Retraites: Manifestations émaillées de tensions partout en France

A Lyon, environ 500 manifestants, dont beaucoup de jeunes, se sont rassemblés vers 20h30 place Guichard dans le 3e arrondissement et s'en sont pris aux forces de l'ordre avec des jets de projectiles, avant de se disperser en plusieurs groupes dans différents quartiers (Photo, AFP).
A Lyon, environ 500 manifestants, dont beaucoup de jeunes, se sont rassemblés vers 20h30 place Guichard dans le 3e arrondissement et s'en sont pris aux forces de l'ordre avec des jets de projectiles, avant de se disperser en plusieurs groupes dans différents quartiers (Photo, AFP).
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Publié le Mardi 21 mars 2023

Retraites: Manifestations émaillées de tensions partout en France

  • Les manifestants ne cherchaient pas la confrontation avec les forces de l'ordre, mais plutôt à se livrer au jeu du chat et de la souris
  • Peu avant 23h30, 142 personnes avaient été interpellées à Paris, selon une source policière

PARIS: Poubelles renversées et brûlées, barricades, jets de projectiles sur les forces de l'ordre, fumigènes: l'adoption lundi de la réforme des retraites après le rejet de la motion de censure a provoqué de nombreuses manifestations émaillées d'incidents dans toute la France, ont constaté des journalistes de l'AFP.

A Paris, quelques centaines de personnes, rejointes par des députés de la France Insoumise (LFI), se sont d'abord rassemblées, non loin de l'Assemblée nationale, Place Vauban (VIIe arrondissement), avant d'être canalisées par les forces de l'ordre.

Puis, des feux de poubelles et affrontements avec les forces de l'ordre ont été repérés dans le quartier de la gare Saint-Lazare (IXe), autour de la place de l'Opéra, où de nombreux cars de CRS étaient stationnés. Un cortège a ensuite arpenté les rues en renversant des poubelles, suivi par les policiers de la BRAV-M en moto, tandis que d'autres étaient au Châtelet, non loin de l'Hôtel de Ville.

Peu avant 23H30, 142 personnes avaient été interpellées à Paris, selon une source policière.

Renversant sur leur passage trottinettes électriques et vélos, ou mettant le feu à des poubelles, les manifestants ne cherchaient pas la confrontation avec les forces de l'ordre, selon les journalistes de l'AFP sur place, mais plutôt à se livrer au jeu du chat et de la souris. Les forces de l'ordre ont utilisé à plusieurs reprises des gaz lacrymogènes.

"On entend que les jeunes ne sont pas mobilisés. Nous voilà. C'est pour les retraites et pour le reste. C'est un tout, une accumulation", a expliqué à l'AFP une étudiante désirant rester anonyme, la manifestation n'étant pas déclarée.

Vers 23H00, la situation s'est tendue brièvement place de la Bastille et dans les rues adjacentes avec des barricades improvisées de poubelles et de palettes de bois enflammées, mais pas de vitrines, ni d'abribus caillassés. "On est là, on est là, la rue est à nous", scandaient les manifestants.

Le rejet de la motion de censure n'entame pas la «détermination des travailleurs», affirme la CGT

Le rejet de cette motion, "à quelques voix près, ne change rien !", écrit la Confédération.

"Rien n'entame la détermination des travailleurs, privés d'emplois, jeunes et retraités à rejeter (...) la réforme des retraites que tout le monde, sans exception, juge injustifiée, injuste et brutale", poursuit le deuxième syndicat français.

La CGT appelle à "amplifier les mobilisations", et à "participer massivement aux grèves reconductibles et aux manifestations", le jeudi 23 mars "et après, si nécessaire".

«Ça va péter»

Les mêmes scènes se sont reproduites dans plusieurs grandes villes de France, comme à Strasbourg, où un gros millier de manifestants se sont d'abord rassemblés place Kléber, en plein centre-ville, sifflant et huant le rejet de la motion de censure avant d'allumer des fumigènes et de scander "nous aussi on va passer en force". Certains manifestants ont ensuite commis des dégradations: façade de banque caillassée, poubelles incendiées, panneaux publicitaires brisés...

"Mon état d'esprit c'est un dégoût infini, c'est un déni de démocratie dans la forme, sur le fond", a déclaré Giampiero Russo, prof de sciences économiques et sociales à Strasbourg, avant que le cortège se mette en route.

À Dijon, environ 200 personnes ont manifesté, certains, masqués et souvent cagoulés, scandant : "on déteste la police". La manifestation a été dispersée vers 21h00 et la police a procédé à deux interpellations.

À Lyon, environ 500 manifestants, dont beaucoup de jeunes, se sont rassemblés vers 20h30 place Guichard dans le 3e arrondissement et s'en sont pris aux forces de l'ordre avec des jets de projectiles, avant de se disperser en plusieurs groupes dans différents quartiers. La préfecture a fait état de six interpellations et un blessé léger parmi les policiers. À Saint-Etienne, la préfecture a recensé quatre interpellations et trois policiers blessés.

Les manifestants étaient plusieurs centaines à Lille devant la préfecture, où ils ont sifflé et hué en apprenant le rejet de la motion de censure. "Ça va péter", ont-ils scandé, "Louis XVI on l'a décapité, Macron on va recommencer".

"On s'y attendait mais on est déçus, en colère", souligne Emma Maes, une Lilloise de 26 ans, tout en soulignant que "la mobilisation n'est pas finie" et en évoquant l'espoir d'un referendum d'initiative populaire.

À Nantes la manifestation, qui a débuté dans le calme vers 18h00, s'est tendue en milieu de soirée, et des bouteilles ont été jetées sur les forces de l’ordre, qui ont répliqué avec des tirs de gaz lacrymogènes. Même tension à Rennes, déjà secouée par de violentes manifestations ces dernières semaines. Plusieurs centaines de jeunes -entre 300 et 500 selon la préfecture- ont défilé dans le centre-ville aux cris notamment de "49.3 on n’en veut pas", et des barricades improvisées ont été incendiées.

D'autres rassemblements ont eu lieu à Bordeaux, Limoges, Poitiers, ou encore à Rouen ou Brest.


Ukraine: Zelensky accueilli par Macron à Paris pour faire le point sur les négociations

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a été accueilli lundi par son homologue français Emmanuel Macron au palais présidentiel de l'Elysée pour faire le point sur les intenses négociations en cours pour tenter de mettre fin à la guerre en Ukraine. (AFP)
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a été accueilli lundi par son homologue français Emmanuel Macron au palais présidentiel de l'Elysée pour faire le point sur les intenses négociations en cours pour tenter de mettre fin à la guerre en Ukraine. (AFP)
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  • Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a été accueilli lundi par son homologue français Emmanuel Macron au palais présidentiel de l'Elysée
  • Cette nouvelle visite en France, la dixième depuis le début de l'invasion russe de l'Ukraine en février 2022, intervient au lendemain de discussions entre délégations américaine et ukrainienne en Floride

PARIS: Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a été accueilli lundi par son homologue français Emmanuel Macron au palais présidentiel de l'Elysée pour faire le point sur les intenses négociations en cours pour tenter de mettre fin à la guerre en Ukraine, a constaté un journaliste de l'AFP.

Cette nouvelle visite en France, la dixième depuis le début de l'invasion russe de l'Ukraine en février 2022, intervient au lendemain de discussions entre délégations américaine et ukrainienne en Floride, et à la veille d'une rencontre à Moscou entre l'émissaire de Donald Trump, Steve Witkoff, et le président russe Vladimir Poutine.

 


La France fixe une nouvelle doctrine d'intervention en mer contre les traversées clandestines

Un bateau de la Gendarmerie maritime française navigue à proximité de bateaux de passeurs transportant des migrants qui tentent de traverser la Manche au large de la plage de Gravelines, dans le nord de la France, le 27 septembre 2025. (AFP)
Un bateau de la Gendarmerie maritime française navigue à proximité de bateaux de passeurs transportant des migrants qui tentent de traverser la Manche au large de la plage de Gravelines, dans le nord de la France, le 27 septembre 2025. (AFP)
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  • La France prévoit de lancer prochainement des opérations en mer pour intercepter les “taxi-boats” transportant clandestinement des migrants vers l’Angleterre
  • Cette initiative intervient après une hausse des traversées de la Manche, avec plus de 39 000 arrivées en 2025

LILLE: Après des mois de discussions, la France a annoncé vendredi qu'elle allait débuter "prochainement" des opérations visant à intercepter en mer des petits bateaux clandestins en chemin vers l'Angleterre, avant qu'ils n'embarquent des groupes de migrants.

Ce changement de doctrine engagé par Paris sous pression de Londres était en gestation depuis plusieurs mois.

Les forces de l'ordre françaises peinent à trouver la parade face aux "taxi-boats", un mode d'action des passeurs consistant à faire partir une embarcation d'un point éloigné des principales plages de départ où sont rassemblés les migrants.

Le taxi-boat s'approche ensuite du rivage et vient récupérer des passagers directement dans l'eau, avant de poursuivre sa route vers l'Angleterre.

"La Gendarmerie maritime sera bientôt en mesure d'effectuer des opérations de contrôle et d'intervention en mer, sur des embarcations soupçonnées d'être des taxi-boats", a déclaré à l'AFP la préfecture maritime de la Manche et de la mer du Nord (Prémar), confirmant des informations du journal Le Monde.

Le quotidien évoque un document signé par le préfet maritime mais aussi ceux du Nord, de la Somme et du Pas-de-Calais.

Le ministère de l'Intérieur français n'a pas souhaité réagir.

Côté britannique, un porte-parole du gouvernement a simplement rappelé vendredi à l'AFP que Londres a "déjà travaillé à s'assurer que les autorités en France réforment leurs tactiques en mer afin qu'elles puissent intervenir dans les eaux peu profondes".

- Pas de filets à ce stade -

Actuellement, une fois une embarcation clandestine en mer, seul le dispositif de secours intervient en cas de besoin, en raison des risques que présentent ce type d'opérations, comme prévu par les conventions internationales.

Désormais, il pourra aussi y avoir des "opérations de contrôle et d'intervention (...) issues d'études menées par l'ensemble des services de l’État concernés", a précisé la Prémar. Elles "comportent des dispositions prenant en compte la primauté de la sauvegarde de la vie humaine".

Ces futures opérations de la gendarmerie maritime sont prévues en amont de l'embarquement de passagers, pour ne pas mettre leurs vies en péril, selon une source proche du dossier.

"L'ensemble des travaux sur le sujet se fait en lien avec les parquets concernés", a souligné à l'AFP la procureure de Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais), Cécile Gressier.

En outre, la Prémar précise que "l'emploi de filets visant à stopper le taxi-boat n'est pas envisagé à ce stade".

Cette méthode, mentionnée la semaine dernière dans la presse, avait soulevé l'indignation d'associations d'aide aux migrants et d'ONG comme Amnesty International.

Pour le professeur de droit international Thibaut Fleury-Graff, "les interceptions sont susceptibles d'être contraires au droit de quitter tout pays" inscrit dans le Pacte de l'ONU sur les droits civils et politiques, et doivent respecter "l'ensemble des droits de la personne humaine".

Les taxi-boats embarquent leurs passagers sur une ou plusieurs haltes et repartent en direction de l'Angleterre surchargés, transportant régulièrement plus de 70 candidats à l'exil dans des conditions périlleuses.

Au moins 27 migrants sont morts cette année lors de ces dangereuses tentatives de traversées de la Manche, selon un décompte de l'AFP.

Après le pire naufrage dans la Manche, qui a fait 31 morts en novembre 2021, le parquet de Paris a demandé vendredi un procès en correctionnelle pour 14 hommes, nés pour la plupart en Afghanistan et en Irak, soupçonnés d'être impliqués dans des réseaux de passeurs à l'origine du drame.

Depuis le 1er janvier, plus de 39.000 personnes sont arrivées sur les côtes anglaises à bord de petites embarcations, selon les données britanniques, soit plus que sur la totalité de 2024.

Plus de la moitié des personnes arrivées clandestinement au Royaume-Uni entre septembre 2024 et septembre 2025 sont de cinq nationalités: Érythréens (la nationalité la plus représentée), Afghans, Iraniens, Soudanais et Somaliens.

Le gouvernement travailliste britannique, sous pression de l'extrême-droite, a annoncé ce mois-ci une réforme qui durcit fortement sa politique d'asile et d'immigration, espérant ainsi décourager les arrivées irrégulières de migrants sur ces "small boats", qu'il peine à endiguer.


France: des ONG inquiètes d'une baisse de l'aide au développement

Le docteur Bertrand Chatelain (à gauche), de l'ONG Médecins du Monde (MdM), examine un réfugié lors d'une opération de maraudage dans le camp de migrants du quartier Stalingrad à Paris, le 12 juillet 2023. (AFP)
Le docteur Bertrand Chatelain (à gauche), de l'ONG Médecins du Monde (MdM), examine un réfugié lors d'une opération de maraudage dans le camp de migrants du quartier Stalingrad à Paris, le 12 juillet 2023. (AFP)
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  • Plusieurs ONG françaises alertent sur un désengagement de la France en matière d’aide au développement, dans un contexte mondial déjà marqué par une baisse générale de la solidarité internationale
  • Les organisations humanitaires redoutent des conséquences majeures pour des millions de personnes

PARIS: Plusieurs ONG françaises, dont Médecins du Monde, ont critiqué vendredi un "désengagement croissant" de Paris envers la solidarité internationale, le gouvernement entendant amputer, dans le prochain budget, l'aide au développement de 700 millions d'euros, dans un contexte international tendu.

Sandrine Simon, directrice santé et plaidoyer de Médecins du Monde, critique une décision qui va "à l'encontre des engagements" de la France dans ce secteur. Elle évoque sa "grande inquiétude" et son "incompréhension".

En France, où l'aide publique au développement a été réduite ces dernières années, les coupes envisagées dans le projet de loi de finances 2026 s'élèvent à 700 millions d'euros, pour un montant alloué de 3,7 milliards d'euros.

"A chaque fois qu'il y a ne serait-ce qu'un million d'euros qui est coupé, on sait qu'il y a des milliers, voire des millions de personnes derrière qui sont affectées", alerte Anne Bideau, directrice générale de Plan International France, rappelant une "tendance à la baisse de l'aide publique au développement un peu partout dans le monde".

"on sait que les conséquences vont être dramatiques, donc on est extrêmement inquiets", ajoute Mme Bideau auprès de l'AFP.

Début 2025, le démantèlement de l'Agence américaine pour le développement international (USAID), sous l'impulsion du président républicain Donald Trump, avait provoqué une onde de choc internationale.

Mais la fin de l'USAID avait mis en exergue une tendance de fond: le montant accordé par 32 pays riches de l'OCDE et l'Union européenne à l'aide au développement a diminué en 2024 de 7,1% (en terme réel) à 212,1 milliards de dollars, selon une estimation de l'OCDE, une première en six ans.

"On a des crises à répétition, le Soudan, Gaza etc. Il y a une augmentation des besoins et il y a une réduction de l'aide", déplore pour sa part Stéphane Doyon, de Médecins Sans Frontières, ONG qui n'est pas financée par le gouvernement français.

En France, cette coupe est justifiée "par l'effort nécessaire sur les finances publiques - et pas pour des raisons idéologiques comme aux Etats-Unis", affirme une source diplomatique à l'AFP, rappelant qu'elle n'a pas encore été votée.

"Entre la loi de finances 2024 et le projet de loi de finances 2026, on aurait une baisse de moitié de l'aide publique au développement", a calculé la Coordination Sud, qui regroupe des associations françaises de solidarité internationale.

Avec des conséquences concrètes pour les ONG qui comptent sur le soutien de l'Etat.

"Nous espérions recevoir de l'argent de l'Agence française de développement qui vient de nous annoncer qu'ils ne nous soutiendraient pas l'année prochaine", explique Sandrine Simon, de Médecins du Monde, au moment où l'ONG elle-même programme avec "un niveau d'incertitudes très important ce budget 2026, bien au-delà des années passées."

Dans le pire des scénarios, avec des coupes budgétaires massives, plus de 22 millions de personnes pourraient mourir de causes évitables d'ici à 2030, selon une étude menée par des chercheurs espagnols, brésiliens et mozambicains.