des actions, soit en réduisant ses crédits et investissements risqués
  • Les exigences de CET1 applicables aux banques françaises se situent généralement entre 9% et 10%

PARIS: Le groupe bancaire français BNP Paribas gagnait plus de 5% jeudi matin à la Bourse de Paris, après avoir annoncé qu'il visait un ratio de solvabilité supérieur d'ici 2027.

Son titre prenait 5,79% vers 08H15 GMT, à 70,93 euros, en première place d'un CAC 40 en hausse de 1,13%. BNP Paribas table désormais sur un "ratio CET1 fixé à 13% à l'horizon 2027".

Plus ce ratio est élevé, plus une banque est capable d'absorber, grâce à son capital, des pertes liées à des crédits non honorés ou à des investissements risqués.

Une banque peut améliorer ce ratio soit en augmentant ses fonds propres, par exemple en mettant en réserve ses bénéfices ou en émettant des actions, soit en réduisant ses crédits et investissements risqués.

Les exigences de CET1 applicables aux banques françaises se situent généralement entre 9% et 10%.

BNP Paribas vise aussi une amélioration "continue" de son coefficient d'exploitation, un indicateur de rentabilité qui rapporte les coûts fixes au produit net bancaire (équivalent du chiffre d'affaires pour les banques).

L'objectif est qu'il atteigne 61% en 2026 et 58% en 2028, "un engagement fort de maîtrise des coûts", selon le communiqué.

BNP Paribas souhaite par ailleurs rester "à l'écoute de [ses] actionnaires grâce à une politique de distribution attractive et disciplinée", a expliqué Jean-Laurent Bonnafé, directeur général de BNP Paribas, cité dans un communiqué.

Le groupe a aussi annoncé qu'il lancerait courant novembre son programme de rachat d'actions de 1,15 milliard d'euros, dans le cadre de sa distribution du résultat de 2025.