Les BRICS voient la force de l’élargissement et envisagent un ordre mondial multipolaire

Les ministres des Affaires étrangères des pays membres de BRICS avec les représentants des nouveaux membres potentiels, au Cap (Photo, Reuters).
Les ministres des Affaires étrangères des pays membres de BRICS avec les représentants des nouveaux membres potentiels, au Cap (Photo, Reuters).
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Publié le Samedi 03 juin 2023

Les BRICS voient la force de l’élargissement et envisagent un ordre mondial multipolaire

  • Le sommet des ministres des Affaires étrangères au Cap ouvre la voie à un rôle plus ambitieux des BRICS dans un monde multipolaire
  • Le prince Faisal ben Farhane, ministre saoudien des Affaires étrangères, a participé à la réunion ministérielle des «Amis des BRICS» au Cap

LONDRES: Les ministres des Affaires étrangères du Brésil, de la Russie, de l'Inde, de la Chine et de l'Afrique du Sud ont exprimé leur volonté d'accepter de nouveaux membres, dont l'Arabie saoudite, alors que le bloc cherche à se faire entendre davantage sur la scène internationale.

Lors d'une conférence de deux jours qui s'est tenue au Cap jeudi et vendredi, en présence du prince Faisal ben Farhane, ministre saoudien des Affaires étrangères, le groupe s'est présenté comme une force en faveur d'un «nouvel équilibre» de l'ordre mondial par rapport aux institutions dominées par l'Occident.

Le prince Faisal a eu des entretiens bilatéraux avec plusieurs de ses homologues et a assisté à une réunion ministérielle des «Amis des BRICS» sur le thème «Partenariat pour une croissance mutuellement accélérée, un développement durable et un multilatéralisme inclusif».

Il s'est également entretenu avec Hossein Amir-Abdollahian, ministre iranien des Affaires étrangères, afin d'examiner les mesures à prendre «pour mettre en œuvre l'accord signé entre les deux pays à Pékin, notamment l'intensification des efforts bilatéraux visant à garantir la paix et la sécurité internationales», selon un communiqué de la délégation saoudienne.

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Le ministre saoudien des Affaires étrangères, le prince Faisal ben Farhan, avec son homologue russe Sergey Lavrov (Photo, Ministère des affaires étrangères/Twitter).

L'Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, l'Iran, Cuba, la République Démocratique du Congo (RDC), les Comores, le Gabon et le Kazakhstan ont tous envoyé des représentants au Cap pour les pourparlers, tandis que l'Égypte, l'Argentine, le Bangladesh, la Guinée-Bissau et l'Indonésie y ont participé virtuellement.

Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergei Lavrov, a déclaré que «plus d'une douzaine» de pays ont exprimé leur intérêt à rejoindre les BRICS. De son côté, Ma Zhaoxu, vice-ministre chinois des affaires étrangères, a déclaré lors d'une conférence de presse: «Nous espérons que d'autres pays rejoindront notre grande famille.»

Selon certaines informations, l'Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, l'Algérie, l'Égypte, le Bahreïn et l'Iran ont tous officiellement demandé à rejoindre les BRICS, à l'instar de plusieurs autres pays qui semblent vouloir rééquilibrer leurs relations internationales en fonction d'un ordre mondial de plus en plus multipolaire.

Selon le Financial Times, l'Arabie saoudite est également en pourparlers avec la Nouvelle banque de développement, le prêteur basé à Shanghai plus connu sous le nom de «Banque des BRICS», pour admettre l’Arabie saoudite en tant que neuvième membre.

Un sommet des chefs d'État est prévu à Johannesburg en août.

Le bloc économique des BRICS se positionne comme une alternative aux centres de pouvoir dominés par l'Occident. Cependant, les experts semblent incertains quant à son potentiel, soulignant les divisions innées entre les puissances centrales des BRICS et le manque de clarté sur ce que l'adhésion pourrait engendrer.

Néanmoins, pour plusieurs pays à la recherche d'une aide financière, les exigences strictes souvent liées aux renflouements par des institutions dominées par l'Occident, comme le FMI et la Banque mondiale, se sont révélées de plus en plus désagréables, ce qui a conduit de nombreux pays à chercher des partenariats ailleurs.

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Un Tunisien et ses enfants rentrent chez eux en charrette dans la ville de Sidi Bouzid, dans le centre de la Tunisie (Photo, AFP).

La Tunisie en est un bon exemple.

Touchée par une production en baisse, une dette élevée et une inflation galopante, avec une flambée des prix des denrées alimentaires et des carburants, beaucoup ont vu dans l'offre de prêt de 1,9 milliard de dollars américains (1 dollar américain = 0,93 euro) du FMI le seul moyen pour la Tunisie de sortir d'une crise économique et politique qui ne cesse de s'aggraver.

Le président Kaïs Saïed n'était toutefois pas d'accord avec ce point de vue. Début avril, il a clairement exprimé son opinion sur l'accord, rejetant les demandes de réduction des subventions à l'énergie et à l'alimentation, ainsi que les demandes de réduction de la masse salariale du secteur public, auxquelles le prêt avait été subordonné.

«Je ne veux pas entendre de diktats», a déclaré Saïed, rappelant les émeutes meurtrières qui ont éclaté en 1983 après l'augmentation du prix du pain, et expliquant aux Tunisiens qu'ils devaient plutôt «compter sur eux-mêmes».

D'autres proches de Saïed semblent penser qu'il a d'autres projets pour arrêter le déclin économique du pays.

Faisant écho à Saïed, Mahmoud ben Mabrouk, porte-parole du mouvement pro-présidentiel du 25 juillet, a déclaré à Arab News que la Tunisie «n'accepterait pas de diktats ou d'ingérence» et qu'elle se tournerait désormais vers les BRICS en tant qu'«alternative politique, économique et financière qui permettra à la Tunisie de s'ouvrir au nouveau monde».

Si la demande de ben Mabrouk devait avoir du poids, la Tunisie deviendrait le dernier pays d'Afrique du Nord à graviter autour du bloc, après la demande d'adhésion de l'Algérie, à la fin de l'année dernière.

Une telle démarche indiquerait que le bloc des BRICS est une organisation en expansion offrant une alternative au FMI et à la Banque mondiale pour les pays qui cherchent à se renflouer.

Cependant, Jim O'Neill, l'économiste qui a inventé l'acronyme BRICS, s'interroge sur ce que la Tunisie signerait réellement, décrivant le bloc comme étant plutôt un «club politique» qu'un groupe économique défini, et qui semble avoir eu des effets négatifs sur le plan financier.

«Comme je l'ai déjà dit, depuis que le club politique existe, ironiquement, sa force économique s'est affaiblie», a précisé O'Neill à Arab News. Il s'interroge en outre sur les critères que le bloc chercherait à appliquer aux nouveaux membres, suggérant que dans le cas de l'Algérie et de la Tunisie, «tout cela ne semble être que du symbolisme».

Qu’il s’agisse de symbolisme ou autre, l'Algérie et la Tunisie ne sont pas les seuls pays à se tourner vers le bloc naissant. L'Argentine, l'Égypte, l'Indonésie, l'Iran, l'Arabie saoudite et la Turquie envisagent tous de lier leur avenir à ce bloc.

Sarah Yerkes, chargée de recherche au programme Moyen-Orient de Carnegie, estime que la décision de la Tunisie doit être prise au sérieux car elle représente «un changement géopolitique intentionnel de sa part», mentionnant les critiques accrues de la Tunisie de la part de l'Europe et des États-Unis.

«La Tunisie a désespérément besoin d'une aide financière et comme l'Occident s'efforce de conditionner l'aide à la Tunisie à des réformes démocratiques, il est logique que Saïed cherche de l'aide auprès de pays qui sont moins concernés par les droits de l'homme et les libertés», a expliqué Yerkes à Arab News.

Toutefois, à l'instar de Jim O'Neill, elle se demande si les BRICS peuvent offrir une alternative au FMI et à la Banque mondiale, soulignant la faiblesse du bilan du bloc lorsqu'il s'agit «d'assister d'autres pays et de les aider à atteindre une prospérité économique réelle et durable». 

En interne, le groupe des BRICS semble en tout cas convaincu de pouvoir rivaliser avec l'Occident. La ministre sud-africaine des Affaires étrangères, Naledi Pandor, aurait laissé entendre que le lancement d'une monnaie propre au bloc économique, destinée à rivaliser avec l'hégémonie du dollar, serait résolument à l'ordre du jour.

Elie Abouaoun, directeur de la région MENA à l'Institut américain de la paix, considère l'ajout de la Tunisie comme un fardeau pour un groupe limité de «contributeurs au PIB» .

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Les ministres des Affaires étrangères de l'Afrique du Sud et de l'Inde (Photo fournie).

«À ce stade, les principaux contributeurs au PIB mondial parmi les pays des BRICS sont la Chine et l'Inde, et la plupart des pays figurant sur la liste des candidats potentiels à l'adhésion sont des consommateurs de crédits plutôt que des contributeurs solides au PIB mondial», a clarifié Abouaoun à Arab News.

«Avec l'intégration de sept ou huit nouveaux pays consommateurs dans l'alliance, je vois des défis pour les plus grands pays membres des BRICS et moins, voire pas du tout, d'avantages financiers pour les nouveaux. L'alliance sera certainement plus faible avec plus de membres si désespérés de recevoir une aide économique.»

De même, Liam Campling, professeur de commerce international et de développement à l'école de commerce et de gestion de l'université Queen Mary à Londres, a déclaré que l'accord de la cohorte des BRICS pour admettre la Tunisie serait «légèrement déroutant, étant donné qu'il s'agit d'une puissance de niveau moyen».

«Les membres actuels sont tous des puissances sous-régionales, chacune dominante dans sa partie du monde, mais la Tunisie ne domine pas l'Afrique du Nord de la même manière que l'Égypte», a éclairci Campling à Arab News.

«Ainsi, du point de vue des BRICS, il ne s'agit pas d'un allié évident, mais du côté de la Tunisie, il pourrait évidemment s'agir d'un effort pour obtenir un soutien macroéconomique plus large. Mais je crois que la Tunisie joue sur les deux tableaux, ce qui fait partie du jeu de tout pays de rang intermédiaire.»

Le scepticisme de Campling s'explique par le fait que, même si la Tunisie s'est attiré les foudres des États-Unis et que l'acrimonie politique entre les deux pays s'est accrue, elle est encore très proche des Européens sur le plan économique, ajoutant qu'«elle ne va pas compromettre ses relations avec l'UE pour cela».

Et comme les autres, Campling émet des réserves plus générales sur le projet des BRICS, soulignant ce qu'il appelle la «tension centrale au cœur du bloc», à savoir les différends frontaliers de longue date entre la Chine et l'Inde.

Selon lui, cela fait du bloc une alliance ad hoc plutôt qu'une unité cohésive capable de diriger le commerce mondial, la politique et la finance d'une manière similaire à celle du FMI ou de la Banque mondiale. Il remet donc en question l'affirmation selon laquelle les BRICS pourraient devenir un bloc économique alternatif.

«Essentiellement, je ne crois pas que le bloc puisse offrir une alternative durable tant que la tension centrale entre l'Inde et la Chine n'est pas résolue, et je ne pense pas qu'elle le soit, ce qui signifie que rien ne la maintient vraiment, laissant peu d'espace pour un rôle plus soutenu», a-t-il soutenu.

Selon Abouaoun, ce qui manque vraiment, c'est un «modèle normatif» auquel les autres pays pourraient adhérer, au-delà de la défense de la «multipolarité» par le bloc des BRICS. Si l'on gratte sous la surface, il semble y avoir une absence de substance, une opinion partagée par Yerkes.

«À ce stade, il ne semble guère plus qu'un contrepoids potentiel à l'Europe et aux États-Unis. Sans idéologie fondatrice, en particulier avec des membres aux philosophies économiques très différentes, il ne semble pas probable que le bloc des BRICS soit un concurrent solide», a-t-il déclaré.

Malgré le consensus sur les perspectives des BRICS, O'Neill est en désaccord avec les autres lorsqu'il s'agit de savoir si le monde a besoin d'un autre bloc économique, estimant que l'accent devrait plutôt être mis sur le renforcement de chaque économie, plutôt que sur l'action collective.

Yerkes, Campling et Abouaoun semblent moins opposés à la notion de nouveau bloc, reconnaissant que l'unipolarité américaine semble en voie de disparition. Ils soulignent néanmoins que la valeur du bloc dépendrait de sa composition et de ses intentions.

En effet, avec des pays comme l'Arabie saoudite dans leurs rangs, les BRICS pourraient atteindre de nouveaux niveaux de puissance financière et diplomatique, transformant ainsi l'arène internationale.

«Historiquement, la domination de l'Occident et de ses divers organismes et institutions internationaux a été extrêmement intéressée, produisant des résultats contradictoires qui ont conduit à un monde plus volatil, plus inégal et de plus en plus dépendant de l'endettement», a soutenu Campling.

«Tout cela a été poussé dans l'intérêt des Européens et des États-Unis. Peut-être devrions-nous nous inspirer des années 1970 et du mouvement des non-alignés, composé de beaucoup de ceux qui cherchent prétendument à rejoindre les BRICS, afin de trouver l'inspiration.»

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

 


Trump a écrit au président israélien pour lui demander de gracier Netanyahu

Le président américain, Donald Trump, a écrit à son homologue israélien, Isaac Herzog, pour lui demander d'accorder une grâce au Premier ministre Benjamin Netanyahu, poursuivi dans son pays pour corruption, a indiqué mercredi le bureau de la présidence. (REUTERS)
Le président américain, Donald Trump, a écrit à son homologue israélien, Isaac Herzog, pour lui demander d'accorder une grâce au Premier ministre Benjamin Netanyahu, poursuivi dans son pays pour corruption, a indiqué mercredi le bureau de la présidence. (REUTERS)
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  • "Le président Herzog tient le président Trump en très haute estime et continue d'exprimer sa profonde gratitude" pour son "soutien indéfectible" à Israël
  • "Monsieur le Président Herzog, écoutez le Président Trump", a écrit sur X le ministre d'extrême-droite Itamar Ben Gvir, tout en accusant la justice israélienne d'être biaisée à l'égard de M. Netanyahu

JERUSALEM: Le président américain, Donald Trump, a écrit à son homologue israélien, Isaac Herzog, pour lui demander d'accorder une grâce au Premier ministre Benjamin Netanyahu, poursuivi dans son pays pour corruption, a indiqué mercredi le bureau de la présidence.

M. Herzog a reçu "ce matin" une lettre de Donald Trump, "l'invitant à envisager d'accorder une grâce" à M. Netanyahu, détaille un communiqué du bureau présidentiel, qui précise que "toute personne souhaitant obtenir une grâce présidentielle doit présenter une demande officielle".

M. Netanyahu est poursuivi dans son pays pour corruption et est régulièrement entendu dans le cadre d'au moins trois procédures judiciaires, dans lesquels aucun jugement n'a encore été rendu.

"Le président Herzog tient le président Trump en très haute estime et continue d'exprimer sa profonde gratitude" pour son "soutien indéfectible" à Israël, "sa contribution considérable au retour des otages, à la refonte de la situation au Moyen-Orient et à Gaza en particulier, et à la garantie de la sécurité de l'Etat d'Israël", précise le communiqué.

Aussitôt plusieurs personnalités politiques israéliennes ont réagi.

"Monsieur le Président Herzog, écoutez le Président Trump", a écrit sur X le ministre d'extrême-droite Itamar Ben Gvir, tout en accusant la justice israélienne d'être biaisée à l'égard de M. Netanyahu.

Une députée également d'extrême-droite mais dans l'opposition, Yulia Malinovsky, du parti Israel Beitenou ("Israël est notre maison" en hébreu), a de son côté suggéré que le président américain faisait cette demande dans le cadre d'un accord avec M. Netanyahu sur des sujets relatifs au cessez-le-feu dans la bande de Gaza.

Quant au dirigeant de l'opposition, Yaïr Lapid, du parti centriste Yesh Atid ("il y a un futur", en hébreu), il a taclé M. Netanyahu en écrivan sur X: "rappel: la loi israélienne stipule que la première condition pour obtenir une grâce est l'aveu de culpabilité et l'expression de remords pour les actes commis".

Lors d'un discours au Parlement israélien le 13 octobre, M. Trump avait déjà suggéré qu'une grâce lui soit accordée.

"J'ai une idée. Monsieur le président (Isaac Herzog), pourquoi ne pas lui accorder une grâce? Ce passage n'était pas prévu dans le discours (...) Mais j'aime bien ce monsieur", avait dit le président américain dans son allocution, mettant en avant qu'il a été "l'un des plus grands" dirigeants "en temps de guerre".

 


Famine: l'ONU alerte sur «16 zones critiques» où la situation s'aggrave

Haïti, le Mali, la Palestine, le Soudan du Sud, le Soudan et le Yémen figurent parmi les pays les plus touchés, "où les populations sont confrontées à un risque imminent de famine catastrophique", souligne le rapport des deux organisations.  L’Afghanistan, la République démocratique du Congo, la Birmanie, le Nigeria, la Somalie et la Syrie sont considérés quant à eux comme étant dans une situation "très préoccupante".  Les quatre autres zones critiques sont le Burkina Faso, le Tchad, le Kenya et la situation des réfugiés rohingyas au Bangladesh. (AFP)
Haïti, le Mali, la Palestine, le Soudan du Sud, le Soudan et le Yémen figurent parmi les pays les plus touchés, "où les populations sont confrontées à un risque imminent de famine catastrophique", souligne le rapport des deux organisations. L’Afghanistan, la République démocratique du Congo, la Birmanie, le Nigeria, la Somalie et la Syrie sont considérés quant à eux comme étant dans une situation "très préoccupante". Les quatre autres zones critiques sont le Burkina Faso, le Tchad, le Kenya et la situation des réfugiés rohingyas au Bangladesh. (AFP)
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  • Selon un rapport conjoint de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et du Programme alimentaire mondial (PAM), l'insécurité alimentaire aiguë à laquelle sont confrontées 16 zones critiques dans le monde s'accentue
  • "Les conflits, les chocs économiques, les phénomènes météorologiques extrêmes et l'insuffisance critique des financements exacerbent des conditions déjà désastreuses", notent la FAO et le PAM

ROME: Des millions de personnes supplémentaires dans le monde pourraient être confrontées à la famine ou au risque de famine, ont averti mercredi les deux organes de l'ONU dédiés à l'alimentation et à l'agriculture, dans un contexte tendu par la limitation des financements.

Selon un rapport conjoint de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et du Programme alimentaire mondial (PAM), l'insécurité alimentaire aiguë à laquelle sont confrontées 16 zones critiques dans le monde s'accentue.

"Les conflits, les chocs économiques, les phénomènes météorologiques extrêmes et l'insuffisance critique des financements exacerbent des conditions déjà désastreuses", notent la FAO et le PAM, tous deux basés à Rome, dans un communiqué commun.

Haïti, le Mali, la Palestine, le Soudan du Sud, le Soudan et le Yémen figurent parmi les pays les plus touchés, "où les populations sont confrontées à un risque imminent de famine catastrophique", souligne le rapport des deux organisations.

L’Afghanistan, la République démocratique du Congo, la Birmanie, le Nigeria, la Somalie et la Syrie sont considérés quant à eux comme étant dans une situation "très préoccupante".

Les quatre autres zones critiques sont le Burkina Faso, le Tchad, le Kenya et la situation des réfugiés rohingyas au Bangladesh.

"Nous sommes au bord d'une catastrophe alimentaire totalement évitable qui menace de provoquer une famine généralisée dans de nombreux pays", a mis en garde Cindy McCain, directrice générale du PAM, citée dans le communiqué, ajoutant que "ne pas agir maintenant ne fera qu'aggraver l'instabilité".

Le financement de l'aide humanitaire est "dangereusement insuffisant", alerte également le rapport, précisant que sur les 29 milliards de dollars nécessaires pour venir en aide aux populations vulnérables, seuls 10,5 milliards ont été reçus, précipitant notamment l'aide alimentaire aux réfugiés "au bord de la rupture".

Le PAM indique avoir réduit son assistance aux réfugiés et aux personnes déplacées en raison des coupes budgétaires et suspendu les programmes d'alimentation scolaire dans certains pays.

La FAO prévient de son côté que les efforts pour protéger les moyens de subsistance agricoles sont menacés et alerte sur la nécessité d'un financement urgent pour les semences et les services de santé animale.

"La prévention de la famine n’est pas seulement un devoir moral – c’est un investissement judicieux pour la paix et la stabilité à long terme", a rappelé le directeur général de la FAO, Qu Dongyu.

 


UE: quatre pays bénéficiaires de l'aide à la répartition des migrants

Des migrants, interceptés dans les eaux italiennes, débarquent après l'arrivée d'un navire transportant 49 migrants au port albanais de Shengjin, le 28 janvier 2025.(AFP)
Des migrants, interceptés dans les eaux italiennes, débarquent après l'arrivée d'un navire transportant 49 migrants au port albanais de Shengjin, le 28 janvier 2025.(AFP)
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  • La Commission européenne propose de relocaliser au moins 30.000 demandeurs d’asile depuis l’Italie, l’Espagne, la Grèce et Chypre vers d’autres États membres pour alléger la pression migratoire sur ces pays
  • Les 27 pays de l’UE doivent désormais négocier : chaque État devra soit accueillir des migrants, soit verser 20.000 € par personne — un débat déjà tendu entre pays réticents

BRUXELLES: La Commission européenne a annoncé mardi que l'Italie, l'Espagne, la Grèce et Chypre devraient recevoir de l'aide pour répartir ailleurs au moins 30.000 demandeurs d'asile et ainsi alléger la "pression migratoire" pesant sur ces pays.

Cette annonce va ouvrir des négociations délicates entre les 27 États membres de l'Union européenne (UE), dont nombre d'entre eux se montrent réticents à l'idée d'en accueillir.

L'UE a adopté en 2024 une réforme de sa politique sur la migration et l'asile, qui va bientôt entrer en vigueur.

L'élément clé est un nouveau système de "solidarité" visant à aider les pays méditerranéens considérés par Bruxelles comme étant sous "pression migratoire".

Les autres pays devront soit accueillir une partie des demandeurs d'asile en provenance de ces pays, soit leur verser une aide financière de 20.000 euros par migrant.

Les États membres ont cherché à influencer la décision de la Commission, ce qui a retardé son annonce d'un mois.

"La Grèce et Chypre subissent une forte pression migratoire du fait du niveau disproportionné des arrivées au cours de l'année écoulée", a déclaré mardi la Commission dans un communiqué.

"L'Espagne et l'Italie subissent également une forte pression migratoire du fait d'un nombre disproportionné d'arrivées à la suite d'opérations de sauvetage et de recherche en mer durant la même période", a-t-elle ajouté.

Cette annonce servira de base aux négociations entre États membres sur le nombre supplémentaire de demandeurs d'asile que chacun est disposé à accueillir, ou le montant de l'aide financière qu'il est prêt à apporter.

Certains pays ont déjà assuré qu'ils n'accueilleraient personne dans le cadre de ce dispositif et qu'ils se limiteraient à verser de l'argent.

Au moins 30.000 migrants devront être "relocalisés" chaque année dans le cadre du nouveau système. Le nombre définitif reste à déterminer, et la décision de qui ira où doit être prise d'ici fin décembre.