Les BRICS voient la force de l’élargissement et envisagent un ordre mondial multipolaire

Les ministres des Affaires étrangères des pays membres de BRICS avec les représentants des nouveaux membres potentiels, au Cap (Photo, Reuters).
Les ministres des Affaires étrangères des pays membres de BRICS avec les représentants des nouveaux membres potentiels, au Cap (Photo, Reuters).
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Publié le Samedi 03 juin 2023

Les BRICS voient la force de l’élargissement et envisagent un ordre mondial multipolaire

  • Le sommet des ministres des Affaires étrangères au Cap ouvre la voie à un rôle plus ambitieux des BRICS dans un monde multipolaire
  • Le prince Faisal ben Farhane, ministre saoudien des Affaires étrangères, a participé à la réunion ministérielle des «Amis des BRICS» au Cap

LONDRES: Les ministres des Affaires étrangères du Brésil, de la Russie, de l'Inde, de la Chine et de l'Afrique du Sud ont exprimé leur volonté d'accepter de nouveaux membres, dont l'Arabie saoudite, alors que le bloc cherche à se faire entendre davantage sur la scène internationale.

Lors d'une conférence de deux jours qui s'est tenue au Cap jeudi et vendredi, en présence du prince Faisal ben Farhane, ministre saoudien des Affaires étrangères, le groupe s'est présenté comme une force en faveur d'un «nouvel équilibre» de l'ordre mondial par rapport aux institutions dominées par l'Occident.

Le prince Faisal a eu des entretiens bilatéraux avec plusieurs de ses homologues et a assisté à une réunion ministérielle des «Amis des BRICS» sur le thème «Partenariat pour une croissance mutuellement accélérée, un développement durable et un multilatéralisme inclusif».

Il s'est également entretenu avec Hossein Amir-Abdollahian, ministre iranien des Affaires étrangères, afin d'examiner les mesures à prendre «pour mettre en œuvre l'accord signé entre les deux pays à Pékin, notamment l'intensification des efforts bilatéraux visant à garantir la paix et la sécurité internationales», selon un communiqué de la délégation saoudienne.

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Le ministre saoudien des Affaires étrangères, le prince Faisal ben Farhan, avec son homologue russe Sergey Lavrov (Photo, Ministère des affaires étrangères/Twitter).

L'Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, l'Iran, Cuba, la République Démocratique du Congo (RDC), les Comores, le Gabon et le Kazakhstan ont tous envoyé des représentants au Cap pour les pourparlers, tandis que l'Égypte, l'Argentine, le Bangladesh, la Guinée-Bissau et l'Indonésie y ont participé virtuellement.

Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergei Lavrov, a déclaré que «plus d'une douzaine» de pays ont exprimé leur intérêt à rejoindre les BRICS. De son côté, Ma Zhaoxu, vice-ministre chinois des affaires étrangères, a déclaré lors d'une conférence de presse: «Nous espérons que d'autres pays rejoindront notre grande famille.»

Selon certaines informations, l'Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, l'Algérie, l'Égypte, le Bahreïn et l'Iran ont tous officiellement demandé à rejoindre les BRICS, à l'instar de plusieurs autres pays qui semblent vouloir rééquilibrer leurs relations internationales en fonction d'un ordre mondial de plus en plus multipolaire.

Selon le Financial Times, l'Arabie saoudite est également en pourparlers avec la Nouvelle banque de développement, le prêteur basé à Shanghai plus connu sous le nom de «Banque des BRICS», pour admettre l’Arabie saoudite en tant que neuvième membre.

Un sommet des chefs d'État est prévu à Johannesburg en août.

Le bloc économique des BRICS se positionne comme une alternative aux centres de pouvoir dominés par l'Occident. Cependant, les experts semblent incertains quant à son potentiel, soulignant les divisions innées entre les puissances centrales des BRICS et le manque de clarté sur ce que l'adhésion pourrait engendrer.

Néanmoins, pour plusieurs pays à la recherche d'une aide financière, les exigences strictes souvent liées aux renflouements par des institutions dominées par l'Occident, comme le FMI et la Banque mondiale, se sont révélées de plus en plus désagréables, ce qui a conduit de nombreux pays à chercher des partenariats ailleurs.

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Un Tunisien et ses enfants rentrent chez eux en charrette dans la ville de Sidi Bouzid, dans le centre de la Tunisie (Photo, AFP).

La Tunisie en est un bon exemple.

Touchée par une production en baisse, une dette élevée et une inflation galopante, avec une flambée des prix des denrées alimentaires et des carburants, beaucoup ont vu dans l'offre de prêt de 1,9 milliard de dollars américains (1 dollar américain = 0,93 euro) du FMI le seul moyen pour la Tunisie de sortir d'une crise économique et politique qui ne cesse de s'aggraver.

Le président Kaïs Saïed n'était toutefois pas d'accord avec ce point de vue. Début avril, il a clairement exprimé son opinion sur l'accord, rejetant les demandes de réduction des subventions à l'énergie et à l'alimentation, ainsi que les demandes de réduction de la masse salariale du secteur public, auxquelles le prêt avait été subordonné.

«Je ne veux pas entendre de diktats», a déclaré Saïed, rappelant les émeutes meurtrières qui ont éclaté en 1983 après l'augmentation du prix du pain, et expliquant aux Tunisiens qu'ils devaient plutôt «compter sur eux-mêmes».

D'autres proches de Saïed semblent penser qu'il a d'autres projets pour arrêter le déclin économique du pays.

Faisant écho à Saïed, Mahmoud ben Mabrouk, porte-parole du mouvement pro-présidentiel du 25 juillet, a déclaré à Arab News que la Tunisie «n'accepterait pas de diktats ou d'ingérence» et qu'elle se tournerait désormais vers les BRICS en tant qu'«alternative politique, économique et financière qui permettra à la Tunisie de s'ouvrir au nouveau monde».

Si la demande de ben Mabrouk devait avoir du poids, la Tunisie deviendrait le dernier pays d'Afrique du Nord à graviter autour du bloc, après la demande d'adhésion de l'Algérie, à la fin de l'année dernière.

Une telle démarche indiquerait que le bloc des BRICS est une organisation en expansion offrant une alternative au FMI et à la Banque mondiale pour les pays qui cherchent à se renflouer.

Cependant, Jim O'Neill, l'économiste qui a inventé l'acronyme BRICS, s'interroge sur ce que la Tunisie signerait réellement, décrivant le bloc comme étant plutôt un «club politique» qu'un groupe économique défini, et qui semble avoir eu des effets négatifs sur le plan financier.

«Comme je l'ai déjà dit, depuis que le club politique existe, ironiquement, sa force économique s'est affaiblie», a précisé O'Neill à Arab News. Il s'interroge en outre sur les critères que le bloc chercherait à appliquer aux nouveaux membres, suggérant que dans le cas de l'Algérie et de la Tunisie, «tout cela ne semble être que du symbolisme».

Qu’il s’agisse de symbolisme ou autre, l'Algérie et la Tunisie ne sont pas les seuls pays à se tourner vers le bloc naissant. L'Argentine, l'Égypte, l'Indonésie, l'Iran, l'Arabie saoudite et la Turquie envisagent tous de lier leur avenir à ce bloc.

Sarah Yerkes, chargée de recherche au programme Moyen-Orient de Carnegie, estime que la décision de la Tunisie doit être prise au sérieux car elle représente «un changement géopolitique intentionnel de sa part», mentionnant les critiques accrues de la Tunisie de la part de l'Europe et des États-Unis.

«La Tunisie a désespérément besoin d'une aide financière et comme l'Occident s'efforce de conditionner l'aide à la Tunisie à des réformes démocratiques, il est logique que Saïed cherche de l'aide auprès de pays qui sont moins concernés par les droits de l'homme et les libertés», a expliqué Yerkes à Arab News.

Toutefois, à l'instar de Jim O'Neill, elle se demande si les BRICS peuvent offrir une alternative au FMI et à la Banque mondiale, soulignant la faiblesse du bilan du bloc lorsqu'il s'agit «d'assister d'autres pays et de les aider à atteindre une prospérité économique réelle et durable». 

En interne, le groupe des BRICS semble en tout cas convaincu de pouvoir rivaliser avec l'Occident. La ministre sud-africaine des Affaires étrangères, Naledi Pandor, aurait laissé entendre que le lancement d'une monnaie propre au bloc économique, destinée à rivaliser avec l'hégémonie du dollar, serait résolument à l'ordre du jour.

Elie Abouaoun, directeur de la région MENA à l'Institut américain de la paix, considère l'ajout de la Tunisie comme un fardeau pour un groupe limité de «contributeurs au PIB» .

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Les ministres des Affaires étrangères de l'Afrique du Sud et de l'Inde (Photo fournie).

«À ce stade, les principaux contributeurs au PIB mondial parmi les pays des BRICS sont la Chine et l'Inde, et la plupart des pays figurant sur la liste des candidats potentiels à l'adhésion sont des consommateurs de crédits plutôt que des contributeurs solides au PIB mondial», a clarifié Abouaoun à Arab News.

«Avec l'intégration de sept ou huit nouveaux pays consommateurs dans l'alliance, je vois des défis pour les plus grands pays membres des BRICS et moins, voire pas du tout, d'avantages financiers pour les nouveaux. L'alliance sera certainement plus faible avec plus de membres si désespérés de recevoir une aide économique.»

De même, Liam Campling, professeur de commerce international et de développement à l'école de commerce et de gestion de l'université Queen Mary à Londres, a déclaré que l'accord de la cohorte des BRICS pour admettre la Tunisie serait «légèrement déroutant, étant donné qu'il s'agit d'une puissance de niveau moyen».

«Les membres actuels sont tous des puissances sous-régionales, chacune dominante dans sa partie du monde, mais la Tunisie ne domine pas l'Afrique du Nord de la même manière que l'Égypte», a éclairci Campling à Arab News.

«Ainsi, du point de vue des BRICS, il ne s'agit pas d'un allié évident, mais du côté de la Tunisie, il pourrait évidemment s'agir d'un effort pour obtenir un soutien macroéconomique plus large. Mais je crois que la Tunisie joue sur les deux tableaux, ce qui fait partie du jeu de tout pays de rang intermédiaire.»

Le scepticisme de Campling s'explique par le fait que, même si la Tunisie s'est attiré les foudres des États-Unis et que l'acrimonie politique entre les deux pays s'est accrue, elle est encore très proche des Européens sur le plan économique, ajoutant qu'«elle ne va pas compromettre ses relations avec l'UE pour cela».

Et comme les autres, Campling émet des réserves plus générales sur le projet des BRICS, soulignant ce qu'il appelle la «tension centrale au cœur du bloc», à savoir les différends frontaliers de longue date entre la Chine et l'Inde.

Selon lui, cela fait du bloc une alliance ad hoc plutôt qu'une unité cohésive capable de diriger le commerce mondial, la politique et la finance d'une manière similaire à celle du FMI ou de la Banque mondiale. Il remet donc en question l'affirmation selon laquelle les BRICS pourraient devenir un bloc économique alternatif.

«Essentiellement, je ne crois pas que le bloc puisse offrir une alternative durable tant que la tension centrale entre l'Inde et la Chine n'est pas résolue, et je ne pense pas qu'elle le soit, ce qui signifie que rien ne la maintient vraiment, laissant peu d'espace pour un rôle plus soutenu», a-t-il soutenu.

Selon Abouaoun, ce qui manque vraiment, c'est un «modèle normatif» auquel les autres pays pourraient adhérer, au-delà de la défense de la «multipolarité» par le bloc des BRICS. Si l'on gratte sous la surface, il semble y avoir une absence de substance, une opinion partagée par Yerkes.

«À ce stade, il ne semble guère plus qu'un contrepoids potentiel à l'Europe et aux États-Unis. Sans idéologie fondatrice, en particulier avec des membres aux philosophies économiques très différentes, il ne semble pas probable que le bloc des BRICS soit un concurrent solide», a-t-il déclaré.

Malgré le consensus sur les perspectives des BRICS, O'Neill est en désaccord avec les autres lorsqu'il s'agit de savoir si le monde a besoin d'un autre bloc économique, estimant que l'accent devrait plutôt être mis sur le renforcement de chaque économie, plutôt que sur l'action collective.

Yerkes, Campling et Abouaoun semblent moins opposés à la notion de nouveau bloc, reconnaissant que l'unipolarité américaine semble en voie de disparition. Ils soulignent néanmoins que la valeur du bloc dépendrait de sa composition et de ses intentions.

En effet, avec des pays comme l'Arabie saoudite dans leurs rangs, les BRICS pourraient atteindre de nouveaux niveaux de puissance financière et diplomatique, transformant ainsi l'arène internationale.

«Historiquement, la domination de l'Occident et de ses divers organismes et institutions internationaux a été extrêmement intéressée, produisant des résultats contradictoires qui ont conduit à un monde plus volatil, plus inégal et de plus en plus dépendant de l'endettement», a soutenu Campling.

«Tout cela a été poussé dans l'intérêt des Européens et des États-Unis. Peut-être devrions-nous nous inspirer des années 1970 et du mouvement des non-alignés, composé de beaucoup de ceux qui cherchent prétendument à rejoindre les BRICS, afin de trouver l'inspiration.»

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

 


Pourparlers jeudi entre l'Azerbaïdjan et les séparatistes arméniens du Nagorny Karabakh

Dans cette vidéo extraite d'une séquence diffusée par le ministère russe de la Défense le 21 septembre 2023, un casque bleu russe monte la garde alors que des civils arméniens entrent dans une base militaire russe près de Stepanakert, dans la région du Haut-Karabakh. (Photo, AFP /HANDOUT/ RUSSIAN DEFENCE MINISTRY)
Dans cette vidéo extraite d'une séquence diffusée par le ministère russe de la Défense le 21 septembre 2023, un casque bleu russe monte la garde alors que des civils arméniens entrent dans une base militaire russe près de Stepanakert, dans la région du Haut-Karabakh. (Photo, AFP /HANDOUT/ RUSSIAN DEFENCE MINISTRY)
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  • La délégation séparatiste est arrivée dans la matinée à Yevlakh, à 295 km à l'ouest de la capitale azerbaïdjanaise, pour ces négociations, selon l'agence de presse officielle azerbaïdjanaise Azertag
  • Les images de ce média d'Etat montrent une colonne de 4X4 noirs arrivant sur les lieux des discussions, suivie d'un véhicule sur lequel flotte un drapeau russe et portant des plaques d'immatriculation de l'armée russe

BAKOU: De premiers pourparlers entre l'Azerbaïdjan et les séparatistes arméniens du Nagorny Karabakh doivent s'ouvrir jeudi dans la ville azerbaïdjanaise de Yevlakh après une victoire militaire éclair de Bakou pour reprendre le contrôle de ce territoire sécessionniste.

La délégation séparatiste est arrivée dans la matinée à Yevlakh, à 295 km à l'ouest de la capitale azerbaïdjanaise, pour ces négociations, selon l'agence de presse officielle azerbaïdjanaise Azertag.

Les images de ce média d'Etat montrent une colonne de 4X4 noirs arrivant sur les lieux des discussions, suivie d'un véhicule sur lequel flotte un drapeau russe et portant des plaques d'immatriculation de l'armée russe.

La Russie a depuis fin 2020 et une précédente guerre une mission de soldats de la paix au Nagorny Karabakh.

Selon le dernier bilan des séparatistes arméniens, l'opération militaire azerbaïdjanaise qui s'est achevée en 24 heures mercredi à la mi-journée a fait au moins 200 morts et 400 blessés. Le ministère russe de la Défense a quant à lui annoncé que deux soldats russes avaient été tués mercredi lorsque leur voiture a été visée par des tirs.

Acculés par la puissance de feu des unités azerbaïdjanaises et la décision de l'Arménie de ne pas leur venir en aide, les séparatistes ont accepté de participer jeudi à de premiers pourparlers sur "la réintégration" à l'Azerbaïdjan du Nagorny Karabakh. Ils ont également accepté de rendre toutes leurs armes.

En parallèle, une réunion d'urgence du Conseil de sécurité de l'ONU se déroulera dans l'après- midi, a confirmé la présidence albanaise du Conseil mardi soir.

A la veille des pourparlers, Hikmet Hajiev, un conseiller du président azerbaïdjanais Ilham Aliev, a assuré que l'Azerbaïdjan avait "pour objectif la réintégration pacifique des Arméniens du Karabakh" et une "normalisation" des relations avec l'Arménie.

Il a promis "un passage en toute sécurité" aux forces séparatistes arméniennes, assurant que "toutes les actions" menées "sur le terrain" étaient coordonnées avec le contingent de maintien de la paix russe.

Vingt-quatre heures après le déclenchement de son offensive militaire, l'Azerbaïdjan a "rétabli sa souveraineté" sur le Nagorny Karabakh, s'est félicité mercredi M. Aliev.

Cette victoire azerbaïdjanaise nourrit les craintes d'un départ massif des 120.000 habitants du Nagorny Karabakh, tandis que des images diffusées par des médias locaux montraient une foule rassemblée à l'aéroport de la capitale des séparatistes Stepanakert, contrôlé par les Russes.

Plus de 10.000 personnes, dont des femmes, des enfants et des personnes âgées, ont d'ores et déjà été évacuées de l'enclave, a fait savoir mercredi soir un responsable des séparatistes.

Les soldats de la paix russes ont affirmé jeudi matin avoir pris en charge environ 5.000 personnes évacuées.

Pachinian sous pression, Aliev renforcé

Après l'instauration du cessez-le-feu mercredi, l'Arménie a accusé l'armée azerbaïdjanaise d'avoir ouvert le feu sur ses positions à la frontière avec l'Azerbaïdjan.

"Des unités des forces armées azerbaïdjanaises ont tiré à l'arme légère sur les avant-postes de combat arméniens près de Sotk", a dit le ministère arménien de la Défense dans un communiqué.

La capitulation des séparatistes a fait monter la pression sur le Premier ministre arménien Nikol Pachinian, critiqué pour ne pas avoir envoyé d'aide au Nagorny Karabakh.

Au lendemain de heurts devant le siège du gouvernement, des milliers de manifestants, partisans des séparatistes du Nagorny Karabakh, se sont de nouveau rassemblés mercredi soir et des incidents ont éclaté avec la police. Nikol Pachinian "doit partir, il ne peut pas diriger le pays", a déclaré l'un d'eux, Sarguis Hayats, un musicien de vingt ans.

Usant de la manne pétrolière pour renforcer son armée, le président azerbaïdjanais Ilham Aliev est de son côté en passe de réussir son pari de reprendre le contrôle de cette région majoritairement peuplée d'Arméniens, qui a été le théâtre de deux guerres entre les anciennes républiques soviétiques du Caucase que sont l'Azerbaïdjan et l'Arménie : l'une de 1988 à 1994 (30.000 morts) et l'autre à l'automne 2020 (6.500 morts).

Cette victoire "va assurément augmenter la popularité d'Ilham Aliev", au pouvoir depuis vingt

ans mais celui-ci va désormais devoir "tenir sa promesse" de grantir les droits des Arméniens du Nagorny Karabakh, a souligné Chahin Hajiev, un expert azerbaïdjanais indépendant.

Poutine espère un «règlement pacifique»

Totalement absorbée par la guerre en Ukraine depuis plus d'un an et demi, la Russie a joué un rôle de médiateur dans la signature de ce cessez-le-feu, ont affirmé les séparatistes et Bakou. Mais Moscou, qui juge que la crise au Nagorny Karabakh est une "affaire intérieure" de l'Azerbaïdjan, n'a jusqu'ici rien dit de l'accord.

Mercredi soir, le président russe Vladimir Poutine a toutefois déclaré que les négociations sur l'avenir de cette enclave auraient lieu avec "la médiation" des forces russes déployées sur le terrain.

Craignant que la reprise des hostilités ne déstabilise tout le Caucase, les Occidentaux et la Russie avaient appelé dès mardi à un arrêt immédiat des combats.

Les autorités azerbaïdjanaises avaient déclenché ce jour-là leur opération "antiterroriste", à la suite de la mort de six personnes dans l'explosion de mines posées, ont-elles affirmé, par des "saboteurs" arméniens.


Niger: Le président déchu Mohamed Bazoum saisit la justice ouest-africaine pour sa libération

Une femme tient l'image du président nigérien déchu Mohamed Bazoum, détenu avec sa famille dans sa résidence officielle de Niamey depuis le 26 juillet, lors d'une manifestation devant l'ambassade du Niger, à Paris, le 5 août 2023 (Photo, AFP).
Une femme tient l'image du président nigérien déchu Mohamed Bazoum, détenu avec sa famille dans sa résidence officielle de Niamey depuis le 26 juillet, lors d'une manifestation devant l'ambassade du Niger, à Paris, le 5 août 2023 (Photo, AFP).
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  • La requête déposée devant la Cour de justice de la Cedeao nvoque «l'arrestation arbitraire» et «la violation de la liberté d'aller et venir»
  • La Cour de justice de l'organisation est la principale juridiction de la Cedeao, composée de 5 juges choisis parmi les ressortissants des Etats membres

NIAMEY: Le président nigérien déchu Mohamed Bazoum a décidé de saisir la justice ouest-africaine pour obtenir sa libération et le rétablissement de l'ordre constitutionnel dans le pays, près de deux mois après un coup d'Etat opéré par des militaires qui l'ont renversé et le séquestrent toujours.

"Nous demandons (...) au vu de la violation des droits politiques, que l'Etat du Niger soit condamné au rétablissement immédiat de l'ordre constitutionnel par la remise du pouvoir au président Bazoum qui doit continuer de l'exercer jusqu'à la fin de son mandat le 2 avril 2026", a déclaré mercredi à l'AFP son avocat sénégalais, Maître Seydou Diagne.

La requête déposée devant la Cour de justice de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cedeao) le 18 septembre invoque "l'arrestation arbitraire" et "la violation de la liberté d'aller et venir" du président Mohamed Bazoum, de sa femme Haziza et de son fils Salem, détenus avec lui au palais présidentiel depuis le coup d'État, le 26 juillet.

Selon Maître Diagne, ses "clients sont victimes de graves et intolérables violations des droits de l'homme. Ils ont le droit de saisir les juridictions compétentes. Ca ne peut pas aggraver leur situation, c'est un motif d'espoir que justice leur soit rendue".

En cas de décision favorable, "l'Etat du Niger a(ura) l'obligation juridique d'exécuter la décision", a-t-il assuré.

"Ce qui nous intéresse, c'est d'obtenir une condamnation de l'Etat du Niger par une décision de justice. Le combat de monsieur Bazoum est un combat par le droit", a-t-il souligné.

Maître Seydou Diagne a également affirmé que "le général (Abdourahamane) Tiani (à la tête du régime militaire, ndlr) n'est pas habilité par la loi nigérienne pour procéder à des arrestations. Il a été nommé par décret depuis 2011 pour assurer la sécurité du président".

La Cour de justice de l'organisation est la principale juridiction de la Cedeao, composée de 5 juges choisis parmi les ressortissants des Etats membres.

Mi-août, les auteurs du coup d'Etat avaient de leur côté annoncé leur intention de "poursuivre" Mohamed Bazoum pour "haute trahison" et "atteinte à la sûreté" du pays.

Bazoum et la Cedeao soutenus 
La Cedeao menace les auteurs du coup d'Etat d'une intervention militaire depuis le 30 juillet pour rétablir l'ordre constitutionnel.

Elle avait annoncé que le jour et les modalités de l'opération avaient été décidés, priorisant toutefois la voie diplomatique, mais reste désormais relativement silencieuse, bien que soutenue par plusieurs pays occidentaux.

L'Union européenne (UE) a rappelé mercredi son "soutien à la position de la Cedeao", appelant une nouvelle fois "à la libération immédiate et inconditionnelle du président Bazoum et de sa famille", et "ne reconnaît pas les autorités issues du putsch", a affirmé à l'AFP Nabila Massrali, porte-parole du chef de la diplomatie de l'UE, Josep Borrell.

Des propos déclarés le lendemain d'une convocation de l'ambassadeur de l'UE à Niamey, Salvador Pinto da França, par le Premier ministre du Niger nommé par les militaires au pouvoir, Ali Mahaman Lamine Zeine.

La Cedeao est également soutenue par la France, engagée dans un bras de fer avec le régime militaire.

Paris a suspendu début août la délivrance de visas à Niamey - suspendue également à Ouagadougou (Burkina) et Bamako (Mali) - pour entrer sur son territoire.

Paris refuse aussi le retour en France de son ambassadeur à Niamey, Sylvain Itté, "pris en otage" selon Emmanuel Macron, et dont l'expulsion a été ordonnée par les généraux au pouvoir fin août.

La France compte quelque 1.500 soldats au Niger, dont l'avenir est incertain.

Le régime militaire, qui prévoit une transition d'une durée maximum de trois ans, cherche des alliés.

Il se tourne notamment vers le Mali et le Burkina voisins, également dirigés par des militaires arrivés au pouvoir par un coup d'Etat, avec qui il a lancé samedi une coopération de défense, avec la création de l'Alliance des Etats du Sahel (AES).


Les liens militaires «florissants» entre l'Iran et la Russie inquiètent les Etats-Unis

Le lieutenant général Alexus Grynkewich américain s'est dit "préoccupé" par le renforcement de "la coopération et la collusion entre la Russie et l'Iran (Photo, AFP).
Le lieutenant général Alexus Grynkewich américain s'est dit "préoccupé" par le renforcement de "la coopération et la collusion entre la Russie et l'Iran (Photo, AFP).
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  • L'Iran, très proche de Moscou notamment sur le dossier syrien, est accusé par les pays occidentaux de livrer en quantité des drones à l'armée russe
  • L'Iran a dévoilé fin août la nouvelle version d'un drone militaire capable de voler 24 heures et de transporter toutes sortes d'armements

ABOU DHABI: De la Syrie à l'Ukraine, les liens militaires "florissants" entre la Russie et l'Iran inquiètent les Etats-Unis, alors que Téhéran pourrait bénéficier des technologies apportées à ses drones utilisés par Moscou, a déclaré mercredi un responsable militaire américain.

L'Iran, très proche de Moscou notamment sur le dossier syrien, est accusé par les pays occidentaux de livrer en quantité des drones, notamment explosifs, à l'armée russe pour l'aider dans sa guerre en Ukraine, ce que Téhéran dément.

"Il y a un risque que, lorsque la Russie accepte les drones de l'Iran, lorsqu'elle modifie ces armes, une partie de cette technologie soit partagée avec l'Iran (et) lui donne des capacités supplémentaires", a déclaré le lieutenant général Alexus Grynkewich, lors d'un point presse à Abou Dhabi.

"Et je vois un peu les implications de cette relation à l'oeuvre en Syrie. Qui aurait jamais pensé que la Fédération de Russie aurait besoin de l'Iran pour ses capacités militaires ? Et pourtant", a-t-il ajouté devant les journalistes.

Les drones sont devenus un élément central de la stratégie militaire de la Russie et de l'Iran, deux pays faisant l'objet de lourdes sanctions occidentales.

L'Iran a dévoilé fin août la nouvelle version d'un drone militaire capable de voler 24 heures et de transporter toutes sortes d'armements. Le Mohajer 10 est destiné à enrichir les capacités de défense aériennes de la République islamique.

Alexus Grynkewich s'est dit "préoccupé" par le renforcement de "la coopération et la collusion entre la Russie et l'Iran en Syrie", Moscou et Téhéran y étant déjà les principaux soutiens du président Bachar al-Assad dans la guerre civile qui ravage le pays depuis 2011.

Surveiller de très près
Le militaire américain a assuré que les Etats-Unis "surveillaient de très près" cette coopération russo-iranienne, déplorant le "soutien économique, politique et militaire" de Téhéran à la Syrie, le régime de Damas ayant récupéré la plupart des territoires perdus au début du conflit.

"Cette relation florissante me préoccupe sur le plan militaire", a insisté le général Grynkewich.

Le conflit en Syrie, déclenché en 2011 par la répression de manifestations prodémocratie, a fait plus d'un demi-million de morts, déplacé des millions de personnes et morcelé le pays.

Selon Alexus Grynkewich, le groupe Etat islamique, dont le califat autoproclamé contrôlait autrefois une partie du territoire syrien, a été "éliminé", après avoir été défait en 2019 par une coalition antidjihadistes emmenée par Washington.

Mais des "menaces et risques persistent" en Syrie et en Irak, a-t-il mis en garde.

"La Russie et le régime syrien feraient bien de se concentrer sur cette menace, pour éviter qu'elle ne revienne", a déclaré le général américain.

«Engagement sans faille»
Alexus Grynkewich s'exprimait depuis les Emirats arabes unis, d'où il a assuré que son pays restait attaché à la sécurité de ses partenaires du Golfe, notamment l'Arabie saoudite et les Emirats, les deux pays les plus riches et influents du monde arabe.

"Nous n'allons nulle part", a affirmé Alexus Grynkewich. "Même sans accord signé, je peux simplement vous dire que nous avons un engagement sans faille en faveur de la sécurité ici dans cette région", a-t-il dit.