«Ils n'arrivent plus à payer»: les Turcs dans la spirale de l'endettement

La hausse de l'endettement est l'une des conséquences de la très forte inflation qui frappe la Turquie, à plus de 84% sur un an. (AFP)
La hausse de l'endettement est l'une des conséquences de la très forte inflation qui frappe la Turquie, à plus de 84% sur un an. (AFP)
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Publié le Vendredi 30 décembre 2022

«Ils n'arrivent plus à payer»: les Turcs dans la spirale de l'endettement

  • Selon la presse turque, 24 millions de dossiers de recouvrement attendaient en août devant les tribunaux du pays
  • Basés sur la confiance, sans signature de document ni taux d'intérêt, ces achats à crédit sont la dernière option pour certaines familles surendettées

ANKARA: Ali Golpinar ne sait plus où mettre les dizaines de lettres envoyées chaque jour à ses administrés et qui finissent, lorsque non remises, dans son bureau de "muhtar", maire de quartier en banlieue d'Ankara, la capitale turque.

Notifications d'impayés, mises en demeure ou convocations devant la justice: le nombre de ces courriers, dont une grande partie concerne le recouvrement de créances, a doublé en deux ans pour atteindre une quarantaine par jour dans ce quartier modeste de près de 25 000 habitants.

"Ce ne sont que les courriers non remis. Imaginez donc le nombre total. Les gens n'arrivent plus à payer leurs dettes", assure le muhtar.

Selon la presse turque, 24 millions de dossiers de recouvrement attendaient en août devant les tribunaux du pays.

Le montant des crédits impayés par des particuliers est passé de 17 à 29 milliards de livres turques (1,55 milliard de dollars) entre mars et septembre, d'après l'Agence turque de régulation bancaire.

Courses à crédit 

La hausse de l'endettement est l'une des conséquences de la très forte inflation qui frappe la Turquie, à plus de 84% sur un an.

Plus de 40% des actifs doivent se contenter du salaire minimum, qui sera relevé de 300 à 450 dollars au 1er janvier.

Mais avec la hausse des loyers (+163% sur un an à Ankara, +144% à Istanbul), les dépenses de logement continueront d'engloutir la quasi-totalité des bas salaires, souligne Hacer Foggo, chargée de la lutte contre la pauvreté au CHP, principal parti de l'opposition turque.

Dans ce contexte, une vieille pratique est redevenue populaire: les courses à crédit dans les commerces de quartier.

"Demander un prêt bancaire est risqué. Mais l'épicier du coin vous connaît, il ne vous refusera pas", analyse M. Golpinar.

Basés sur la confiance, sans signature de document ni taux d'intérêt, ces achats à crédit sont la dernière option pour certaines familles surendettées.

"De plus en plus de clients demandent à payer à crédit", confirme Yuksel Kurt, épicier dans le quartier de Keçioren, en banlieue nord d'Ankara.

"Je suis obligé de refuser certains car je sais que je ne serai jamais remboursé. Si une dette n'est pas payée au bout de six mois, on sait qu'il faut l'oublier", affirme-t-il en montrant les pages déchirées de son cahier où il note les créances.

Pain, biscuits, huile... les achats à crédit concernent souvent les produits de première nécessité, mais s'ajoutent à des listes de dettes déjà longues.

"Beaucoup remboursent leurs dettes en empruntant ailleurs", avance M. Kurt.

Gênée, une jeune femme entrée pour acheter des cigarettes à crédit refuse de parler.

Dans la boulangerie voisine, Cemal Aygun rappelle que les commerçants sont eux-mêmes souvent endettés.

"Je dois 10 000 livres turques (535 dollars) à mon fournisseur de farine (...) Tous les mois, je demande à des amis de m'épauler", confie-t-il.

«Dilemmes»

Jusqu'en 2021, le gouvernement turc a encouragé cette spirale d'endettement, affirme l'économiste Erinç Yeldan.

"L'accès aux crédits bancaires a été facilité (...) pour favoriser une croissance virtuelle", explique-t-il.

Conséquence: des particuliers sans emploi stable ou aux revenus insuffisants ont obtenu des prêts qu'ils échouent désormais à rembourser, affirme Hacer Foggo.

"Ils font face à des dilemmes: payer leur loyer, emmener leur enfant chez le médecin ou rembourser leur prêt", déplore-t-elle.

Dans des mairies dirigées par l'opposition turque, comme Istanbul et Ankara, un site internet permet de régler les factures d'eau et de gaz des plus nécessiteux.

Mais aucun organisme n'est chargé spécifiquement du surendettement.

"Il y a des actions ponctuelles, réduites à des actes de charité, sans que cela ne soit institutionnalisé", regrette M. Yeldan.

Des aides du gouvernement aux plus démunis existent mais sont insuffisantes, juge Mme Foggo.

A l'approche des élections présidentielle et législatives de juin 2023, le gouvernement multiplie pourtant les initiatives.

Le président Recep Tayyip Erdogan a ainsi annoncé début novembre l'effacement des dettes de moins de 2 000 livres turques (105 dollars), à condition que le créancier donne son accord.

M. Golpinar reste cependant sceptique: "Je ne connais personne qui a pu en bénéficier", dit-il.


Décès d'un otage israélien détenu dans la bande de Gaza

Fin novembre, une trêve d'une semaine avait permis la libération de 105 otages, dont 80 Israéliens et binationaux échangés contre 240 Palestiniens détenus par Israël. Il en reste 209 retenus dans la bande de Gaza. (AFP).
Fin novembre, une trêve d'une semaine avait permis la libération de 105 otages, dont 80 Israéliens et binationaux échangés contre 240 Palestiniens détenus par Israël. Il en reste 209 retenus dans la bande de Gaza. (AFP).
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  • Dror Or, âgé de 49 ans, a été tué et retenu dans la bande de Gaza depuis le 7 octobre, a indiqué dans un communiqué le kibboutz Be'eri où il vivait
  • Son épouse, Yonat, avait été tuée lors de cet assaut tandis que deux de leurs trois enfants, Noam et Alma, âgés respectivement de 17 ans et de 13 ans, avaient été kidnappés puis libérés

JERUSALEM: Un otage israélien retenu dans la bande de Gaza depuis les attaques du Hamas le 7 octobre a été déclaré mort, ont annoncé tôt vendredi les autorités israéliennes et des proches.

Dror Or, âgé de 49 ans, a été tué et retenu dans la bande de Gaza depuis le 7 octobre, a indiqué dans un communiqué le kibboutz Be'eri où il vivait et dont les habitants ont été parmi les plus touchés par l'attaque en territoire israélien du mouvement islamiste palestinien Hamas.

Son épouse, Yonat, avait été tuée lors de cet assaut tandis que deux de leurs trois enfants, Noam et Alma, âgés respectivement de 17 ans et de 13 ans, avaient été kidnappés puis libérés dans le cadre d'un accord de trêve à la fin du mois de novembre.

"Il est désormais confirmé que Dror Or, kidnappé par le Hamas le 7 Octobre, a été assassiné et son corps retenu à Gaza", a indiqué le gouvernement israélien sur son compte X officiel, précisant que Alma, Noam et leur frère Yahli étaient désormais orphelins.

L'annonce du décès de Dror Or intervient alors que les pays médiateurs - Qatar, Etats-Unis et Egypte - attendent la réponse du Hamas à une nouvelle proposition de trêve associée à la libération d'otages.

Fin novembre, une trêve d'une semaine avait permis la libération de 105 otages, dont 80 Israéliens et binationaux échangés contre 240 Palestiniens détenus par Israël.

La guerre a éclaté le 7 octobre quand des commandos du Hamas ont mené une attaque qui a entraîné la mort de 1.170 personnes, essentiellement des civils, selon un bilan de l'AFP établi à partir de données officielles israéliennes.

Plus de 250 personnes ont été enlevées et 129 restent captives à Gaza, dont désormais 35 sont mortes en comptant Dror Or.

En représailles, Israël a juré d'anéantir le Hamas et lancé une vaste offensive dans la bande de Gaza, qui a fait jusqu'à présent plus de 34.500 morts, majoritairement des civils, selon le ministère de la Santé du mouvement islamiste armé.


Des frappes israéliennes blessent huit soldats syriens, affirme Damas

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  • Jeudi soir, "l'ennemi israélien a lancé des frappes aériennes depuis la direction du Golan syrien occupé, ciblant un site près de Damas (...) blessant huit soldats"
  • Israël commente rarement les frappes individuelles mais répète régulièrement qu'il ne permettra pas à son ennemi juré, l'Iran, d'accroître sa présence en Syrie

DAMAS: Des frappes aériennes israéliennes ont blessé huit soldats syriens près de Damas, a annoncé le ministère syrien de la Défense vendredi.

Jeudi soir, "l'ennemi israélien a lancé des frappes aériennes depuis la direction du Golan syrien occupé, ciblant un site près de Damas (...) blessant huit soldats", a indiqué le ministère dans un communiqué.

Israël commente rarement les frappes individuelles mais répète régulièrement qu'il ne permettra pas à son ennemi juré, l'Iran, d'accroître sa présence en Syrie.

L'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), qui dispose d'un vaste réseau de sources en Syrie, rapporte qu'Israël a frappé un bâtiment gouvernemental dans la campagne aux abords de Damas, utilisé par le Hezbollah libanais pro-iranien depuis 2014.

L'armée israélienne a conduit des centaines de frappes en Syrie depuis le déclenchement en 2011 de la guerre civile qui y fait rage, ciblant principalement des positions militaires et des combattants pro-iraniens.

Le nombre de frappes s'est accru depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas le 7 octobre, lorsque le mouvement islamiste palestinien a mené une attaque meurtrière sans précédent contre Israël.

Le 19 avril, des frappes israéliennes ont ciblé une position de l'armée syrienne dans le sud du pays, selon le gouvernement syrien et l'OSDH.

Le 13 avril, l'Iran a mené une attaque inédite contre Israël, avec 350 drones et missiles, dont la plupart ont été interceptés avec l'aide des Etats-Unis et d'autres pays. Téhéran a dit avoir agi en "légitime défense" après l'attaque meurtrière, attribuée à Israël, qui a détruit son consulat à Damas le 1er avril.

La guerre en Syrie a fait plus de 500.000 morts et des millions de déplacés depuis son déclenchement en mars 2011.


Le Hamas dit étudier avec un « esprit positif  » l'offre de trêve à Gaza

Le Hamas étudie dans un "esprit positif" la nouvelle offre sur la table, pour une pause de 40 jours dans les combats, a déclaré jeudi son chef, Ismaïl Haniyeh, dans une conversation téléphonique avec le chef du renseignement égyptien, Abbas Kamel. (AFP).
Le Hamas étudie dans un "esprit positif" la nouvelle offre sur la table, pour une pause de 40 jours dans les combats, a déclaré jeudi son chef, Ismaïl Haniyeh, dans une conversation téléphonique avec le chef du renseignement égyptien, Abbas Kamel. (AFP).
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  • Des sources médicales dans la bande de Gaza ont fait état vendredi de frappes israéliennes dans le secteur de Rafah
  • Et Israël a annoncé le décès d'un des otages israéliens à Gaza, Dror Or, un habitant du kibboutz Be'eri dont deux des enfants, kidnappés aussi le 7 octobre par le Hamas, avaient été libérés fin novembre dans le cadre d'une première trêve

TERRITOIRES: Le Hamas dit étudier dans un "esprit positif" la dernière offre de trêve associée à la libération d'otages dans la bande de Gaza où près de sept mois de guerre meurtrière ont provoqué selon l'ONU des destructions "sans précédent".

Alors que les pays médiateurs (Qatar, Egypte, Etats-Unis) attendent la réponse du Hamas à cette nouvelle proposition, des sources médicales dans la bande de Gaza ont fait état vendredi de frappes israéliennes dans le secteur de Rafah (sud).

Et Israël a annoncé le décès d'un des otages israéliens à Gaza, Dror Or, un habitant du kibboutz Be'eri dont deux des enfants, kidnappés aussi le 7 octobre par le Hamas, avaient été libérés fin novembre dans le cadre d'une première trêve.

Cette trêve d'une semaine avait permis la libération de 105 otages contre 240 Palestiniens détenus par Israël. Depuis, les nombreuses tentatives de médiation sont restées vaines.

Le Hamas étudie dans un "esprit positif" la nouvelle offre sur la table, pour une pause de 40 jours dans les combats, a déclaré jeudi son chef, Ismaïl Haniyeh, dans une conversation téléphonique avec le chef du renseignement égyptien, Abbas Kamel.

Lors de cet entretien, M. Haniyeh a "confirmé" qu'une délégation du mouvement se rendrait en Egypte "sous peu" pour compléter les discussions récentes en vue d'un éventuel accord qui "réponde aux exigences de notre peuple" et "mette fin à l'agression".

Le chef du Hamas, dont le mouvement est considéré comme une organisation terroriste par Israël ou encore les Etats-Unis, s'est aussi entretenu avec le ministre qatari des Affaires étrangères, à qui il a répété son souhait de "parvenir à un accord".

Ces propos jurent avec ceux la veille d'un responsable du mouvement qui évoquait une position pour l'instant "négative" du Hamas à propos de ces tractations.

Le Hamas, qui a pris le pouvoir en 2007 à Gaza, maintient ses exigences, en premier lieu un cessez-le-feu permanent, ce qu'Israël a toujours refusé.

Se défendre « seuls »

En visite mercredi en Israël, le secrétaire d'Etat américain, Antony Blinken, avait appelé le Hamas à dire "oui" à un accord qu'il a jugé "extraordinairement généreux" de la part d'Israël.

Il a aussi exhorté Israël à renoncer à une offensive terrestre sur la ville de Rafah, dernier grand bastion du mouvement islamiste selon le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, où s'entassent un million et demi de Palestiniens en majorité déplacés par la guerre.

"Nous ferons ce qui est nécessaire pour gagner et vaincre notre ennemi, y compris à Rafah", a répété jeudi M. Netanyahu, après avoir promis d'y lancer une offensive terrestre, "avec ou sans accord" de trêve.

De nombreuses capitales et organisations humanitaires redoutent de lourdes pertes civiles, en l'absence d'un plan jugé crédible pour protéger la population.

"Si nous devons nous défendre seuls, nous nous défendrons seuls", a-t-il dit alors que la mobilisation s'accentue dans certains pays contre Israël pour la conduite de sa guerre à Gaza.

Outre des manifestations sur les campus de grandes universités aux Etats-Unis, au Canada, ou encore en France à Sciences Po, la Colombie a annoncé mercredi rompre ses liens diplomatiques avec Israël, et la Turquie a suspendu jeudi ses relations commerciales avec ce même pays.

Le tout alors que des responsables israéliens commencent à craindre une possible inculpation par la Cour pénale internationale (CPI), à laquelle s'oppose toutefois leur allié américain.

Selon les sites américain Axios et israélien Walla, des sénateurs américains ont tenu une rencontre virtuelle mercredi avec des responsables du tribunal de La Haye pour témoigner de leur préoccupation à propos de possibles mandats d'arrêt contre des dirigeants israéliens pour la guerre à Gaza.

Le 7 octobre, une attaque de commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza dans le sud d'Israël a entraîné la mort de 1.170 personnes, essentiellement des civils, selon un bilan de l'AFP établi à partir de données officielles israéliennes.

Plus de 250 personnes ont été enlevées ce jour-là et 129 restent captives dans Gaza, dont 35 sont mortes, en incluant Dror Or, selon des responsables israéliens.

En représailles, Israël a lancé une offensive dans le territoire palestinien qui a fait 34.596 morts, majoritairement des civils, selon le ministère de la Santé du Hamas.

30 à 40 milliards

En plus de ce bilan humain, la reconstruction devrait coûter entre 30 et 40 milliards de dollars (entre 28 et 37 milliards d'euros), a estimé jeudi le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD).

"L'ampleur de la destruction est énorme et sans précédent (...) C'est une mission à laquelle la communauté internationale n'a pas été confrontée depuis la Seconde Guerre mondiale", a déclaré le directeur du bureau régional pour les Etats arabes du PNUD, Abdallah al-Dardari.

Sur le plan de l'aide internationale, strictement contrôlée par Israël, elle continue d'arriver au compte-gouttes, principalement depuis l'Egypte, via Rafah, dans le territoire de 2,4 millions d'habitants menacé de famine.

L'ONG américaine World Central Kitchen, qui avait suspendu ses activités dans la bande de Gaza après la mort de sept travailleurs humanitaires lors d'une frappe aérienne israélienne au début du mois d'avril, a repris cette semaine ses activités.

"Après la fermeture de la cuisine, nous nous sommes rendu compte que de nombreuses bouches restaient affamées", a déclaré jeudi à l'AFP Zakria Yahya Abukuwaik, responsable d'une cuisine soutenue par cette ONG à Rafah où la population craint ces jours-ci une opération au sol des soldats israéliens à défaut d'accord de trêve.