Erdogan, maître de la Turquie pour cinq ans de plus

Le président turc Tayyip Erdogan s'adresse à ses partisans après les premiers résultats des sondages à la sortie du second tour de l'élection présidentielle à Istanbul (Photo, Reuters).
Le président turc Tayyip Erdogan s'adresse à ses partisans après les premiers résultats des sondages à la sortie du second tour de l'élection présidentielle à Istanbul (Photo, Reuters).
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Publié le Lundi 29 mai 2023

Erdogan, maître de la Turquie pour cinq ans de plus

  • Juché sur un bus devant son domicile d'Istanbul, sur la rive asiatique du Bosphore Erdogan a pris la parole devant une mer de drapeaux rouges brandis par une foule enthousiaste
  • Des rassemblements spontanés se sont formés partout dans les villes où le "Reis" a triomphé, en particulier au coeur de l'Anatolie

ISTANBUL: L'indéboulonnable Recep Tayyip Erdogan, confirmé dimanche pour cinq années supplémentaires à la tête de la Turquie, a appelé son pays à "la solidarité et l'unité" face aux défis qui l'attendent.

Juché sur un bus devant son domicile d'Istanbul, sur la rive asiatique du Bosphore, le président de 69 ans, dont 20 pouvoir, avait revendiqué la victoire en début de soirée devant une mer de drapeaux rouges brandis par une foule enthousiaste.

"Notre nation nous a confié la responsabilité de gouverner le pays pour les cinq prochaines années", a-t-il lancé au terme d'une élection qui l'a contraint pour la première fois à un second tour.

De retour à Ankara au cœur de la nuit, fêté en rock star par une foule de dizaines de milliers de partisans qui l'attendait depuis des heures devant le palais présidentiel, le chef de l'Etat n'a pas manqué de faire huer son adversaire malheureux, Kemal Kiliçdaroglu.

Avant d'estimer qu'il "est temps de mettre de côté les disputes de la campagne électorale et de parvenir à l'unité et à la solidarité autour des rêves de notre nation".

"La Turquie a gagné!", a-t-il lancé entre deux portraits géants projetés sur la façade monumentale: le sien et celui de son plus illustre prédécesseur, Mustafa Kemal Atatürk, le fondateur de la République qui célèbre cette année ses cent ans.

Selon les résultats portant sur plus de 99,85% des bulletins, le chef de l'Etat a obtenu 52,16% des suffrages contre 47,84% au candidat social-démocrate Kemal Kiliçdaroglu qui, à 74 ans, a perdu le pari de la "démocratie apaisée" qu'il promettait.

Rassemblements spontanés 

La commission électorale turque (YSK) a confirmé dans la soirée la victoire du chef de l'Etat et publiera les résultats définitifs en début de semaine.

Dans la soirée, des rassemblements spontanés se sont formés autour du siège de son parti AKP à Istanbul, dont les rues résonnent de coups de klaxons et une foule considérable s'est massée devant le palais présidentiel à Ankara pour l'attendre.

Des scènes de liesse ont eu lieu à travers le pays ainsi que dans plusieurs grandes villes européennes, dont Berlin, où vit une importante communauté turque.

"On est heureux, Dieu a exaucé nos voeux. Recep Tayyip Erdogan est un très grand leader, un leader très puissant. Et il a beaucoup fait progresser la Turquie", s'est félicité dimanche soir à Istanbul Soner Ceylan, 52 ans.

Le président russe Vladimir Poutine, qui n'avait pas caché son soutien au président, a rapidement salué un "résultat logique" de même que le président ukrainien Volodymyr Zelensky, qui a dit espérer "renforcer ses liens avec Ankara".

Premier des dirigeants occidentaux, le président français Emmanuel Macron a également "félicité" M. Erdogan, suivi par le chancelier allemand Olaf Scholz et les responsables de l'Union européenne Ursula Von der Leyen et Charles Michel, notamment.

Le rival malheureux du président Erdogan a pris la parole depuis le siège de son parti, le CHP fondé par Mustafa Kemal, pour exprimer sa "réelle tristesse face aux difficultés qui attendent le pays".

Ni le désir de changement d'une partie de l'électorat, ni l'inflation sévère qui mine la Turquie, ni les restrictions aux libertés et l'hyperprésidentialisation d'un pouvoir qui a envoyé des dizaines de milliers d'opposants derrière les barreaux ou en exil n'ont pesé face au désir de sécurité et de stabilité.

Pas même les conséquences du terrible du séisme de février (au moins 50.000 morts et 3 millions de déplacés) dans onze provinces du sud du pays, qui ont largement reconduit le chef de l'Etat.

Habileté 

"Erdogan a joué la carte du nationalisme avec beaucoup d'habileté, l'opposition n'a pas su proposer une alternative susceptible" de convaincre malgré la mauvaise situation économique du pays, a estimé Galip Dalay, chercheur associé Middle East Council on Global Affairs.

Le parti du président Erdogan, l'AKP islamo-conservateur, sur lequel il a bâti son accession au pouvoir suprême, a perdu des sièges au Parlement mais conserve sa majorité avec ses alliés.

Kemal Kiliçdaroglu encaisse quant à lui une défaite de plus après avoir promis le "retour du printemps".

Considéré par beaucoup, y compris au sein de son alliance d'opposition, comme terne et sans charisme, M. Kiliçadaroglu n'a pas su profiter de la crise économique pour rafler la victoire.

Visage fatigué, se déplaçant avec lenteur, Recep Tayyip Erdogan, avait voté à la mi-journée dans son quartier d'Usküdar à Istanbul: une foule enjouée l'y attendait, à laquelle les gardes du corps ont distribué des jouets tandis qu'il glissait quelques billets de banque à des enfants.

Presque simultanément, tout sourire malgré les pronostics défavorables, Kemal Kiliçdaroglu déposait son bulletin à Ankara en incitant ses concitoyens à voter "pour se débarrasser d'un gouvernement autoritaire".

Le camp Erdogan n'a eu de cesse de qualifier l'opposition emmenée par Kiliçdaroglu de "terroriste" en raison du soutien que lui ont apporté les responsables du parti pro-kurde HDP.

Les personnes interrogées par l'AFP dans les files d'attente des bureaux de vote ont témoigné de la polarisation du pays après ces semaines de campagne.

Campagne difficile 

Kemal Kiliçdaroglu a été largement privé d'accès aux grands médias et surtout aux chaînes de télévision officielles, qui ont réservé soixante fois plus de temps d'antenne à son rival, selon l'organisation Reporters sans frontières.

Face à son rival discret d'obédience alévie, une branche de l'islam jugée hérétique par les sunnites rigoristes, Recep Tayyip Erdogan a multiplié les meetings, s'appuyant sur les transformations qu'il a su apporter au pays depuis son accession au pouvoir comme Premier ministre en 2003.

Sa réélection intervient dix ans jour pour jour après le début des grandes manifestations de "Gezi" qui s'étaient répandues dans tout le pays et avaient été sévèrement réprimées.


Gaza : Israël dit soutenir « pleinement » le plan américain pour l'aide humanitaire

Le ministre allemand des Affaires étrangères Johann Wadephul (G), accompagné de son homologue israélien Gideon Saar, donne une conférence de presse au musée commémoratif de l'Holocauste Yad Vashem à Jérusalem, le 11 mai 2025, lors de sa visite en Israël. (Photo GIL COHEN-MAGEN / AFP)
Le ministre allemand des Affaires étrangères Johann Wadephul (G), accompagné de son homologue israélien Gideon Saar, donne une conférence de presse au musée commémoratif de l'Holocauste Yad Vashem à Jérusalem, le 11 mai 2025, lors de sa visite en Israël. (Photo GIL COHEN-MAGEN / AFP)
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  • « Israël soutient pleinement le plan de l'administration Trump présenté vendredi par l'ambassadeur des États-Unis en Israël, M. Mike Huckabee », a déclaré M. Saar lors d'une conférence de presse avec son homologue allemand, Johann Wadephul.
  • Depuis des semaines, des responsables de l'ONU et d'ONG multiplient les avertissements sur la pénurie de nourriture, de médicaments et de carburant dans le territoire palestinien assiégé.

JERUSALEM : Gideon Saar, le ministre israélien des Affaires étrangères, a affirmé dimanche que son pays soutenait « pleinement » l'initiative américaine de distribution d'aide humanitaire dans la bande de Gaza, qui ne prévoit pas de participation israélienne directe.

« Israël soutient pleinement le plan de l'administration Trump présenté vendredi par l'ambassadeur des États-Unis en Israël, M. Mike Huckabee », a déclaré M. Saar lors d'une conférence de presse avec son homologue allemand, Johann Wadephul.

En guerre contre le Hamas depuis l'attaque sans précédent perpétrée par le mouvement islamiste palestinien le 7 octobre 2023, Israël bloque l'entrée de toute aide humanitaire dans la bande de Gaza depuis le 2 mars, où celle-ci est vitale pour les 2,4 millions d'habitants.

Depuis des semaines, des responsables de l'ONU et d'ONG multiplient les avertissements sur la pénurie de nourriture, de médicaments et de carburant dans le territoire palestinien assiégé.

« Le Hamas a volé cette aide au peuple et en a tiré profit. Il l'a utilisée pour alimenter sa machine de guerre. Il s'en est servi pour préserver sa position de force, au détriment de la population civile », a-t-il souligné.

« Si l'aide continue d'aller au Hamas plutôt qu'au peuple de Gaza, la guerre ne prendra jamais fin », a-t-il affirmé. 

Vendredi, M. Huckabee a levé un coin du voile sur une nouvelle initiative que les États-Unis comptent mettre en place prochainement pour venir en aide aux Palestiniens.

« Les Israéliens seront impliqués dans la fourniture de la sécurité militaire nécessaire, car c'est une zone de guerre, mais ils ne participeront ni à la distribution de la nourriture, ni même à son acheminement vers Gaza », a affirmé l'ambassadeur américain.

La sécurité aux points de distribution sera assurée par des prestataires privés, tandis que l'armée israélienne se chargera de la sécurité « à distance » pour les protéger des combats en cours, a-t-il ajouté.

Israël n'avait pas encore commenté ces annonces.

L'initiative américaine « permettra à l'aide d'aller directement au peuple », a déclaré M. Saar dimanche. « Le Hamas ne doit en aucun cas pouvoir y mettre la main ».

« Les soldats de l'armée israélienne ne distribueront pas l'aide, ils sécuriseront le périmètre », a-t-il confirmé.

Le chef de la diplomatie israélienne a aussi dit souhaiter coopérer avec « autant de pays et d'ONG que possible » pour la mise en œuvre du plan américain.

Un rapport basé sur un index de définition des stades de la faim à Gaza est attendu lundi.


Un documentaire affirme avoir identifié le meurtrier de Shireen Abu Akleh

Cette photo obtenue par un ancien collègue de Shireen Abu Akleh, journaliste chevronnée d'Al-Jazira, montre son reportage à Jérusalem le 12 juin 2021. (Photo HANDOUT / AFP)
Cette photo obtenue par un ancien collègue de Shireen Abu Akleh, journaliste chevronnée d'Al-Jazira, montre son reportage à Jérusalem le 12 juin 2021. (Photo HANDOUT / AFP)
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  • Qui a tiré ? S'agissait-il vraiment d'un « accident » ? Le documentaire « Who killed Shireen ? » (« Qui a tué Shireen ? »), diffusé par le site indépendant Zeteo, pointe pour la première fois un suspect : le soldat d'élite Alon Scaggio.
  • Alon Scaggio, alors âgé de 20 ans, avait terminé une formation dans les Duvdevan, unité d'élite de l'armée israélienne, trois mois plus tôt, selon le documentaire.

NEW-YORK : Qui a tué Shireen Abu Akleh ? Un nouveau documentaire affirme enfin révéler l'identité du soldat israélien soupçonné d'avoir tué la reporter vedette de la chaîne Al-Jazeera, trois ans après cet événement qui avait endeuillé le Moyen-Orient.

Retour en arrière. Le 11 mai 2022, une « alerte » retentit sur les chaînes d'information du monde entier. La journaliste américano-palestinienne, connue pour sa couverture du conflit israélo-palestinien, vient d'être abattue à l'entrée du camp de Jénine, dans le nord de la Cisjordanie occupée. Elle portait pourtant un casque et un gilet pare-balles siglé du mot « Press ».

Al-Jazeera et des témoins blâment aussitôt l'armée israélienne. Le Premier ministre israélien de l'époque, Naftali Bennett, estime quant à lui que les tirs proviennent de combattants palestiniens. Dans les semaines qui suivent, les enquêtes journalistiques s'accumulent et révèlent toutes la même origine des tirs : Israël. 

Quelques mois plus tard, l'armée publie les « conclusions » de son enquête interne : « Il y a une forte probabilité que madame Abu Akleh ait été touchée accidentellement par un tir de l'armée israélienne visant des suspects identifiés comme des hommes armés palestiniens ».

Qui a tiré ? S'agissait-il vraiment d'un « accident » ? Le documentaire « Who killed Shireen ? » (« Qui a tué Shireen ? »), diffusé par le site indépendant Zeteo, pointe pour la première fois un suspect : le soldat d'élite Alon Scaggio.

« Israël a tout fait pour cacher l'identité du soldat. Ils ne voulaient pas transmettre cette information aux États-Unis, ne voulaient pas laisser les Américains l'interroger, ne voulaient pas leur transmettre son témoignage, ils ne voulaient pas leur donner son nom », explique à l'AFP Dion Nissenbaum, journaliste à l'origine du film. 

- Israël vs États-Unis -

Aidé notamment par la reporter Fatima AbdulKarim, qui travaille pour le New York Times en Cisjordanie occupée, et par le producteur Conor Powell, cet ex-correspondant du Wall Street Journal au Moyen-Orient a pu recueillir les témoignages de deux soldats israéliens présents à Jénine le 11 mai 2022 ainsi que ceux de hauts responsables américains.

Alon Scaggio, alors âgé de 20 ans, avait terminé une formation dans les Duvdevan, unité d'élite de l'armée israélienne, trois mois plus tôt, selon le documentaire.

« Il l'a tuée intentionnellement. Il n'y a pas de doute à ce sujet. La question est de savoir s'il savait qu'elle était journaliste et plus précisément qu'il s'agissait de Shireen Abu Akleh. Les ordres venaient-ils d'en haut ? Personnellement, je ne pense pas qu'il y ait eu d'ordre. Je ne pense pas qu'il savait qu'il s'agissait de Shireen, mais elle portait un gilet pare-balles tagué +Press+ », explique M. Nissenbaum. 

« Les preuves indiquent un meurtre intentionnel de Shireen Abu Akleh. Savaient-ils qui c'était ? Cela peut faire l'objet d'un débat, mais ils devaient absolument savoir qu'il s'agissait d'une personne des médias ou, au minimum, qu'il ne s'agissait pas d'un combattant », témoigne dans le documentaire un haut responsable de l'administration Biden d'avant Joe Biden sous couvert d'anonymat.

Le documentaire soutient également que les États-Unis n'ont pas fait pression outre mesure pour creuser cette affaire afin de ne pas entacher leur relation avec leur allié.

« Ce n'était pas un sujet dans les échanges entre le président (Joe Biden) et le Premier ministre », déclare le conseiller à la sécurité nationale de M. Bennett, Eyal Hulata.

Le sénateur américain Chris Van Hollen (démocrate) témoigne avoir demandé à Joe Biden, avec des collègues, qu'un rapport détaillé sur cette affaire soit « déclassifié ». En vain. 

- Impunité -

Selon le Comité pour la protection des journalistes (CPJ), dont les données remontent à 1992, « il s'agit de la première fois qu'un suspect potentiel est nommé en lien avec le meurtre d'un journaliste par un Israélien ».

L'impunité de ce « meurtre » a, selon cette organisation basée à New York, « donné concrètement à Israël la permission d'en taire des centaines d'autres ». Selon Reporters sans frontières, environ 200 journalistes ont été tués en 18 mois de frappes israéliennes à Gaza. 

Un porte-parole de l'armée israélienne a dénoncé la divulgation « par la famille » du nom d'un soldat « alors qu'il n'y a pas de conclusion définitive » quant à l'identité du tireur.

Mais Alon Scaggio ne pourra jamais répondre aux questions : l'armée souligne qu'il est « tombé lors d'une opération ».

Au début de son enquête, l'équipe de Dion Nissenbaum pensait que le soldat avait été tué à Gaza, avant d'en arriver à la conclusion que sa mort est survenue à Jénine. Le 27 juin 2024, soit près de deux ans après la mort de Shireen Abu Akleh. 


Le ministre saoudien des Affaires étrangères reçoit son homologue iranien à Djeddah

Le ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, s'adresse à l'AFP lors d'une interview au consulat iranien de Jeddah, le 7 mars 2025. (AFP)
Le ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, s'adresse à l'AFP lors d'une interview au consulat iranien de Jeddah, le 7 mars 2025. (AFP)
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  • M. Araqchi s'est rendu à Djeddah pour rencontrer de hauts responsables saoudiens
  • Cette visite précède d'éventuelles discussions indirectes entre les États-Unis et l'Iran, qui se tiendront dimanche à Oman.

RIYAD : Le ministre saoudien des Affaires étrangères Faisal ben Farhane a reçu samedi son homologue iranien Abbas Araqchi à Djeddah, a rapporté la chaîne d'information Al Arabiya.

M. Araqchi s'est rendu à Djeddah pour rencontrer de hauts responsables saoudiens et discuter des questions bilatérales et des développements régionaux et internationaux.

Il devrait ensuite se rendre au Qatar pour participer au sommet du dialogue Iran-Monde arabe à Doha, a déclaré vendredi un porte-parole du ministère iranien.

Cette visite précède également d'éventuelles discussions indirectes entre les États-Unis et l'Iran, qui auront lieu dimanche à Oman.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com