Retraites: le gouvernement ne veut pas du 49.3, part à la chasse aux voix des députés

Le gouvernement a assuré dimanche qu'il ne voulait pas utiliser l'article 49.3 de la Constitution, c'est-à-dire une adoption sans vote, pour faire approuver par l'Assemblée nationale sa réforme très contestée des retraites (Photo d'illustration, AFP)
Le gouvernement a assuré dimanche qu'il ne voulait pas utiliser l'article 49.3 de la Constitution, c'est-à-dire une adoption sans vote, pour faire approuver par l'Assemblée nationale sa réforme très contestée des retraites (Photo d'illustration, AFP)
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Publié le Dimanche 12 mars 2023

Retraites: le gouvernement ne veut pas du 49.3, part à la chasse aux voix des députés

  • La Première ministre est montée en première ligne dès que le vote du Sénat a été acquis tard samedi soir par 195 voix contre 112
  • Le gouvernement a sorti sa calculette et espère obtenir suffisamment de voix du parti Les Républicains, pourtant divisé

PARIS: Le gouvernement a assuré dimanche qu'il ne voulait pas utiliser l'article 49.3 de la Constitution, c'est-à-dire une adoption sans vote, pour faire approuver par l'Assemblée nationale sa réforme très contestée des retraites, et se trouve engagé dans une chasse aux voix des députés qui devraient se prononcer jeudi.

"Nous ne voulons pas du 49.3. Nous voulons transformer notre majorité relative en une majorité absolue", a affirmé dimanche le porte-parole du gouvernement Olivier Véran, à l'issue d'une réunion à Matignon avec la cheffe du gouvernement Elisabeth Borne et plusieurs ministres, dont Bruno Le Maire (Economie), Olivier Dussopt (Travail) et Gabriel Attal (Comptes publics).

"Nous souhaitons qu'il puisse y avoir un vote positif pour ce texte", a-t-il ajouté.

Mais "nous ne renoncerons pas à notre réforme", a-t-il précisé, laissant entendre que l'usage du 49.3 n'était pas totalement exclu.

Ce "n’est pas notre piste aujourd’hui" même si cet article figure "par définition dans la Constitution", a affirmé sur France 2 Gabriel Attal.

Même s'il n'utilise pas cet outil constitutionnel, le gouvernement pourrait par précaution, dans un Conseil des ministres ordinaire ou extraordinaire, prendre cette semaine les dispositions légales permettant d'y avoir éventuellement recours, selon une source gouvernementale.

"Député par député" 

La Première ministre est montée en première ligne dès que le vote du Sénat, dominé par la droite, a été acquis, tard samedi soir, par 195 voix contre 112. Elle a promis de mettre désormais toute son "énergie" pour "que ce texte soit voté".

Le président Emmanuel Macron, pour qui cette réforme repoussant l'âge de départ en retraite à 64 ans est politiquement capitale, est en revanche resté dimanche sur sa réserve et n'a pas commenté l'adoption du texte au Sénat.

"Il existe une majorité au Parlement" pour voter la réforme, veut croire Elisabeth Borne, à l'orée d'un scrutin autrement plus serré qui s'annonce à l'Assemblée.

Le gouvernement a sorti sa calculette et espère obtenir suffisamment de voix du parti Les Républicains, pourtant divisé, afin d'éviter l'utilisation d'un outil perçu comme autoritaire.

Olivier Dussopt et Gabriel Attal se sont dits, de concert dimanche soir, "convaincus d'avoir une majorité".

"Nous construisons cette majorité, député par député", a ajouté M. Dussopt sur BFMTV, tandis que Gabriel Attal faisait valoir que "chaque voix en moins pour la réforme" serait "une voix pour plus d'impôts".

"Vice démocratique" 

Après trois jours de répit, les débats parlementaires reprendront mercredi, avec la convocation d'une commission mixte paritaire (CMP) en parallèle d'une huitième journée de manifestations contre la réforme.

Dans cette réunion, sept députés et sept sénateurs chercheront à s'accorder sur un texte de compromis. Le gouvernement n'y est pas présent, mais il peut tirer les ficelles.

Si un accord est trouvé, le texte ira jeudi de nouveau au Sénat pour une dernière validation puis, vraisemblablement dans un immense suspense, à l'Assemblée nationale.

Selon une source au sein de l'exécutif, Matignon devrait réunir lundi les parlementaires de la majorité concernés pour préparer le conclave, où les macronistes et la droite sont majoritaires.

Dire qu'il existe une majorité au Parlement, c'est "la méthode Coué", a estimé le chef de file des sénateurs socialistes Patrick Kanner sur RMC.

Il a souligné que 50 voix avaient manqué à la droite et au groupe centriste au Sénat pour voter la réforme, "une alerte non négligeable", selon lui.

Compte tenu du niveau "inédit" des manifestations contre la réforme, utiliser le 49.3 "serait une forme de vice démocratique", a prévenu le patron de la CFDT Laurent Berger.

Le leader syndical met surtout en garde contre le "ressentiment très profond" que l'adoption de la réforme pourrait susciter dans le monde du travail, jugeant que le refus par Emmanuel Macron de recevoir l'intersyndicale ressemble à un "incroyable bras d'honneur à la démocratie sociale".

"Peu de marges" 

La mise au point dimanche du gouvernement fait aussi écho aux prises de position de plusieurs leaders de la majorité.

Les arguments contre sont "très forts", a jugé au Grand Jury RTL/Le Figaro/LCI le patron du MoDem François Bayrou, même s'"il y a peu de marges" pour réunir une majorité de députés.

Le patron du parti présidentiel Renaissance, Stéphane Séjourné, n'est pas non plus favorable au 49.3 et a estimé dans le JDD que la réforme "peut et doit avoir une majorité", appelant "en responsabilité" les Républicains à la voter.

Mais "si, au bout du compte, il y a un souci" le gouvernement "devra l'utiliser", a conseillé le patron des sénateurs LR Bruno Retailleau au Grand rendez-vous Europe 1/Les Echos/CNews.

L'exécutif met tous ses espoirs dans Les Républicains, pourtant particulièrement divisés à l'Assemblée, où les frondeurs, parmi lesquels le député Aurélien Pradié, jouent les trouble-fête.

Maintenant "il faut que les LR du Sénat se mettent d’accord avec les LR de l’Assemblée", résume une source gouvernementale.

 

 


La cour d'assises de Paris se dit bien compétente pour juger un ex-rebelle salafiste syrien

La cour d'assises de Paris a rejeté mercredi la demande des avocats d'un ancien rebelle syrien qui voulaient qu'elle se déclare incompétente pour le juger pour complicité de crimes de guerre. (AFP)
La cour d'assises de Paris a rejeté mercredi la demande des avocats d'un ancien rebelle syrien qui voulaient qu'elle se déclare incompétente pour le juger pour complicité de crimes de guerre. (AFP)
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  • Mes Romain Ruiz et Raphaël Kempf arguaient notamment que la chute du régime de Bachar al-Assad, survenue en décembre 2024, changeait la donne, et appelaient à ce que leur client soit jugé par la justice de transition en Syrie
  • La cour d'assises a rejeté cette demande, se disant "régulièrement saisie" et "compétente pour connaître des faits reprochés à Majdi Nema", permettant ainsi au procès de se poursuivre

PARIS: La cour d'assises de Paris a rejeté mercredi la demande des avocats d'un ancien rebelle syrien qui voulaient qu'elle se déclare incompétente pour le juger pour complicité de crimes de guerre.

La défense de Majdi Nema, un ancien membre du groupe salafiste syrien Jaysh al-Islam (JAI, Armée de l'islam) arrêté en France en 2020, a contesté mardi, au premier jour du procès, le principe de compétence universelle permettant à la justice française de juger un étranger pour des crimes commis à l'étranger sur des étrangers.

Mes Romain Ruiz et Raphaël Kempf arguaient notamment que la chute du régime de Bachar al-Assad, survenue en décembre 2024, changeait la donne, et appelaient à ce que leur client soit jugé par la justice de transition en Syrie.

La cour d'assises a rejeté cette demande, se disant "régulièrement saisie" et "compétente pour connaître des faits reprochés à Majdi Nema", permettant ainsi au procès de se poursuivre.

Cet homme de 36 ans comparaît pour complicité de crimes de guerre, soupçonné notamment d'avoir aidé à enrôler et à former à l'action armée des mineurs, et pour entente en vue de la préparation de crimes de guerre, des faits pour lesquels il encourt 20 ans de réclusion criminelle.

Il conteste les accusations, affirmant n'avoir eu qu'un "rôle limité" dans JAI, un groupe prônant la charia et qui combattait le régime syrien, qu'il dit avoir quitté en 2016.

Alors qu'une plainte avait été déposée en France contre JAI en 2019, il avait été arrêté en janvier 2020 à Marseille, où il se trouvait pour un séjour d'études de quelques mois. Il avait été mis en examen et écroué par un juge du pôle crimes contre l'humanité du tribunal de Paris.


Proportionnelle: Bayrou consulte mais les avis divergent

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  • Le Premier ministre recevra chacun des chefs de partis et des présidents de groupes parlementaires représentés à l'Assemblée nationale, suivant un ordre lié à leur importance numérique
  • François Bayrou défend un scrutin à la proportionnelle intégrale, dans tous les départements, pour les élections législatives, alors que depuis l'instauration de la Ve République, les députés sont élus au scrutin uninominal majoritaire à deux tours

PARIS: François Bayrou entame mercredi avec le Rassemblement national une série de consultations des forces politiques sur la proportionnelle, que lui-même réclame depuis longtemps mais sur laquelle les désaccords restent nombreux.

Le Premier ministre recevra chacun des chefs de partis et des présidents de groupes parlementaires représentés à l'Assemblée nationale, suivant un ordre lié à leur importance numérique.

La cheffe de file des députés RN Marine Le Pen, qui forment le groupe le plus important à l'Assemblée, et le président du parti à la flamme Jordan Bardella seront ainsi reçus en premier à 10H00.

Suivra un entretien jeudi 1er mai à 17H00 avec le président du groupe macroniste et du parti Renaissance Gabriel Attal. Il sera accompagné par le député Pierre Cazeneuve, qui a mené une analyse comparative des différents modes de scrutin.

François Bayrou défend un scrutin à la proportionnelle intégrale, dans tous les départements, pour les élections législatives, alors que depuis l'instauration de la Ve République - à l'exception des législatives de 1986 -, les députés sont élus au scrutin uninominal majoritaire à deux tours.

Le RN réclame lui aussi la proportionnelle, mais avec une prime majoritaire pour la liste arrivée en tête. "La tripolarisation de la vie politique entraîne une absence de majorité", a soutenu mardi Mme Le Pen, qui "n'imagine pas que le Premier ministre (...) puisse reculer sur ce sujet".

"Moins pire" 

En discutant de cette revendication commune avec le RN, François Bayrou espère sans doute faire baisser la tension avec l'extrême droite, qui fait planer la menace d'une motion de censure contre son gouvernement.

Le RN dénonce l'absence de perspectives législatives sur la proportionnelle, sur l'immigration ainsi que sur la feuille de route énergétique (programmation pluriannuelle de l'énergie, PPE). François Bayrou l'a à cet égard ménagé lundi en reportant la date de publication d'un décret sur la PPE.

Mais le Premier ministre n'est pas assuré d'avoir cette fois le soutien des macronistes, traversés par moult "interrogations", selon Pierre Cazeneuve.

En 2018, le président Emmanuel Macron avait souhaité l'instauration d'un système mixte avec 15% des députés élus à la proportionnelle, puis la réforme avait été abandonnée.

Or les députés Renaissance considèrent désormais que le mode de scrutin actuel est "le moins pire", car la "distorsion" entre le nombre de voix et le nombre de députés "n'existe plus" dans l'Assemblée actuelle, et ce changement n'est "pas forcément une priorité" pour les Français au vu du nouveau contexte international, a expliqué M. Cazeneuve lors d'un point presse.

Cumul des mandats 

Gabriel Attal et Pierre Cazeneuve entendent jeudi élargir le débat à la question de "l'efficacité de l'action publique", en reparlant de la réduction du nombre de parlementaires et de la "simplification du millefeuille administratif".

Mais ils jugent "délétère" de proposer la proportionnelle en échange du cumul des mandats, soutenu avec force par François Bayrou.

Le président du parti Horizons Edouard Philippe défend pour sa part le scrutin majoritaire, qui "impose un lien entre un député et les électeurs d'un territoire". Il pourrait soutenir la proportionnelle "si était rétablie la possibilité de cumuler un mandat exécutif local et le mandat parlementaire".

Les indépendants du groupe Liot sont "plutôt largement très défavorables" à réformer le mode de scrutin, selon son président Laurent Panifous.

A droite, Les Républicains (LR) y sont fermement opposés, comme l'a rappelé Laurent Wauquiez.

"La proportionnelle aboutira à ce qu'on va institutionnaliser le chaos politique qu'on connaît en ce moment", a tonné le patron de la droite dimanche, avant de critiquer mardi la "hiérarchie des priorités" du gouvernement dans un pays "qui est ruiné" et "où il y a une telle explosion de l'insécurité et de l'immigration", au vu des "menaces" sur le plan international.

Le gouvernement souhaite pouvoir légiférer à ce sujet "avant la fin de la session parlementaire si le débat est mûr", a précisé mercredi sa porte-parole LR Sophie Primas.

D'autres partis, notamment à gauche, souhaitent une évolution du mode de scrutin.

Mais le PS est divisé. L'ancien président François Hollande est pour, tandis que son Premier secrétaire Olivier Faure est contre à titre personnel.

Le député PS Emmanuel Grégoire a rappelé mardi que "derrière ce mot un peu vague de proportionnelle, se cache une subtilité immense, immense, de déclinaisons pratiques".


Assemblée: la gauche s'insurge contre le refus d'une minute de silence pour la victime de la mosquée du Gard

La députée de La France Insoumise - Nouveau Front Populaire et présidente de la commission parlementaire des affaires économiques, Aurélie Trouve, s'exprime lors d'une déclaration du gouvernement et d'un débat parlementaire sur la souveraineté énergétique de la France à l'Assemblée nationale française, à Paris, le 28 avril 2025. (AFP)
La députée de La France Insoumise - Nouveau Front Populaire et présidente de la commission parlementaire des affaires économiques, Aurélie Trouve, s'exprime lors d'une déclaration du gouvernement et d'un débat parlementaire sur la souveraineté énergétique de la France à l'Assemblée nationale française, à Paris, le 28 avril 2025. (AFP)
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  • La gauche s'est insurgée mardi contre l'absence de minute de silence à l'Assemblée nationale en hommage à Aboubakar Cissé, tué de plusieurs dizaines de coups de couteau vendredi dans une mosquée du Gard
  • Le parti de gauche a annoncé avoir essuyé un refus de Mme Braun-Pivet au motif qu'il "n'y a pas de minute de silence pour des cas individuels", a rapporté Aurélie Trouvé, députée LFI

PARIS: La gauche s'est insurgée mardi contre l'absence de minute de silence à l'Assemblée nationale en hommage à Aboubakar Cissé, tué de plusieurs dizaines de coups de couteau vendredi dans une mosquée du Gard.

La France insoumise, qui appelle à une "mobilisation nationale contre l'islamophobie" le dimanche 11 mai, a demandé à la présidente de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, qu'une minute de silence soit observée mardi en ouverture de la séance des questions au gouvernement.

Le parti de gauche a toutefois annoncé avoir essuyé un refus de Mme Braun-Pivet au motif qu'il "n'y a pas de minute de silence pour des cas individuels", a rapporté Aurélie Trouvé, députée LFI (Seine-Saint-Denis).

La question a été soulevée en conférence des présidents, mais n'a pas recueilli de majorité de voix selon une source parlementaire, qui souligne que cette instance a décidé fin janvier "de ne plus faire de minutes de silence pour des cas individuels".

"On n'est pas sur un cas individuel, on est sur un meurtre islamophobe, sur un climat islamophobe dans le pays, et ne pas rendre hommage à Aboubakar Cissé est une très grave faute politique", a déploré le député LFI Thomas Portes.

Le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, s'est dit sur X "scandalisé par le refus de Yaël Braun-Pivet d'accorder une minute de silence en hommage à Aboubakar Cissé". "Cet hommage républicain doit être rendu dans l'hémicycle", a abondé sur le même réseau social le patron des députés PS Boris Vallaud.

Benjamin Lucas, porte-parole du groupe écologiste, a lui-aussi regretté l'absence de cette minute de silence qui "aurait été un bon signal" envers "nos compatriotes musulmans qui sont insultés, injuriés en permanence".

Une décision également "vivement regrettée" par Stéphane Peu, chef du groupe communiste à l'Assemblée nationale. Son groupe posera mardi après-midi une question au gouvernement sur le meurtre d'Aboubakar Cissé.

Réunis autour de membres de la famille d'Aboubakar Cissé, mardi à l'Assemblée nationale, plusieurs leaders de gauche dont Olivier Faure et l'écologiste Marine Tondelier, ont insisté pour que cette minute de silence puisse avoir lieu.