«Guérir les blessures»: L’ONU annonce une enquête sur les disparus de Syrie

Des familles et des proches de détenus syriens et de personnes disparues demandent des informations sur leurs proches dans la ville d'Azaz, dans la province d'Alep (Photo, AFP).
Des familles et des proches de détenus syriens et de personnes disparues demandent des informations sur leurs proches dans la ville d'Azaz, dans la province d'Alep (Photo, AFP).
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Publié le Vendredi 30 juin 2023

«Guérir les blessures»: L’ONU annonce une enquête sur les disparus de Syrie

  • Le chef de l’ONU doit présenter le mandat de la nouvelle institution dans un délai de quatre-vingt jours ouvrables
  • Selon De Laurentis, Damas avait refusé de participer aux efforts visant à créer l'institution

NEW YORK: Dans le cadre de la réponse internationale à la guerre en Syrie, l'Assemblée générale des Nations unies a voté jeudi en faveur de la création d'une institution indépendante chargée d'enquêter et de faire la lumière sur le sort de plus de 150 000 Syriens portés disparus ou victimes de disparitions forcées aux mains du régime syrien, des forces d'opposition ou de groupes terroristes depuis le début du conflit, il y a douze ans.

En présentant le projet de résolution, le représentant permanent du Luxembourg auprès des Nations unies, Olivier Maes, a rendu hommage à la «force et au courage» des familles syriennes qui «cherchent désespérément à chaque jour savoir ce qu'il est advenu de leurs proches et où ils se trouvent».

Il a ajouté : «Les familles, en particulier les femmes, sont confrontées à des difficultés administratives et juridiques, à des incertitudes financières et à de profonds traumatismes alors qu'elles continuent à rechercher leurs proches disparus.»

Olivier Maes, ambassadeur et représentant permanent du Luxembourg auprès des Nations unies (Photo, AFP).

Un grand nombre d'organisations internationales, non gouvernementales, humanitaires et organisations centrées sur la famille, dont le Comité international de la Croix-Rouge, la Commission internationale des personnes disparues et la Commission internationale indépendante d'enquête sur la République arabe syrienne, qui mènent des enquêtes sur les cas de personnes disparues en Syrie et en assurent le suivi.

Cependant, le manque de coordination laisse les familles dans l'incertitude lorsqu'elles cherchent à savoir où se trouvent leurs proches, et les victimes et les survivants ne savent pas où communiquer les informations qu'ils pourraient avoir.

Les familles ont insisté sur la création d'une agence internationale indépendante, à la mesure de l'ampleur et de la complexité de la crise, chargée d'enquêter sur le sort de leurs proches.

S'inspirant de leurs avis et conseils, le secrétaire général des Nations unies a publié l'année dernière un rapport concluant qu'une telle institution internationale, dotée d'un mandat solide pour enquêter et élucider le sort des disparus et apporter un soutien à leurs familles, constituerait la pierre angulaire d'une solution globale à la crise.

La résolution qui en a résulté a été parrainée par plus de 50 pays, dont l'Albanie, l'Australie, le Danemark, la République dominicaine, l'Estonie, la Finlande, la France, la Géorgie, l'Allemagne, la Grèce, l'Islande, l'Irlande, Israël, l'Italie, la Lettonie, le Liberia, la principauté du Liechtenstein, la Lituanie, le Luxembourg, Malte, la Slovénie et l'Espagne.

Des humains, pas des statistiques

Maes a indiqué que la nouvelle institution «renforcera la complémentarité et évitera le chevauchement des tâches. Elle servira de point d'entrée unique pour la collecte et la comparaison des données, et assurera la coordination et la communication avec tous les acteurs concernés et les initiatives en cours».

Il a souligné que la résolution «ne pointe personne du doigt» et a ajouté : «Elle n'a qu'un seul objectif, un objectif humanitaire : améliorer la situation des familles syriennes qui ne savent pas ce qui est arrivé à leurs frères, à leurs fils, à leurs pères, à leurs maris ou à tout autre parent. Tout cela allégera les souffrances de ces victimes en leur apportant le soutien dont elles ont besoin et les réponses auxquelles elles ont droit en vertu du droit humanitaire international.»

Un représentant de l'UE a exprimé l'espoir que «cette nouvelle institution humanitaire puisse aider à guérir certaines des blessures causées par douze années de conflit. Ce faisant, elle jouera un rôle important en contribuant aux efforts de réconciliation et de paix durable».

L'ambassadeur américain, Jeffrey De Laurentis, a réaffirmé que la résolution était de nature humanitaire et a ajouté : «Elle se concentre sur tous les Syriens disparus, indépendamment de leur appartenance ethnique, de leur religion ou de leur affiliation politique.

«De nombreux Syriens nous ont demandé de ne pas oublier qui cette institution cherche à défendre : les personnes disparues et détenues qui ont encore une vie bien remplie à vivre. Ce ne sont pas des statistiques, ce sont des conjoints, des enfants, des frères et sœurs, des parents, des amis, des collègues.

«Comme le montrent leurs témoignages poignants, nous devons apporter des réponses attendues depuis longtemps aux victimes et à leurs familles qui méritent notre soutien.»

De Laurentis a ajouté que Damas avait refusé de participer aux efforts visant à créer l'institution.

La représentante permanente adjointe de la Russie auprès des Nations unies, Maria Zabolotskaya, a déclaré que l'Assemblée générale, «en violation de la Charte des Nations unies, est aujourd'hui invitée à créer un instrument de pression sur la Syrie sous un prétexte humanitaire cynique qui n'a rien à voir avec les véritables objectifs de cette initiative».

Elle a ajouté que loin d'être indépendant ou impartial, le mécanisme «ne peut qu'obéir aux ordres de ses commanditaires» et a insisté sur le fait que «pour résoudre véritablement le problème des personnes disparues, il est nécessaire de développer une coopération substantielle avec Damas, de lui fournir une assistance efficace et de lever les sanctions illégales et unilatérales qui affectent négativement ces efforts, ainsi que la reprise des efforts de secours humanitaire et de redressement dans son ensemble».

Zabolotskaya a également demandé la fin de «l'occupation étrangère de la Syrie» et le rapatriement des «citoyens étrangers présents dans le pays».

Bassam Sabbagh, représentant permanent de la Syrie auprès des Nations unies, a déclaré que la résolution est «politisée et vise la Républiquegime arabe syrienne».

«Ce projet reflète clairement une ingérence flagrante dans nos affaires intérieures et fournit de nouvelles preuves de l'approche hostile de certains États occidentaux à l'égard de la Syrie. Au cœur de ce groupe se trouvent les Etats-Unis», a-t-il soutenu.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Liban: le chef de l'Etat demande à l'armée de «s'opposer à toute incursion israélienne»

Le président libanais Joseph Aoun a demandé jeudi à l'armée de "s'opposer à toute incursion israélienne", après la mort d'un employé municipal d'un village du sud du Liban où une unité israélienne a pénétré pendant la nuit. (AFP)
Le président libanais Joseph Aoun a demandé jeudi à l'armée de "s'opposer à toute incursion israélienne", après la mort d'un employé municipal d'un village du sud du Liban où une unité israélienne a pénétré pendant la nuit. (AFP)
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  • Dans un communiqué, le chef de l'Etat a condamné cette opération et "demandé à l'armée de faire face à toute incursion israélienne (...) pour défendre le territoire libanais et la sécurité des citoyens"
  • Selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), "dans une agression grave et sans précédent", une unité israélienne "appuyée par des véhicules a effectué une incursion dans le village de Blida, à plus d'un kilomètre de la frontière"

BERYROUTH: Le président libanais Joseph Aoun a demandé jeudi à l'armée de "s'opposer à toute incursion israélienne", après la mort d'un employé municipal d'un village du sud du Liban où une unité israélienne a pénétré pendant la nuit.

Dans un communiqué, le chef de l'Etat a condamné cette opération et "demandé à l'armée de faire face à toute incursion israélienne (...) pour défendre le territoire libanais et la sécurité des citoyens".

Selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), "dans une agression grave et sans précédent", une unité israélienne "appuyée par des véhicules a effectué une incursion dans le village de Blida, à plus d'un kilomètre de la frontière".

Cette unité "a investi le bâtiment de la municipalité du village, où dormait Ibrahim Salamé, un employé municipal, qui a été tué par les soldats de l'ennemi", a ajouté l'Ani.

Le ministère de la Santé a confirmé la mort de l'employé municipal.

Des villageois cités par l'Ani ont indiqué que l'incursion avait duré plusieurs heures et que les forces israéliennes s'étaient retirées à l'aube.

Sur X, le Premier ministre libanais Nawaf Salam a dénoncé "une agression flagrante contre les institutions de l'Etat libanais et sa souveraineté".


Liban: incursion israélienne dans un village frontalier, un employé municipal tué

Un employé municipal a été tué jeudi, selon le ministère libanais de la Santé, lors d'une incursion israélienne nocturne dans un village du sud du Liban, confirmée par Israël qui a affirmé agir contre le Hezbollah pro-iranien. (AFP)
Un employé municipal a été tué jeudi, selon le ministère libanais de la Santé, lors d'une incursion israélienne nocturne dans un village du sud du Liban, confirmée par Israël qui a affirmé agir contre le Hezbollah pro-iranien. (AFP)
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  • En vertu d'un cessez-le-feu qui a mis fin en novembre 2024 à la guerre entre le Hezbollah et Israël, ce pays a retiré ses troupes du sud du Liban mais continue d'occuper cinq points sur le territoire libanais, frontalier du nord d'Israël
  • Selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), "dans une agression grave et sans précédent", une unité israélienne "appuyée par des véhicules a effectué une incursion dans le village de Blida, à plus d'un kilomètre de la frontière"

BEYROUTH: Un employé municipal a été tué jeudi, selon le ministère libanais de la Santé, lors d'une incursion israélienne nocturne dans un village du sud du Liban, confirmée par Israël qui a affirmé agir contre le Hezbollah pro-iranien.

En vertu d'un cessez-le-feu qui a mis fin en novembre 2024 à la guerre entre le Hezbollah et Israël, ce pays a retiré ses troupes du sud du Liban mais continue d'occuper cinq points sur le territoire libanais, frontalier du nord d'Israël.

Selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), "dans une agression grave et sans précédent", une unité israélienne "appuyée par des véhicules a effectué une incursion dans le village de Blida, à plus d'un kilomètre de la frontière".

Cette unité "a investi le bâtiment de la municipalité du village, où dormait Ibrahim Salamé, un employé municipal, qui a été tué par les soldats de l'ennemi", a ajouté l'Ani.

Le ministère de la Santé a confirmé la mort de l'employé municipal.

Des villageois cités par l'Ani ont indiqué que l'incursion avait duré plusieurs heures et que les forces israéliennes s'étaient retirées à l'aube.

Sur X, le Premier ministre libanais Nawaf Salam a dénoncé "une agression flagrante contre les institutions de l'Etat libanais et sa souveraineté".

L'armée israélienne a confirmé avoir mené cette incursion, affirmant qu'elle intervenait dans le cadre de ses "activités visant à détruire une infrastructure terroriste" du Hezbollah.

Elle a ajouté que l'unité avait "repéré un suspect à l'intérieur du bâtiment" de la municipalité et ouvert le feu après avoir identifié "une menace directe" sur les soldats.

L'incident "fait l'objet d'une enquête", selon l'armée.

Dans un autre village frontalier, Adaissé, une unité israélienne a dynamité un bâtiment servant à abriter des cérémonies religieuses, selon l'Ani.

Ces derniers jours, l'aviation israélienne a intensifié ses frappes au Liban, affirmant viser des membres ou des infrastructures du Hezbollah.

Mardi, le porte-parole du Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'Homme, Jeremy Laurence, a indiqué que 111 civils avaient été tués au Liban par les forces israéliennes depuis la fin de la guerre.

Le Hezbollah est sorti très affaibli du conflit et les Etats-Unis exercent une intense pression sur le gouvernement libanais pour qu'il livre ses armes à l'armée nationale, ce qu'il refuse jusqu'à présent.

Le mécanisme de surveillance du cessez-le-feu, qui regroupe outre le Liban et Israël, les Etats-Unis, la France et l'ONU, s'est réuni mercredi dans la localité frontalière de Naqoura, qui abrite le quartier général des forces de l'ONU.

L'émissaire américaine Morgan Ortagus a déclaré au cours de la réunion que "l'armée libanaise doit à présent exécuter entièrement son plan" visant à "placer toutes les armes sous le contrôle de l'Etat d'ici la fin de l'année".


Soudan: l'ONU appelle à mettre un terme au siège d'El-Facher après une tuerie dans une maternité

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  • Le chef des paramilitaires soudanais Mohamed Daglo a reconnu mercredi soir une "catastrophe" dans la ville, assurant: "La guerre nous a été imposée"
  • Antonio Guterres s'est dit "gravement préoccupé par l'escalade militaire récente" à El-Facher, appelant à "mettre un terme immédiatement au siège et aux hostilités"

PORT-SOUDAN: Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé jeudi à mettre un terme à l'"escalade militaire" au Soudan, après le meurtre de plus de 460 personnes dans une maternité à El-Facher, ville clé prise par les forces paramilitaires.

Les informations se multiplient sur des exactions massives depuis que les Forces de soutien rapide (FSR, paramilitaires) ont pris dimanche, après 18 mois de siège, cette dernière grande ville qui échappait à leur contrôle dans la vaste région du Darfour, où "les massacres continuent" selon des images satellite analysées par le Humanitarian Research Lab (HRL) de l'université Yale.

Le chef des paramilitaires soudanais Mohamed Daglo a reconnu mercredi soir une "catastrophe" dans la ville, assurant: "La guerre nous a été imposée".

Antonio Guterres s'est dit "gravement préoccupé par l'escalade militaire récente" à El-Facher, appelant à "mettre un terme immédiatement au siège et aux hostilités".

L'Organisation mondiale de la santé (OMS) s'est dite "consternée par les informations faisant état du meurtre tragique de plus de 460 patients et accompagnateurs à la maternité saoudienne d'El-Facher". Selon l'institution, cette maternité était le seul hôpital encore partiellement opérationnel dans la ville.

Après la prise d'El-Facher à leurs rivaux, l'armée du général Abdel Fattah al-Burhane, les FSR contrôlent désormais l'ensemble du Darfour, vaste région de l'ouest du Soudan couvrant le tiers du pays.

Les communications satellite restent coupées -sauf pour les FSR qui contrôlent le réseau Starlink-, les accès d'El-Facher restent bloqués malgré les appels à ouvrir des corridors humanitaires. Dans ce contexte, il est extrêmement compliqué de joindre des sources locales indépendantes.

Maîtres du Darfour 

"Plus de 2.000 civils ont été tués au cours de l'invasion de la milice (des FSR) à El-Facher, ciblant les mosquées et les volontaires du Croissant-Rouge", a pour sa part affirmé Mona Nour Al-Daem, chargée de l'aide humanitaire au gouvernement pro-armée.

A El-Facher, le comité de résistance local, qui documente les exactions depuis le début du conflit, a rapporté mercredi soir avoir entendu des tirs dans l'ouest de la ville, "où quelques soldats restants combattent avec (...) ténacité".

Depuis dimanche, plus de 36.000 personnes ont fui les violences, majoritairement vers la périphérie d'El-Facher et vers Tawila, cité située à 70 km plus à l'ouest et qui était déjà la plus importante zone d'accueil du Soudan, selon l'ONU, avec plus de 650.000 déplacés.

De rares images de l'AFP en provenance de Tawila montrent des déplacés portant leurs affaires sur leur dos ou sur leur tête. Certains montent des tentes, d'autres, parfois blessés, sont assis dans des conditions précaires.

Le Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme a alerté sur le "risque croissant d'atrocités motivées par des considérations ethniques" en rappelant le passé du Darfour, ensanglanté au début des années 2000 par les massacres et les viols des milices arabes Janjawid, dont sont issues les FSR, contre les tribus locales Massalit, Four ou Zaghawa.

"Unité" 

Les FSR, qui ont installé au Darfour une administration parallèle, contrôlent désormais l'ouest du Soudan et certaines parties du sud, avec leurs alliés. L'armée contrôle le nord, l'est et le centre du troisième plus vaste pays d'Afrique, ravagé par plus de deux ans de guerre.

Des experts craignent une nouvelle partition du Soudan, après l'indépendance du Soudan du Sud en 2011. Mais le chef des FSR a affirmé mercredi que la prise complète du Darfour par ses forces favoriserait "l'unité" du pays.

"La libération d'El-Facher est une opportunité pour l'unité du Soudan et nous disons : l'unité du Soudan par la paix ou par la guerre", a déclaré M. Daglo mercredi.

Les pourparlers menés depuis plusieurs mois par le groupe dit du "Quad", qui réunit les Etats-Unis, l'Egypte, les Emirats arabes Unis et l'Arabie saoudite, sont restés dans l'impasse, selon un responsable proche des négociations.

Leurs propositions de trêve se heurtent, selon lui, "à l'obstructionnisme continu" du pouvoir de M. Burhane, qui a refusé en septembre une proposition prévoyant à la fois son exclusion et celle des FSR de la transition politique post-conflit.