L'ONU échoue à prolonger une voie majeure d'aide humanitaire à la Syrie

Un convoi de camions transportant de l'aide humanitaire est stationné après avoir traversé le poste frontière syrien de Bab al-Hawa avec la Turquie, le 10 juillet 2023. (Photo, AFP)
Un convoi de camions transportant de l'aide humanitaire est stationné après avoir traversé le poste frontière syrien de Bab al-Hawa avec la Turquie, le 10 juillet 2023. (Photo, AFP)
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Publié le Mercredi 12 juillet 2023

L'ONU échoue à prolonger une voie majeure d'aide humanitaire à la Syrie

  • Face à l'opposition de la Russie, qui insistait pour seulement six mois comme c'était le cas actuellement, un compromis de neuf mois a été mis au vote mardi
  • Mais la Russie a mis son veto à cette résolution qui a recueilli 13 voix en faveur et une abstention (Chine)

NATIONS UNIES: Après un veto russe, le Conseil de sécurité de l'ONU a échoué mardi à prolonger le mécanisme d'aide humanitaire transfrontalier vers la Syrie, fermant au moins temporairement une voie de passage vitale pour des millions d'habitants de zones rebelles du pays.

Les 15 membres du Conseil tentaient depuis des jours de trouver un compromis pour prolonger ce mécanisme qui permet d'acheminer depuis la Turquie, en passant par le poste frontière de Bal al-Hawa et sans autorisation de Damas, nourriture, eau ou médicaments aux habitants du nord-ouest de la Syrie.

En raison des besoins encore plus criants depuis les séismes de février, l'ONU, les humanitaires et une majorité de membres du Conseil réclamaient une prolongation d'au moins un an pour permettre une meilleure planification de l'aide.

Face à l'opposition de la Russie, qui insistait pour seulement six mois, la Suisse et le Brésil, en charge de ce dossier, ont finalement proposé un compromis de neuf mois.

Compromis auquel la Russie, un allié clé de Damas, a opposé mardi son veto, empêchant son adoption malgré 13 voix en faveur, et une abstention (Chine).

Le Conseil a également rejeté par 2 voix pour, 3 contre et 10 absentions, un texte russe concurrent qui prévoyait une prolongation de six mois, mais qui mettait également en cause les sanctions occidentales imposées à la Syrie.

"C'est un triste moment pour ce Conseil, sauf pour un pays", a lancé l'ambassadrice américaine Linda Thomas-Greenfield après le veto russe, dénonçant un "acte de cruauté absolue".

"Ce calendrier aurait permis de passer les durs mois d'hiver", a déploré l'ambassadrice suisse Pascale Baeriswyl. "Nous ne laisserons pas ce veto mettre un terme à nos efforts pour trouver une solution", a-t-elle souligné, assurant qu'elle allait "se remettre au travail immédiatement".

"Déçu" par cet échec, le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a lui appelé les membres du Conseil "à redoubler d'efforts" pour permettre de poursuivre l'aide transfrontalière.

Mais l'ambassadeur russe Vassili Nebenzia a évoqué sa fin pure et simple. "Si notre projet de texte n'est pas soutenu, nous pourrons tout simplement fermer le mécanisme", a-t-il lancé, accusant l'aide transitant par ce mécanisme de profiter aux "terroristes d'Idleb", une région rebelle du nord-ouest de la Syrie, et non au peuple syrien.

«Supplier»

Le texte de la Suisse et du Brésil "ne reflétait pas les aspirations du peuple syrien", a renchéri l'ambassadeur syrien Bassam Sabbagh, déplorant que le plan humanitaire de l'ONU pour l'ensemble de son pays, chiffré à 5,4 milliards de dollars pour 2023, ne soit financé qu'à 12%.

Le mécanisme créé en 2014 permet à l'ONU d'acheminer de l'aide humanitaire aux populations des zones rebelles du nord-ouest de la Syrie, sans autorisation du gouvernement syrien, qui dénonce régulièrement une violation de sa souveraineté.

Au départ, il prévoyait quatre points de passage, mais après des années de pression en particulier de Moscou, allié du régime syrien, seul le poste de Bab al-Hawa était resté opérationnel, et son autorisation avait été réduite à six mois renouvelables.

"L'aide humanitaire devrait être basée sur les besoins, pas la politique", a fustigé mardi Floriane Borel, de l'organisation Human Rights Watch, dénonçant le "veto cynique" de la Russie.

L'ONU "devrait explorer immédiatement des moyens alternatifs pour s'assurer que les Syriens reçoivent suffisamment de nourriture, de médicaments et autres aides dont ils ont désespérément besoin sans avoir à supplier la Russie ou le président syrien pour un accès", a-t-elle ajouté.

Malgré l'expiration du mécanisme de l'ONU, deux autres points de passage sont en effet opérationnels, autorisés directement par le président syrien Bachar al-Assad après les séismes de février.

Cette autorisation expire mi-août. "J'ai grand espoir qu'ils continuent à être renouvelés", a commenté la semaine dernière le responsable de l'ONU pour les affaires humanitaires, Martin Griffiths.

Mais ces deux points de passage "ne pourront pas compenser" Bab al-Hawa, a insisté mardi Stéphane Dujarric, porte-parole du secrétaire général de l'ONU. "85% de nos besoins passaient par la porte qui a été fermée aujourd'hui".

Comme à chaque renouvellement du mandat, dans l'hypothèse de cette fermeture, l'ONU a prépositionné de l'aide en Syrie, a-t-il noté, sans préciser combien de temps elle pourrait durer.

Selon l'ONU, quatre millions de personnes dans le nord-ouest de la Syrie, la plupart des femmes et des enfants, ont besoin d'aide humanitaire pour survivre après des années de conflit, de chocs économiques, d'épidémies et de pauvreté grandissante aggravée par des séismes dévastateurs. Et le mécanisme qui a expiré lundi permettait d'aider 2,7 millions de personnes chaque mois.


Liban: le chef de l'Etat demande à l'armée de «s'opposer à toute incursion israélienne»

Le président libanais Joseph Aoun a demandé jeudi à l'armée de "s'opposer à toute incursion israélienne", après la mort d'un employé municipal d'un village du sud du Liban où une unité israélienne a pénétré pendant la nuit. (AFP)
Le président libanais Joseph Aoun a demandé jeudi à l'armée de "s'opposer à toute incursion israélienne", après la mort d'un employé municipal d'un village du sud du Liban où une unité israélienne a pénétré pendant la nuit. (AFP)
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  • Dans un communiqué, le chef de l'Etat a condamné cette opération et "demandé à l'armée de faire face à toute incursion israélienne (...) pour défendre le territoire libanais et la sécurité des citoyens"
  • Selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), "dans une agression grave et sans précédent", une unité israélienne "appuyée par des véhicules a effectué une incursion dans le village de Blida, à plus d'un kilomètre de la frontière"

BERYROUTH: Le président libanais Joseph Aoun a demandé jeudi à l'armée de "s'opposer à toute incursion israélienne", après la mort d'un employé municipal d'un village du sud du Liban où une unité israélienne a pénétré pendant la nuit.

Dans un communiqué, le chef de l'Etat a condamné cette opération et "demandé à l'armée de faire face à toute incursion israélienne (...) pour défendre le territoire libanais et la sécurité des citoyens".

Selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), "dans une agression grave et sans précédent", une unité israélienne "appuyée par des véhicules a effectué une incursion dans le village de Blida, à plus d'un kilomètre de la frontière".

Cette unité "a investi le bâtiment de la municipalité du village, où dormait Ibrahim Salamé, un employé municipal, qui a été tué par les soldats de l'ennemi", a ajouté l'Ani.

Le ministère de la Santé a confirmé la mort de l'employé municipal.

Des villageois cités par l'Ani ont indiqué que l'incursion avait duré plusieurs heures et que les forces israéliennes s'étaient retirées à l'aube.

Sur X, le Premier ministre libanais Nawaf Salam a dénoncé "une agression flagrante contre les institutions de l'Etat libanais et sa souveraineté".


Liban: incursion israélienne dans un village frontalier, un employé municipal tué

Un employé municipal a été tué jeudi, selon le ministère libanais de la Santé, lors d'une incursion israélienne nocturne dans un village du sud du Liban, confirmée par Israël qui a affirmé agir contre le Hezbollah pro-iranien. (AFP)
Un employé municipal a été tué jeudi, selon le ministère libanais de la Santé, lors d'une incursion israélienne nocturne dans un village du sud du Liban, confirmée par Israël qui a affirmé agir contre le Hezbollah pro-iranien. (AFP)
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  • En vertu d'un cessez-le-feu qui a mis fin en novembre 2024 à la guerre entre le Hezbollah et Israël, ce pays a retiré ses troupes du sud du Liban mais continue d'occuper cinq points sur le territoire libanais, frontalier du nord d'Israël
  • Selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), "dans une agression grave et sans précédent", une unité israélienne "appuyée par des véhicules a effectué une incursion dans le village de Blida, à plus d'un kilomètre de la frontière"

BEYROUTH: Un employé municipal a été tué jeudi, selon le ministère libanais de la Santé, lors d'une incursion israélienne nocturne dans un village du sud du Liban, confirmée par Israël qui a affirmé agir contre le Hezbollah pro-iranien.

En vertu d'un cessez-le-feu qui a mis fin en novembre 2024 à la guerre entre le Hezbollah et Israël, ce pays a retiré ses troupes du sud du Liban mais continue d'occuper cinq points sur le territoire libanais, frontalier du nord d'Israël.

Selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), "dans une agression grave et sans précédent", une unité israélienne "appuyée par des véhicules a effectué une incursion dans le village de Blida, à plus d'un kilomètre de la frontière".

Cette unité "a investi le bâtiment de la municipalité du village, où dormait Ibrahim Salamé, un employé municipal, qui a été tué par les soldats de l'ennemi", a ajouté l'Ani.

Le ministère de la Santé a confirmé la mort de l'employé municipal.

Des villageois cités par l'Ani ont indiqué que l'incursion avait duré plusieurs heures et que les forces israéliennes s'étaient retirées à l'aube.

Sur X, le Premier ministre libanais Nawaf Salam a dénoncé "une agression flagrante contre les institutions de l'Etat libanais et sa souveraineté".

L'armée israélienne a confirmé avoir mené cette incursion, affirmant qu'elle intervenait dans le cadre de ses "activités visant à détruire une infrastructure terroriste" du Hezbollah.

Elle a ajouté que l'unité avait "repéré un suspect à l'intérieur du bâtiment" de la municipalité et ouvert le feu après avoir identifié "une menace directe" sur les soldats.

L'incident "fait l'objet d'une enquête", selon l'armée.

Dans un autre village frontalier, Adaissé, une unité israélienne a dynamité un bâtiment servant à abriter des cérémonies religieuses, selon l'Ani.

Ces derniers jours, l'aviation israélienne a intensifié ses frappes au Liban, affirmant viser des membres ou des infrastructures du Hezbollah.

Mardi, le porte-parole du Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'Homme, Jeremy Laurence, a indiqué que 111 civils avaient été tués au Liban par les forces israéliennes depuis la fin de la guerre.

Le Hezbollah est sorti très affaibli du conflit et les Etats-Unis exercent une intense pression sur le gouvernement libanais pour qu'il livre ses armes à l'armée nationale, ce qu'il refuse jusqu'à présent.

Le mécanisme de surveillance du cessez-le-feu, qui regroupe outre le Liban et Israël, les Etats-Unis, la France et l'ONU, s'est réuni mercredi dans la localité frontalière de Naqoura, qui abrite le quartier général des forces de l'ONU.

L'émissaire américaine Morgan Ortagus a déclaré au cours de la réunion que "l'armée libanaise doit à présent exécuter entièrement son plan" visant à "placer toutes les armes sous le contrôle de l'Etat d'ici la fin de l'année".


Soudan: l'ONU appelle à mettre un terme au siège d'El-Facher après une tuerie dans une maternité

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  • Le chef des paramilitaires soudanais Mohamed Daglo a reconnu mercredi soir une "catastrophe" dans la ville, assurant: "La guerre nous a été imposée"
  • Antonio Guterres s'est dit "gravement préoccupé par l'escalade militaire récente" à El-Facher, appelant à "mettre un terme immédiatement au siège et aux hostilités"

PORT-SOUDAN: Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé jeudi à mettre un terme à l'"escalade militaire" au Soudan, après le meurtre de plus de 460 personnes dans une maternité à El-Facher, ville clé prise par les forces paramilitaires.

Les informations se multiplient sur des exactions massives depuis que les Forces de soutien rapide (FSR, paramilitaires) ont pris dimanche, après 18 mois de siège, cette dernière grande ville qui échappait à leur contrôle dans la vaste région du Darfour, où "les massacres continuent" selon des images satellite analysées par le Humanitarian Research Lab (HRL) de l'université Yale.

Le chef des paramilitaires soudanais Mohamed Daglo a reconnu mercredi soir une "catastrophe" dans la ville, assurant: "La guerre nous a été imposée".

Antonio Guterres s'est dit "gravement préoccupé par l'escalade militaire récente" à El-Facher, appelant à "mettre un terme immédiatement au siège et aux hostilités".

L'Organisation mondiale de la santé (OMS) s'est dite "consternée par les informations faisant état du meurtre tragique de plus de 460 patients et accompagnateurs à la maternité saoudienne d'El-Facher". Selon l'institution, cette maternité était le seul hôpital encore partiellement opérationnel dans la ville.

Après la prise d'El-Facher à leurs rivaux, l'armée du général Abdel Fattah al-Burhane, les FSR contrôlent désormais l'ensemble du Darfour, vaste région de l'ouest du Soudan couvrant le tiers du pays.

Les communications satellite restent coupées -sauf pour les FSR qui contrôlent le réseau Starlink-, les accès d'El-Facher restent bloqués malgré les appels à ouvrir des corridors humanitaires. Dans ce contexte, il est extrêmement compliqué de joindre des sources locales indépendantes.

Maîtres du Darfour 

"Plus de 2.000 civils ont été tués au cours de l'invasion de la milice (des FSR) à El-Facher, ciblant les mosquées et les volontaires du Croissant-Rouge", a pour sa part affirmé Mona Nour Al-Daem, chargée de l'aide humanitaire au gouvernement pro-armée.

A El-Facher, le comité de résistance local, qui documente les exactions depuis le début du conflit, a rapporté mercredi soir avoir entendu des tirs dans l'ouest de la ville, "où quelques soldats restants combattent avec (...) ténacité".

Depuis dimanche, plus de 36.000 personnes ont fui les violences, majoritairement vers la périphérie d'El-Facher et vers Tawila, cité située à 70 km plus à l'ouest et qui était déjà la plus importante zone d'accueil du Soudan, selon l'ONU, avec plus de 650.000 déplacés.

De rares images de l'AFP en provenance de Tawila montrent des déplacés portant leurs affaires sur leur dos ou sur leur tête. Certains montent des tentes, d'autres, parfois blessés, sont assis dans des conditions précaires.

Le Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme a alerté sur le "risque croissant d'atrocités motivées par des considérations ethniques" en rappelant le passé du Darfour, ensanglanté au début des années 2000 par les massacres et les viols des milices arabes Janjawid, dont sont issues les FSR, contre les tribus locales Massalit, Four ou Zaghawa.

"Unité" 

Les FSR, qui ont installé au Darfour une administration parallèle, contrôlent désormais l'ouest du Soudan et certaines parties du sud, avec leurs alliés. L'armée contrôle le nord, l'est et le centre du troisième plus vaste pays d'Afrique, ravagé par plus de deux ans de guerre.

Des experts craignent une nouvelle partition du Soudan, après l'indépendance du Soudan du Sud en 2011. Mais le chef des FSR a affirmé mercredi que la prise complète du Darfour par ses forces favoriserait "l'unité" du pays.

"La libération d'El-Facher est une opportunité pour l'unité du Soudan et nous disons : l'unité du Soudan par la paix ou par la guerre", a déclaré M. Daglo mercredi.

Les pourparlers menés depuis plusieurs mois par le groupe dit du "Quad", qui réunit les Etats-Unis, l'Egypte, les Emirats arabes Unis et l'Arabie saoudite, sont restés dans l'impasse, selon un responsable proche des négociations.

Leurs propositions de trêve se heurtent, selon lui, "à l'obstructionnisme continu" du pouvoir de M. Burhane, qui a refusé en septembre une proposition prévoyant à la fois son exclusion et celle des FSR de la transition politique post-conflit.