Il est temps d'augmenter la pression sur le régime iranien

Le régime a déployé une force de répression à grande échelle pour réprimer les manifestants, y compris les enfants et les femmes. (Photo, AN)
Le régime a déployé une force de répression à grande échelle pour réprimer les manifestants, y compris les enfants et les femmes. (Photo, AN)
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Publié le Mardi 03 janvier 2023

Il est temps d'augmenter la pression sur le régime iranien

Il est temps d'augmenter la pression sur le régime iranien
  • Selon l’ONG Iran Human Rights, lors des récentes manifestations antirégime, 326 personnes sont mortes et 15 000 ont été arrêtées
  • Le régime iranien continue de défier la communauté internationale en développant son programme nucléaire

En 2022, plusieurs évènements importants se sont produits en Iran et se poursuivront probablement en 2023.

En premier lieu, le régime iranien a fait face en 2022 à l'un des soulèvements les plus graves de son histoire. Les manifestations à l'échelle nationale ont été déclenchées par la mort en septembre de Mahsa Amini, une jeune femme de 22 ans, aux mains de la prétendue «police des mœurs». Sa mort a conduit à une mobilisation quasi nationale et à un puissant mouvement porté par les femmes contre les dirigeants religieux. Des gens du monde entier ont pu voir des femmes retirant en guise de défi leur hijab et se coupant les cheveux en public, ainsi que des foules scandant le slogan «femmes, vie, liberté» Les réseaux sociaux ont contribué à faire circuler des images de la défiance des femmes iraniennes envers les forces du régime. Le magazine Time a même désigné les Iraniennes comme ses héroïnes de l'année.

Les protestations ont secoué 31 provinces iraniennes et sont devenues extrêmement politisées, les manifestants scandant «mort au dictateur»; «mort au (Guide suprême Ali) Khamenei»; «Nous sommes tous Mahsa, combattez-nous et nous riposterons»; «Cette année est une année de sacrifice»; «Liberté, liberté, liberté»; «Du Kurdistan à Téhéran, je sacrifie ma vie pour l'Iran» ou encore «Les enseignants emprisonnés doivent être libérés». 

L’inquiétude des responsables iraniens a augmenté à mesure que leur maintien au pouvoir était menacé. Ali Khamenei, qui a le dernier mot sur toutes les grandes politiques intérieures et étrangères de l'Iran, a immédiatement soutenu les forces de sécurité et la police, tout en leur ordonnant de réprimer durement les manifestants. Il a qualifié les manifestants de «voyous, voleurs et extorqueurs». ll a aussi affirmé que «ceux qui ont déclenché des troubles pour saboter le pays méritent des poursuites et des sanctions sévères». 

Le régime a déployé une force de répression à grande échelle pour réprimer les manifestants, y compris les enfants et les femmes. Il a commencé à exécuter des manifestants et à porter contre eux des accusations ambiguës, telles que «moharebeh» («hostilité envers Dieu»), mise en danger de la sécurité nationale du gouvernement, tentative de renverser le gouvernement et conspiration avec des «ennemis» et des étrangers.

Des rapports de l'organisation non gouvernementale Iran Human Rights, basée à Oslo, indiquent que, lors des récentes manifestations antirégime, 326 personnes sont mortes et 15 000 ont été arrêtées. Les exécutions ont déjà commencé.

Selon le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits humains, «certaines sources indiquent que 23 enfants ont été tués et de nombreux autres blessés dans sept provinces par des balles réelles, des boulettes métalliques tirées à bout portant et des passages à tabac mortels». Selon l’organisme, «un certain nombre d'écoles ont également été perquisitionnées et des enfants arrêtés par les forces de sécurité. Certains directeurs auraient également été arrêtés pour ne pas avoir coopéré avec les forces de sécurité. Le 11 octobre, le ministre de l'Éducation a confirmé qu'un nombre indéterminé d'enfants avaient été envoyés dans des «centres psychologiques» après leur arrestation présumée pour avoir participé à des manifestations contre l'État.

Le régime a livré des drones à la Russie, a commencé à envoyer des soldats en Crimée et a prévu de livrer des missiles balistiques à Moscou.

Dr Majid Rafizadeh

Le deuxième problème clé en 2022 a été le programme nucléaire iranien. Le régime a continué de défier la communauté internationale, tout en ne montrant aucun signe indiquant qu'il était sérieux ou désireux de parvenir à un accord pour limiter son programme nucléaire et faire face aux menaces qu'il pose.

Au contraire, les dirigeants iraniens ont fait d’importants progrès dans leur programme nucléaire. Ils l'ont développé, enrichissant l'uranium à des niveaux proches de la qualité militaire, menant des recherches ainsi qu’un développement et une production d'uranium métal. Ils ont également ajouté des centrifugeuses avancées supplémentaires pour enrichir l'uranium.

L'ancien ministre des Affaires étrangères, Kamal Kharazi, a souligné les avancées majeures de l'Iran en la matière. «Ce n'est un secret pour personne que nous sommes devenus un État quasi nucléaire. C'est un fait. Et ce n'est un secret pour personne que nous avons les moyens techniques de produire une bombe nucléaire... Par le passé, et en quelques jours seulement, nous avons pu enrichir l'uranium jusqu'à 60 %, et nous pouvons facilement produire de l'uranium enrichi à 90 %», a-t-il déclaré.

L'Iran a également demandé l'aide de son alliée, la Russie, pour renforcer son programme nucléaire, selon des responsables du renseignement américain. Le régime a même annoncé qu'il n'autoriserait pas l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) à voir des images de centrifugeuses. Une déclaration conjointe publiée par le Royaume-Uni, la France et l'Allemagne a souligné que Téhéran «n'avait aucun besoin civil crédible de recherche, de développement et de production d'uranium métal, qui sont une étape clé dans le développement d'une arme nucléaire».

Le troisième problème majeur a été l'implication croissante de l'Iran dans la guerre russo-ukrainienne, laquelle a entraîné sa condamnation par l'UE et les États-Unis. Le régime a en effet livré des drones à la Russie, a commencé à envoyer des soldats en Crimée et a prévu de livrer des missiles balistiques à Moscou.

En 2023, le soulèvement et l'opposition au régime à l’échelle nationale se poursuivront très probablement. En outre, le régime augmentera vraisemblablement ses livraisons d'armes à la Russie et tentera de devenir un État doté d'armes nucléaires. La communauté internationale se doit ainsi de faire preuve de davantage de soutien au peuple iranien, en particulier aux femmes, et de contrer les efforts du régime iranien dans le développement de son programme nucléaire et sa livraison d’armes à la Russie.

  • Le Dr Majid Rafizadeh est un politologue irano-américain diplômé de Harvard. Twitter: @Dr_Rafizadeh

NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est celle de l’auteur et ne reflète pas nécessairement le point de vue d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com