Riyad et Pékin s'affirment comme des partenaires stratégiques globaux

Le président chinois, Xi Jinping, a été reçu par le roi Salmane. (Photo, SPA)
Le président chinois, Xi Jinping, a été reçu par le roi Salmane. (Photo, SPA)
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Publié le Samedi 10 décembre 2022

Riyad et Pékin s'affirment comme des partenaires stratégiques globaux

  • Accord sur l'harmonisation de la Vision 2030 avec l'initiative «la ceinture et la route» et la stimulation du commerce non pétrolier
  • L'approfondissement des relations avec la Chine ne signifie pas que le Royaume tourne le dos aux États-Unis, déclare le ministre saoudien des Affaires étrangères

RIYAD: L'Arabie saoudite et la Chine ont convenu de renforcer leurs relations stratégiques et d'élargir leurs relations commerciales lors de la visite d'État de trois jours du président chinois, Xi Jinping, au Royaume.

Xi et sa délégation se sont entretenus avec le roi Salmane, le prince héritier, Mohammed ben Salmane, et les responsables des principaux ministères, ce qui a donné lieu à 35 protocoles d'accord et à des transactions d'une valeur de 30 milliards de dollars américains (1 dollar américain = 0,95 euro).

Les deux parties ont signé un accord de partenariat stratégique global, s'engageant à soutenir les intérêts fondamentaux, la souveraineté et l'intégrité territoriale de l'autre partie et à défendre le principe de non-ingérence dans les affaires intérieures des États.

S'adressant aux médias à l'issue de la visite de Xi vendredi, le prince Faisal ben Farhane, ministre saoudien des Affaires étrangères, a indiqué que l'approfondissement des relations avec la Chine ne signifiait pas que le Royaume tournait le dos aux États-Unis et aux autres alliés occidentaux.

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La Chine est le premier partenaire commercial de l'Arabie saoudite. (Photo, SPA)

Il a affirmé: «L'objectif principal de l'Arabie saoudite est de savoir comment se développer économiquement, et grâce au travail avec les partenaires stratégiques, nous continuerons à trouver des moyens pour renforcer la coopération bilatérale avec tous.»

«Le Royaume est membre du G20 et a pour objectif de devenir l'une des 15 premières économies mondiales. Nous devons être ouverts à la coopération avec tout le monde.»

«Sans doute, la collaboration avec la deuxième plus grande économie du monde est essentielle à la croissance de l'Arabie saoudite, mais cela ne signifie pas que nous ne pouvons pas continuer à travailler avec la plus grande économie du monde.»

«Nous nous efforçons de travailler avec toutes les grandes économies et bien d'autres dans le monde. En travaillant avec divers partenaires, cela assurera la transition du Royaume vers un autre niveau de croissance qui ne peut se produire en déclinant les opportunités d'un pays à l'autre.»

«Nous devons être ouverts à la coopération avec les autres et cela a été la philosophie du Royaume afin d’atteindre des intérêts mutuels.»

Au cours du sommet, l’Arabie saoudite a réaffirmé son adhésion au principe d'une seule Chine, tandis que la Chine a exprimé son soutien au Royaume dans le maintien de la sécurité et de la stabilité et a rejeté toute attaque visant les civils, les infrastructures civiles, les territoires et les intérêts saoudiens.

«Nous cherchons à renforcer notre partenariat stratégique global avec la Chine et à trouver des moyens de le développer au-delà du commerce», a signalé le prince Faisal. «Ce partenariat soutient le développement du Royaume et sert ses intérêts.»

En ce qui concerne les questions régionales et internationales, les deux parties ont salué le premier sommet Chine-CCG ainsi que le premier sommet arabo-chinois, qui se sont également tenus à Riyad vendredi.

Les deux pays ont souligné l'importance de renforcer la coopération par le biais du comité conjoint saoudo-chinois de haut niveau afin d'atteindre des objectifs communs, de renforcer la coopération et d'intensifier la communication entre les secteurs public et privé.

Les deux parties ont souligné l'importance de la stabilité des marchés pétroliers mondiaux et ont convenu d'explorer des opportunités d'investissement communes dans le domaine de la pétrochimie et de renforcer la coopération dans le domaine de l'énergie solaire, éolienne et d'autres sources d'énergie renouvelable.

Les deux délégations ont également convenu de coopérer dans les domaines des hydrocarbures, de l'efficacité énergétique, de la localisation des composants du secteur énergétique et des chaînes d'approvisionnement, en plus des utilisations pacifiques de l'énergie nucléaire et du développement de technologies telles que l'intelligence artificielle.

En particulier, les délégations ont souligné l'importance d'approfondir la coopération quant à l'initiative intitulée «la ceinture et la route», notamment la participation à des partenariats dans le domaine de l'énergie et de l'investissement et l'utilisation de la position du Royaume en tant que centre régional.

Les deux parties ont salué la signature du «plan d'harmonisation» entre le programme de réforme sociale et de diversification économique, la Vision 2030 du Royaume et l'initiative chinoise «la ceinture et la route».

Xi a annoncé le lancement de l'initiative «la ceinture et la route» — anciennement intitulée «une ceinture, une route» — en 2013.

L'initiative vise à relier les marchés et les fabricants d'Asie de l'Est à ceux d'Europe via un vaste réseau logistique et numérique traversant l'Asie centrale, le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord, dans une régénération moderne de l'ancienne route de la soie.

L'initiative chinoise «la ceinture et la route» et la Vision 2030 de l'Arabie saoudite lancée en 2016 par le prince héritier saoudien partagent le même objectif lié à la stimulation de l'interconnectivité par la coopération dans les domaines de l'énergie, du commerce, de l'investissement et de la technologie.

En Bref

  • Les responsables saoudiens et chinois ont signé un accord de partenariat stratégique global, s'engageant à soutenir les intérêts fondamentaux de chacun des deux pays.

 

  • Le prince Faisal ben Farhane, ministre saoudien des Affaires étrangères, a déclaré que l'approfondissement des relations avec la Chine ne signifiait pas que le Royaume tourne le dos aux États-Unis.

 

  • Le président chinois, Xi Jinping, et sa délégation ont participé vendredi à des sommets avec des représentants du CCG et des chefs d'État arabes.

La Chine est le premier partenaire commercial de l'Arabie saoudite. Selon l'agence de presse Reuters, le commerce bilatéral entre les deux pays a atteint 87,3 milliards de dollars en 2021, les exportations chinoises vers le Royaume atteignant 30,3 milliards de dollars et les importations chinoises en provenance d'Arabie saoudite s'élevant à 57 milliards de dollars.

Les principales exportations de la Chine vers l'Arabie saoudite sont le textile, les appareils électroniques et les machines, tandis que la Chine importe principalement du pétrole brut et des plastiques primaires du Royaume. Au cours des 10 premiers mois de 2022, les importations chinoises de pétrole saoudien ont atteint 1,77 million de barils par jour, pour une valeur de 55,5 milliards de dollars, selon les données des douanes chinoises.

Les deux délégations ont convenu d'augmenter le volume des échanges non pétroliers, d'accroître les investissements conjoints, d’amplifier la capacité des compagnies aériennes commerciales, de stimuler les investissements du secteur privé et de créer un environnement d'investissement attrayant.

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Les deux parties ont souligné l'importance de renforcer la coopération par le biais du comité conjoint saoudo-chinois de haut niveau afin d'atteindre des objectifs communs. (Photo, SPA)

Elles ont notamment convenu d'approfondir la coopération dans l'industrie automobile, les chaînes d'approvisionnement, la logistique, le dessalement de l'eau, les infrastructures, l'industrie manufacturière, l'exploitation minière et le secteur financier.

La délégation saoudienne a déclaré qu'elle espérait attirer l'expertise chinoise pour participer aux prochains mégaprojets du Royaume et que les entreprises chinoises ouvriraient des sièges régionaux en Arabie saoudite.

Les deux délégations se sont également félicitées des accords concernant l'énergie hydrogène, le système judiciaire, l'enseignement en langue chinoise, le logement, les investissements directs, la radio et la télévision, l'économie numérique, le développement économique, la standardisation, les médias d'information, l'administration fiscale et la lutte contre la corruption.

La délégation chinoise a également exprimé sa volonté d'approfondir la coopération en matière d'investissement dans l'économie numérique et le développement vert, de renforcer la coopération en matière de commerce électronique et d'explorer les moyens de coopération économique et commerciale conjointe avec l'Afrique.

En ce qui concerne le défi commun du changement climatique, la délégation chinoise a salué l'Initiative verte saoudienne et l'Initiative verte du Moyen-Orient du Royaume et a exprimé son soutien à l'application par l'Arabie saoudite de l'économie circulaire du carbone.

Les deux parties ont également convenu d'exhorter les pays développés à prendre au sérieux leurs responsabilités historiques, en s'acquittant de leurs obligations en réduisant fortement leurs émissions avant la date butoir. De même, elles ont convenu d’aider concrètement les pays en développement par un soutien financier, technique et de renforcement des capacités.

Les deux délégations ont souligné la nécessité de renforcer le partenariat dans les domaines des communications, de l'économie numérique, de l'innovation et de l'espace, afin de mettre en place une meilleure infrastructure numérique pour les générations futures dans les deux pays.

Elles ont également souligné l'importance de renforcer la coopération et l'action conjointe pour développer les secteurs du transport aérien et maritime, les modes de transport modernes et les chemins de fer et pour accélérer l'achèvement des études sur le projet de pont terrestre saoudien.

Les deux délégations ont affirmé leur détermination à développer la coopération en matière de défense dans le but de lutter contre le crime organisé, le terrorisme et la cybercriminalité.

Elles ont également insisté sur l'importance de renforcer la coopération en matière de santé pour lutter contre les menaces sanitaires et les pandémies actuelles et futures et ont convenu de développer la coopération dans les domaines du patrimoine, de la culture, du sport, du tourisme et de la science.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


L'organisation humanitaire controversée GHF, dit avoir terminé sa mission à Gaza

L'organisation humanitaire GHF, soutenue par Israël et les Etats-Unis et vivement critiquée par l'ONU, a annoncé lundi avoir terminé sa mission à Gaza, se prévalant d'y avoir fourni des dizaines de millions de repas gratuits "sans détournement" de l'aide par le Hamas. (AFP)
L'organisation humanitaire GHF, soutenue par Israël et les Etats-Unis et vivement critiquée par l'ONU, a annoncé lundi avoir terminé sa mission à Gaza, se prévalant d'y avoir fourni des dizaines de millions de repas gratuits "sans détournement" de l'aide par le Hamas. (AFP)
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  • L'organisme au financement opaque, déployé en mai dans le territoire palestinien en guerre, après deux mois de blocus humanitaire total imposé par Israël, a été vivement critiquée par la communauté humanitaire internationale
  • Ses distributions de nourriture ont été entachées par des violences qui ont tué plus de 1.000 personnes à proximité de ses sites, selon le bureau des droits de l'Homme de l'ONU

JERUSALEM: L'organisation humanitaire GHF, soutenue par Israël et les Etats-Unis et vivement critiquée par l'ONU, a annoncé lundi avoir terminé sa mission à Gaza, se prévalant d'y avoir fourni des dizaines de millions de repas gratuits "sans détournement" de l'aide par le Hamas.

La Gaza Humanitaran Foundation (GHF) a annoncé dans un communiqué "la fin réussie de sa mission d'urgence à Gaza après avoir distribué plus de 187 millions de repas gratuits directement aux civils dans le cadre d'une opération humanitaire record qui a permis de garantir que l'aide alimentaire parvienne aux familles palestiniennes en toute sécurité et sans détournement par le Hamas ou d'autres entités".

L'organisme au financement opaque, déployé en mai dans le territoire palestinien en guerre, après deux mois de blocus humanitaire total imposé par Israël, a été vivement critiquée par la communauté humanitaire internationale.

Ses distributions de nourriture ont été entachées par des violences qui ont tué plus de 1.000 personnes à proximité de ses sites, selon le bureau des droits de l'Homme de l'ONU.

L'ONG a rejeté les critiques et sa responsabilité dans ces violences.

"A un moment critique, nous sommes fiers d’avoir été la seule opération d'aide capable de fournir de manière fiable et sûre des repas gratuits directement au peuple palestinien de Gaza, à grande échelle et sans détournement, s'est félicité son directeur John Acree, cité par le communiqué.

"Le modèle de la GHF, dans lequel le Hamas ne pouvait plus piller et tirer profit du détournement de l'aide, a joué un rôle majeur pour amener le Hamas à la table des négociations et parvenir à un cessez-le-feu. Nous les remercions pour tout ce qu’ils ont apporté aux Gazaouis", a salué sur X le porte-parole du département d'Etat, Tommy Pigott.

 

 


Israël: des généraux limogés, d'autres sanctionnés, en lien avec le 7-Octobre

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  • Ces mesures prises par le chef d'état-major Eyal Zamir ont provoqué un regain de tension avec le ministre israélien de la Défense Israël Katz
  • Le limogeage de généraux de premier plan le 7-Octobre met en exergue la façon dont le Premier ministre Benjamin Netanyahu a réussi jusque-là à esquiver ses torts dans le fiasco du 7-Octobre

JERUSALEM: L'armée israélienne a annoncé le limogeage de trois généraux à des postes clés le 7 octobre 2023 et des sanctions disciplinaires contre plusieurs autres à cause de leur échec à empêcher ce jour-là l'attaque la plus meurtrière qu'ait connue Israël.

Ces mesures prises par le chef d'état-major Eyal Zamir ont provoqué un regain de tension avec le ministre israélien de la Défense Israël Katz, qui a annoncé lundi avoir demandé un "examen approfondi" du rapport, commandité par l'armée, qui leur a servi de base pour prendre ces mesures.

Le limogeage de généraux de premier plan le 7-Octobre met en exergue la façon dont le Premier ministre Benjamin Netanyahu a réussi jusque-là à esquiver ses torts dans le fiasco du 7-Octobre, malgré les appels de l'opinion publique et de l'opposition à la formation d'une commission d'enquête nationale.

M. Netanyahu a répété que les fautes de la direction politique ayant mené au 7-Octobre ne pourraient être examinées qu'après la fin de la guerre.

Le général de division Aharon Haliva, à l'époque chef des renseignements militaires, le général de division Oded Basyuk, alors chef des opérations, et le général de division Yaron Finkelman, qui commandait ce jour-là depuis peu la région militaire sud d'Israël, vont être déchargés "du cadre de réserve et ne (feront) plus partie" de l'armée, indique un communiqué de l'armée publié dimanche soir.

Le général Haliva a été le premier responsable militaire à démissionner, en 2024, en invoquant sa responsabilité pour le drame du 7-Octobre. Le général Finkelman a lui aussi démissionné en invoquant les mêmes motifs. Quant au général Basyuk, il a pris sa retraite après la guerre de 12 jours lancée par Israël contre l'Iran en juin.

Selon le communiqué de l'armée, les trois hommes portent chacun une responsabilité personnelle dans l'échec de l'institution militaire à anticiper et à repousser l'attaque lancée par le mouvement islamiste palestinien Hamas à partir de la bande de Gaza sur le sud d'Israël.

"Défaillance systémique" 

Ces mesures, prises par Eyal Zamir, font suite à la publication au début du mois du rapport d'un comité d'experts qu'il avait mandaté et qui a marqué la fin des enquêtes au sein de l'armée sur les défaillances ayant mené au drame du 7-Octobre.

Le rapport concluait à une "défaillance systémique et organisationnelle de longue date" au sein de l'appareil militaire.

Déplorant des "processus de prise de décision et de déploiement des forces déficients dans la nuit du 7 octobre 2023", le comité pointait des échecs au niveau de l'état-major général, de la direction des opérations, de la direction du renseignement militaire, du Commandement Sud, mais aussi de l'armée de l'Air et de la Marine.

Israël Katz, dont l'inimitié avec le chef d'état-major est connue, a réagi lundi à l'annonce des limogeages et mesures disciplinaires  en annonçant "un examen en profondeur" de ce rapport.

"A la suite des mesures annoncées hier par le chef d'état-major concernant la responsabilité des commandants dans les événements du 7 octobre, j'ai décidé de charger le contrôleur de l'établissement de la Défense, le général de division (à la retraite) Yaïr Wolansky, d'examiner en profondeur le rapport présenté par l'équipe dirigée par le général de division (à la retraite) Sami Turgeman", a annoncé le ministre de la Défense dans un communiqué.

Joute 

Il a précisé que le "contrôleur sera également invité à formuler une recommandation concernant des critères équitables pour l'élaboration de conclusions personnelles", faisant allusion aux limogeages et mesures disciplinaires annoncés par Eyal Zamir.

Selon les médias israéliens, il s'agit d'une énième joute dans le bras de fer qui oppose les deux hommes, M. Katz ayant cette fois-ci été ulcéré de ne pas avoir été prévenu directement des mesures qu'il a apprises par les médias.

En outre, le chef d'état-major s'est publiquement dissocié du gouvernement, notamment en appelant le 10 novembre à une "enquête systémique" sur le 7-Octobre.

Malgré les pressions de l'opinion publique et les demandes de l'opposition, le gouvernement israélien refuse l'établissement d'une commission nationale d'enquête dans l'échec des autorités à prévenir l'attaque.

Outre les trois généraux limogés, l'armée a annoncé des sanctions disciplinaires contre le général de division aérienne Tomer Bar et le vice-amiral David Saar Salma, respectivement à la tête de l'armée de l'Air et de la Marine.

Sont également visés par des mesures disciplinaires quatre autres généraux et quatre officiers supérieurs.

Le général Herzi Halévy, qui était à la tête de l'armée le 7 octobre 2023, a annoncé sa démission en janvier et quitté ses fonctions en mars. Il n'est pas concerné par les mesures.

 


Le Hezbollah enterre son chef militaire tué dans un bombardement israélien

Le Hezbollah a porté en terre lundi son chef militaire Haitham Ali Tabatabai, tué la veille par Israël dans la banlieue sud de Beyrouth, une attaque qui accentue encore la pression sur le Liban pour désarmer le mouvement pro-iranien. (AFP)
Le Hezbollah a porté en terre lundi son chef militaire Haitham Ali Tabatabai, tué la veille par Israël dans la banlieue sud de Beyrouth, une attaque qui accentue encore la pression sur le Liban pour désarmer le mouvement pro-iranien. (AFP)
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  • A l'appel de la formation chiite, des centaines de ses partisans sont descendus dans son fief de la banlieue sud de Beyrouth, pour les funérailles de celui que le mouvement a qualifié de "grand leader"
  • Jusque-là largement inconnu du grand public au Liban, il est le plus haut responsable du Hezbollah tué depuis la fin, il y a un an, de la dernière guerre qui a opposé le mouvement à Israël

BEYROUTH: Le Hezbollah a porté en terre lundi son chef militaire Haitham Ali Tabatabai, tué la veille par Israël dans la banlieue sud de Beyrouth, une attaque qui accentue encore la pression sur le Liban pour désarmer le mouvement pro-iranien.

A l'appel de la formation chiite, des centaines de ses partisans sont descendus dans son fief de la banlieue sud de Beyrouth, pour les funérailles de celui que le mouvement a qualifié de "grand leader".

Jusque-là largement inconnu du grand public au Liban, il est le plus haut responsable du Hezbollah tué depuis la fin, il y a un an, de la dernière guerre qui a opposé le mouvement à Israël.

Dans cette banlieue densément peuplée de la capitale, des membres du Hezbollah en treillis ont porté son cercueil et ceux d'autres compagnons tués dans la frappe ciblée de dimanche, recouverts des drapeaux jaunes du groupe, au son de chants religieux, a rapporté un correspondant de l'AFP.

La foule, d'où émergeaient des portraits des dirigeants du Hezbollah et du guide suprême iranien, l'ayatollah Ali Khamenei, a scandé des slogans contre Israël et les États-Unis.

Cet assassinat est intervenu alors qu'Israël a intensifié ces derniers temps ses frappes sur le territoire libanais malgré le cessez-le-feu, disant viser des membres ou infrastructures du Hezbollah qu'il accuse de se réarmer, ce que le mouvement dément.

"Voie diplomatique" 

Le gouvernement libanais est sous forte pression de Washington pour contraindre le Hezbollah à rendre ses armes conformément à l'accord de cessez-le-feu du 27 novembre 2024, ce que le mouvement islamiste refuse jusqu'à présent.

Après l'assassinat de Haitham Ali Tabatabai, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a réaffirmé qu'Israël "ne permettra(it) pas au Hezbollah de reconstruire son pouvoir" et appelé Beyrouth  à "respecter son engagement" à le désarmer.

A Paris, la diplomatie française a appelé à la "retenue" après la frappe israélienne qui fait "peser un risque d'escalade dans un contexte déjà marqué par de fortes tensions".

Les options du Hezbollah apparaissent désormais limitées: le mouvement est sorti très affaibli du conflit qu'il avait enclenché avec Israël après le début de la guerre à Gaza, et a perdu sa voie d'approvisionnement via la Syrie depuis la chute de Bachar al-Assad en décembre dernier.

Washington presse également Beyrouth de lui couper les financements iraniens. Téhéran, principal allié du Hezbollah, a dénoncé lundi un "lâche assassinat".

Il existe aujourd'hui "deux tendances au sein du groupe", explique à l'AFP une source proche du Hezbollah, sous couvert d'anonymat. "Ceux qui veulent répondre à l'assassinat et ceux qui préfèrent s'abstenir, et pour l'instant, la direction du groupe préfère la voie diplomatique".

"Les options du Hezbollah sont très limitées", affirme à l'AFP Nicholas Blanford, analyste à l'Atlantic Council. "Sa base réclame vengeance, mais si le Hezbollah répond directement (...) Israël ripostera très durement et personne au Liban ne remerciera le Hezbollah pour ça".

Selon lui, la frappe sur le chef militaire du Hezbollah "montre qu'Israël peut toujours localiser et cibler les hauts responsables (du mouvement) malgré toutes les mesures de protection".

"Rejeter les pressions" 

L'assassinat de Haitham Ali Tabatabai visait à "effrayer et affaiblir" le Hezbollah pour qu'il "se rende et se soumette, mais cet objectif ne sera jamais atteint", a lancé lors des funérailles un haut responsable du mouvement, Ali Damuch.

Israël était "inquiet de la réponse possible du Hezbollah, et doit le rester", a-t-il ajouté, exhortant les autorités libanaises à "affronter l'agression par tous les moyens (...) et à rejeter les pressions (...) à se conformer aux diktats américains et aux conditions israéliennes".

En vertu de l'accord de cessez-le-feu, l'armée libanaise doit démanteler la présence militaire du Hezbollah sur une bande d'une trentaine de kms entre la frontière avec Israël et le fleuve Litani, plus au nord.

L'armée a soumis un plan au gouvernement, dans lequel elle s'engage à accomplir cette tâche titanesque, avant de procéder par étapes sur le reste du territoire libanais. Mais les Etats-Unis et Israël accusent les autorités libanaises de tarder, face à la ferme opposition du Hezbollah.

Ce dernier invoque notamment le maintien par Israël de cinq postes dans le sud du Liban, dont l'accord de cessez-le-feu stipule pourtant que l'armée israélienne doit se retirer.

Un responsable militaire libanais a affirmé à l'AFP la semaine dernière que les demandes américaines et israéliennes d'un désarmement d'ici fin 2025 étaient "impossibles" à satisfaire, faute de personnel et d'équipement, et au vu du risque de confrontations avec les communautés locales soutenant le Hezbollah.