Retraites: la réforme bientôt livrée, et déjà combattue

La réforme des retraites est un projet au long cours d'Emmanuel Macron, entamé durant son premier quinquennat au prix d'une forte opposition puis suspendu en raison du Covid et remis en chantier sous une forme remaniée. (AFP).
La réforme des retraites est un projet au long cours d'Emmanuel Macron, entamé durant son premier quinquennat au prix d'une forte opposition puis suspendu en raison du Covid et remis en chantier sous une forme remaniée. (AFP).
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Publié le Dimanche 11 décembre 2022

Retraites: la réforme bientôt livrée, et déjà combattue

  • Elisabeth Borne va enfin présenter --probablement jeudi après-midi-- les grandes lignes de la réforme des retraites, pierre angulaire du second quinquennat d'Emmanuel Macron
  • L'exécutif a déjà commencé à préparer les esprits, multipliant les entretiens à la presse, les réunions de travail à Matignon et les dîners au sommet à l'Elysée

PARIS : A quelques jours des vacances de Noël, le gouvernement doit dévoiler une réforme des retraites très contestée, que ses opposants se préparent à bloquer par tous les moyens, de la rue au Parlement.

Le cadeau ne fera pas beaucoup d'heureux. Après une courte concertation, Elisabeth Borne va enfin présenter --probablement jeudi après-midi-- les grandes lignes de la réforme des retraites, pierre angulaire du second quinquennat d'Emmanuel Macron.

L'exécutif a déjà commencé à préparer les esprits, multipliant les entretiens à la presse, les réunions de travail à Matignon et les dîners au sommet à l'Elysée. Mais les annonces de la Première ministre sont courues d'avance, balisées par la promesse présidentielle de repousser l'âge légal de 62 à 64 voire 65 ans. Cette dernière borne tient la corde.

"C'est le seul levier que nous avons", affirme le chef de l'Etat, qui exclut depuis le départ d'augmenter les cotisations ou de réduire les pensions. Cette mesure, assortie ou non d'une hausse de la durée de cotisation, risque de reléguer au second plan d'éventuelles contreparties sur la pénibilité ou les petites pensions.

D'autant que le gouvernement veut aller vite: un projet de loi en janvier, un vote au printemps, une entrée en vigueur à l'été, avec la "génération 1961" pour essuyer les plâtres. Comme une urgence, justifiée par le retour durable de déficits massifs, qui dépasseraient 12 milliards en 2027.

Impossible pour M. Macron de laisser un tel héritage à son successeur, surtout après l'échec de son projet de "système universel de retraite", stoppé net par le Covid. Le temps lui est donc compté, avant les élections européennes de 2024 qui sonneront la mi-temps de son mandat.

Réformer les retraites, le projet au long cours d'Emmanuel Macron

La réforme des retraites est un projet au long cours d'Emmanuel Macron, entamé durant son premier quinquennat au prix d'une forte opposition puis suspendu en raison du Covid et remis en chantier sous une forme remaniée.

Système par points

Annoncée par Emmanuel Macron lors de sa campagne présidentielle de 2017, une première tentative de réforme vise à remplacer les 42 régimes existants (privés, spéciaux, des fonctionnaires etc) pour créer un système de retraite universel par points.

En 2019, anticipant un déficit futur, l'exécutif prévient qu'il faudra allonger la durée du travail.

Jean-Paul Delevoye, nommé haut-commissaire à la réforme des retraites, consulte syndicats et patronat et préconise un "âge d'équilibre" à 64 ans pour une retraite à taux plein.

Grèves et âge pivot

L'inquiétude monte dans certaines branches: le 13 septembre 2019 grève à la RATP puis, en décembre, deux journées nationales d'action très suivies.

La grève devient reconductible à la SNCF et la RATP et atteint des taux records chez les enseignants.

Le 11 décembre, le Premier ministre Edouard Philippe présente son projet: le système universel par points s'appliquera à partir de la génération 1975, voire celles de 1980 ou 1985 pour certains fonctionnaires et agents de régimes spéciaux.

Un système de bonus-malus incitera à travailler plus longtemps avec un "âge d'équilibre" fixé à 64 ans en 2027. Cet "âge pivot" fait basculer la CFDT dans le camp des opposants.

Recours au «49-3»

Une troisième journée nationale d'action est organisée le 17 décembre à l'appel de l'ensemble des syndicats et les transports sont perturbés pendant les congés de fin d'année.

Des concessions sont accordées à une dizaine de professions (policiers, pilotes de ligne, marins, danseurs de l'Opéra...)

Le 11 janvier 2020, Edouard Philippe se déclare "disposé à retirer", sous conditions, l'âge pivot de 64 ans.

La mobilisation se poursuit dans les ports, raffineries, à la Banque de France, à l'Opéra de Paris, chez les avocats.

La grève illimitée est suspendue à partir du 20 janvier à la RATP. Le trafic redevient normal à la SNCF.

Le projet de loi fait l'objet de 41 000 amendements. Le gouvernement engage la procédure de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution: le texte est adopté en première lecture dans la nuit du 3 au 4 mars.

Suspension en raison du Covid

Le 16 mars 2020, Emmanuel Macron annonce la suspension de "toutes les réformes en cours" dont celle "des retraites", en raison de la pandémie de Covid-19.

Le 2 juillet, il dit qu'il n'y aura pas d'abandon de la réforme mais une "transformation" après concertation.

Le 13 juillet 2021, il assure que la réforme sera engagée "dès que les conditions sanitaires seront réunies". En novembre, il repousse la réforme à 2022.

Age légal à 65 ans

Fin 2021, Emmanuel Macron réitère sa volonté de réformer les retraites, mais évoque "un système simplifié avec trois grands régimes, un pour la fonction publique, un pour les salariés, un pour les indépendants".

Réélu en 2022 après s'être engagé durant la campagne à "décaler l'âge de départ légal (de départ à la retraite, ndlr) jusqu'à 65 ans" contre 62 actuellement, il appelle le 14 juillet à "des compromis responsables" en vue d'une entrée en vigueur de la réforme à l'été 2023.

Concertations

Face à l'opposition virulente des syndicats devant un possible passage en force parlementaire, Emmanuel Macron demande le 22 septembre au gouvernement de "trouver la bonne manoeuvre" pour une réforme "apaisée".

Début octobre, la Première ministre Elisabeth Borne engage la concertation avec les partenaires sociaux pour, espère-t-elle, une adoption "avant la fin de l'hiver".

Le 26 octobre, le président se dit "ouvert" à un âge légal de départ à 64 ans, au lieu de 65 ans.

Mais il insiste le 3 décembre: "travailler plus longtemps" est "le seul levier" pour faire face aux "besoins de financement massifs".

Malgré la menace d'une mobilisation syndicale dès janvier 2023, l'exécutif maintient son projet qui devrait être dévoilé autour du 15 décembre.

Tenté de passer en force au début de l'automne via le budget de la Sécu, il s'est résolu à patienter trois mois de plus. A peine assez pour consulter les partenaires sociaux, jouer l'ouverture et constater les désaccords de fond.

«Ils sont obstinés»

Car aucun syndicat n'accepte cette réforme, pas même la CFDT qui a durci sa position sur le sujet lors de son dernier congrès en juin. Depuis, son leader Laurent Berger martèle son opposition à toute "mesure d'âge" et met en garde contre une "réforme dure" qui provoquerait une "réaction sociale tout aussi déterminée".

Son homologue de la CGT, Philippe Martinez, enjoint aussi l'exécutif à "prendre ça au sérieux", mais sans se faire d'illusion: "Ils sont obstinés". Ses troupes savent aussi se montrer coriaces, comme l'ont rappelé les récents blocages de raffineries.

Sur fond d'inflation record et de revendications salariales, les coups de semonce ont également touché les industries électriques et gazières, ainsi que la RATP, dont les régimes spéciaux sont dans le collimateur du gouvernement.

De simples avertissements, qui réveillent le spectre du long conflit social de l'hiver 2019-2020, auquel s'étaient ralliés cheminots, routiers et dockers, entre autres. Mais les stratèges syndicaux attendent le bon moment pour en découdre.

Depuis 30 ans une série de grandes réformes des retraites

La France a connu depuis une trentaine d'années une série de grandes réformes de ses systèmes de retraite pour répondre au vieillissement de la population et à la dégradation financière de ses caisses.

Un projet de réforme voulu par Emmanuel Macron depuis son premier quinquennat, visant à l'origine à unifier les régimes et instaurer un système par points, a été suspendu en mars 2020 en raison de la crise sanitaire. Il a été remis en chantier sous une forme remaniée en 2022, prévoyant notamment de retarder l'âge légal de départ à la retraite.

Rappel des principales réformes qui ont précédé:

1991: Livre blanc

La publication en 1991 du Livre blanc sur les retraites marque un tournant: il met en évidence les difficultés financières à venir des régimes et préconise d'allonger la durée de cotisation de 150 à 168 trimestres pour bénéficier d'une retraite à taux plein. Les réformes qui suivront viseront à réduire les déficits des caisses ou à revoir leurs modalités de financement.

1993: réforme Balladur

En 1993, sous la présidence de François Mitterrand, le Premier ministre de cohabitation Edouard Balladur décide de porter progressivement de 37,5 ans à 40 ans (de 150 à 165 trimestres) la durée de cotisation dans le privé pour une retraite à taux plein.

Le montant des retraites est désormais calculé sur les 25 meilleures années de la vie active au lieu des 10 meilleures. Mise en oeuvre au coeur de l'été, la réforme provoque peu de remous.

1995: plan Juppé

En novembre 1995, sous la présidence de Jacques Chirac, le Premier ministre Alain Juppé présente un plan de redressement de la Sécurité sociale comportant une réforme des retraites des agents de l'État et des services publics.

Les fonctionnaires observent plusieurs semaines de grève. Trains et métros sont paralysés pendant plus de trois semaines. Alain Juppé renonce aux mesures sur les retraites mais maintient le reste de son plan.

2003: réforme Fillon

La réforme de François Fillon, ministre des Affaires sociales du gouvernement Raffarin, complète celle de Balladur, portant la durée de cotisation à 40 ans pour les fonctionnaires.

Elle fixe les règles d'allongement futur des durées de cotisation pour le privé et la fonction publique, incite à rester dans l'emploi après 60 ans, créant une surcote et limitant l'accès aux pré-retraites.

Négociée avec les syndicats, la réforme provoque grèves et manifestations. Elle n'est acceptée que par la CFDT.

2007: régimes spéciaux

La  première réforme des retraites du quinquennat de Nicolas Sarkozy concerne les régimes spécifiques des sociétés de service public (EDF, GDF, SNCF, RATP, Banque de France, etc.) ainsi que les professions à statut particulier (clercs de notaires, élus et employés parlementaires).

Pour ces salariés, la durée de cotisation passe à 40 ans. La réforme est menée avec diplomatie pour ne pas répéter l'échec de 1995.

2010: réforme Woerth

Du nom d'Éric Woerth, ministre du Travail, cette réforme met fin au principe de la retraite à 60 ans, héritage de François Mitterrand. Très impopulaire, la seconde réforme des retraites de la présidence Sarkozy provoque manifestations massives et blocages.

L'âge légal de départ est reculé de deux ans, passant progressivement à 62 ans. Il en va de même pour l'âge du départ à taux plein (67 ans en 2022).

La réforme étend le dispositif carrières longues à ceux qui ont commencé à travailler à 17 ans, permettant des départs anticipés.

2014: réforme Touraine

Portée par la ministre des Affaires sociales Marisol Touraine, sous la présidence de François Hollande, cette réforme inscrit dans le temps le principe de l'allongement de la durée de cotisation pour l'obtention d'une retraite à taux plein.

Cette durée est relevée d'un trimestre tous les trois ans de 2020 à 2035 pour atteindre 172 trimestres (43 ans) pour les générations 1973 et suivantes.

Un compte personnel de pénibilité est instauré pour permettre à ceux qui exercent des métiers difficiles d'anticiper leur départ.

Retraites: «le jeu n'est pas fait» sur l'âge légal à 65 ans, assure Braun-Pivet

La présidente de l'Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet a assuré dimanche que "le jeu n'est pas fait" sur un âge légal de la retraite à 65 ans, alors qu'Elisabeth Borne doit présenter son projet de réforme jeudi et le Parlement s'en emparer début 2023.

65 ans, comme l'avait annoncé Emmanuel Macron, ou 64 ans? "Cela pourra, je pense, bouger si l'Assemblée veut aller dans ce sens-là et que le gouvernement y est prêt", a déclaré la députée Renaissance à France Inter-franceinfo-Le Monde.

"Je suis tout à fait ouverte à des +bougés+, pour autant que les objectifs de la réforme puissent être atteints, c'est-à-dire un équilibre financier et de la justice sociale", a-t-elle ajouté, en insistant: "le jeu n'est pas fait".

Emmanuel Macron avait défendu pendant la campagne présidentielle un report de l'âge légal de 62 à 65 ans, avant d'évoquer une fois réélu un recul à 64 ans couplé à une augmentation de la durée de cotisation. Le report à 65 ans est désormais la piste privilégiée, selon des responsables de la majorité qui ont participé mercredi soir à un dîner à l'Elysée. Mme Braun-Pivet n'y a pas participé car elle fêtait son anniversaire en famille.

"On a fait campagne pendant des semaines autour de l'âge de 65 ans, donc il ne serait pas étonnant qu'on rentre dans la mêlée avec un âge de 65 ans donc", a convenu le porte-parole du gouvernement Olivier Véran, dimanche auprès de RTL-Le Figaro-LCI. Mais "nous sommes dans la concertation permanente", a-t-il précisé.

La Première ministre doit recevoir jusqu'en milieu de semaine prochaine les patrons des groupes parlementaires, avant de présenter les contours du projet de réforme jeudi, date confirmée par M. Véran.

Si aucune majorité ne se dégage début 2023 à l'Assemblée nationale en faveur de la réforme, le gouvernement pourra toujours recourir à l'arme constitutionnelle du 49.3 pour la faire passer sans vote.

Mme Braun-Pivet s'est dite "convaincue qu'il y a un chemin, mais le chemin n'est pas trouvé à l'avance" pour éviter ce recours au 49.3 et parvenir à "une réforme consensuelle": "c'est à ça que servent la concertation et le débat parlementaire".

"L'Assemblée nationale est à même d'être le lieu par excellence du débat démocratique", qui est "de nature à apaiser le climat social", veut-elle croire.

Les secrétaires généraux de la CFDT et de la CGT, Laurent Berger et Philippe Martinez, ont déjà promis une mobilisation sociale "déterminée" en cas de report de l'âge de départ.

Les huit centrales nationales (CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC, Unsa, Solidaires et FSU) ont prévu de se réunir dans la foulée des annonces de Mme Borne, pour caler leur riposte autour de la date de présentation du projet de loi en Conseil des ministres - peut-être le 11 janvier.

La suite se jouera autant dans la rue qu'à l'Assemblée, où le texte est promis à un chemin de croix. La cheffe des députés LFI, Mathilde Panot, jure de le "combattre pied à pied" avec une pluie d'amendements. A l'autre extrémité de l'hémicycle, Marine Le Pen a fait connaître son "opposition absolument totale sur le fond" de la réforme.

Les chefs des différents groupes parlementaires seront à nouveau reçus à Matignon entre lundi et jeudi matin. Mais à moins d'une improbable alliance avec Les Républicains, le recours au 49.3 semble inéluctable. Une option que la majorité soutient d'avance, à l'instar de la patronne des députés Renaissance, Aurore Bergé, qui juge que ce scénario "ne doit pas être tabou".


Aude: météo favorable pour les pompiers qui luttent encore contre le feu

Les pompiers, qui ont réussi à fixer jeudi soir l'incendie géant dans l'Aude, peuvent compter vendredi sur une météo favorable pour poursuivre leur combat contre les flammes qu'ils ne pourront toutefois éteindre totalement que dans quelques jours. (AFP)
Les pompiers, qui ont réussi à fixer jeudi soir l'incendie géant dans l'Aude, peuvent compter vendredi sur une météo favorable pour poursuivre leur combat contre les flammes qu'ils ne pourront toutefois éteindre totalement que dans quelques jours. (AFP)
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  • "Le crachin qui tombe faiblement ce matin est aussi le bienvenu pour (...) progresser du feu fixé vers le feu maîtrisé", en s'attaquant aux reprises et aux "points chauds"
  • Cependant, "le ciel bas", qui rend plus facile le travail des pompiers au sol, est "défavorable pour les moyens aériens", a déclaré de son côté le colonel Christophe Magny, à la tête des opérations

SAINT-LAURENT-DE-LA-CABERISSE: Les pompiers, qui ont réussi à fixer jeudi soir l'incendie géant dans l'Aude, peuvent compter vendredi sur une météo favorable pour poursuivre leur combat contre les flammes qu'ils ne pourront toutefois éteindre totalement que dans quelques jours.

"L'évolution de la météo nous est favorable", a déclaré vendredi matin à la presse le sous-préfet de Narbonne, Rémi Recio, soulignant "un affaiblissement du vent" et une humidité qui remonte, favorisant le travail des pompiers.

"Le crachin qui tombe faiblement ce matin est aussi le bienvenu pour (...) progresser du feu fixé vers le feu maîtrisé", en s'attaquant aux reprises et aux "points chauds", a-t-il encore précisé devant le poste de commandement de Saint-Laurent-de-la-Cabrerisse, à une trentaine de kilomètres de Narbonne.

Cependant, "le ciel bas", qui rend plus facile le travail des pompiers au sol, est "défavorable pour les moyens aériens", a déclaré de son côté le colonel Christophe Magny, à la tête des opérations.

Cet incendie, le plus important depuis au moins 50 ans sur le pourtour méditerranéen français, a parcouru 17.000 hectares de végétation en un peu plus de 48 heures et coûté la vie à une personne.

"La mobilisation des sapeurs pompiers restera intense sur le terrain dans les jours à venir", selon la préfecture qui a interdit l'accès aux massifs forestiers audois jusqu'à dimanche inclus.

Pour elle, "les axes fermés à la circulation restent pour l’essentiel non reconnus et donc potentiellement encore dangereux, notamment du fait de la présence de câbles électriques sur les routes".

Dans ce contexte, "les personnes sinistrées, sauf autorisation des autorités locales sur place, ne peuvent pas encore regagner leur domicile".

Le préfet de l'Aude, Christian Pouget, a précisé que quelque 2.000 personnes évacuées n'avaient pas encore pu rentrer chez elles.

Jeudi, plusieurs centaines d'entre elles ont encore été accueillies dans les salles polyvalentes mises à disposition par les communes.

"Pas éteint avant plusieurs jours"

M. Pouget a également affirmé que l'incendie ne serait pas "déclaré éteint avant plusieurs jours", ajoutant qu'"il y a encore beaucoup de travail".

Près de 2.000 soldats du feu et 600 engins restent ainsi mobilisés.

Jeudi soir, 1.500 foyers étaient encore privés d'électricité, a fait savoir à l'AFP Enedis, pour qui "la priorité immédiate (...) est d'assurer la continuité des services essentiels", comme l'accès à l'eau ou aux réseaux de télécommunications.

"Au plus fort de la crise, 5.000 foyers ont été privés d'électricité", selon la préfecture qui recommande d'annuler tous les évènements publics et privés prévus ce weekend.

Le sinistre géant a aussi détruit ou endommagé 36 habitations et brûlé 54 véhicules.

Parties mardi après-midi de la commune de Ribaute, à une quarantaine de kilomètres de Narbonne et de Carcassonne, les flammes ont parcouru 17.000 hectares de pinède et de garrigue, dont 13.000 brûlés, selon la sécurité civile.

C'est le pire incendie depuis au moins 50 ans sur le pourtour méditerranéen français, selon une base de données gouvernementale répertoriant les feux de forêt depuis 1973.

À Saint-Laurent-de-la-Cabrerisse, une femme de 65 ans a été retrouvée morte mercredi à son domicile dévasté par les flammes. La préfecture a également décompté 18 blessés: deux habitants hospitalisés, dont un grièvement brûlé, et 16 sapeurs-pompiers.

Jeudi soir, le feu a enfin pu être fixé.

C'est le résultat de "la lutte menée depuis le début", se sont félicités les pompiers de l'Aude. "C'était un travail classique mais d'une ampleur extraordinaire", ont-ils précisé à l'AFP.

D'après les premiers éléments de l'enquête, l'incendie a démarré sur le bord d'une route à Ribaute, selon la gendarmerie.

Le parquet de Carcassonne a indiqué à l'AFP ne pas connaître encore son origine.

Par ailleurs, le préfet a évalué "de 800 à 900 hectares" les vignobles perdus.

"Si on n'est pas aidés, on ne se relèvera pas. On perd gros. C'est un désespoir complet. Ça m’écœure, cette vigne, toutes ces années de travail, c'est parti en fumée en une heure", confie à l'AFP Fabien Vergnes, 52 ans, dans sa propriété de 20 hectares à Tournissan, à quelques kilomètres de Saint-Laurent.


Sous pression de l'opinion, le Conseil constitutionnel se prononce sur la loi Duplomb

Sur la loi agricole, la décision de l'institution, attendue à partir de 18H00, sera particulièrement scrutée. Elle enverra un signal tant sur le débat environnemental et sanitaire provoqué par le texte, que sur le droit parlementaire lié aux conditions de son examen. (AFP)
Sur la loi agricole, la décision de l'institution, attendue à partir de 18H00, sera particulièrement scrutée. Elle enverra un signal tant sur le débat environnemental et sanitaire provoqué par le texte, que sur le droit parlementaire lié aux conditions de son examen. (AFP)
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  • Pour les parlementaires de gauche, qui ont saisi les Sages, le texte est contraire à la Charte de l'environnement, à valeur constitutionnelle
  • Notamment son principe de précaution, ainsi que le "droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé"

PARIS: La loi Duplomb passera-t-elle le crible du Conseil constitutionnel? Les Sages doivent rendre jeudi leurs conclusions très attendues sur la réintroduction sous conditions d'un pesticide interdit, ainsi que sur trois autres textes, notamment la réforme du scrutin municipal à Paris, Lyon et Marseille.

Sur la loi agricole, la décision de l'institution, attendue à partir de 18H00, sera particulièrement scrutée. Elle enverra un signal tant sur le débat environnemental et sanitaire provoqué par le texte, que sur le droit parlementaire lié aux conditions de son examen.

Présentée comme une réponse aux grandes manifestations agricoles de 2024, la loi Duplomb a été l'objet d'un fort mouvement de contestation malgré l'été, poussé par les défenseurs de l'environnement. Une pétition réclamant son abrogation a réuni plus de 2,1 millions de signatures.

En cause notamment: la réintroduction à titre dérogatoire d'un pesticide de la famille des néonicotinoïdes. Nocif pour la biodiversité, mais toujours autorisé ailleurs en Europe, le retour de l'acétamipride est réclamé par certains producteurs de betteraves et de noisettes.

Pour les parlementaires de gauche, qui ont saisi les Sages, le texte est contraire à la Charte de l'environnement, à valeur constitutionnelle. Notamment son principe de précaution, ainsi que le "droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé".

La gauche condamne également la procédure utilisée à l'Assemblée pour faire adopter le texte. Ses défenseurs l'avaient rejeté d'emblée pour contourner les quelque 3.500 amendements déposés - dont beaucoup par les écologistes et les Insoumis - empêchant leur examen dans l'hémicycle.

Mais difficile, même pour les experts en droit, de deviner quelles interprétations le Conseil constitutionnel, présidé par Richard Ferrand, privilégiera.

La jurisprudence n'est à première vue pas favorable aux requérants. L'institution s'est déjà prononcée par le passé sur l'utilisation au Sénat d'une procédure de rejet équivalente - sans censurer.

"Mais les échanges internes" des membres de l'institution de l'époque "révèlent une gêne constante face à ces manœuvres procédurales", a relevé dans une tribune l'ancien ministre de la Justice Jean-Jacques Urvoas, appelant à protéger le droit d'amendement, affirmé dans la Constitution.

Sur le fond, les Sages avaient aussi validé en 2020 une dérogation à l'utilisation des néonicotinoïdes - mais temporaire, et tout en reconnaissant leurs "incidences sur la biodiversité" et "risques pour la santé humaine".

Dans la loi Duplomb, la dérogation est prévue en cas de "menace grave compromettant la production agricole", mais sans limite de temps - seule une clause de revoyure est prévue après trois ans.

"Débat sociétal"

La FNSEA, puissant syndicat agricole dont est issu le sénateur LR Laurent Duplomb, n'a pas voulu s'exprimer avant la décision.

Pour Véronique Le Floc'h, présidente du deuxième syndicat Coordination rurale, une censure sur l'acétamipride serait hypocrite: "Il aurait fallu que l'Etat donne des vrais moyens pour trouver des alternatives" face aux ravageurs.

Mais pour la Confédération paysanne, troisième syndicat, la loi Duplomb répond "à des intérêts très particuliers d'une filière", et non à la "colère agricole" de 2024 et aux problématiques de revenu des agriculteurs.

De nombreuses sociétés savantes ont appelé le Conseil constitutionnel à censurer la loi, rappelant la "présomption forte de lien entre l'exposition aux pesticides" et "certains cancers" ou autres pathologies.

Les parlementaires requérants visent aussi d'autres mesures du texte, adopté début juillet avec les voix de la coalition gouvernementale et de l'extrême droite. Entre autres: la facilitation des procédures d'autorisation de construction pour certains ouvrages de stockage d'eau.

En cas de validation de la loi jeudi, les regards se tourneront vers Emmanuel Macron, qui aura quinze jours pour la promulguer... ou demander une deuxième délibération au Parlement, comme le pressent les contempteurs de la loi.

Pour Lorine Azoulai, co-présidente du collectif Nourrir rassemblant plusieurs ONG, le combat se poursuivra au-delà: "ces dernières semaines ont montré la nécessité d'un débat sociétal", estime-t-elle.

"PLM" 

Autre texte aux forts enjeux politiques examiné par le Conseil: la réforme dite "PLM". Elle instaure deux scrutins dans les trois plus grandes villes de France: l'un pour élire les conseillers d'arrondissement ou de secteur, l'autre pour ceux du conseil municipal, sur une circonscription unique.

Les Sages ont été saisis par des députés et sénateurs de gauche, ainsi que les sénateurs Les Républicains.

Le PS parisien pointe une réforme conçue pour favoriser la ministre de la Culture Rachida Dati (LR), et augmenter ses chances de ravir la mairie de Paris en 2026.

Les Sages doivent également se prononcer jeudi sur la loi de "refondation" de Mayotte, notamment ses nombreuses mesures migratoires, ainsi que sur l'allongement de la rétention administrative pour certains étrangers.

 


Le sud de la France toujours sur le qui-vive face au plus gros incendie de l'été

A la tombée de la nuit mercredi, l'incendie - que le Premier ministre François Bayrou a qualifié de "catastrophe d'une ampleur inédite" en estimant que l'épisode était "lié au "réchauffement climatique" et "à la sécheresse" - était toujours actif. (AFP)
A la tombée de la nuit mercredi, l'incendie - que le Premier ministre François Bayrou a qualifié de "catastrophe d'une ampleur inédite" en estimant que l'épisode était "lié au "réchauffement climatique" et "à la sécheresse" - était toujours actif. (AFP)
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  • Le vent qui poussait les flammes vers le littoral méditerranéen a tourné mercredi après-midi, redirigeant le danger vers le massif des Corbières et quinze communes ont été déjà directement ou indirectement impactées par le sinistre
  • "L'arrière du feu est devenu l'avant du feu", a déclaré le colonel Christophe Magny, patron des pompiers du département de l'Aude. Et le front toujours incontrôlable revient vers "son point de départ" et des "zones boisées assez inaccessibles"

LAGRASSE: Plusieurs villages du sud de la France restent sur le qui-vive jeudi, au troisième jour du plus gros incendie de l'été dans le pays, où le feu continue de ravager des milliers d'hectares, même s'il a perdu en intensité.

Le vent qui poussait les flammes vers le littoral méditerranéen a tourné mercredi après-midi, redirigeant le danger vers le massif des Corbières et quinze communes ont été déjà directement ou indirectement impactées par le sinistre.

"L'arrière du feu est devenu l'avant du feu", a déclaré le colonel Christophe Magny, patron des pompiers du département de l'Aude. Et le front toujours incontrôlable revient vers "son point de départ" et des "zones boisées assez inaccessibles", a ajouté la secrétaire générale de la préfecture départementale, Lucie Roesch.

Parti mardi après-midi du village de Ribaute, entre Carcassonne et Narbonne, le plus gros incendie de l'été en France a ravagé 16.000 hectares de végétation et de pinède mercredi soir, "plus que la commune de Paris", selon le colonel Magny. Il a aussi détruit ou endommagé 25 habitations et brûlé 35 véhicules, selon le bilan provisoire de la préfecture.

A Saint-Laurent-de-la-Cabrerisse, une dame de 65 ans qui avait refusé de quitter sa maison a été retrouvée morte à son domicile dévasté par les flammes. La préfecture a également décompté 13 blessés: deux habitants hospitalisés, dont un grièvement brûlé, et onze sapeurs-pompiers, selon le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau.

A la tombée de la nuit mercredi, l'incendie - que le Premier ministre François Bayrou a qualifié de "catastrophe d'une ampleur inédite" en estimant que l'épisode était "lié au "réchauffement climatique" et "à la sécheresse" - était toujours actif. Mais sa progression qui était auparavant "de 1.000 hectares à l'heure globalement", "diminue d'intensité", a indiqué à l'AFP Rémi Recio, sous-préfet de Narbonne.

Et la tramontane, un vent sec et chaud qui renforce le feu, a été supplanté par un vent marin qui soufflera encore jeudi, et "va apporter de l'air plus humide qu'avant, ce qui est moins favorable à la propagation du feu", a déclaré à l'AFP François Gourand, prévisionniste à Météo-France.

Mais si les pompiers ont protégé les zones d'habitation, les communes n'en craignent pas moins un retour des flammes avec le changement de direction du vent. "On reste sur le qui-vive, parce qu'on est entourés de pins et puis que tout a brûlé, tout autour du village, c'est la catastrophe", déplore Bruno Zubieta, premier-adjoint au maire de Villesèque-des-Corbières.

"Seuls au monde" 

"On a eu très peur. Le feu est arrivé au grand galop", raconte-t-il à l'AFP. "On a été entourés de flammes, de partout qui arrivaient de la gauche, de la droite, de derrière. On était encerclés. On était tout seuls au monde".

Il reste 90 km de lisières qui rendent le travail des pompiers compliqué.

Un millier des 2.200 habitants du secteur concernés par l'incendie ont été évacués de leurs domiciles et il est trop tôt pour rentrer pour la plupart d'entre eux.

Une enquête a été ouverte pour déterminer les causes du feu, encore inconnues. Aucune hypothèse n'est pour l'heure privilégiée, même si le Premier ministre a évoqué un départ de feu en bord de route.

L'UE au côtés de la France 

Face à l'incendie, tous les moyens aériens nationaux ont été mobilisés. L'Union européenne a également annoncé se tenir "prête à mobiliser" des ressources.

"L'Europe se tient aux côtés de la France alors que les pires feux de forêt de son histoire récente font rage dans l'Aude", a déclaré sur X Ursula Von der Leyen, la présidente de la Commission européenne.

Fin juillet, à la moitié de la saison estivale, la Sécurité civile avait comptabilisé plus de 15.000 hectares brûlés sur le territoire national pour 9.000 départs de feu, principalement sur le littoral méditerranéen.

C'est l'incendie le plus important en France depuis au moins 2006, soit le début des enregistrements, et depuis les années 1970 pour la zone méditerranéenne, selon la base de données sur les incendies de forêt (BDIFF) du gouvernement (qui recense les feux depuis 1972 pour les départements méditerranéens et 2006 pour la France).