Mosquée Al-Aqsa : Comment le Premier ministre Benjamin Netanyahu peut regagner la confiance de la Jordanie

Afin de reconstruire la confiance, il suffit de revenir à l’entente conclue en 2014 (File/AFP)
Afin de reconstruire la confiance, il suffit de revenir à l’entente conclue en 2014 (File/AFP)
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Publié le Samedi 04 février 2023

Mosquée Al-Aqsa : Comment le Premier ministre Benjamin Netanyahu peut regagner la confiance de la Jordanie

Mosquée Al-Aqsa : Comment le Premier ministre Benjamin Netanyahu peut regagner la confiance de la Jordanie
  • Le test le plus important du nouvel engagement sera le comportement d’Israël vis-à-vis de ce lieu musulman sacré
  • Afin de reconstruire la confiance, il suffit de revenir à l’entente conclue en 2014

Après avoir été rejeté pendant des années, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a eu cette semaine l’occasion de visiter de rencontrer le roi Abdallah ll de Jordanie. De hauts responsables de la sécurité nationale américaine ainsi que des dirigeants émiratis et des Égyptiens, ont convaincu le roi qu’ils étaient sérieux au sujet de faire pression sur Netanyahu cette fois. La grande question à laquelle il faut désormais répondre est la suivante : Bibi, tel qu’on l’appelle, sera-t-il capable d’équilibrer ses engagements envers le roi Abdallah II tout en gardant sa coalition intacte ? Lui et ses sponsors vont devoir prouver au roi et au monde que Netanyahu ici présent tiendra ses promesses cette fois-ci.

Il s’est rendu au palais royal d’Amman pour la dernière fois le 13 novembre 2014, où tout comme aujourd’hui, la situation était très tendue, notamment à Jérusalem. Le secrétaire d’État de l’époque, John Kerry, a dirigé la réunion qui visait à résoudre l’impasse sur le troisième site le plus sacré de l’islam, la mosquée Al-Aqsa, que les Israéliens appellent le mont du Temple.

Un communiqué officiel de la cour royale a déclaré mardi que le roi Abdallah II « a souligné l’importance de respecter le statu quo historique et juridique dans la mosquée Al-Aqsa/Al-Haram Al-Sharif ». Bien que la déclaration indique que le roi a appelé à la paix et à la sécurité, à la nécessité d’un retour au processus de paix et à la « fin de toutes les mesures qui compromettraient la paix», le test le plus important du nouvel engagement sera le comportement d’Israël vis-à-vis de ce lieu musulman sacré.

L’entente de 2014 conclue ente les Jordaniens, les Israéliens et les Américains a produit un accord selon lequel «Al-Aqsa est un lieu de prière pour les musulmans et un site de visite pour les autres». Or, les détails de la seconde moitié de cet accord n’ont pas été rendus publics. L’accord indiquait que seuls de petits groupes d’Israéliens pouvaient visiter le site, que les visites répétées n’étaient pas autorisées et que  les extrémistes juifs ne pouvaient pas entrer au sein du sanctuaire musulman.

« Afin de reconstruire la confiance, il suffit de revenir à l’entente conclue en 2014» Daoud Kuttab

Cependant, l’engagement de Netanyahu n’a jamais été appliqué sur le terrain, étant donné que des centaines de visiteurs juifs entrent chaque jour par la seule porte où le garde payé par la Jordanie n’est pas autorisé à être présent. La majorité des visiteurs sont réguliers et beaucoup d’entre eux sont des extrémistes qui exigent de prier sur le site sacré musulman – certains le font à leur manière. D’ailleurs, un écrivain israélien s’était vanté il y a cinq ans que les juifs prient au sein de la mosquée Al-Aqsa. Il faisait référence aux prières silencieuses et aux mouvements corporels qui les accompagnaient. Il n’est donc pas étonnant que le roi ait refusé de répondre aux appels de Netanyahu pendant des années.

Cette fois-ci, Netanyahu est dans un état bien pire qu’il ne l’était en 2014. Il est entouré d’extrémistes qui le pressent de changer le statu quo sur le site administré par des musulmans depuis plus de 13 siècles, à l’exception des quelque 90 ans durant lesquels les Croisés ont régné. Chrétiens et musulmans ont soutenu le fait que la Jordanie et la famille hachémite du roi soient les gardiens des liens saints de Jérusalem.

La réunion de cette semaine comprenait le vice-Premier ministre jordanien et ministre des Affaires étrangères Ayman Safadi, le directeur du cabinet du roi, Jaafar Hassan et le directeur du département des renseignements généraux, le maj. Gén. Ahmad Housni. La délégation israélienne comprenait des officiers supérieurs de la politique et du renseignement, montrant ainsi l’implication d’une sécurité de haut niveau.

La Jordanie ainsi que d’autres dirigeants internationaux s’inquiètent également d’une probable explosion de la population de colons. Ils s’inquiètent de l’attente qu’on demande au gouvernement actuel dominé par les colons d’approuver le plan dangereux « un million de colons», qui mettrait définitivement fin au plan visant une solution à deux États.  

Bien que Netanyahu ait promis la lune au roi, il est peu probable que quiconque dans le palais jordanien, le gouvernement ou les services de renseignements, s’accroche cette fois-ci à ses promesses. Afin de reconstruire la confiance, il suffit de revenir à l’entente conclue en 2014. Si Netanyahu croit vraiment en ce qu’il a promis devant Kerry, le monde entier devrait voir les résultats un jour ou l’autre. Si un grand nombre de visiteurs juifs, parmi lesquels des extrémistes, continuent de faire des visites provocatrices sur le site musulman, il ne s’agirait évidemment pas de simples visiteurs mais de personnes avec des intentions politiques ou religieuse.

Une autre mesure que Netanyahu pourrait prendre serait de demander aux visiteurs juifs de rejoindre ceux du reste du monde et donc d’accéder par la porte des visiteurs Bab Al-Silsila et de respecter les règles exigées par les techniciennes de surface du lieu. Le grand test approche, avec le chevauchement du Ramadan et de la Pessah en avril.

 

Daoud Kuttab est un journaliste palestinien de Jérusalem. Il est ancien professeur de journalisme à l’Université de Princeton. Twitter : @daoudkuttab

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com