L'Arabie saoudite privilégie la réhabilitation dans sa lutte contre les stupéfiants

Les autorités et les professionnels de la santé se préoccupent du nombre croissant d'individus devenus dépendants à la méthamphétamine, un dérivé des amphétamines (Photo, SPA).
Les autorités et les professionnels de la santé se préoccupent du nombre croissant d'individus devenus dépendants à la méthamphétamine, un dérivé des amphétamines (Photo, SPA).
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Publié le Mardi 27 juin 2023

L'Arabie saoudite privilégie la réhabilitation dans sa lutte contre les stupéfiants

  • Aider les toxicomanes à sortir de leur dépendance est tout aussi important que de lutter contre les réseaux de trafiquants, affirment les professionnels de la santé
  • Un nouveau documentaire d'Arab News se penche sur la lutte du Royaume contre la production, la consommation et le trafic de drogues

DJEDDAH: Des flammes s'échappent de la carcasse d'un véhicule à la périphérie de la ville côtière de Djeddah, en Arabie saoudite, un soir de décembre. À proximité se trouvent les restes carbonisés de Bandar al-Qarhadi, incarnation sans vie du problème de la drogue dans la ville.

Des images diffusées sur les réseaux sociaux dans la soirée montrent les derniers instants de Bandar al-Qarhadi, englouti par les flammes, après s'être échappé de l'arrière du véhicule en flammes, aspergé d'essence, les mains liées.

Bandar al-Qarhadi a été tué par son meilleur ami, un homme sous l’emprise de  méthamphétamine, qui a été condamné à la peine de mort pour ce crime. Cette tragédie a mis en lumière la nature du problème que rencontrent les forces de l'ordre et les professionnels de la santé.

En Arabie saoudite, le nom commun de la méthamphétamine est shabu. Ailleurs  de le monde, on peut qualifier cette substance de crystal meth, ice, LA glass, stove top, quartz, crank, hiropon ou cocaïne du pauvre, en raison de son coût de production relativement faible.

La méthamphétamine, un dérivé des amphétamines (Photo, SPA).

Populaire dans les soirées clandestines des années 1980 et 1990, cette drogue s'est rapidement répandue dans le monde entier, devenant l'un des stupéfiants les plus dangereux et les plus addictifs au monde.

La facilité avec laquelle elle peut être produite, à un coût relativement faible, avec un profit élevé et sans être détectée par les forces de l'ordre, est illustrée dans la série télévisée américaine à succès Breaking Bad. Toutefois, ses conséquences sont particulièrement dévastatrices.

Pour les trafiquants de drogue, l'Arabie saoudite est un marché cible pour les amphétamines, en particulier le captagon. Entre 2019 et 2020, le Royaume a saisi quelque 30 tonnes de drogues illicites, dont 99% de pilules de captagon.

Cependant, les autorités et les professionnels de la santé se préoccupent de plus en plus du nombre croissant de personnes devenues dépendantes à la méthamphétamine, un dérivé des amphétamines, qui a atteint des proportions épidémiques dans de nombreux pays.

En Arabie saoudite, un pays qui impose des lois strictes contre l'importation, la fabrication, la possession et l'utilisation de drogues illicites, les sanctions pour les revendeurs et les consommateurs comprennent des peines de prison, de lourdes amendes et l'expulsion.

Ces derniers mois, la Direction générale du contrôle des stupéfiants du Royaume a procédé à de nombreuses arrestations et saisies de drogues pour endiguer le trafic de méthamphétamine. Des campagnes de santé publique ont également été lancées pour sensibiliser le public à ce problème croissant.

Jeunesse toxicomane

Un nouveau documentaire d'Arab News, intitulé Abu Hilalain: Inside the Kingdom's Crackdown on Captagon, met en lumière les efforts déployés par l'Arabie saoudite pour lutter contre la prolifération de cette drogue.

L'équipe d'Arab News à l'origine du documentaire a parcouru trois pays, dévoilant les vastes opérations de trafic de captagon et leurs conséquences sur la région. 

Présenté en avant-première lors d'une projection exclusive au BFI de Londres, le documentaire, produit en collaboration avec Lambda, a été présenté le 26 juin, à l'occasion de la Journée internationale contre l'abus et le trafic de drogues.

S’appuyant sur une enquête de fond publiée par Arab News en février 2023, Abu Hilalain: Inside the Kingdom's Crackdown on Captagon explore en profondeur l'impact de la drogue sur la société.

Le rapport 2022 de l'Office des Nations unies contre la drogue et le crime indique que 525 tonnes de drogues stimulantes amphétaminiques illicites ont été saisies dans le monde en 2020, ce qui représente une augmentation de 15% par rapport à l'année précédente et témoigne de la tendance à la hausse observée au cours de la période 2010-2020.

Dans l'ensemble de la région arabe, les taux de toxicomanie, de troubles psychiatriques débilitants et de criminalité violente continuent d'augmenter. La guerre contre la drogue semble loin de mettre un terme à la production, au trafic, à la vente et à la consommation de méthamphétamine et d'autres substances illicites.

«Ce fléau gagne du terrain dans le monde entier et l'Arabie saoudite n'est pas à l'abri de ce problème», affirme le Dr Sultan Alwajeeh, spécialiste en santé publique et en toxicomanie. «Les effets du shabu sont graves.»

La majorité des toxicomanes ont entre 18 et 30 ans, explique le Dr Alwajeeh à Arab News, et nombre d'entre eux se mettent à consommer sous la pression de leurs pairs ou à cause de problèmes familiaux. Il n'est pas rare que des troubles psychologiques se développent en conséquence.

«Évidemment, chaque cas est différent, mais cela dépend de la situation précognitive, de la génétique, de la fréquence d'utilisation et du dosage, ainsi que de la prédisposition aux maladies mentales», précise le Dr Alwajeeh.

«Mais la drogue elle-même est sale, purement chimique, et peut avoir des effets graves même en cas de consommation occasionnelle.»

EN BREF

  • La Journée internationale contre l'abus et le trafic de drogues, célébrée le 26 juin de chaque année, est une campagne des Nations unies contre le commerce illicite de stupéfiants.

 

  • Un nouveau documentaire d'Arab News, intitulé Abu Hilalain: Inside the Kingdom's Crackdown on Captagon, plonge dans la lutte de l'Arabie saoudite contre le captagon à travers une enquête sur les origines, la production et le trafic de cette drogue, ainsi que sur sa consommation dans le pays.

La méthamphétamine contient de la pseudoéphédrine, un composé chimique que l'on trouve généralement dans les médicaments contre le rhume et les allergies. Toutefois, elle est souvent coupée avec d'autres substances dangereuses telles que de l'acide de batterie, du déboucheur de canalisations et même du verre pilé.

Elle peut être ingérée sous forme de pilules, injectée sous forme liquide par voie intraveineuse ou, plus couramment, fumée sous forme de cristaux – une méthode connue en Arabie saoudite sous le nom de gargoor, en référence au bruit de gargouillement qu'elle produit à chaque bouffée.

La consommation chronique de méthamphétamine peut entraîner une dépendance psychologique, des hallucinations, de l'agressivité et des pertes de mémoire.

La consommation à long terme provoque souvent des sensations permanentes de paranoïa et de méfiance. Les usagers peuvent devenir excessivement craintifs et convaincus que les autres complotent contre eux avant de passer à l'acte. Ils peuvent également développer des symptômes d'anxiété et de dépression.

La psychose induite par les méthamphétamines est souvent impossible à distinguer de la schizophrénie paranoïaque.

«C'est une drogue non naturelle et bon marché», explique le Dr Alwajeeh. «Ses effets sont plus intenses que ceux des autres stimulants. Elle procure un état d'euphorie plus long et une satisfaction immédiate», ajoute-t-il.

«Les consommateurs de drogue recherchent l'euphorie. La poussée de dopamine est plus forte que tous les stimulants que l'on trouve en Arabie saoudite, y compris le qat, un stimulant courant au sein de la communauté yéménite ou le goro au sein de la communauté nigériane de La Mecque et de Djeddah.»

Prévenir la récidive

Rapidement, le cerveau du consommateur devient dépendant de la drogue pour ressentir la poussée de dopamine désirée, qui n'est plus suffisamment fournie par la vie normale.

«Ce qui a commencé comme une sensation agréable lors d'une étreinte, par exemple, d'une relation intime avec un partenaire ou avec la fin d'une tâche compliquée... tout cela se dissipe avec le temps parce que le cerveau trompe le consommateur en lui faisant croire que cela ne suffit pas, qu'il en veut plus, parce que c'est euphorique, mais pas assez», précise le Dr Alwajeeh.

Laboratoire de méthamphétamines (Photo, Shutterstock).

Les conséquences peuvent être catastrophiques pour le consommateur et son entourage.

«Le principal acte de violence commis par les consommateurs de méthamphétamine dans le Royaume est sans doute les accidents de la route, car ils vivent une expérience extracorporelle, leur jugement est altéré et ils sont incapables de percevoir ou d'appréhender leur environnement», affirme le Dr Alwajeeh.

«Nous voyons plus de toxicomanes aujourd'hui qu'il y a quelques années et tous les six mois, nous entendons parler d'un crime horrible qui a été commis». Pourtant, selon lui, le problème n'a reçu que peu d'attention. «À mon avis, cette question ne devrait pas recevoir moins d'attention que la guerre ou le terrorisme.»

Bien que la guerre contre la drogue soit généralement considérée comme l'affaire des forces de l'ordre, chargées de s'attaquer au trafic à la source, elle ne représente que la moitié de la bataille. Il est tout aussi important d'aider les toxicomanes à sortir de leur dépendance et à reconstruire leur vie.

«L'une des étapes les plus difficiles du traitement est celle de la désintoxication, qui dure entre une semaine et un mois, au cours de laquelle le patient souffre», explique à Arab News Khalid al-Mashari, PDG de Qaweem, un centre de réhabilitation pour toxicomanes à Riyad et à Djeddah.

«Le shabu provoque de graves symptômes de sevrage qui plongent le patient dans un état d'agitation, voire de convulsions permanentes, ce qui le rend difficile à contrôler. Un autre défi est celui de tenir le patient à l'écart de la pression du cercle de toxicomanes. Il faut s'en détacher complètement pour se rétablir.»

Heureusement, la prise en charge rapide d'un toxicomane augmente ses chances de s'en sortir et d'éviter la récidive.

«Le taux de réussite peut atteindre 70% si le patient parvient à s'éloigner des gens, des lieux et des stimuli», précise M. Al-Mashari.

«Plus la période de réhabilitation est longue, en particulier après les trois premiers mois, plus le patient peut espérer retrouver une vie digne et devenir un individu productif au sein de la société.»

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com 


Gaza: affrontements interpalestiniens meurtriers dans la foulée du cessez-le-feu

Lors de sa prise de contrôle de la bande de Gaza en 2007, le Hamas s'est opposé par les armes à de nombreuses grandes familles, dont les Doghmoush. (AFP)
Lors de sa prise de contrôle de la bande de Gaza en 2007, le Hamas s'est opposé par les armes à de nombreuses grandes familles, dont les Doghmoush. (AFP)
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  • "Environ 200 membres des forces de sécurité [du Hamas] étaient présents et ont combattu jusqu'à maîtriser complètement" leurs adversaires, a ainsi expliqué un riverain
  • "Il y a eu des morts et des blessés parmi les membres de la famille [Doghmoush], mais aussi des martyrs parmi les forces de sécurité, et des blessés"

GAZA: Plusieurs personnes ont été tuées en fin de semaine à Gaza-ville dans des affrontements armés entre forces du Hamas et membres du clan Doghmoush, une grande famille palestinienne de la bande de Gaza, a-t-on appris lundi de sources concordantes.

Après plusieurs jours d'échauffourées, des "échanges de tirs" ont encore eu lieu dimanche soir dans le quartier Sabra, au surlendemain de l'entrée en vigueur d'un cessez-le-feu entre Israël et le mouvement islamiste palestinien, ont indiqué des témoins sous le couvert de l'anonymat, disant craindre pour leur sécurité.

"Environ 200 membres des forces de sécurité [du Hamas] étaient présents et ont combattu jusqu'à maîtriser complètement" leurs adversaires, a ainsi expliqué un riverain.

"Il y a eu des morts et des blessés parmi les membres de la famille [Doghmoush], mais aussi des martyrs parmi les forces de sécurité, et des blessés", a-t-il poursuivi.

Un autre voisin a livré une version similaire des faits, précisant que le calme était revenu dans le quartier vers 21h30 (18h30 GMT), et une source au sein du ministère de l'Intérieur de Gaza, placé sous l'autorité du Hamas, a reconnu qu'il y avait eu des morts dans les deux camps.

Accusant le clan Doghmoush d'être "affilié à l'occupation", c'est-à-dire Israël, et de plusieurs meurtres, la source du ministère a indiqué qu'une soixantaine de membres de la famille avaient été arrêtés.

Niant toute collaboration avec Israël, la famille a reconnu dans un communiqué que certains de ses membres avaient commis des "écarts", sans plus de précision, mais a également accusé les services de sécurité du Hamas d'avoir ciblé tous ses membres sans distinction.

Ces derniers jours, "il suffisait d'appartenir à la famille Doghmoush pour se faire tirer dans les jambes, se faire tuer, arrêter ou brûler sa maison", a dénoncé Abou al-Hassan Doghmoush, figure du clan, sur Facebook.

Lors de sa prise de contrôle de la bande de Gaza en 2007, le Hamas s'est opposé par les armes à de nombreuses grandes familles, dont les Doghmoush.

Le ministère de l'Intérieur de Gaza a déclaré dimanche ouvrir une "période d'amnistie générale" pour les "membres de bandes criminelles" qui n'ont pas commis de meurtres au cours de la guerre.

Depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu, vendredi, des journalistes de l'AFP ont vu des membres des forces de sécurité du Hamas déployés dans plusieurs villes de la bande de Gaza, sur des marchés ou sur des routes.


Israël: l'armée annonce que les quatre dépouilles d'otages rendues lundi ont été identifiées

Les quatre dépouilles d'otages rendues lundi par le Hamas ont été identifiées, parmi lesquelles celle de l'étudiant népalais Bipin Joshi et de trois Israliens, a annoncé mardi l'armée israélienne. (AFP)
Les quatre dépouilles d'otages rendues lundi par le Hamas ont été identifiées, parmi lesquelles celle de l'étudiant népalais Bipin Joshi et de trois Israliens, a annoncé mardi l'armée israélienne. (AFP)
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  • "A l'issue du processus d'identification [des quatre dépouilles] par l'Institut national de médecine légale, les représentants de l'armée ont informé les familles de Guy Illouz, Bipin Joshi, et de deux autres otages décédés"
  • L'armée souligne que "les conclusions finales [sur les causes des décès] seront déterminées après l'achèvement de l'examen des circonstances" par le centre de médecine médico-légale

JERUSALEM: Les quatre dépouilles d'otages rendues lundi par le Hamas ont été identifiées, parmi lesquelles celle de l'étudiant népalais Bipin Joshi et de trois Israliens, a annoncé mardi l'armée israélienne.

"A l'issue du processus d'identification [des quatre dépouilles] par l'Institut national de médecine légale, les représentants de l'armée ont informé les familles de Guy Illouz, Bipin Joshi, et de deux autres otages décédés, dont les noms n'ont pas encore été autorisés à être publiés par leurs familles, que leurs proches ont été ramenés pour être enterrés", indique un communiqué militaire.

Guy Illouz avait été enlevé au festival de musique Nova, théâtre du plus grand massacre (plus de 370 morts) perpétré par les commandos du Hamas le 7 octobre 2023. Etudiant en agriculture, Bipin Joshi avait été enlevé au kibboutz Aloumim.

"Guy Illouz, 26 ans au moment de son décès, a été blessé et enlevé vivant par le mouvement islamiste Hamas. Il est décédé des suites de ses blessures après n'avoir pas reçu de soins médicaux appropriés pendant sa captivité par le Hamas", indique le communiqué de l'armée.

Bipin Joshi, 22 ans au moment de son "enlèvement dans un abri du kibboutz Aloumim par le Hamas, a été assassiné pendant sa captivité au cours des premiers mois de la guerre", selon l'armée. Il était le dernier otage non-Israélien captif à Gaza.

L'armée souligne que "les conclusions finales [sur les causes des décès] seront déterminées après l'achèvement de l'examen des circonstances" par le centre de médecine médico-légale.

"Malgré le chagrin [...] le retour de Guy et Bipin [...] ainsi que celui de deux autres otages décédés apporte un certain réconfort aux familles qui ont vécu dans l'incertitude et le doute pendant plus de deux ans", a indiqué dans un communiqué le Forum des familles d'otages, principale organisation israélienne militant pour la libération des otages retenus à Gaza.


Le président égyptien déclare que l'accord sur Gaza «ouvre une nouvelle ère de paix et de stabilité» au Moyen-Orient

Le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi a déclaré lundi que l'accord sur Gaza "ouvre une nouvelle ère de paix et de stabilité" au Moyen-Orient. (AFP)
Le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi a déclaré lundi que l'accord sur Gaza "ouvre une nouvelle ère de paix et de stabilité" au Moyen-Orient. (AFP)
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  • M. al-Sissi, qui a signé lundi une déclaration conjointe avec ses homologues garants de l'accord de cessez-le-feu entre Israël et le Hamas palestinien, a déclaré qu'il s'agissait d'une "journée historique"
  • Le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi a déclaré lundi que l'accord sur Gaza "ouvre une nouvelle ère de paix et de stabilité" au Moyen-Orient

CHARM EL-CHEIKH: Le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi a déclaré lundi que l'accord sur Gaza "ouvre une nouvelle ère de paix et de stabilité" au Moyen-Orient.

M. al-Sissi, qui a signé lundi une déclaration conjointe avec ses homologues garants de l'accord de cessez-le-feu entre Israël et le Hamas palestinien, a déclaré qu'il s'agissait d'une "journée historique" pour la paix, jetant les fondations d’une solution à deux États.